L’Essentiel : En 2007, Sodico Expansion a conclu des contrats avec Multi.com pour des affichages publicitaires. En octobre 2021, Multi.com a mis en demeure Sodico pour des factures impayées, entraînant des ordonnances judiciaires en décembre 2021 et janvier 2022. Malgré une opposition, Sodico a réglé partiellement les montants dus. Le 15 février 2023, le tribunal a accueilli l’opposition de Sodico, mais a maintenu des condamnations pour intérêts et une clause pénale. En avril 2023, Sodico a fait appel, contesté les condamnations, tandis que Multi.com a formé un appel incident. La cour d’appel a confirmé certaines décisions tout en infirmant d’autres.
|
Contexte de l’affaireÀ partir de 2007, la société Sodico Expansion, exploitant un hypermarché Leclerc, a passé plusieurs contrats avec la société Multi.com affichage pour des ordres d’affichage sur des panneaux publicitaires, en échange d’une redevance annuelle. Mise en demeure et ordonnances judiciairesLe 20 octobre 2021, la société Multicom a mis en demeure Sodico de régler deux factures impayées pour août et septembre 2021, ainsi qu’un reliquat de taxes, totalisant 12 028,60 euros. En réponse, le tribunal de commerce de Versailles a condamné Sodico à payer ces redevances, ainsi que des intérêts et une clause pénale, par ordonnances en décembre 2021 et janvier 2022. Opposition et paiement partielSodico a fait opposition à ces ordonnances, mais a tout de même réglé le montant des factures d’août et septembre 2021 en avril 2022, s’élevant à 11 599,20 euros. Jugement contradictoire du tribunalLe 15 février 2023, le tribunal a déclaré Sodico recevable dans son opposition, a substitué le jugement aux ordonnances, et a condamné Sodico à payer des intérêts sur la somme réglée, tout en déboutant Multicom de sa demande de 427,80 euros. Sodico a également été condamnée à verser une clause pénale de 3 479,76 euros et 1 500 euros pour frais de justice. Appel de la société SodicoLe 4 avril 2023, Sodico a interjeté appel du jugement, contestant les condamnations relatives aux intérêts, à la clause pénale et aux frais de justice. Elle a demandé la réformation du jugement et a soulevé des exceptions d’inexécution. Appel incident de la société MulticomLe 5 septembre 2024, Multicom a formé un appel incident, demandant la confirmation du jugement pour le surplus et l’infirmation de la décision sur la somme de 427,80 euros, tout en soutenant que les conditions générales de vente étaient opposables à Sodico. Décisions de la cour d’appelLa cour a confirmé le jugement en ce qui concerne les intérêts dus par Sodico, mais a infirmé la décision relative à la demande de 427,80 euros, la déclarant irrecevable. Elle a également condamné Sodico à verser 1 159,92 euros au titre de la clause pénale, tout en rejetant les autres demandes. ConclusionLa cour a statué en faveur de la société Multicom sur plusieurs points, tout en confirmant certaines décisions du tribunal de commerce de Versailles, et a condamné Sodico aux dépens d’appel. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature de la prescription applicable aux demandes de paiement de la société Multicom ?La prescription applicable aux actions personnelles ou mobilières est régie par l’article 2224 du code civil, qui stipule que : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. » Dans le cas présent, la société Multicom a formulé une demande de paiement pour des taxes TLPE (taxe locale sur la publicité extérieure) de 2015 et 2016. Les factures correspondantes datent des 9 juillet et 17 août 2015, ainsi que du 2 mai 2016. La société Sodico a soutenu que l’action introduite par la société Multicom en décembre 2021 était manifestement prescrite, car aucun acte interruptif de prescription n’avait été réalisé avant cette date. En effet, selon les articles 2240 et 2241 du code civil, la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription. Cependant, la cour a constaté que la société Multicom ne pouvait pas prouver que la société Sodico avait reconnu devoir les taxes litigieuses, ce qui a conduit à la conclusion que la demande de paiement était prescrite. Ainsi, le tribunal a rejeté la demande de la société Multicom à hauteur de 427,80 euros, confirmant que la prescription était bien applicable dans ce cas. Quelles sont les conditions d’opposabilité des conditions générales de vente dans ce litige ?Les conditions générales de vente sont régies par l’article L. 581-25 du code de l’environnement, qui précise que : « Le contrat de louage d’emplacement privé aux fins d’apposer de la publicité ou d’installer une préenseigne se fait par écrit. Il est conclu pour une période qui ne peut excéder six ans à compter de sa signature. » Dans cette affaire, la société Multicom a produit des bons de commande signés par la société Sodico, qui contiennent des conditions générales de vente. L’article 12 des conditions générales stipule que : « Sauf dénonciation par lettre recommandée avec accusé de réception par le preneur, 6 mois avant l’échéance du contrat, celui-ci sera renouvelé par tacite reconduction pour une période identique. » La société Sodico a contesté l’opposabilité de ces conditions, arguant que les contrats étaient désormais inapplicables en raison de la durée maximale de six ans. Cependant, la cour a jugé que les contrats avaient été tacitement reconduits faute de dénonciation dans les délais prévus. Ainsi, les conditions générales de vente étaient opposables à la société Sodico, qui avait reconnu en avoir pris connaissance. La cour a donc confirmé que les conditions générales de vente de la société Multicom étaient valides et applicables dans le cadre de ce litige. Quels sont les critères d’application de la clause pénale dans ce litige ?La clause pénale est régie par l’article 1231-6 du code civil, qui dispose que : « Les dommages-intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. » Dans les conditions générales de vente de la société Multicom, il est précisé que : « En cas de non-paiement du support par son client, une clause pénale d’un montant égal à 30% de toutes les sommes restant dues pourrait être appliquée après mise en demeure préalable, à titre d’indemnité. » La société Sodico a contesté l’application de cette clause, arguant qu’elle ne s’appliquait qu’en cas de non-paiement et non de simple retard de paiement. La cour a convenu que le retard de paiement était prévu par les mentions portées sur les factures, qui stipulaient une pénalité de 10% des sommes dues. Ainsi, la cour a décidé d’appliquer l’indemnité de 10% à l’ensemble des sommes dues, infirmant la décision de première instance concernant la clause pénale de 30%. La société Sodico a donc été condamnée à payer la somme de 1 159,92 euros au titre de la clause pénale, conformément aux dispositions contractuelles applicables. Quelles sont les conséquences de l’exception d’inexécution dans ce litige ?L’exception d’inexécution est régie par l’article 1219 du code civil, qui stipule que : « Une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave. » Dans cette affaire, la société Sodico a invoqué une exception d’inexécution, soutenant que la société Multicom n’avait pas respecté ses obligations contractuelles en matière de mise à jour des informations affichées. Cependant, la cour a constaté que les dispositions contractuelles ne faisaient pas peser sur la société Multicom une obligation de se renseigner sur la pertinence des informations. Au contraire, il incombait à la société Sodico de contrôler la pertinence des informations affichées et de demander des modifications si nécessaire. Par conséquent, la cour a jugé que la société Sodico n’était pas fondée à suspendre le paiement des factures en raison d’une prétendue inexécution de la part de la société Multicom. Ainsi, la cour a confirmé que la société Sodico devait payer les intérêts au taux légal sur la somme due, en raison de son retard de paiement. |
DE
VERSAILLES
Code nac : 59B
Chambre commerciale 3-2
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 26 NOVEMBRE 2024
N° RG 23/02184 – N° Portalis DBV3-V-B7H-VYWZ
AFFAIRE :
S.A.S. SODICO EXPANSION
C/
S.A.S. MULTI COM AFFICHAGE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Février 2023 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES
N° Chambre : 2
N° RG : 22/00027
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Céline BORREL
Me Emilie GATTONE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SIX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
APPELANT
S.A.S. SODICO EXPANSION
Ayant son siège
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 1]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Céline BORREL, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 122
Plaidant : Me Lina MROUEH de la SELEURL MROUEH-LEFEVRE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0515
****************
INTIME
S.A.S. MULTI COM AFFICHAGE
Ayant son siège
[Adresse 2]
[Localité 3]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Emilie GATTONE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 693 –
Plaidant : Me Marie-christine GROZDOFF, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D 0595
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 08 Octobre 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Véronique MULLER, Magistrat honoraire chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Ronan GUERLOT, Président de chambre,
Monsieur Cyril ROTH, Président de chambre,
Mme Véronique MULLER, Magistrat honoraire
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN,
A compter de l’année 2007, la société Sodico Expansion (ci-après société Sodico) – exploitant un hypermarché sous l’enseigne Leclerc – a donné à la société Multi.com affichage (société Multicom) plusieurs » ordres d’affichage longue conservation » sur des panneaux publicitaires, moyennant une redevance annuelle variable selon la taille et l’emplacement des panneaux.
Le 20 octobre 2021, la société Multicom a mis en demeure la société Sodico de lui régler le montant de 2 factures de redevance pour les mois d’août et septembre 2021, outre un reliquat sur des taxes antérieures, pour un montant total de 12 028,60 euros.
Par ordonnances des 14 décembre 2021 et 26 janvier 2022, le président du tribunal de commerce de Versailles a condamné la société Sodico à payer le montant des redevances arriérées, outre les intérêts et la clause pénale.
Les 30 décembre 2021 et 17 mars 2022, la société Sodico a fait opposition à ces deux ordonnances. Elle a toutefois réglé, le 14 avril 2022, le montant des factures d’août et septembre 2021 pour un montant de 11 599,20 euros.
Le 15 février 2023, par jugement contradictoire, le tribunal de commerce de Versailles a :
– dit la société Sodico recevable en son opposition aux ordonnances d’injonction de payer des 14 décembre 2021 et 26 janvier 2022 ;
– dit qu’en application de l’article 1420 du code de procédure civile, le jugement se substitue aux ordonnances susvisées ;
– condamné la société Sodico à payer à la société Multicom les intérêts au taux légal sur la somme de 11 599,20 euros du 22 octobre 2021 au 14 avril 2022 ;
– débouté la société Multicom de sa demande de paiement de la somme de 427,80 euros et des intérêts ;
– condamné la société Sodico à payer la somme de 3 479,76 euros à la société Multicom au titre de la clause pénale ;
– condamné la société Sodico à payer la somme de 1 500 euros à la société Multicom au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la société Sodico aux dépens.
Le 4 avril 2023, la société Sodico a interjeté appel de ce jugement en ce qu’il l’a condamnée à payer :
– les intérêts au taux légal sur la somme de 11 599,20 euros du 22 octobre 2021 au 14 avril 2022 ;
– la somme de 3 479,76 euros au titre de la clause pénale ;
– la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions du 14 décembre 2023, elle demande à la cour de :
– la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;
Y faisant droit :
– réformer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à payer à la société Multicom les intérêts au taux légal sur la somme de 11 599,20 euros du 22 octobre 2021 au 14 avril 2022, la somme de 3 479,76 euros au titre de la clause pénale et la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Et statuant à nouveau,
– déclarer les conditions générales figurant au verso des bons des commandes signées les 31 mai, 13 août et 5 septembre 2014, inopposables à son égard et la recevoir en son exception d’inexécution ;
– juger qu’elle a suspendu à bon droit le règlement des sommes dues jusqu’à ce que les prestations de mise en conformité des informations diffusées sur les panneaux publicitaires aient été réalisées par la société Multicom ;
– en tout état de cause, juger inapplicable la clause pénale qui prévoyait une indemnité fixée à 30% du montant total des sommes dues, en présence d’un » retard de paiement « , et non d’un » défaut de paiement du support » ;
– à titre infiniment subsidiaire, juger manifestement excessive la clause pénale qui prévoyait une indemnité fixée à 30% du montant total des sommes dues, en l’absence de tout préjudice subi par la société Multicom ;
– rejeter toutes les demandes de la société Multicom ;
– confirmer pour le surplus la décision déférée en ses dispositions non contraires aux présentes ;
– condamner la société Multicom à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Par dernières conclusions formant appel incident du 5 septembre 2024, la société Multicom demande à la cour de :
– déclarer la société Sodico infondée dans sa demande de réformation du jugement ;
– infirmer le jugement déféré en ce qu’il l’a déboutée de sa demande à hauteur de 427,80 euros et des intérêts afférents ;
– confirmer le jugement déféré pour le surplus ;
Statuant à nouveau,
– déclarer les conditions générales figurant au verso des bons des commandes, signés les 31 mai, 13 août et 5 septembre 2014, opposables à la société Sodico ;
– ne pas recevoir la société Sodico en son exception d’inexécution ;
– juger que la société Sodico n’a pas suspendu à bon droit le règlement des sommes dues jusqu’à ce que les prestations de mise en conformité des informations diffusées sur les panneaux publicitaires aient été réalisées ;
– juger applicable la clause pénale qui prévoyait une indemnité fixée à 30% du montant total des sommes dues ;
– condamner la société Sodico à la somme de 427,80 euros due au titre de la TLPE 2015 / 2016 et 2017 avec les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 4 février 2016 ;
– rejeter toutes les demandes de la société Sodico ;
– condamner la société Sodico à lui verser la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 26 septembre 2024.
Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures susvisées.
Les appels, principal et incident, ne portent ni sur la recevabilité de l’opposition formée par la société Sodico aux ordonnances d’injonction de payer, ni sur le fait que le jugement se substitue à ces ordonnances, ni sur la condamnation aux dépens de première instance, de sorte que la cour n’est pas saisie de ces chefs.
1 – sur la demande en paiement d’un solde de taxes de 427,80 euros
Le tribunal a rejeté la demande en paiement formée par la société Multicom à hauteur de 427,80 euros, correspondant à des taxes TLPE (taxe locale sur la publicité extérieure) de 2015 et 2016, estimant qu’elle était prescrite.
La société Multicom sollicite l’infirmation du jugement sur ce point, et reprend sa demande en paiement. Elle précise que, refusant de payer les taxes TLPE, la société Sodico a établi des « factures’ du même montant afin de les déduire de ses propres factures (en mentionnant qu’il s’agissait d’avoirs). Elle soutient que la reconnaissance de la dette TLPE par la société Sodico a interrompu la prescription.
La société Sodico fait valoir qu’elle n’a jamais reconnu devoir les taxes TLPE de 2015 et 2016 (selon factures des 9 juillet et 17 août 2015, puis 2 mai 2016), et que l’action introduite par la société Multicom en décembre 2021 est manifestement prescrite sur le fondement de l’article 2224 du code civil.
Réponse de la cour
Il résulte de l’article 122 du code de procédure civile que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.
L’article 2224 du code civil dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Les articles 2240 et 2241 du même code disposent que la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription. La demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.
La société Multicom ne peut sérieusement soutenir que la société Sodico a reconnu devoir les taxes litigieuses, alors même qu’elle a toujours refusé de les payer.
En matière d’injonction de payer, c’est la signification de l’ordonnance qui interrompt le délai de prescription. En l’espèce, les ordonnances d’injonction de payer ont été signifiées à la société Sodico les 24 décembre 2021 et 15 mars 2022.
Les factures étant datées des 9 juillet et 17 août 2015, puis 2 mai 2016, sans qu’il soit discuté qu’elles ont été portées à la connaissance de la société Sodico à ces dates, la société Multicom devait agir en paiement au plus tard les 9 juillet 2020, 17 août 2020 et 2 mai 2021.
Aucun acte interruptif de prescription n’étant intervenu avant le 24 décembre 2021, c’est à juste titre que le tribunal a dit prescrite la demande en paiement à hauteur de 427,80 euros. C’est toutefois par erreur que le tribunal a » débouté la société Multicom de sa demande « , alors qu’il s’agissait d’une fin de non-recevoir. La cour infirmera le jugement et dira irrecevable la demande en paiement formée par la société Multicom à hauteur de 427,80 euros.
2 – sur la demande en paiement des intérêts et de la clause pénale sur le solde de la créance réglée en cours de procédure, à hauteur de 11 599,20 euros
La société Sodico précise qu’elle a procédé, le 14 avril 2022, au paiement des factures d’août et septembre 2021, et conteste devoir les intérêts de retard et le montant de la clause pénale. Elle fait valoir que les derniers contrats souscrits avec la société Multicom datent de 2014, rappelant les dispositions du code de l’environnement aux termes desquelles la durée maximum d’un contrat d’affichage est de 6 ans, soutenant dès lors que les conditions générales conclues en 2014 lui sont désormais inopposables, notamment quant au paiement des intérêts et de la clause pénale. Elle soutient ensuite qu’en l’absence de conformité des informations diffusées sur les panneaux publicitaires, elle était fondée à invoquer une exception d’inexécution, et à suspendre le règlement des factures. S’agissant de la clause pénale, la société Sodico ajoute que la pénalité de 30% du montant des sommes dues n’est applicable qu’en cas de non-paiement du support, et non pas pour un simple retard de paiement, rappelant également le pouvoir modérateur du juge.
La société Multicom fait valoir que les contrats souscrits en 2014 pour 3 années se renouvellent par tacite reconduction pour la même durée, conformément aux conditions générales. Elle soutient que les dispositions légales invoquées par la société Sodico ne sont pas applicables, le contrat pouvant être reconduit au-delà de la période de 6 années, comme c’est le cas en l’espèce. Elle en conclut que les conditions générales sont opposables à la société Sodico qui a reconnu en avoir pris connaissance. Elle soutient n’avoir aucune obligation de recherche ou de conformité des informations, la demande de modification de ces dernières incombant uniquement au client, ajoutant qu’elle ne peut modifier elle-même une information si le client ne lui donne aucun ordre en ce sens. Elle soutient qu’il n’y a donc pas lieu à application d’une exception d’inexécution. Elle sollicite l’application de la clause pénale, dont elle rappelle le caractère contractuel, rappelant que le paiement du principal n’est intervenu que 6 mois après la mise en demeure.
Réponse de la cour
. Sur l’opposabilité des conditions générales de vente de la société Multicom
Il résulte de l’article L. 581-25 du code de l’environnement que le contrat de louage d’emplacement privé aux fins d’apposer de la publicité ou d’installer une préenseigne se fait par écrit. Il est conclu pour une période qui ne peut excéder six ans à compter de sa signature. Il peut être renouvelé par tacite reconduction par périodes d’une durée maximale d’un an, sauf dénonciation par l’une des parties trois mois au moins avant son expiration.
La société Multicom produit aux débats trois bons de commandes valant contrat, conclus avec la société Sodico les 31 mai, 13 août et 6 septembre 2014, et concernant des ordres d’affichage sur des espaces publicitaires, chaque contrat étant conclu pour une durée de 3 années. Les conditions générales de vente sont mentionnées au verso des bons de commande et signées par la société Sodico.
L’article 12 des conditions générales, intitulé » renouvellement « , précise que : » sauf dénonciation par lettre recommandée avec accusé de réception par le preneur, 6 mois avant l’échéance du contrat, celui-ci sera renouvelé par tacite reconduction pour une période identique « .
Comme le soutient la société Multicom, les contrats litigieux ne portent pas sur le louage d’un emplacement aux fins d’apposer de la publicité, mais sur un » ordre d’affichage » sur des panneaux dont dispose la société Multicom. L’article L. 581-25 du code de l’environnement est dès lors inapplicable au présent litige.
Contrairement à ce que soutient la société Sodico, il existe bien des contrats écrits conclus en 2014, ces derniers ayant été tacitement reconduits faute de dénonciation dans les délais prévus à l’article 12 des conditions générales. Les conditions générales, visées par la société Sodico, lui sont donc opposables.
. Sur l’exception d’inexécution, et la suspension du paiement des factures
Il résulte de l’article 1219 du code civil qu’une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.
En l’espèce, la société Sodico reproche à la société Multicom de ne pas l’avoir interrogée régulièrement quant à la pertinence des informations affichées, afin de tenir compte d’éventuelles modifications (suppression d’enseignes dans le centre commercial). Ainsi que le soutient la société Multicom, les dispositions contractuelles ne mettaient à sa charge aucune obligation de se renseigner sur la pertinence des informations, le contrat précisant au contraire que le changement des messages publicitaires se faisait » à la demande du client « . Il appartenait à la société Sodico de contrôler – notamment au moment de l’envoi des factures accompagnées des photos des panneaux publicitaires – la pertinence des informations, et de solliciter éventuellement leur modification.
Aucune inexécution contractuelle ne peut dès lors être imputée à la société Multicom, de sorte que la société Sodico n’était pas fondée dans son retard de paiement des factures. Elle est ainsi redevable du paiement des intérêts au taux légal sur la somme de 11 599,20 euros du 22 octobre 2021 au 14 avril 2022. Le jugement sera confirmé de ce chef
. Sur la demande en paiement de la clause pénale
Il résulte de l’article 1231-6 du code civil que les dommages-intérêts dus à raison du retard dans le paiement d’une obligation de somme d’argent consistent dans l’intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.
L’article 11 des conditions générales de vente indique que : » conformément à l’article L.441-6 du code de commerce, tout dépassement des délais de paiement entraînera des pénalités suivant la loi LME 01/2009, et indemnité forfaitaire de 40 euros exigibles sans rappel, sans mise en demeure préalable, dès le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture. En cas de non-paiement du support par son client, une clause pénale d’un montant égal à 30% de toutes les sommes restant dues pourrait être appliquée après mise en demeure préalable, à titre d’indemnité. »
Enfin, chacune des factures émises par la société Multicom comporte une mention selon laquelle : » en cas de retard de paiement, une pénalité égale à 10% d’intérêt sera exigible (décret 2009-138 du 9 février 2009), ainsi qu’une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement d’un montant minimum de 40 euros pour les professionnels. »
Comme le fait valoir la société Sodico, le retard de paiement est prévu par les mentions portées sur les factures (pénalité de 10% des sommes dues), de sorte que l’article 11 des conditions générales fixant une pénalité de 30% » en cas de non-paiement » n’est applicable qu’à un défaut de paiement, et non à un simple retard de paiement.
Il convient donc de faire application de l’indemnité de 10 % à l’ensemble des sommes dues, étant observé que la société Sodico ne conteste pas ce quantum. Le jugement sera infirmé de ce chef, la cour condamnant la société Sodico au paiement de la somme de 1 159,92 euros au titre de la clause pénale.
3 – sur les demandes accessoires
Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles. La société Sodico qui succombe pour l’essentiel, sera condamnée aux dépens d’appel. Il n’y a pas lieu à paiement de frais irrépétibles en appel.
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement du tribunal de commerce de Versailles du 15 février 2023 en ce qu’il a :
– condamné la société Sodico à payer à la société Multicom les intérêts au taux légal sur la somme de 11 599,20 euros du 22 octobre 2021 au 14 avril 2022 ;
– statué sur les frais irrépétibles,
L’infirme pour le surplus,
Et statuant à nouveau,
Dit que la société Multi.com affichage est irrecevable en sa demande en paiement de la somme de 427,80 euros, au titre de taxes locales de publicité extérieure pour les années 2015 et 2016,
Condamne la société Sodico Expansion à payer à la société Multi.com affichage la somme de 1 159,92 euros au titre de la clause pénale,
Rejette toutes autres demandes,
Condamne la société Sodico Expansion aux dépens d’appel.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Ronan GUERLOT, Président, et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
Laisser un commentaire