Délai d’appel et notification : enjeux procéduraux en matière de saisie des rémunérations

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Délai d’appel et notification : enjeux procéduraux en matière de saisie des rémunérations

L’Essentiel : Le 15 avril 2024, le tribunal judiciaire de Reims a débouté M. [N] [V] de ses demandes concernant la saisie de ses rémunérations, fixant sa créance à 9.893,44€. Il a été autorisé à rembourser par versements mensuels de 200€, sous peine de déchéance. M. [N] [V] a interjeté appel le 15 mai 2024. Les consorts [H] ont contesté la recevabilité de cet appel pour tardiveté, tandis que M. [N] [V] a soutenu que leurs conclusions étaient irrecevables. Le tribunal a finalement déclaré l’appel recevable, renvoyant l’affaire au fond pour une audience prévue le 14 janvier 2025.

Jugement du 15 avril 2024

Le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Reims a rendu un jugement contradictoire le 15 avril 2024, déboutant M. [N] [V] de ses prétentions concernant une mesure de saisie de ses rémunérations. La créance a été fixée à 9.893,44€, incluant le principal, les intérêts et les frais. M. [N] [V] a été autorisé à rembourser cette dette par versements mensuels de 200€, avec une déchéance du terme en cas de non-respect du moratoire. Il a également été condamné aux dépens.

Appel de M. [N] [V]

M. [N] [V] a interjeté appel de ce jugement le 15 mai 2024. Un avis de fixation de l’affaire à bref délai a été envoyé par le greffe le 18 juin 2024, marquant le début de la procédure d’appel.

Conclusions des intimés

Les intimés, consorts [H], ont déposé des conclusions d’incident le 16 juillet 2024 et le 21 octobre 2024, contestant la recevabilité de l’appel pour tardiveté. Ils ont également demandé la condamnation de M. [N] [V] aux dépens et aux frais irrépétibles de procédure, s’élevant à 1.500€.

Réponse de l’appelant

M. [N] [V] a réagi par des conclusions d’incident en réponse, signifiées et déposées à la cour les 18 juillet 2024 et 21 octobre 2024. Il a soutenu que les consorts [H] ne pouvaient pas invoquer l’irrecevabilité de son appel dans leurs conclusions d’incident, car celles-ci ne contenaient pas leurs moyens de fond.

Plaidoirie sur incident

L’affaire a été plaidée sur incident devant le président de chambre lors de l’audience du 12 novembre 2024. Les arguments des deux parties ont été examinés en lien avec la recevabilité de l’appel et les conclusions d’incident.

Décision sur la fin de non-recevoir

Le tribunal a statué que les consorts [H] pouvaient valablement soutenir leurs fins de non-recevoir par des conclusions séparées, respectant ainsi les délais prescrits par la loi. Le moyen soulevé par M. [N] [V] n’a pas été retenu.

Décision sur la tardiveté de l’appel

Concernant la tardiveté de l’appel, le tribunal a constaté que la notification du jugement du 14 avril 2024 n’avait pas été reçue par M. [N] [V], ce qui a empêché le délai d’appel de courir. La notification n’ayant pas été réceptionnée, le délai a commencé à courir à partir du 18 juin 2024, date à laquelle le jugement a été signifié par un commissaire de Justice.

Recevabilité de l’appel

En conséquence, l’appel interjeté par M. [N] [V] le 15 mai 2024 a été déclaré recevable. L’affaire a été renvoyée au fond pour être plaidée à l’audience du 14 janvier 2025, avec une date de clôture fixée au 7 janvier 2025.

Dépens et frais irrépétibles

Les dépens et frais irrépétibles de procédure liés à l’incident seront joints à ceux du fond, conformément aux dispositions des articles 699 et 700 du code de procédure civile.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la recevabilité de l’appel de M. [N] [V] ?

L’appel de M. [N] [V] est déclaré recevable par le président de chambre.

En effet, selon l’article R. 121-20 du code des procédures civiles d’exécution, le délai d’appel des jugements du juge de l’exécution est de quinze jours à compter de la notification par le greffe de la décision.

Il est précisé que l’appel est formé, instruit et jugé selon les règles applicables à la procédure à bref délai ou à la procédure à jour fixe.

Dans cette affaire, la décision du juge de l’exécution a été notifiée le 15 avril 2024, mais il a été établi que cette notification n’a pas été réceptionnée par M. [N] [V],

comme l’indique l’accusé de réception qui mentionne « Destinataire inconnu à l’adresse ».

Ainsi, la notification n’ayant pas été effective, le délai d’appel n’a pas couru.

Il a été déterminé que le délai d’appel a commencé à courir à partir du 18 juin 2024, date à laquelle le jugement a été signifié par un commissaire de Justice.

Par conséquent, l’appel interjeté le 15 mai 2024 est recevable, car il a été formé dans le délai légal après la notification effective.

Les conséquences de la tardiveté de l’appel

La question de la tardiveté de l’appel est cruciale dans cette affaire.

L’article 905-2 du code de procédure civile stipule que l’appelant dispose d’un délai d’un mois à compter de la réception de l’avis de fixation de l’affaire à bref délai pour remettre ses conclusions au greffe.

En l’espèce, la notification du jugement n’ayant pas été reçue par M. [N] [V],

le délai d’appel n’a pas commencé à courir à la date de la notification initiale, mais à partir de la signification par le commissaire de Justice.

Cela signifie que M. [N] [V] a respecté les délais légaux pour interjeter appel,

ce qui a conduit à la décision de la cour de déclarer l’appel recevable.

Il est important de noter que la bonne ou mauvaise foi de M. [N] [V] concernant son changement d’adresse n’a pas d’impact sur la question de la notification.

La cour a donc statué en faveur de la recevabilité de l’appel, permettant ainsi à l’affaire d’être renvoyée au fond pour un examen ultérieur.

Quelles sont les implications des conclusions d’incident des intimés ?

Les conclusions d’incident des intimés, qui invoquent l’irrecevabilité de l’appel pour tardiveté,

sont fondées sur l’argument que M. [N] [V] aurait dû respecter les délais de notification.

Cependant, comme mentionné précédemment, l’article 910-4 du code de procédure civile exige que les parties présentent l’ensemble de leurs prétentions sur le fond dans les délais prescrits.

Les consorts [H] ont donc pu valablement soutenir leurs fins de non-recevoir par des conclusions séparées,

ce qui est conforme à la loi.

Il est également important de noter que la cour a rejeté l’argument des intimés concernant la tardiveté de l’appel,

car la notification initiale n’ayant pas été reçue, le délai d’appel n’a pas couru.

Ainsi, les conclusions d’incident des intimés n’ont pas eu l’effet escompté et n’ont pas pu empêcher la recevabilité de l’appel de M. [N] [V].

La cour a donc décidé de renvoyer l’examen de la cause sur le fond, permettant à M. [N] [V] de défendre ses droits.

COUR D’APPEL DE REIMS

1ère Chambre Civile

Section JEX

N° RG 24/00770

N° Portalis DBVQ-V-B7I-FPWA

Ordonnance n°

du 26 Novembre 2024

Formule exécutoire aux

avocats le : 26 novembre 2024

ORDONNANCE D’INCIDENT

LE VINGT SIX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,

Nous, Bertrand Duez, président de chambre, assisté de Sophie Balestre, avons rendu l’ordonnance suivante, après débats tenus le 12 novembre 2024 dans la procédure, opposant :

M. [N] [V]

[Adresse 1]

[Localité 2]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2024/002323 du 29/05/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Reims)

Représenté par Me Aurélie Gabon, avocat au barreau de Reims

à

1/ Mme [L] [P] épouse [H]

[Adresse 3]

[Localité 4]

2/ M. [Z] [H]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentés par la SELARL Guyot – De Campos, avocats au barreau de Reims

et par Me Julie Faizende, avocat au barreau de Lyon

Exposé du litige

Par jugement contradictoire du 15 avril 2024, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Reims, statuant sur contestation d’une mesure de saisie des rémunérations a débouté M. [N] [V] de ses prétentions, fixé la créance à la somme de 9.893,44€ en principal, intérêts et frais, autorisé M. [N] [V] à se libérer de cette dette par versements mensuels de 200€ s’imputant prioritairement sur le capital, jusqu’à épuisement de la dette avec déchéance du terme en cas de non-respect du moratoire et condamné M. [N] [V] aux dépens.

‘ Vu l’appel de M. [N] [V] en date du 15 mai 2024 (23h02)

‘ Vu l’avis de fixation de l’affaire à bref délai envoyé par le greffe le 18 juin 2024

‘ Vu les conclusions d’incident n°1 des intimés signifiées et déposées à la cour le 16 juillet 2024 et numéro 2 signifiées et déposées à la cour le 21 octobre 2024 invoquant l’irrecevabilité de l’appel pour tardiveté et sollicitant la condamnation de l’appelant aux dépens et aux frais irrépétibles de procédure (1.500€)

‘ Vu les conclusions d’incident en réponse n°1 de l’appelant signifiées et déposées à la cour le 18 juillet 2024 et numéro 2 signifiées et déposées à la cour le 21 octobre 2024

‘ Vu les conclusions de fond de l’appelant signifiées et déposées à la cour les 17/06/2024 et 18/07/2024.

‘ Vu les conclusions au fond des intimés signifiées et déposées à la cour le 16 juillet 2024.

La cause a été plaidée sur incident devant le président de chambre à l’audience du 12 novembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1/ Sur la fin de non-recevoir des conclusions d’incident des consorts [H]

M. [N] [V] soutient que les consorts [H] ne pouvaient invoquer l’irrecevabilité de son appel au moyen de leurs conclusions d’incident du 16 juillet 2024 puisque ces écritures ne contenaient pas leurs moyens de fond aux termes de l’article 910-4 du code de procédure civile.

Sur ce :

L’article 910-4 du code de procédure civile dispose que :

A peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

Néanmoins, et sans préjudice de l’alinéa 2 de l’article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

L’article 905-2 du même code dispose en son premier alinéa que :

A peine de caducité de la déclaration d’appel, relevée d’office par ordonnance du président de la chambre saisie ou du magistrat désigné par le premier président, l’appelant dispose d’un délai d’un mois à compter de la réception de l’avis de fixation de l’affaire à bref délai pour remettre ses conclusions au greffe. L’intimé dispose, à peine d’irrecevabilité relevée d’office par ordonnance du président de la chambre saisie ou du magistrat désigné par le premier président, d’un délai d’un mois à compter de la notification des conclusions de l’appelant pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué.

Il ne résulte pas de la combinaison de ces deux textes d’autres obligations pour les parties que de signifier et déposer leurs conclusions dans les délais prescrits par la Loi.

Il ne saurait sans ajouter à la Loi une condition qu’elle ne contient pas être imposé aux parties de conclure sur une fin de non recevoir et sur le fond dans un seul jeu de conclusions dès lors que les délais prescrits à l’appelant et à l’intimé sont respectés quant aux conclusions de fond.

En l’espèce, les consorts [H] qui ont conclu sur le fond le 16/07/2024 en réponse aux écritures de l’appelant du 17/06/2024, pouvaient donc valablement soutenir leurs fins de non-recevoir par conclusions séparées signifiées le 16/07/2024.

Le moyen ne sera pas retenu.

2/ Sur la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de l’appel

Il résulte de l’article R. 121-20 du code des procédures civiles d’exécution que le délai d’appel des jugements du juge de l’exécution est de quinze jours à compter de la notification par le greffe de la décision et que l’appel est formé, instruit et jugé selon les règles applicables à la procédure à bref délai ou à la procédure à jour fixe.

Il résulte des dispositions des articles 668 et 669 du code de procédure civile que :

La date de la notification par voie postale est, à l’égard de celui qui y procède, celle de l’expédition et, à l’égard de celui à qui elle est faite, la date de la réception de la lettre.

La date de l’expédition d’une notification faite par la voie postale est celle qui figure sur le cachet du bureau d’émission.

La date de la remise est celle du récépissé ou de l’émargement.

La date de réception d’une notification faite par lettre recommandée avec demande d’avis de réception est celle qui est apposée par l’administration des postes lors de la remise de la lettre à son destinataire.

En l’espèce, la décision déférée à la cour (jugement du 14/04/2024) a été notifiée par les soins du greffe du juge de l’exécution de Reims le 15/04/2024 aux parties mais il ressort de l’accusé de réception de cette notification que celle-ci est revenue avec la mention ‘ Destinataire inconnu à l’adresse’ (pièce appelant n° 6)

Il s’ensuit que la notification faite par le greffe de la juridiction de première instance n’ayant pas été réceptionnée par la personne à qui elle était destinée, cette notification ne peut faire courir le délai d’appel, la partie qui y a intérêt étant, dans ce cas, tenue de procéder par signification de commissaire de Justice pour ce faire, et ce sans qu’il soit besoin de statuer sur la bonne ou mauvaise foi de M. [N] [V] dans son changement d’adresse.

Le délai d’appel n’a couru en l’espèce qu’à compter du 18 juin 2024, date de la signification du jugement du juge de l’exécution par exploit de Me [E] commissaire de Justice en date du 18 juin 2024.

En conséquence, l’appel interjeté par M. [N] [V] le 15 mai 2024 est recevable et la cause sera renvoyée au fond pour y être plaidée.

Par application des dispositions des articles 699 et 700 du code de procédure civile, les dépens et frais irrépétibles de procédure de l’incident seront joints à ceux du fond.

PAR CES MOTIFS

Le président de chambre, statuant publiquement et contradictoirement :

Déclare recevable l’appel formé par M. [N] [V] le 15 mai 2024 sur le jugement rendu par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Reims le 15 avril 2024 (RG N° 24/01219)

Renvoie l’examen de la cause sur le fond à l’audience du 14 janvier 2025 à 10 heures avec une date de clôture fixée au 7 janvier 2025.

Dit que les dépens et frais irrépétibles de procédure de l’incident seront joints avec ceux du fond.

Le Greffier Le Président


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