Rupture des pourparlers : enjeux de la bonne foi et conséquences contractuelles

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Rupture des pourparlers : enjeux de la bonne foi et conséquences contractuelles

L’Essentiel : Le 13 avril 2021, un compromis de vente a été signé pour des parcelles appartenant à Madame [C] et ses enfants, pour 850 000 euros, avec des conditions suspensives, notamment l’obtention d’un permis de construire. Un avenant du 7 décembre 2021 a prévu une avance de 10 000 euros par vendeur et reporté la signature de l’acte authentique au 2 mai 2022, mais aucun acte n’a été signé. En mai et juin 2023, les sociétés et Monsieur [V] ont assigné les consorts [A] pour rupture brutale des pourparlers, tandis que ces derniers ont demandé le rejet des demandes et des indemnités pour préjudices subis.

Contexte de l’affaire

Un compromis de vente a été signé le 13 avril 2021 concernant des parcelles cadastrées, appartenant à Madame [C] et ses enfants, pour un montant de 850 000 euros. Ce compromis, établi en l’étude de Me [N], stipulait des conditions suspensives, notamment l’obtention d’un permis de construire dans un délai de huit mois, sans mention d’une condition suspensive d’obtention de prêt ni de dépôt de garantie.

Avenant et non-signature de l’acte authentique

Un avenant a été signé le 7 décembre 2021, prévoyant une avance de 10 000 euros à chaque vendeur et reportant la date de signature de l’acte authentique au 2 mai 2022. Cependant, aucun acte authentique n’a été signé entre les parties.

Assignation en justice

Les sociétés impliquées, ainsi que Monsieur [V], ont assigné les consorts [A] devant le tribunal judiciaire en mai et juin 2023, demandant des indemnités pour rupture brutale des pourparlers contractuels. Ils réclamaient des sommes importantes pour divers préjudices, y compris des dommages et intérêts pour frais engagés et préjudice moral.

Réponses des consorts [A]

Les consorts [A] ont demandé le rejet des demandes et ont formulé des demandes reconventionnelles, invoquant la clause pénale du compromis et des préjudices subis en raison de la défaillance de l’acquéreur à respecter les délais pour l’obtention du permis de construire.

Arguments des parties

Les demandeurs soutenaient que les consorts [A] avaient manqué à la bonne foi dans les négociations, tandis que les défendeurs affirmaient que la dénonciation du compromis était justifiée par la défaillance de l’acquéreur. Ils ont également contesté les accusations d’obstruction et ont mis en avant des manquements de l’acquéreur.

Décision du tribunal

Le tribunal a rejeté les demandes des demandeurs, considérant que les négociations avaient abouti à un compromis de vente, rendant inapplicables les dispositions sur la bonne foi. Concernant les demandes reconventionnelles, le tribunal a constaté que l’acquéreur n’avait pas respecté les conditions du compromis, ce qui a engagé sa responsabilité contractuelle.

Indemnités accordées

Le tribunal a condamné la SCCG Les Voiles d’Or à verser des indemnités aux consorts [A] pour la perte de chance de vendre leurs biens et pour le préjudice de jouissance, tout en rejetant les autres demandes et en condamnant les demandeurs aux dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la nature de la décision rendue par le tribunal ?

La décision rendue par le tribunal est réputée contradictoire et en premier ressort. Cela signifie que le jugement a été rendu après que les parties ont été dûment convoquées et que le tribunal a examiné les arguments des deux parties, même si les débiteurs n’ont pas comparu.

En vertu de l’article 455 du Code de procédure civile, le jugement doit être motivé et exposer les raisons pour lesquelles le tribunal a pris sa décision.

Il est également important de noter que, selon l’article 500 du même code, les décisions rendues en premier ressort peuvent faire l’objet d’un appel, permettant ainsi aux parties de contester la décision devant une juridiction supérieure.

Quelles sont les conséquences de la déchéance du terme dans cette affaire ?

La déchéance du terme, telle que prévue par l’article 1224 du Code civil, entraîne la résolution du contrat de prêt, permettant au créancier de réclamer immédiatement le remboursement de la totalité des sommes dues.

L’article 1224 stipule que :

« La résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice. »

Dans cette affaire, le tribunal a invalidé la déchéance du terme en date du 4 janvier 2024, car les mises en demeure n’ont pas mentionné le droit de résoudre le contrat.

Ainsi, bien que la déchéance du terme ait été déclarée non écrite, les créances échues demeurent exigibles, ce qui signifie que le créancier peut toujours réclamer le paiement des sommes dues.

Quelles sont les implications de la clause d’exigibilité dans le contrat de prêt ?

La clause d’exigibilité, figurant à l’alinéa 8 de l’article VIII du contrat de prêt, stipule que toutes les sommes prêtées deviennent immédiatement exigibles en cas de non-paiement.

Cependant, le tribunal a déclaré cette clause comme étant abusive, en vertu de l’article L.212-1 du Code de la consommation, qui interdit les clauses créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.

L’article L.212-1 précise que :

« Dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. »

Ainsi, la clause d’exigibilité, qui ne prévoyait pas de mise en demeure préalable, a été déclarée non écrite, ce qui empêche le créancier de réclamer le paiement immédiat des sommes dues en cas de non-paiement.

Quelles sont les conditions pour la saisie immobilière dans cette affaire ?

Les conditions pour la saisie immobilière sont régies par les articles L.311-2 et L.311-6 du Code des procédures civiles d’exécution.

Ces articles stipulent que le créancier doit justifier d’un titre exécutoire pour procéder à la saisie. Dans cette affaire, le créancier a présenté un acte notarié en date du 18 juin 2019, qui constitue un titre exécutoire valide.

L’article L.311-2 précise que :

« Le créancier peut obtenir l’exécution forcée de son titre exécutoire. »

De plus, l’article L.311-6 indique que :

« Le créancier doit justifier de l’existence d’une créance exigible. »

Dans ce cas, le tribunal a constaté que les conditions étaient réunies, permettant ainsi la vente forcée des biens immobiliers saisis.

Quelles sont les conséquences financières pour les débiteurs dans cette décision ?

Les débiteurs, Monsieur [J] [T] et Madame [O] [K], se voient condamnés à payer les sommes dues au titre des prêts immobiliers, soit 3 780,39 euros pour le prêt DD13936788 et 10 400,60 euros pour le prêt DD13936790.

Ces montants incluent les intérêts et accessoires, conformément aux termes des contrats de prêt.

Le tribunal a également mentionné que les dépens de la procédure seraient considérés comme frais privilégiés de vente, ce qui signifie que ces frais seront réglés en priorité lors de la vente des biens saisis.

En outre, l’article 700 du Code de procédure civile, qui permet au tribunal d’allouer des frais d’avocat à la partie gagnante, n’a pas été appliqué dans cette affaire, ce qui signifie que chaque partie devra supporter ses propres frais.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE – AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ST DENIS

MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/02160 – N° Portalis DB3Z-W-B7H-GLNQ

NAC : 50F

JUGEMENT CIVIL
DU 26 NOVEMBRE 2024

DEMANDEURS

M. [O] [V]
[Adresse 1]
[Localité 10]
Rep/assistant : Maître Rechad PATEL de la SELARL PATEL AVOCATS, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

S.C.C.V RIVIERA
[Adresse 2]
[Localité 10]
Rep/assistant : Maître Rechad PATEL de la SELARL PATEL AVOCATS, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

S.A.R.L. DIRECTE PATRIMOINE
[Adresse 2]
[Localité 10]
Rep/assistant : Maître Rechad PATEL de la SELARL PATEL AVOCATS, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

S.C. C.G LES VOILES D’OR
[Adresse 2]
[Localité 10]
Rep/assistant : Maître Rechad PATEL de la SELARL PATEL AVOCATS, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DÉFENDEURS

M. [J] [A]
[Adresse 3]
[Localité 10]
Rep/assistant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Mme [P] [A]
[Adresse 4]
[Localité 9]
Rep/assistant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Mme [I] [A]
[Adresse 6]
[Localité 8]
Rep/assistant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Mme [X] [C]
[Adresse 3]
[Localité 10]
Rep/assistant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

Copie exécutoire délivrée le : 26.11.2024
CCC délivrée le :
à Me Laurent BENOITON, Maître Rechad PATEL de la SELARL PATEL AVOCATS

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Le Tribunal était composé de :

Madame Sophie PARAT, Juge Unique
assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière

LORS DES DÉBATS

L’affaire a été évoquée à l’audience du 14 Octobre 2024.

LORS DU DÉLIBÉRÉ ET DU PRONONCÉ

A l’issue des débats, les parties présentes et leurs conseils ont été avisés que le jugement serait mis à leur disposition le 26 Novembre 2024.

JUGEMENT : Contradictoire, du 26 Novembre 2024 , en premier ressort

Prononcé par mise à disposition par Madame Sophie PARAT, Vice-présidente assistée de Madame Isabelle SOUNDRON, greffière

En vertu de quoi, le Tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit :

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES:

Un compromis portant sur les parcelles cadastrées EO [Cadastre 5] et EO [Cadastre 7] situes [Adresse 3] à [Localité 10], appartenant à Madame [C] et ses enfants a été signé le 13 avril 2021 pour un prix de 850 000 euros, en l’étude de Me [N] à [Localité 11], au bénéfice de la société civile Les Voiles d’or, représentée par la société Direct Patrimoine.

Le compromis notarié stipulait plusieurs conditions suspensives particulières, notamment l’une liée à l’obtention d’un permis de construire purgé de tous recours et retrait administratif/déféré préfectoral, par l’acquéreur, dans les huit mois.

En revanche, aucune condition suspensive d’obtention de prêt n’était stipulée. Aucun dépôt de garantie n’était non plus prévu.

Le compromis prévoyait la réitération par acte authentique au plus tard le 15 décembre 2021.

Un avenant a été signé le 7 décembre 2021, notamment pour prévoir qu’une avance de 10 000 euros comptant serait versée à chacun des vendeurs avant la signature de l’acte authentique, et pour reporter au 2 mai 2022 la date butoir de signature de l’acte authentique de vente.

Aucun acte authentique de vente n’a jamais été signé entre les parties.

Par actes de commissaire de justice en date des 30 mai 2023, 12 juin 2023 et 23 juin 2023, la SCCG Les voiles d’or, la société Directe Patrimoine, la SCCV RIVIERA et Monsieur [O] [V] ont fait assigner Madame [X] [C], Madame [I] [A], Madame [P] [A] et Monsieur [J] [A] devant le tribunal judiciaire aux fins de les voir condamner à les indemniser de leurs divers préjudices au titre d’une rupture brutale des pourparlers contractuels.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées électroniquement le 2 mai 2024, ils demandent au tribunal de:
– Condamner les consorts [A] à payer à la société Riviera la somme de 710 740,18 euros à titre de dommages et intérêts en remboursement des frais engagés au cours des pourparlers,
– Condamner les consorts [A] à payer à Monsieur [V] la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,
– Condamner les consorts [A] à payer à la SCCG Les Voiles d’or la somme de 300 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi,
– Condamner les consorts [A] à payer à Monsieur [V] la somme de 600 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance subie,
– Condamner les consorts [A] à payer à la société Direct Patrimoine la somme de 40 000 euros au titre du dépôt de garantie irrégulièrement conservé,
– Rejeter les demandes reconventionnelles formulées par les consorts [A],
– Condamner les consorts [A] à payer à :
– La société Riviera la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– La société Les Voiles d’or la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– La société Direct Patrimoine la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
– Monsieur [V] la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
– Condamner les consorts [A] aux entiers dépens.

Au soutien de leurs prétentions, ils font valoir que les consorts [A] auraient manqué à la bonne foi dans la conduite puis la rupture des négociations précontractuelles en janvier 2023. Ils reprochent à Madame [A] d’avoir refusé de fournir à monsieur [V] le plan de bornage qu’elle était tenue de communiquer en vertu du compromis signé. Ils lui reprochent encore d’avoir dénoncé en janvier 2023 la caducité du compromis sans respecter les formes prévues et sans justifier d’une quelconque défaillance de l’acquéreur.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées électroniquement le 22 août 2024, les consorts [A] demandent au tribunal de:
A TITRE PRINCIPAL,
REJETER l’ensemble des demandes de la SCCG LES VOILES D’OR, la SCCV RIVIERA, la SARL DIRECTE PATRIMOINE et Monsieur [O] [V];
A TITRE RECONVENTIONNEL,
CONDAMNER la SCCG LES VOILES D’OR à payer la somme de 42 500 euros en application de la clause pénale spécifiée aux compromis de vente du 13 avril 2021 et demeurée inchangée par l’avenant au compromis en date du 7 décembre 2021;
CONDAMNER la SCCG LES VOILES D’OR à verser aux consorts [A] les sommes de :
– 60 000 euros au titre du préjudice subi lié à la perte de chance de vendre leurs biens pendant toute l’immobilisation ;
– 40 000 euros au titre des préjudices de jouissance lié de la parcelle cadastrée EO [Cadastre 7],
des préjudices financiers, environnemental et moral subi ;
– 13 000 euros au titre du préjudice financier subi lié à l’imposition des intérêts de retard dus aux impôts ;
EN TOUT ETAT DE CAUSE,
CONDAMNER la SCCG LES VOILES D’OR, la SCCV RIVIERA, la SARL DIRECTE PATRIMOINE et monsieur [O] [V] à verser aux consorts [A] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

En défense, ils soutiennent d’une part qu’aucun manquement à la bonne foi dans les négociations précontractuelles ne saurait leur être reproché alors qu’un compromis de vente avait été signé, rendant le moyen fondé par les demandeurs sur l’article 1112 du code civil inopérant. Ils soutiennent d’autre part que leur décision de dénoncer le compromis comme étant caduc est motivée par la défaillance de l’acquéreur qui n’a pas obtenu son permis de construire dans les délais impartis. Ils ajoutent enfin que l’obstruction alléguée n’est pas justifiée, sachant que le permis de construire a été obtenu, quoique hors délai, et sachant que l’absence de transmission du document de bornage n’a jamais été invoquée pour justifier de la prorogation des délais.
A titre reconventionnel, ils invoquent les manquements de l’acquéreur à ses obligations contractuels, en ayant déposé sa demande de permis hors délais, en l’ayant obtenu hors délais, en lien avec des choix opérationnels indépendants des vendeurs. Outre l’application de la clause pénale, ils demandent la réparation de plusieurs autres préjudices disctincts.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des moyens et arguments développés au soutien des prétentions.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 octobre 2024. Les parties ont été autorisées à déposer leur dossier au greffe le 14 octobre 2024.

Les conseils des parties ont été informés que le jugement serait mis à disposition au greffe à la date du 26 novembre 2024, conformément aux dispositions de l’article 450 du Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la rupture brutale des négociations précontractuelles reprochée aux consorts [A]

Aux termes de l’article 1112 du code civil: “L’initiative, le déroulement et la rupture des négociations précontractuelles sont libres. Ils doivent impérativement satisfaire aux exigences de la bonne foi.
En cas de faute commise dans les négociations, la réparation du préjudice qui en résulte ne peut avoir pour objet de compenser ni la perte des avantages attendus du contrat non conclu, ni la perte de chance d’obtenir ces avantages.”

En l’espèce, les demandes, en ce qu’elles sont fondées sur ces dispositions, qui n’ont vocation à s’appliquer qu’en amont de la conclusion du contrat, au stade des négociations sur les termes de celui-ci, ne sauraient de toute évidence prospérer alors que les parties ont signé un compromis de vente notarié, qui a retenu l’accord sur la chose et le prix et fixé diverses conditions suspensives.

Pour ce seul motif et sans qu’il soit besoin d’examiner les griefs adressés aux consorts [A], les demandes principales soumises au tribunal seront rejetées.

Sur les demandes reconventionnelles:

* au titre de la clause pénale:

Aux termes de l’article 1231-5 du code civil: “Lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
Lorsque l’engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d’office, à proportion de l’intérêt que l’exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l’application de l’alinéa précédent.
Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite.
Sauf inexécution définitive, la pénalité n’est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure.”

En l’espèce, le compromis de vente stipulait en page 9 qu’ “au cas où, toutes les conditions relatives à l’exécution des présentes seraient remplies, et dans l’hypothèse où l’une des parties ne régulariserait pas l’acte authentique ne satisfaisant pas ainsi aux obligations alors exigibles, elle devra verser à l’autre la somme de 42 500 euros à titre de dommages et intérêts”.

Néanmoins, en l’espèce, et comme les défendeurs ne manquent pas de le relever eux-même, l’acquéreur n’a pas rempli l’ensemble des conditions relatives à l’exécution du compromis, puisque la demande de permis de construire a été déposée hors délai (le 5 novembre 2021 au lieu du 15 juillet 2021 au plus tard) et que le permis de construire a été obtenu hors délai (le 20 juillet 2022, au lieu du 2 mai 2022 selon les termes de l’avenant, et encore il ne s’agit pas d’un permis purgé des recours). En conséquence, l’ensemble des conditions relatives à l’exécution du compromis de vente n’ayant pas été correctement réalisées, les vendeurs ne sauraient invoquer l’application de la clause pénale.

* au titre de la responsabilité contractuelle:

Aux termes de l’article 1231-1 du code civil: “Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.”

En l’espèce, ainsi qu’il vient d’être dit, il est établi que l’acquéreur n’a pas exécuté ses obligations conformément aux stipulations contractuelles, en déposant sa demande de permis de construire avec plus de trois mois de retard, en obtenant un permis de construire hors délai, et en ne proposant toujours pas de réitérer la vente en décembre 2022 en invoquant des difficultés à la fois techniques (liées au raccordement au réseau d’eaux usées et à l’avis de la CINOR) et financières pour solliciter un énième délai.

Par conséquent, sa responsabilité contractuelle est engagée.

S’agissant des divers préjudices invoqués, durant tout le temps écoulé entre la signature du compromis de vente et au moins jusqu’à la date butoir pour la réitération du compromis fin mai 2022, voire même jusqu’en janvier 2023 (courrier recommandé pour dénoncer la caducité du compromis), les biens ont été immobilisés dans l’attente de la réitération de l’acte de vente. Par conséquent, le principe de la perte de chance de vendre leurs biens est établi. Néanmoins, faute d’être étayée par des pièces qui en donneraient une consistance plus précise – telle qu’une ou plusieurs offres d’achat qui auraient été faites sur la période écoulée, ou que la justification de démarches auprès d’une agence immobilière pour la remise en vente du bien, cette perte de chance sera compensée par l’allocation d’une somme fixée à 40 000 euros.

En outre, le préjudice de jouissance consistant à la fois en un préjudice moral et en un préjudice lié au nettoyage des parcelles en cause est également établi. Les opérations de nettoyage, impliquant l’usage d’une pelle à chenille, sont admises par Monsieur [V] dans un courrier électronique du 4 juillet 2021 adressé à l’avocat de la SARL Colline des Camélias (pièce 10 des défendeurs) puis dans un courrier adressé à Maître [W] le 23 janvier 2023 (pièce 14 des demandeurs). Le compromis de vente ne contenait pourtant aucune autorisation donnée à l’acquéreur pour de telles opérations et aucune pièce ne justifie d’une telle autorisation, de sorte que le préjudice qui découle de ces opérations doit être réparé par la SCCG Les Voiles d’Or. Elle sera donc condamnée à verser la somme de 20 000 euros aux vendeurs à ce titre.

En revanche, les intérêts de retard dus aux impôts, qui ne sont justifiés par aucune pièce, ne sauraient donner lieu à l’allocation d’aucune indemnité.

Sur les demandes annexes :

Les demandeurs, qui perdent leur procès, seront condamnés in solidum aux dépens, ainsi qu’à verser la somme globale de 4 000 euros aux défendeurs.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal,

REJETTE l’ensemble des demandes indemnitaires dirigées contre Madame [X] [C] veuve [A], Madame [I] [A], Madame [P] [A] et Monsieur [J] [A],

REJETTE la demande de condamner Madame [X] [C] veuve [A], Madame [I] [A], Madame [P] [A] et Monsieur [J] [A] à restituer à la SCCG Les Voiles d’Or la somme de 40 000 euros,

REJETTE la demande reconventionnelle formulée au titre de la clause pénale,

CONDAMNE la SCCG Les Voiles d’Or à payer à Madame [X] [C] veuve [A], Madame [I] [A], Madame [P] [A] et Monsieur [J] [A] la somme de 40 000 (quarante mille) euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance de vendre leurs biens immobiliers,

CONDAMNE la SCCG Les Voiles d’Or à payer à Madame [X] [C] veuve [A], Madame [I] [A], Madame [P] [A] et Monsieur [J] [A] la somme de 20 000 (vingt mille) euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance,

CONDAMNE in solidum la SCCG Les voiles d’or, la société Directe Patrimoine, la SCCV RIVIERA et Monsieur [O] [V] aux dépens,

CONDAMNE in solidum la SCCG Les voiles d’or, la société Directe Patrimoine, la SCCV RIVIERA et Monsieur [O] [V] à payer la somme globale de 4 000 (quatre mille) euros à Madame [X] [C] veuve [A], Madame [I] [A], Madame [P] [A] et Monsieur [J] [A],

REJETTE toutes les demandes plus amples ou contraires des parties,

RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit,

La greffière La Présidente


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