Conflit locatif : enjeux de preuve et responsabilités des parties en matière de réparations et d’indemnités.

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Conflit locatif : enjeux de preuve et responsabilités des parties en matière de réparations et d’indemnités.

L’Essentiel : La société foncière DI 01/2010 a loué un appartement à M. [T] et Mme [P] en juillet 2012. Après avoir donné leur congé en octobre 2021, un litige sur les loyers et charges a éclaté, entraînant une assignation en justice. Le tribunal a condamné les locataires à payer 329,28 euros, tout en accordant 2 000 euros de dommages et intérêts à la bailleresse. En appel, la société a demandé une augmentation des montants dus, tandis que les locataires ont contesté le jugement. La cour d’appel a confirmé la décision initiale, ajustant seulement les réparations locatives à 1 500 euros.

Contexte de la location

La société foncière DI 01/2010 a loué un appartement, un parking et une cave à M. [W] [Z] [T] et Mme [E] [P] le 21 juillet 2012. Les locataires ont donné leur congé par courrier recommandé le 28 octobre 2021, et un état des lieux de sortie a été réalisé le 30 novembre 2021.

Litige sur les loyers et charges

Un arrêté de compte a été envoyé aux locataires le 24 janvier 2022, suivi d’une mise en demeure le 4 mars 2022, que les locataires ont contestée. En réponse, la bailleresse a assigné M. [T] et Mme [P] devant le tribunal pour obtenir le paiement d’un arriéré de loyers et de charges, ainsi que des dommages et intérêts pour résistance abusive.

Jugement du tribunal de proximité

Le 22 novembre 2022, le tribunal a condamné M. [T] et Mme [P] à payer 329,28 euros pour l’arriéré de loyers et des réparations locatives, tout en condamnant la bailleresse à verser 2 000 euros pour dommages et intérêts. Le tribunal a également ordonné une compensation entre les montants dus et a débouté les parties de leurs autres demandes.

Appel de la société foncière

La société foncière a interjeté appel le 10 février 2023, demandant l’infirmation du jugement et la condamnation des locataires à un montant supérieur pour l’arriéré de loyers et les réparations locatives, ainsi que des dommages et intérêts pour résistance abusive.

Appel incident des locataires

M. [T] et Mme [P] ont formé un appel incident le 24 avril 2024, demandant l’infirmation du jugement en toutes ses dispositions et la production de documents sous astreinte, ainsi que des indemnités pour abus de droit et préjudice de jouissance.

Décision de la cour d’appel

La cour a rejeté la demande des locataires concernant la communication de documents, confirmant le jugement de première instance pour la plupart de ses dispositions, tout en ajustant le montant des réparations locatives à 1 500 euros. Les demandes d’indemnisation pour préjudice de jouissance et moral des locataires ont été déboutées.

Condamnation aux dépens

M. [T] et Mme [P] ont été condamnés aux dépens de la procédure d’appel, et la cour a également statué sur les demandes respectives de dommages-intérêts pour résistance ou procédure abusive, les déboutant de ces demandes.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la nature des obligations du locataire en matière de réparations locatives ?

Le locataire a des obligations spécifiques en matière de réparations locatives, qui sont définies par plusieurs articles du Code civil et de la loi du 6 juillet 1989.

Selon l’article 1728 du Code civil, « le preneur est tenu d’user de la chose louée en bon père de famille suivant la destination qui lui a été donnée par le bail ». Cela signifie que le locataire doit prendre soin du bien loué et l’utiliser conformément à son usage prévu.

De plus, l’article 1730 du même code stipule que « s’il a été fait un état des lieux entre le bailleur et le preneur, ce dernier doit rendre la chose telle qu’il l’a reçue, suivant cet état, excepté de ce qui a péri ou a été dégradé par vétusté ou force majeure ».

Cela implique que le locataire doit rendre le logement dans un état similaire à celui dans lequel il l’a reçu, sauf pour les dégradations dues à l’usure normale.

Enfin, l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989 précise que « le locataire est obligé de répondre des dégradations et pertes survenant pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive ».

Il est donc responsable des réparations locatives, sauf si celles-ci sont causées par la vétusté, la malfaçon, ou d’autres circonstances exceptionnelles.

Comment se détermine le montant des réparations locatives à la charge du locataire ?

Le montant des réparations locatives à la charge du locataire est déterminé en fonction de l’état des lieux d’entrée et de sortie, ainsi que des règles de vétusté.

L’article 1730 du Code civil, déjà mentionné, impose au locataire de rendre le bien dans l’état où il l’a reçu, sauf pour les dégradations dues à la vétusté.

La vétusté est un facteur important dans l’évaluation des réparations locatives. En effet, il est généralement admis que la durée de vie des différents éléments d’un logement est limitée. Par exemple, la durée de vie des peintures est souvent estimée à 7 ans, celle des moquettes à 10 ans, et celle des parquets à 15 ans.

Dans le cas présent, la cour a noté que l’appartement était en bon état à la sortie des locataires, à l’exception de certains désordres qui ne résultaient pas d’un usage normal.

Ainsi, la cour a fixé le montant des réparations locatives à 1 500 euros, en tenant compte de la vétusté et des éléments d’équipement détériorés durant l’occupation des lieux.

Quelles sont les conséquences d’une résistance abusive dans le cadre d’un litige locatif ?

La résistance abusive dans un litige locatif peut entraîner des conséquences financières pour la partie qui s’y livre.

L’article 1240 du Code civil stipule que « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ». Cela signifie qu’une partie qui refuse de se conformer à ses obligations peut être condamnée à verser des dommages-intérêts.

Dans le cas présent, la société foncière DI 01/2010 a demandé des dommages-intérêts pour résistance abusive, en raison du refus des locataires de payer les sommes dues.

La cour a jugé que les locataires avaient effectivement fait preuve de résistance abusive, ce qui a conduit à la condamnation de M. [T] et Mme [P] à verser des dommages-intérêts à la bailleresse.

Quels sont les droits du bailleur en matière de dépôt de garantie ?

Le dépôt de garantie est une somme d’argent versée par le locataire au bailleur au début du contrat de location, destinée à couvrir d’éventuels manquements du locataire à ses obligations.

L’article 22 de la loi du 6 juillet 1989 précise que « le montant du dépôt de garantie ne peut excéder un mois de loyer hors charges ».

Le bailleur a le droit de conserver ce dépôt de garantie pour couvrir les réparations locatives ou les arriérés de loyer.

En cas de litige, le bailleur doit justifier les retenues effectuées sur le dépôt de garantie. Si le bailleur ne peut prouver que les dégradations sont imputables au locataire, il doit restituer le dépôt de garantie dans un délai d’un mois après la restitution des lieux.

Dans cette affaire, la demande de restitution du dépôt de garantie par les locataires a été déboutée, car la cour a estimé que les dégradations constatées étaient à la charge des locataires, justifiant ainsi la non-restitution du dépôt.

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 51E

Chambre civile 1-2

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 26 NOVEMBRE 2024

N° RG 23/00952 – N° Portalis DBV3-V-B7H-VVVB

AFFAIRE :

S.C.I. FONCIERE DI 01/2010

C/

[W] [Z] [T]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 novembre 2022 par le Juge des contentieux de la protection de RAMBOUILLET

N° RG : 11-22-0397

Expéditions exécutoires

Copies certifiées conformes délivrées

le : 26.11.24

à :

Me Hélène ROBERT

Me Léa CHEVALIER

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SIX NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

APPELANTE

S.C.I. FONCIERE DI 01/2010 immatriculée au RCS de PARIS sous le N° 515 059 988, dont le siège social est sis [Adresse 2] à [Localité 4], pris en la personne de son représentant légal, domiciliée audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Hélène ROBERT de la SELEURL HELENE ROBERT AVOCAT, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 152

****************

INTIMÉS

Monsieur [W] [Z] [T]

né le 04 avril 1972 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentant : Me Léa CHEVALIER, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 252

Plaidant : Me Richard Ruben COHEN de la SELASU SELASU RICHARD R. COHEN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1887

Madame [E] [P]

née le 05 Mai 1969 à [Localité 6] – MAROC

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentant : Me Léa CHEVALIER, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 252

Plaidant : Me Richard ruben COHEN de la SELASU SELASU RICHARD R. COHEN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1887

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 03 juin 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Isabelle BROGLY, magistrate honoraire chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe JAVELAS, Président,

Madame Anne THIVELLIER, Conseillère,

Madame Isabelle BROGLY, Magistrate honoraire,

Greffière lors des débats : Madame Céline KOC

Greffière placée lors du prononcé : Madame Gaëlle RULLIER

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant acte sous-seing privé du 21 juillet 2012, la société foncière DI 01/2010 a donné en location à M. [W] [Z] [T] et Mme [E] [P] un appartement situé [Adresse 3] ainsi qu’un parking nº 8 et une cave n° 8 à [Localité 8].

Les locataires ont donné congé par courrier recommandé du 28 octobre 2021 reçu le 29 octobre et un état des lieux de sortie contradictoire a été réalisé le 30 novembre 2021.

Par mail adressé le 24 janvier 2022, un arrêté de compte a été transmis aux locataires, réitéré par une mise en demeure du 4 mars 2022. Les locataires l’ont contesté.

Par acte de commissaire de justice délivré le 4 août 2022, la bailleresse a fait assigner M. [T] et Mme [P] à comparaître devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Rambouillet aux fins d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :

– leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 4506,53 euros sur l’arriéré de loyers et charges arrêté au 29 novembre 2021 avec intérêts de droit à compter de l’assignation,

– la condamnation solidaire au paiement de la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

– la condamnation solidaire au paiement de la somme de 960 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Par jugement contradictoire du 22 novembre 2022, le juge des contentieux et de la protection du tribunal de proximité de Rambouillet a :

– condamné solidairement M. [Z] [T] et Mme [P] à payer à la société foncière DI 01/2010 la somme de 329,28 euros au titre de l’arriéré de loyers et des réparations locatives avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement,

– condamné la société foncière DI 01/2010 à payer à M. [Z] [T] et Mme [P] la somme de 2 000 euros à titre de dommages et intérêts,

– ordonné la compensation entre le montant des condamnations,

– débouté les parties de leurs autres demandes,

– ordonné l’exécution provisoire de la présente décision,

– dit que les dépens resteront à la charge de la demanderesse.

Par déclaration déposée au greffe le 10 février 2023, la société foncière DI 01/2010 a relevé appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 26 octobre 2023, la société foncière DI 01/2010, appelante, demande à la cour :

– d’infirmer le jugement déféré :

* en ce qu’il a condamné solidairement M. [Z] [T] et Mme [P] à lui payer la somme de 329,28 euros au titre de l’arriéré de loyers et des réparations locatives avec intérêts an taux légal à compter du présent jugement,

* en ce qu’il l’a condamnée à payer à M. [Z] [T] et Mme [P] la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts,

* en ce qu’il a ordonné la compensation entre les condamnations,

* en ce qu’il a débouté les parties de leurs autres demandes,

* en ce qu’il a ordonné l’exécution provisoire de la présente décision,

* en ce qu’il a dit que les dépens resteront à la charge de la demanderesse,

statuant à nouveau :

– de condamner solidairement M M. [Z] [T] et Mme [P] à lui payer la somme de 4 439,27 euros, selon arrêté du 24 janvier 2021 arrêté au 29 novembre 2021 et décompte du 26 septembre 2022,

– de condamner solidairement M. [Z] [T] et Mme [P] à régler les intérêts de droit à compter de la présente assignation en vertu de l’article 1231-7 du code civil,

– de condamner solidairement M. [Z] [T] et Mme [P] à lui payer la somme de 2 000 euros pour résistance abusive sur le fondement de l’article 1240 du code civil,

– de débouter M. [Z] [T] et Mme [P] de leur demande tendant à qu’il lui soit ordonné de produire sous astreinte de 100 euros par jour de retard, les documents suivants :

*le PV de réception des parties communes et du logement B 114, le cas échéant, les PV relatifs aux levées des réserves,

* le rapport d’expertise intégral déposé par la société GBA Construction relatif au sinistre n°552366173,

* la décision de garantie/non garantie de l’assureur Axa Entreprise relative au sinistre n°552366173,

– de débouter M. [Z] [T] et Mme [P] de leur demande de condamnation à leur payer les sommes suivantes :

* 1.000 euros, au titre de l’abus de droit,

* 6 944,08 euros, en réparation du préjudice de jouissance subi entre le 27 septembre 2019 et le 30 novembre 2021,

* 5 000 euros à titre d’indemnisation de leur préjudice moral,

– de débouter M. [Z] [T] et Mme [P] de leur demande de condamnation à leur restituer le montant du dépôt de garantie, soit la somme de 534,16 euros, avec majoration égale à 10% du loyer mensuel en principal, pour chaque période mensuelle commencée en retard, depuis le 1er février 2022, et ce en application de l’article 22 de la loi,

– de débouter M. [Z] [T] et Mme [P] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

– de débouter M. [Z] [T] et Mme [P] de leur demande de condamnation à leur payer la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

– condamner solidairement M. [Z] [T] et Mme [P] à lui payer la somme de 150 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner solidairement M. [Z] [T] et Mme [P] en tous les dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de Me Robert, avocat aux offres de droit.

Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées le 24 avril 2024, M. [Z] [T] et Mme [P], intimés ayant formé appel incident, demandent à la cour :

– d’infirmer le jugement rendu le 22 novembre 2022 par le juge des contentieux de la protection près le tribunal judiciaire de Versailles en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau, in limine litis,

– d’ordonner à la société foncière DI 01/2010 de produire, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document, les documents suivants :

* le PV de réception des parties communes et du logement B 114, le cas échéant, les PV relatifs aux levées des réserves,

* le rapport d’expertise intégral déposé par la société GBA Construction relatif au sinistre n°552366173,

* la décision de garantie/non garantie de l’assureur Axa Entreprise relative au sinistre n°552366173,

à titre principal, de :

– débouter la société foncière DI 01/2010 de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– condamner la société foncière DI 01/2010 à leur payer les sommes suivantes :

* 1 000 euros au titre de l’abus de droit dont s’est rendue coupable l’appelante en formulant des demandes au mépris des conditions juridiques applicables,

* 6 944,08 euros en réparation du préjudice de jouissance subi entre le 27 septembre 2019 et le 30 novembre 2021,

* 5 000 euros à titre d’indemnisation de leur préjudice moral,

– condamner la société foncière DI 01/2010 à restituer le dépôt de garantie, soit la somme de 534,16 euros, avec majoration égale à 10% du loyer mensuel en principal, pour chaque période mensuelle commencée en retard, depuis le 1er février 2022, et ce en application de l’article 22 de la loi,

– condamner la société foncière DI 01/2010 à leur payer la somme de 3 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société foncière DI 01/2010 aux entiers dépens.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 30 mai 2024.

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande formée in limine litis par les intimés tendant à la communication de documents sous astreinte

Afin de leur permettre de s’opposer utilement à la demande de la bailleresse au titre des réparations locatives, M. [T] et Mme [P] sollicitent, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document, les document suivants : le PV de réception des parties communes et du logement B 114, le cas échéant, les PV relatifs aux levées des réserves, le rapport d’expertise intégral déposé par la société GBA Construction relatif au sinistre n°552366173, la décision de garantie/non garantie de l’assureur Axa Entreprise relative au sinistre n°552366173.

La SCI Foncière DI 01/2010 conteste cette demande qu’elle estime sans objet et sans rapport avec le litige, faisant valoir que seuls quelques désordres avaient été retenus pour l’appartement, à savoir une fuite de la chasse d’eau, un volet roulant bloqué, un problème de fermeture de la porte d’entrée, des défauts de peinture, une mauvaise fixation des radiateurs, une prise électrique du séjour défectueuse, un problème d’ouverture de la porte-fenêtre du séjour.

Sur ce,

Des explications développées dans leurs conclusions, il ressort que M. [T] et Mme [P] voudraient s’appuyer sur ces documents pour justifier le fait que les frais de remise en état qui leur ont été imputés résulteraient des désordres relevant de la garantie biennale qui n’auraient pas été repris par la bailleresse.

Ces quelques désordres sont loin de justifier les nombreux désordres locatifs détaillés dans l’état des lieux de sortie.

En outre, pour justifier des prétendus refus d’intervention de la bailleresse ou de reprise des désordres, M. [T] et Mme [P] ne communiquent que quatre mails en près de 10 ans d’occupation.

De son côté, la SCI Foncière DI 01/2010 justifie s’être montrée réactive en déférant aux doléances des locataires exprimées dans leurs mails, par les différentes factures qu’elle produit aux débats.

Il s’ensuit que la demande de M. [T] et de Mme [P] tendant à la communication de documents sous astreinte doit être rejetée.

Sur l’appel de la SCI Foncière DI 01/2010

– Sur le montant de la dette locative

La société Foncière DI 01 2010 sollicite la condamnation de M. [T] et de Mme [P] à lui verser la somme de 799,50 euros au titre des loyers et provisions sur charges impayés, selon décompte arrêté à la date de la reprise des lieux, le 29 novembre 2021.

M. [T] et Mme [P] opposent le fait qu’ils ont déposé un chèque de ce montant le 3 décembre 2021 dans la boîte aux lettres de l’agence à laquelle ils reprochent pour la première fois en cause d’appel, de ne pas l’avoir encaissé.

Sur ce,

Aux termes de l’article 1353 du code civil : ‘Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation’.

L’article 9 du code de procédure civile dispose que : ‘il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention’.

En l’espèce, M. [T] et Mme [P] se bornent à affirmer avoir déposé le chèque correspondant au montant de leur arriéré locatif dans la boîte aux lettres de l’agence, mais n’établissent nullement que le chèque aurait été encaissé ou qu’ils auraient fait opposition audit chèque.

En conséquence, le jugement querellé doit être confirmé en sa disposition les ayant condamnés solidairement à verser à la SCI Foncière DI 01/2010 la somme de 799,55 euros au titre de l’arriéré de loyer de novembre 2021 (692,67 euros ) et de la provision pour charges (106,83 euros), et ce avec intérêts au taux légal à compter de la date de ce jugement.

– Sur les réparations locatives

La SCI Foncière DI 01/2010 poursuit l’infirmation de la décision dont appel en ce qu’elle a été déboutée en grande partie de sa demande de condamnation de M. [T] et de Mme [P] au titre des réparations locatives, le premier juge ne lui allouant que la somme de 863,46 euros à ce titre alors qu’elle estimait le coût des travaux de remise en état à la somme de 4 241,21 euros. Elle fait valoir essentiellement que le logement a été remis au locataires à l’état neuf, que les désordres mentionnés dans l’état des lieux de sortie ne sont pas consécutifs à un usage normal des lieux durant 10 ans et quatre mois mais à un défaut d’entretien évident. Elle ajoute que le rapport d’expertise Axa Assurances communiqué par les locataires sur lequel le tribunal s’est appuyé pour fonder sa décision est un rapport dressé par l’expert mandaté par la société d’assurance dans le cadre de la mise en oeuvre de la garantie biennale, recherchée par le promoteur, l’immeuble étant neuf lors de l’emménagement des locataires et que le premier juge a fait une mauvaise lecture des pièces produites. Elle tient à rappeler que les travaux sollicités par les locataires ont été exécutés au cours du bail, à mesure de leurs réclamations.

M. [T] et Mme [P] concluent au rejet de la demande au titre des réparations locatives, exposant que les malfaçons ont affecté l’ensemble de leur logement, (peinture – menuiserie – plomberie – électricité), qu’ils n’ont jamais été informés des suites données par l’expert à l’assureur, au syndic, au bailleur. Ils soulignent que les désordres constatés portent sur des postes dont le bailleur sollicite l’indemnisation, qu’en tout état de cause, les désordres affectant les postes nécessitent des reprises liées à la simple usure et la vétusté.

Sur ce,

L’article 1728 du code civil dispose que ‘le preneur est tenu d’user de la chose louée en bon père de famille suivant la destination qui lui a été donnée par le bail’.

L’article 1730 du même code prévoit que ‘s’il a été fait un état des lieux entre le bailleur et le preneur, ce dernier doit rendre la chose telle qu’il l’a reçue, suivant cet état, excepté de ce qui a péri ou a été dégradé par vétusté ou force majeure’.

Aux termes de l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989, ‘le locataire est obligé de répondre des dégradations et pertes survenant pendant la durée du contrat dans les locaux dont il a la jouissance exclusive ainsi que de prendre en charge l’entretien courant du logement, des équipements mentionnés au contrat, les menues réparations ainsi que les réparations locatives sauf si elles sont occasionnées par la vétusté, la malfaçon, le vice de construction, le cas fortuit ou le cas de force majeure. L’obligation légale de prise en charge des réparations locatives est reprise dans le contrat de bail’.

Le bailleur est donc en droit, en application des articles susvisés, de solliciter la réparation intégrale du préjudice que lui cause l’inexécution par le locataire des réparations locatives et l’indemnisation à laquelle il peut prétendre n’est pas subordonnée à l’exécution de ces réparations, ni même à la justification d’un préjudice.

Pour autant, la remise des lieux en état exigée du locataire, ne s’entend évidemment pas d’une remise à neuf.

L’examen attentif des états d’entrée et de sortie des lieux permet de faire ressortir que, si l’appartement était neuf lors de l’entrée des locataires, il était en bon état ou en état d’usage à la sortie, à l’exception de certains postes dont les désordres qui les affectent ne ressortent pas d’un usage normal, tels certains éléments d’équipement qui ont été détériorés au cours de l’occupation des lieux.

Ainsi que le premier juge l’a fait observer à juste titre, il est généralement admis que la durée de vie des peintures et moquettes est de 7 années, celles des revêtement et dalles en plastique de 10 ans, et celle des parquets de 15 ans.

Il s’ensuit que les travaux de peinture ne sauraient être mis à la charge des locataires, à l’exception toutefois du rebouchage des trous divers et notamment les trous de cheville.

Au vu des mentions portées à l’état des lieux de sortie et du chiffrage des différents postes faisant l’objet des désordres, la cour a les éléments suffisants pour fixer à la somme de 1 500 euros le montant des réparations locatives incluant les frais de nettoyage, après nécessaire application d’un coefficient de vétusté pour tenir compte de la durée d’occupation des lieux par les locataires (plus de neuf années). La cour tient à souligner à cet égard que le coût de remplacement du lavabo des WC a été écarté dans la mesure où les locataires avaient avisé dès le 8 janvier 2020, le mandataire de la bailleresse que cet élément d’équipement se désolidarisait du mur et qu’il a fini par tomber le 15 février 2020.

En conséquence, M. [T] et Mme [P] doivent être solidairement condamnés à verser à la société Foncière DI 2010, la somme de 799,55 euros au titre de l’arriéré de loyer de novembre 2021, ainsi que la somme de 1 500 euros au titre du coût des réparations locatives, sous déduction du dépôt de garantie d’un montant de 534,18 euros, soit en définitive la somme de 1 765,37 euros au titre du décompte de résiliation locatif. Il y a lieu d’observer à cet égard que M. [T] et Mme [P] doivent être déboutés de leur demande visant à obtenir, sur le fondement de l’article 22 de la loi du 6 juillet 1989, la majoration légale de 10% du loyer mensuel en principal à compter du 1er février 2022, dès lors que la demande de la bailleresse au titre des réparations locatives a été partiellement admise.

Sur les demandes reconventionnelles de M. [T] et de Mme [P]

– Sur la demande d’indemnisation du trouble de jouissance

Au soutien de leur demande de condamnation de la SCI Foncière DI 01/2010 à leur verser la somme de 6 944,08 euros à titre de dommages-intérêts, M. [T] et Mme [P] invoquent le préjudice de jouissance qu’ils ont subi entre le 27 septembre 2019 et le 30 novembre 2021, correspondant à 50% de la valeur locative et résultant, selon eux, des désordres affectant non seulement les parties privatives, mais également des parties communes de l’immeuble. Ils invoquent ainsi les réserves mentionnées lors de la réception de l’immeuble (fuite de la chasse d’eau, volet roulant bloqué, problème de fermeture de la porte d’entrée, défauts de peinture, mauvaise fixation des radiateurs, prise électrique du séjour défectueuse, problème d’ouverture de la porte-fenêtre du séjour), les infiltrations à répétition dans la cave et l’emplacement de parkings les rendant inutilisables, l’absence de nettoyage des parties communes propice la prolifération des nuisibles.

Sur ce,

Au soutien de cette demande, M. [T] et Mme [P] se bornent à produire quatre mails pour justifier leurs sollicitations, alors qu’ils ont occupé les lieux pendant plus de neuf années. De son côté, la SCI Foncière DI 01/2020 justifie avoir remédié aux désordres dénoncés dans ces mails et ce, dans les délais raisonnables.

Les autres plaintes formulées par les intimés ne sont étayées par aucune pièce probante, tels une lettre recommandée avec avis de réception de plainte, un procès-verbal de constat établi par un commissaire de justice, les locataires se bornant à produire une lettre non datée d’un voisin, ainsi que des photographies de l’accès au sous-sol et des emplacements de parkings en sou-sol prise le 1er février 2022, soit près de quatre mois après leur départ, étant souligné qu’il est couramment admis que des photographies ne constituent pas une modalité de preuve au sens des dispositions civiles.

En outre, aussi bien dans la lettre de congé que dans celle qu’ils ont adressée le 5 février 2022 à l’agence chargée de la gestion du bien pour contester le coût des réparations locatives, M. [T] et Mme [P] ne font aucune allusion au moindre préjudice de jouissance qu’ils auraient subi durant leur occupation des lieux.

En conséquence, le jugement doit être infirmé en ce qu’il a alloué aux locataires la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts. Statuant à nouveau, M. [T] et Mme [P] doivent être déboutés de leur demande de ce chef.

– Sur l’indemnisation du préjudice moral prétendument subi

Pour le mêmes motifs que ceux ci-dessus exposés, M. [T] et Mme [P] doivent être déboutés comme mal fondés en leur demande d’indemnisation du préjudice moral qu’ils prétendent avoir subi.

Sur les demandes respectives des parties en paiement de dommages-intérêts pour résistance ou procédure abusives.

Les parties qui succombent partiellement en leurs demandes principales ne peuvent qu’être déboutées de leur demande respective en paiement de dommages-intérêts pour résistance ou procédure abusive.

Sur les mesures accessoires

M. [T] et Mme [P] doivent être condamnés aux dépens de la procédure d’appel, la disposition du jugement contesté relative à l’article 700 du code de procédure civile étant confirmée, celle relative aux dépens de première instance étant infirmée.

Statuant à nouveau, M. [T] et Mme [P] doivent être condamnés aux dépens de première instance.

Succombant, ils seront, en outre, condamnés aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

Déboute M. [T] et Mme [P] comme mal fondée en leur demande tendant à la communication de documents sous astreinte,

Confirme le jugement rendu le 22 novembre 2022 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Rambouillet en toutes ses dispositions, sauf celle relative au montant de la condamnation des locataires au titre du coût des réparations locatives, celle relative à l’indemnisation des préjudices allégués par les locataires, ainsi que celle relative aux dépens de première instance,

Statuant à nouveau,

Condamne solidairement M. [T] et Mme [P] à verser à la SCI Foncière DI 01/2010, la somme de 1 500 euros au titre du coût des réparations locatives,

Déboute M. [T] et Mme [P] comme mal fondés en leur demande d’indemnisation des préjudices de jouissance et moral qu’ils allèguent,

Condamne in solidum M. [T] et Mme [P] aux dépens de première instance,

Déboute les parties de leur demande respective de dommages-intérêts pour résistance et procédure abusives,

Déboute les parties de leur demande formée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum M. [T] et Mme [P] aux dépens d’appel pouvant être recouvrés par Me Robert, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Monsieur Philippe JAVELAS, président et par Madame Gaëlle RULLIER, greffière placée, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La greffière placée Le président


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