Compétence juridictionnelle et qualification contractuelle : enjeux d’une convention d’occupation précaire.

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Compétence juridictionnelle et qualification contractuelle : enjeux d’une convention d’occupation précaire.

L’Essentiel : En mars 2024, le juge de la mise en état a rejeté l’exception d’incompétence de Monsieur [B] [X] et a renvoyé l’affaire à une audience ultérieure, tout en le condamnant à verser des frais à l’ONF. Ce dernier a interjeté appel. Monsieur [B] [X] a demandé la réforme de cette ordonnance, tandis que l’ONF a sollicité la jonction des procédures et la confirmation de la décision. La cour a statué sur la compétence, concluant que le contrat d’occupation ne relevait pas des baux d’habitation, justifiant ainsi la compétence du tribunal judiciaire et confirmant l’ordonnance contestée.

Contexte de l’affaire

Par contrat signé le 17 février 2014, le préfet de la Réunion et l’Office national des forêts (ONF) ont accordé à Monsieur [B] [X] un droit d’occupation d’un terrain en forêt domaniale littorale. En octobre 2016, l’ONF a résilié ce contrat, arguant que Monsieur [B] [X] ne résidait pas effectivement sur le terrain.

Procédures judiciaires engagées

Monsieur [B] [X] a contesté cette résiliation en saisissant le tribunal administratif de Saint-Denis, tout en introduisant une action devant le tribunal judiciaire. En avril 2020, le juge a suspendu la procédure en attendant la décision administrative. En juillet 2022, le Conseil d’État a statué que le litige relevait de la compétence du juge judiciaire.

Décisions du tribunal judiciaire

En mars 2024, le juge de la mise en état a rejeté l’exception d’incompétence soulevée par Monsieur [B] [X] et a renvoyé l’affaire à une audience ultérieure. Il a également condamné Monsieur [B] [X] à verser des frais à l’ONF. Ce dernier a interjeté appel de cette décision.

Appels et demandes des parties

Monsieur [B] [X] a demandé à la cour de réformer l’ordonnance de mars 2024, de déclarer le juge des contentieux de la protection compétent, et de condamner l’ONF à lui verser des frais. De son côté, l’ONF a demandé la jonction des procédures et la confirmation de l’ordonnance contestée, tout en sollicitant le rejet des demandes de Monsieur [B] [X].

Analyse de la compétence

La cour a examiné la compétence du tribunal en se basant sur la nature du contrat d’occupation. Elle a noté que le contrat ne relevait pas des dispositions de la loi sur les baux d’habitation, ce qui justifiait la compétence du tribunal judiciaire. L’exception d’incompétence a été rejetée.

Conclusion de la cour

La cour a ordonné la jonction des procédures, déclaré irrecevable la première déclaration d’appel, et confirmé l’ordonnance du juge de la mise en état. Monsieur [B] [X] a été condamné aux dépens et à verser des frais à l’ONF.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de recevabilité de la demande d’annulation des résolutions de l’assemblée générale des copropriétaires ?

La recevabilité de la demande d’annulation des résolutions adoptées lors de l’assemblée générale des copropriétaires est régie par plusieurs dispositions du Code de procédure civile et de la loi du 10 juillet 1965.

Selon l’article 42 de la loi du 10 juillet 1965, tout copropriétaire peut contester les décisions de l’assemblée générale.

Il est également précisé que la contestation doit être faite dans un délai de deux mois à compter de la notification des résolutions, conformément à l’article 42-1 de la même loi.

Dans le cas présent, M. [O] a saisi le tribunal par acte d’huissier le 30 janvier 2024, ce qui est dans le délai imparti.

De plus, l’article 455 du Code de procédure civile stipule que le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif, ce qui implique que M. [O] a dû formuler clairement ses demandes pour qu’elles soient examinées.

Ainsi, la demande de M. [O] est déclarée régulière, recevable et bien fondée, car elle respecte les délais et les formes prescrites par la loi.

Quels sont les motifs d’annulation des résolutions n° 17, 18, 19, 20, 21, 22 et 23 ?

Les résolutions n° 17, 18, 19, 20, 21, 22 et 23 ont été annulées pour non-respect des dispositions de l’article 6-2 de la loi du 10 juillet 1965.

Cet article précise que seuls les copropriétaires concernés par les parties communes spéciales peuvent voter sur les résolutions les concernant.

En l’espèce, les résolutions n° 17 et 18, qui portent sur la cession de parties communes spéciales, ont été votées par l’ensemble des copropriétaires, alors que seuls les copropriétaires des lots n° 10 à 19 auraient dû participer au vote.

Le procès-verbal de l’assemblée générale du 18 décembre 2023 atteste que tous les copropriétaires ont pris part aux votes, ce qui constitue une violation des règles de vote établies par la loi.

De plus, les résolutions n° 19 à 23 sont directement liées aux résolutions n° 17 et 18, et leur annulation est donc justifiée par l’illégalité des premières.

Ainsi, le tribunal a conclu que les résolutions n’avaient pas été valablement votées, entraînant leur annulation.

Quelles sont les conséquences financières de la décision du tribunal pour le syndicat des copropriétaires ?

La décision du tribunal a des conséquences financières significatives pour le syndicat des copropriétaires, notamment en ce qui concerne les frais et dépens de la procédure.

Conformément à l’article 696 du Code de procédure civile, le syndicat des copropriétaires, qui succombe dans ses prétentions, est condamné aux entiers dépens de l’instance.

De plus, le tribunal a décidé de condamner le syndicat à verser à M. [O] la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, qui prévoit la possibilité d’une indemnisation pour les frais non compris dans les dépens.

Cette somme est accordée en raison de la nature de la procédure et des circonstances de l’affaire, et elle vise à compenser les frais engagés par M. [O] pour faire valoir ses droits.

Enfin, l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 stipule que le copropriétaire qui obtient gain de cause est dispensé de toute participation aux frais de procédure, ce qui s’applique également à M. [O] dans cette affaire.

Quelles sont les implications de l’exécution provisoire du jugement ?

L’exécution provisoire du jugement est régie par l’article 514 du Code de procédure civile, qui dispose que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire, sauf disposition contraire.

Dans le cas présent, le tribunal a rappelé qu’aucune raison ne justifiait d’écarter l’exécution provisoire, ce qui signifie que les effets de la décision sont immédiats.

Ainsi, les résolutions annulées n’ont plus d’effet et le syndicat des copropriétaires doit se conformer à la décision du tribunal sans attendre l’issue d’un éventuel appel.

L’exécution provisoire permet donc à M. [O] de bénéficier rapidement des effets de la décision, notamment en ce qui concerne la restitution de ses droits en tant que copropriétaire.

Cela souligne l’importance de la protection des droits des copropriétaires dans le cadre des décisions prises en assemblée générale, garantissant ainsi une application rapide des décisions judiciaires.

Arrêt N°

PC

R.G : N° RG 24/00390 – N° Portalis DBWB-V-B7I-GBFT

[B] [X]

C/

Etablissement Public ONF DIRECTION REGIONALE DE L’OFFICE NATIONAL DES F ORETS

COUR D’APPEL DE SAINT-DENIS

ARRÊT DU 26 NOVEMBRE 2024

Chambre civile TGI

Appel d’une ordonnance rendue par le JUGE DE LA MISE EN ETAT DE SAINT-DENIS DE LA REUNION en date du 12 MARS 2024 suivant déclaration d’appel en date du 05 AVRIL 2024 rg n°: 19/00090

APPELANT :

Monsieur [R] [K] [B] [X]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Roberto OVA, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION

INTIMEE :

Etablissement Public ONF DIRECTION REGIONALE DE L’OFFICE NATIONAL DES F ORETS

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentant : Me Jean jacques MOREL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

DÉBATS : en application des dispositions des articles 778, 779 et 917 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 17 Septembre 2024 devant la cour composée de :

Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre

Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseilère

Conseiller : Mme Sophie PIEDAGNEL, Conseillère

Qui en ont délibéré après avoir entendu les avocats en leurs plaidoiries.

A l’issue des débats, le président a indiqué que l’arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition le 26 Novembre 2024.

Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le  26 Novembre 2024.

Greffier : Mme Véronique FONTAINE

LA COUR:

Par contrat du 17 février 2014, le préfet de la Réunion assisté de l’Office national des forêts (l’ONF) et Monsieur [R] [K] [B] [X] ont signé un contrat d’occupation de terrain en forêt domaniale littorale de [Localité 3]. Par courrier en date du 4 octobre 2016 ,le directeur de I’ONF a notifié à Monsieur [B] [X] la résiliation du contrat au motif que ce dernier ne résidait pas de manière effective et personnelle sur le terrain.

Monsieur [B] [X] a alors saisi le tribunal administratif de Saint-Denis afin de voir annuler cette décision de résiliation et en parallèle a saisi le tribunal judiciaire par assignation du 16 novembre 2018.

Par ordonnance du 20 avril 2020, le juge de la mise en état a ordonné un sursis à statuer dans l’attente de la décision de la juridiction administrative. Par arrêt du 20 juillet 2022, le Conseil d’État a jugé que le contentieux de l’occupation privative d’un domaine privé forestier relevait de la compétence du juge judiciaire et non du juge administratif.

Par conclusions d’incident, Monsieur [B] [X] a saisi le juge de la mise en état aux fins de juger que le tribunal judiciaire de Saint-Denis est incompétent et de renvoyer l’affaire au juge des contentieux de la protection près le tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion et de condamner l’ONF à lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l »article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Par ordonnance sur incident rendue le 12 mars 2024, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion a statué en ces termes :

 » REJETONS l’exception d’incompétence ;

RENVOYONS l’affaire et les parties à l’audience de mise en état électronique du 13 mai 2024 pour conclusions au fond de l’ONF ;

CONDAMNONS Monsieur [B] [X] à payer à l’ONF la somme de 1.200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNONS Monsieur [B] [X] aux dépens de l’incident. »

Par déclaration au greffe en date du 26 mars 2024, Monsieur [B] [X] a interjeté appel de cette décision. La procédure a été enregistrée sous les références RG-24-343.

L’affaire a été fixée à bref délai selon avis en date du 10 février 2024.

Puis, Monsieur [B] [X] a déposé une seconde déclaration d’appel enregistrée sous les références RG-24-390 par acte remis au greffe de la cour par RPVA le 5 avril 2024..

Autorisé par ordonnance du premier président en date du 12 avril 2024, suivant requête, l’appelant a signifié son assignation à jour fixe à l’ONF par acte de commissaire de justice délivré le 31 mai 2024, déposé au greffe de la cour le 5 juin 2024.

***

Selon son assignation, Monsieur [B] [X] demande à la cour de :

 » RÉFORMER totalement le dispositif de l`Ordonnance du 12 mars 2024.

DIRE ET JUGER compétent le juge des contentieux de la protection près le Tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion.

EN TOUT ETAT DE CAUSE,

CONDAMNER l’ONF à verser Monsieur [R] [K] [I] [X] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.  »

***

Selon le dispositif de ses uniques conclusions transmises par voie électronique le 12 septembre 2024, l’ONF demande à la cour de :

 » ORDONNER la jonction des procédures ayant pour numéros de RG : 24/00390 et RG 24/00343 ;

CONFIRMER dans toutes ses dispositions l’ordonnance du juge de la mise en état rendue le 12 mars 2024 (RG19/00090) ;

DEBOUTER Monsieur [B] [X] de toutes ses demandes, fins et prétentions ;

DIRE ET JUGER qu’il n’existe aucune erreur de qualification du contrat et qu’il ne s’agit pas d’un contrat d’habitation régi par la loi du 6 juillet 1989 ;

DIRE ET JUGER que le contrat litigieux est bien une convention d’occupation précaire signée à des fins d’occupation privée d’un bien du domaine public,

CONFIRMER le rejet de l’exception d’incompétence soulevée par Monsieur [B] [X],

CONDAMNER Monsieur [B] [X] à payer à PONF la somme de 15.000 euros au titre des frais d’instance d’appel (article 700 du code de procédure civile),

CONDAMNER Monsieur [B] [X] aux entiers dépens.  »

Par avis RPVA du 30 septembre 2024, la cour a invité l’appelant à compléter son dossier de plaidoirie en produisant toutes les pièces communiquées avec l’assignation à jour fixe, numérotées de 1 à 11 selon l’acte, dans le délai de HUIT JOURS.

Les pièces manquantes ont été remises au greffe de la cour dans le délai.

***

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l’exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS

A titre liminaire

La cour rappelle qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n’examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.

Elle n’est pas tenue de statuer sur les demandes de  » constatations  » ou de  » dire et juger  » lorsqu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.

Sur la demande de jonction :

Vu les articles 83 et 84, 795 du code de procédure civile,

En principe, la première déclaration d’appel est devenue irrecevable en raison de l’absence d’assignation à jour fixe et de saisie du premier président à cette fin.

Néanmoins, il résulte de la lecture du dossier de première instance que le greffe de la chambre civile du tribunal judiciaire de Saint-Denis a notifié la décision querellée par courrier du 8 avril 2024, postérieurement à la première déclaration d’appel.

En revanche la seconde déclaration d’appel est régulière puisque la procédure de l’assignation à jour fixe, autorisée par le premier président a bien été respectée.

En conséquence, la jonction des procédures sera ordonnée.

Mais la première déclaration d’appel sera déclarée irrecevable.

Exceptionnellement, l’affaire se poursuivra sous les références RG-24-390.

Sur la procédure :

L’instance a été introduite par Monsieur [B] [X] le 16 novembre 2018.

Par ordonnance du 20 avril 2020, le juge de la mise en état a ordonné un sursis à statuer dans l’attente de la décision de la juridiction administrative, qui s’est prononcée suivant un arrêt Conseil d’Etat en date du 20 juillet 2022.

Si en 2018, une exception d’incompétence pouvait être soulevée aux fins d’invoquer la compétence exclusive d’un tribunal d’instance, juridiction distincte du tribunal de grande instance, cette distinction a disparu depuis le 1er janvier 2020 en vertu de l’article 95 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, créant les fonctions de  » juge des contentieux de la protection » en vertu du nouvel article L. 213-4-1 et suivants du code de l’organisation judiciaire, affectés dans des tribunaux judiciaires ou directement au sein de leurs tribunaux de proximité.

Monsieur [B] [X] a soulevé cette exception d’incompétence en raison de la qualification du contrat litigieux au motif que, s’agissant d’un contrat relevant du régime du bail d’habitation l’examen du litige relève de la compétence exclusive du juge des contentieux de la protection.

Aux termes de l’article L. 213-4-4 du code de l’organisation judiciaire, le juge des contentieux de la protection connaît des actions dont un contrat de louage d’immeubles à usage d’habitation ou un contrat portant sur l’occupation d’un logement est l’objet, la cause ou l’occasion ainsi que des actions relatives à l’application de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 portant modification et codification de la législation relative aux rapports des bailleurs et locataires ou occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel et instituant des allocations de logement.

L’article L. 213-4-3 du même code prévoit que le juge des contentieux de la protection connaît des actions tendant à l’expulsion des personnes qui occupent aux fins d’habitation des immeubles bâtis sans droit ni titre.

Ainsi, même si la compétence du juge de proximité n’est pas exclusive, une partie peut invoquer les dispositions susvisées afin d’être jugée par son juge naturel.

L’exception d’incompétence est dès lors recevable.

Sur l’exception d’incompétence :

Pour rejeter l’exception d’incompétence, le premier juge a analysé la convention d’occupation litigieuse pour écarter la qualification de bail d’habitation et en déduire la compétence du tribunal judiciaire au lieu de celle du juge des contentieux de la protection.

Selon l’appelant, le juge de la mise en état a manifestement violé la loi en s`abstenant de vérifier l’existence de circonstances particulières de la qualification du contrat litigieux en contrat de concession.

Selon l’ONF, contrairement à ce que prétend Monsieur [B] [X], l’existence de circonstances particulières indépendantes de la volonté des parties a été vérifiée exhaustivement par le juge de la mise en état et l’a conduit en présence d’un faisceau d’indices lié à la libre révocabilité de l’autorisation d’occupation et à son caractère précaire à exclure la qualification de bail d’habitation et de conclure à l’exception d’incompétence.

Sur ce,

Vu les articles 6 et 9 du code de procédure civile, 1134 du code civil ;

Vu la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ;

L’arrêt du Conseil d’Etat en date du 20 juillet 2022 (n° 457616) a annulé l’arrêt de la cour administrative d’appel du 16 juillet 2021. Il dispose en son article 2 que  » les conclusions présentées par Monsieur [B] [X] devant le tribunal administratif de la Réunion sont rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.  »

Selon l’exposé de la convention d’occupation,  » la gestion et l’équipement de la forêt domaniale littorale de Saint Philippe ont été confié par l’État à l’ONF (‘).

Monsieur [B] [X] a sollicité l’autorisation de résider en forêt domaniale littorale de Saint Philippe, parcelle forestière Hab2 pour y établir son domicile d’habitation pour une durée de neuf ans à compter du 1er janvier 2014.

Le terrain concerné est compris dans un ensemble de parcelles occupées à des fins d’habitation depuis plusieurs décennies, pour des motifs sociaux et historiques.  »

La convention litigieuse stipule que  » le concessionnaire est autorisé à occuper à usage de domiciles d’habitation principale à l’exclusion de toute activité commerciale, artisanale ou industrielle le terrain désigné ci-après. Le concessionnaire doit y habiter effectivement et personnellement.

L’autorisation porte sur l’occupation d’un terrain d’une superficie de 900 m².

Est autorisé le maintien sur le terrain concédé d’une construction existante à usage d’habitation qui reste propriété du concessionnaire mais qui sera démolie et évacuée sans indemnité à l’expiration du contrat non renouvelé à moins qu’il ne soit incorporé au fond. Le concessionnaire s’engage à ne pas vendre la construction pendant la durée du contrat.  »

Le contrat prévoit le versement d’une redevance mensuelle par le concessionnaire, d’un montant de 3906,00 euros, révisable tous les trois ans, selon l’indice INSEE du coût de la construction.

Une clause de résiliation de plein droit est stipulée :

 » o En cas de manquement par le concessionnaire à une seule de ses obligations contractuelles, sans préjudice des dommages et intérêts qui pourraient être demandés par l’ONF. La résiliation interviendra après une mise en demeure d’avoir à remédier aux manquements constatés, restée infructueuse après un délai de 45 jours. Dans ce cas la résiliation sera notifiée au concessionnaire par lettre recommandée avec demande d’avis de réception et prendra effet trois mois après la signature de l’avis de réception.

o En cas de remise du terrain au service des domaines dans le cadre de la procédure foncière engagée par l’ONF, l’État et la commune concernant les terrains concédés situés en zone constructible des signatures du contrat de vente.

o En cas de décès du concessionnaire sans que la concession puisse passer à ses héritiers.  »

Cette clause s’achève par l’hypothèse d’une résiliation unilatérale par l’ONF:

 » Résiliation par l’ONF : l’ONF pourra prononcer unilatéralement la résiliation de la présente concession sans indemnité et sans préavis dans le cas où le bénéficiaire, pour quelque cause que ce soit, cesserait d’habiter sur le terrain concédé, transférerait ou cèderait à un tiers tout ou partie de son droit d’occupation en violation de l’article un paragraphe trois de la présente concession.  »

La clause IMPOTS ET TAXES prévoit que le concessionnaire doit supporter la taxe foncières sur le foncier bâti, outre la taxe d’habitation et la taxe d’enlèvement des ordures ménagères.

Enfin, aucune référence n’est stipulée dans l’acte à propos de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 dont les dispositions sont d’ordre public en vertu de son article 2 ainsi énoncé :

Le présent titre s’applique aux locations de locaux à usage d’habitation ou à usage mixte professionnel et d’habitation, et qui constituent la résidence principale du preneur, ainsi qu’aux garages, aires et places de stationnement, jardins et autres locaux, loués accessoirement au local principal par le même bailleur. La résidence principale est entendue comme le logement occupé au moins huit mois par an, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure, soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge au sens du code de la construction et de l’habitation.

Toutefois, ce titre ne s’applique pas :

1° Aux logements-foyers, à l’exception du premier alinéa de l’article 6 et de l’article 20-1 ;

2° Aux logements meublés, régis par le titre Ier bis ;

2° bis Aux logements meublés loués dans le cadre d’un bail mobilité, régis par le titre Ier ter ;

3° Aux logements attribués ou loués en raison de l’exercice d’une fonction ou de l’occupation d’un emploi et aux locations consenties aux travailleurs saisonniers, à l’exception de l’article 3-3, des deux premiers alinéas de l’article 6, de l’article 20-1 et de l’article 24-1.

L’appelant invoque un arrêt de la Cour de cassation (Civ. 3ème 06 juillet 2022 n° 21-18.450) qui ne correspond pas au présent litige puisqu’il s’agissait de la qualification d’un contrat, relevant de l’office du juge, après le déclassement du domaine public d’un bien occupé en vertu d’une convention précaire accordée par l’autorité administrative.

Or, en l’espèce, ni l’ONF ni l’appelant n’évoquent le déclassement du domaine public du bien occupé. L’action intentée par Monsieur [B] [X] vise à obtenir l’annulation de la résiliation de la convention par l’ONF au motif que le concessionnaire n’occuperait pas les lieux conformément à ses obligations.

A cet égard, la convention litigieuse contient de nombreuses clauses incompatibles avec les dispositions de la loi du 6 juillet 1989, notamment celles relatives aux conditions de résiliation du contrat, en particulier dans le cas de remise du terrain au service des domaines dans le cadre de la procédure foncière engagée par l’ONF, aux charges fiscales incombant au concessionnaire, à la durée de la convention, aux conditions de l’indexation de la redevance d’un montant très éloigné du montant ordinaire d’un loyer, de l’intention initiale de l’ONF de démolir la construction existante à l’issue du contrat, de l’absence de renouvellement tacite de la convention.

Ainsi, en l’absence de déclassement du domaine public de la parcelle concédée à l’appelant, celui-ci ne démontre pas que la convention litigieuse relève de l’application de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 réglant les rapports entre bailleurs et locataires.

Compte tenu de la nature précaire de cette convention d’occupation, le premier juge a justement écarté l’exception d’incompétence soulevée par l’appelant.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Monsieur [B] [X] succombant, il convient de le condamner aux dépens d’appel.

Monsieur [B] [X] sera condamné à payer à l’ONF la somme de 1.500 euros au titre de ses frais irrépétibles en appel, en plus de ceux déjà alloués en première instance au titre de l’incident.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe conformément à l’article 451 alinéa 2 du code de procédure civile,

ORDONNE la jonction des procédures enregistrées sous les références RG-24-343 et 24-390 ;

DIT que l’affaire se poursuivra sous les références RG-24-390 ;

DECLARE IRRECEVABLE l’appel enregistré selon déclaration d’appel enregistrée sous les références RG-24-343 ;

DECLARE RECEVABLE l’appel enregistré selon déclaration d’appel enregistrée sous les références RG-24-390 ;

CONFIRME l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

CONDAMNE Monsieur [R] [K] [B] [X] aux dépens ;

CONDAMNE Monsieur [B] [X] à payer à l’ONF la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Véronique FONTAINE greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


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