Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Riom
Thématique : Réciproque des obligations de cautionnement : enjeux de preuve et disproportion des engagements financiers
→ RésuméL’ordonnance de clôture, rendue le 12 septembre 2024, marque la fin des débats. M. [F] [G] conteste le paiement de M. [A] [X] envers Mme [N] [Y] [J], soulignant un jugement de 2015 qui condamne M. [G] à une somme non réglée. M. [A] [X] prétend avoir payé par compensation, mais la cour note qu’il ne prouve pas ce paiement. M. [G] demande à être déchargé de son obligation de cautionnement, mais la cour rejette cette demande, concluant que la disproportion de son engagement n’est pas justifiée. M. [A] [X] est condamné à verser des frais à M. [F] [G].
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COUR D’APPEL
DE RIOM
Troisième chambre civile et commerciale
ARRET N°
DU : 27 Novembre 2024
N° RG 23/00965 – N° Portalis DBVU-V-B7H-GAPU
SN
Arrêt rendu le vingt sept Novembre deux mille vingt quatre
Sur APPEL d’une décision rendue le 02 mai 2023 par le Tribunal judiciaire de CLERMONT-FERRAND (RG n° 21/0460 ch1 cab2)
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre
Mme Sophie NOIR, Conseiller
Madame Anne Céline BERGER, Conseiller
En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l’appel des causes et du prononcé
ENTRE :
M. [F] [G]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Christine BAUDON, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro C-63113-2023-00690 du 17/08/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de CLERMONT-FERRAND)
APPELANT
ET :
M. [A] [X]
Né le [Date naissance 1] 1946 à [Localité 5] (73)
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentants : Me Christine PARET, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
(postulant) et Me Vincent DURAND de la SELARL ACTIVE AVOCATS, avocat au barreau de LYON (plaidant)
INTIMÉ
DÉBATS :
Après avoir entendu en application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, à l’audience publique du 10 Octobre 2024, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Madame NOIR, magistrat chargé du rapport, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré.
ARRET :
Prononcé publiquement le 27 Novembre 2024 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par contrat du 17 janvier 1992 la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Savoie a accordé à la société Le Versoyen un prêt d’un montant de 400’000 francs pour financer les travaux d’aménagement d’un commerce de bar, self-service dans la commune de [Localité 6] (Savoie).
Le remboursement de ce prêt était garanti par un engagement de caution solidaire des associés de la société Le Versoyen : M. [A] [X], Mme [N] [Y] [J], M. [F] [G], M. [T] [V] et M. [P] [K] à hauteur de 400’000 francs chacun, en principal, intérêts, frais et accessoires.
La société Le Versoyen a été placée en liquidation judiciaire le 13 juillet 1993.
Par jugement du 14 novembre 1995, le tribunal judiciaire d’Albertville a condamné solidairement M. [A] [X], Mme [N] [Y] [J], M. [T] [V], M. [P] [K] et M. [F] [G], en leurs qualités de cautions solidaires de la société Le Versoyen, à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Savoie la somme de 376’179,73 francs, outre intérêts au taux conventionnel à compter du 28 juillet 1993.
En parallèle et par jugement du 18 septembre 1996, le tribunal de grande instance d’Annecy a condamné Mme [N] [Y] [J] à payer à M. [A] [X] les sommes de 246’000 francs et 52’500 francs en paiement de deux chèques remis en 1991 pour s’associer dans la société Le Versoyen.
Par jugement du 20 octobre 2015, le tribunal de Grande Instance de Clermont-Ferrand a condamné M. [F] [G] à payer à Mme [N] [Y] [J] la somme de 153 444,18 euros au titre de son engagement de caution.
Ce jugement a donné lieu à une mesure d’exécution forcée au titre de laquelle M. [G] a payé la somme de 6700 euros au 2 décembre 2021.
Par jugement du 5 mai 2017 le tribunal de grande instance d’Albertville, saisi par Mme [N] [Y] [J] d’une demande de condamnation de M. [X] à hauteur de 237 448,69 euros a :
– dit que le contrat conclu entre Mme [N] [Y] [J] et la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Savoie constitue une cession de créance
– dit que l’action de Mme [N] [Y] [J] à l’encontre de M. [A] [X], en tant que caution solidaire, est prescrite
– dit que l’ensemble des prétentions de Mme [N] [Y] [J] doit être déclaré irrecevable
– déclarer le jugement commun et opposable à M. [F] [G], intervenant forcé à la procédure.
Par acte sous seing privé du 18 décembre 2000 la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Savoie a cédé sa créance en principal, intérêts, frais et accessoires à hauteur de 685 341,97 francs (en valeur au 31 octobre 2000) à Mme [N] [Y] [J].
Entre-temps, M. [A] [X] a mis en ‘uvre diverses voies d’exécution, notamment une saisie immobilière d’un terrain appartenant à Madame [Y] [J] située à [Localité 7] (31).
Par jugement d’orientation du 10 avril 2014, le juge de l’exécution a, en substance, rejeté l’exception de compensation opposée par Madame [N] [Y] [J] avec la créance de M. [X] à son encontre, a dit que cette dernière devait être retenue pour un montant de 136 266,53 euros arrêtés au 3 avril 2014 et a ordonné la vente forcée de l’immeuble.
M. [X] a été déclaré adjudicataire du bien saisi par jugement du juge de l’exécution du 3 juillet 2014 pour la somme de 80 000 euros.
Par arrêt du 20 décembre 2019 statuant sur renvoi d’une seconde cassation dans l’affaire objet du jugement d’orientation du 10 avril 2014, la cour d’appel de Bordeaux a :
– confirmé le jugement d’orientation du 10 avril 2014
– débouté Mme [N] [Y] [J] de sa demande de dommages et intérêts.
Par arrêt rendu par défaut le 18 janvier 2022 entre Mme [N] [Y] [J], M. [A] [X] et M. [F] [G], la cour d’appel de Chambéry, saisie par Mme [Y] [J] d’un appel contre le jugement du tribunal de grande instance d’Albertville du 5 mai 2017 a :
– confirmé le jugement déféré en ce qu’il a :
– dit que le contrat conclu entre Mme [N] [Y] [J] et la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de la Savoie du 29 novembre 2000 constitue une cession de créance
– déclaré le jugement commun et opposable à M. [F] [G]
– réformé le jugement pour le surplus et statuant à nouveau :
– constaté la compensation légale entre les créances réciproques de Mme [N] [Y] [J] et M. [A] [X] dans les termes de l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux, laissant après compensation légale, une créance en faveur de M. [A] [X]
– débouté en conséquence Mme [N] [Y] [J] de ses demandes.
Le 3 décembre 2021, M. [A] [X] a assigné M. [F] [G] devant le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand pour obtenir la condamnation de ce dernier, en sa qualité de cofidéjusseur, au paiement d’une somme de 16’711,15 euros à titre de principal, outre 542,79 euros au titre des intérêts depuis le 10 juin 2021 arrêté au 6 juillet 2022.
Par jugement du 2 mai 2023, le tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand a :
– condamné M. [F] [G] à payer à M. [A] [X] la somme de 16’168,36 euros au titre de son cautionnement du 17 janvier 1992
– débouté M. [A] [X] du surplus de ses demandes
– débouté M. [F] [G] de l’ensemble de ses demandes
– condamné M. [F] [G] à payer à M. [A] [X] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– rejeté la demande de M. [F] [G] au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– condamné M. [F] [G] aux dépens
– accordé à Maître Christine Paret, Avocat, le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile
– débouté les parties de leurs demandes de plus amples ou contraires.
Le tribunal judiciaire a considéré, notamment, que :
– la créance de Mme [Y] [J] à l’égard de M. [A] [X] s’élève, selon jugement du tribunal de grande instance d’Albertville du 14 novembre 1995 à la somme de 376 179,73 francs, soit 57 348,23 euros
– une compensation entre les créances réciproques de Mme [Y] [J] et M. [A] [X] est intervenue aux termes de l’arrêt du 20 décembre 2019 de la cour d’appel de Bordeaux et, indépendamment de l’issue de la procédure de distribution du prix de vente de l’immeuble appartenant à Mme [Y] [J], M. [A] [X] a vu sa créance fixée par rapport à la propre créance de Mme [Y] [J]
– M. [F] [G] n’est pas fondé à opposer à M. [A] [X] le fait qu’il continue de s’acquitter de sa dette auprès de Mme [N] [Y] [J] dans la mesure où celle-ci n’est pas partie à l’instance et que M. [G] ne pouvait ignorer le dispositif de l’arrêt de la cour d’appel de Chambéry du 18 janvier 2022 qui a constaté ‘la compensation légale entre les créances réciproque de Mme [Y] [J] et de M. [A] [X] dans les termes de l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux, laissant après compensation légale une créance en faveur de M. [A] [X]’ puisque cet arrêt lui a été déclaré commun et opposable
– M. [F] [G] qui invoque l’existence d’un engagement de caution manifestement disproportionné eu égard à ses revenus ne justifie pas du montant de son patrimoine à la date du cautionnement, ni des droits qu’il détenait dans la société Le Versoyen à cette époque
– M. [A] [X] ne peut solliciter des intérêts depuis le 10 juin 2021 dans la mesure où l’arrêt de la cour d’appel de Chambéry est daté du 18 janvier 2022.
Par déclaration du 16 juin 2023 M. [F] [G] a interjeté appel de ce jugement.
Par conclusions notifiées le 24 janvier 2024 par RPVA, M. [F] [G] demande à la cour de :
– infirmer le jugement du 2 mai 2023 en toutes ses dispositions
Statuant à nouveau
– débouter M. [X] de son action en paiement
En tout état de cause
– juger manifestement disproportionné son engagement de caution au regard de sa situation financière de l’époque
– le décharger en totalité de son obligation de cautionnement
– débouter M. [X] de toutes ses demandes, fins et conclusions
– débouter M. [X] de son appel incident
– condamner M. [X] à lui payer la somme de 4000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Par conclusions notifiées le 6 septembre 2024 par RPVA, M. [A] [X] demande à la cour de :
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a :
– condamné M. [F] [G] à payer à M. [A] [X] la somme de 16’168,36 euros au titre de son cautionnement du 17 janvier 1992
– débouté M. [F] [G] de l’ensemble de ses demandes ;
– infirmer le jugement déféré en ce qu’il a rejeté la demande de condamnation au paiement d’intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure de M. [F] [G] et jusqu’au complet paiement ;
En conséquence :
– condamner M. [F] [G] à payer à M. [A] [X] la somme totale de 18’765,39 euros ventilés comme suit :
– 16 168,36 euros à titre principal
– 2 597,03 euros au titre des intérêts depuis le 10 juin 2021 et arrêtés au 6 septembre 2024 (à parfaire)
En tout état de cause :
– rejeter toute demande, fin aux conclusions contraires de M. [F] [G] ;
– condamner M. [F] [G] à payer à M. [A] [X] la somme de 4 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– dire que, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, Maître Christine Paret pourra recouvrer directement les frais dont elle a fait l’objet sans avoir reçu provision.
Par ordonnance du 7 décembre 2023, le conseiller de la mise en état a rejeté une demande de radiation de l’affaire du rôle.
Il sera renvoyé pour l’exposé complet des demandes et moyens des parties, à leurs dernières conclusions.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 septembre 2024.
MOTIFS :
Sur la demande en paiement :
Selon l’article 2033 du code civil dans sa version applicable en la cause, : ‘ Lorsque plusieurs personnes ont cautionné un même débiteur pour une même dette, la caution qui a acquitté la dette, a recours contre les autres cautions, chacune pour sa part et portion ;
Mais ce recours n’a lieu que lorsque la caution a payé dans l’un des cas énoncés en l’article précédent.’
L’article 2032 du code civil dans sa version applicable au litige dispose : ‘ La caution, même avant d’avoir payé, peut agir contre le débiteur, pour être par lui indemnisée :
1° Lorsqu’elle est poursuivie en justice pour le paiement ;
2° Lorsque le débiteur a fait faillite, ou est en déconfiture ;
3° Lorsque le débiteur s’est obligé de lui rapporter sa décharge dans un certain temps ;
4° Lorsque la dette est devenue exigible par l’échéance du terme sous lequel elle avait été contractée ;
5° Au bout de dix années, lorsque l’obligation principale n’a point de terme fixe d’échéance, à moins que l’obligation principale, telle qu’une tutelle, ne soit pas de nature à pouvoir être éteinte avant un temps déterminé.’
Selon l’article 1353 du code civil : ‘Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.’
Au soutien de son appel, M. [F] [G] fait valoir que :
– M. [A] [X] ne rapporte pas la preuve de ce qu’il a effectivement payé à Mme [N] [Y] [J] l’intégralité de la dette cautionnée
– par jugement définitif du tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand du 20 octobre 2015, Mme [N] [Y] [J] a obtenu la condamnation de M. [G] au paiement de la somme de 153 444,18 euros avec intérêts légaux à compter du 27 novembre 2014 au titre de l’engagement de caution du 17 janvier 1992
– par courrier officiel de son conseil du 14 avril 2022, le conseil de Mme [Y] [J] a indiqué au conseil de M. [X] qu’aucune somme n’avait été réglée par ce dernier en exécution de la créance de Mme [Y] [J]
– la procédure de distribution du prix de vente n’a jamais été mise en place par M. [X] de sorte que les comptes entre celui-ci et Mme [Y] [J] ne sont pas soldés et que la compensation alléguée n’est qu’hypothétique et M. [X] ne justifie toujours pas de cette distribution en cause d’appel
– Mme [Y] [J] a procédé à son égard à l’exécution forcée de ce jugement et, dans ce cadre, il a déjà payé à l’huissier une somme de 1 900 euros par des versements mensuels de 100 euros
– il ne peut être condamné à payer les mêmes sommes à ses deux cofidéjusseurs de manière simultanée.
M. [A] [X] répond que :
– il a payé par compensation la totalité de la créance détenue par Mme [Y] [J] en sa qualité de caution solidaire et se trouve donc désormais créancier de ses cofidéjusseurs
– cette compensation résulte des termes des arrêts de la Cour d’appel de Bordeaux du 20 décembre 2019 et de la cour d’appel de Chambéry du 18 janvier 2022 dans lesquels la compensation des créances, alléguée par Mme [Y] [J], a été constatée par les juges
– M. [F] [G] était parfaitement informé de ce paiement puisqu’il était partie à l’instance devant la cour d’appel de Chambéry
– en page 11 dans ses dernières écritures, M. [G] reconnaît expressément l’existence de la compensation de créance entre Mme [Y] [J] et M. [X]
– la cour d’appel de Bordeaux a fixé le montant de la créance de Mme [Y] [J] à son encontre à la somme de 64 673,45 euros, somme qui a été entièrement payée par compensation avec sa propre créance sur Mme [Y] [J] d’un montant de 136 266,53 euros selon jugement du tribunal de grande instance d’Annecy du 18 septembre 1996 et à l’issue de cette compensation, Mme [Y] [J] reste lui devoir la somme de 71 593,08 euros à titre de principal
– la créance de Mme [Y] [J] a été fixée par l’arrêt du 20 décembre 2019 de la cour d’appel de Bordeaux à la somme de 80 841,82 euros, soit 16 168,36 euros pour chacun des 4 autres cofidéjusseurs
– il a payé à Mme [Y] [J] par voie de compensation la somme de 64 673,45 euros correspondant à la totalité des quotes parts des autres cofidéjusseurs et notamment celle de M. [G] s’élevant à 16 168,36 euros en principal
– il n’a jamais eu connaissance du jugement du TGI de Clermont-Ferrand du 20 octobre 2015 et M. [G] n’en a jamais fait état devant la Cour d’appel de Chambéry
– les cofidéjusseurs désormais libérés de leurs dettes à l’égard de Mme [Y] [J] sont désormais exposés à son action personnelle en sa qualité de caution ayant acquitté la dette pour le compte des autres cautions solidaires
– sa créance étant née de la compensation légale des créances constatée par l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux du 20 décembre 2019, les intérêts légaux doivent courir à compter de la mise en demeure du 9 juin 2021.
Sur ce,
Ainsi que le fait justement valoir M. [G], M. [X] ne rapporte pas la preuve du paiement par compensation intervenu suite à l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux en date du 20 décembre 2019.
En effet, M. [X] ne justifie pas de l’issue de la procédure de distribution du prix de vente de la saisie immobilière initiée le 30 septembre 2013 devant le juge de l’exécution de Toulouse.
De plus, il ne peut être considéré comme le fait plaider M. [X] que ‘il ressort des termes même de l’arrêt de la Cour d’appel de Bordeaux du 20 décembre 2019 et de l’arrêt de la cour d’appel de Chambéry du 18 janvier 2022 que Monsieur [X] s’est acquitté seul de l’entièreté de la dette cautionnée, celle-ci ayant été payée par compensation de créances réciproques’ dans la mesure où aucun de ces deux arrêts ne comporte dans son dispositif de précision sur le montant des créances réciproques dont la compensation est constatée.
Dans la mesure où M. [X] ne justifie pas avoir payé la totalité de la créance de Mme [Y] [J] ou à tout le moins une part de cette créance excédant son propre engagement de caution, sa demande de paiement de la somme de 16 168,36 euros assortis des intérêts depuis le 10 juin 2021 dirigée contre M. [G], cofidéjusseur, doit être rejetée.
Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.
Sur la demande de décharge de l’obligation de cautionnement :
Le créancier engage sa responsabilité pour violation de son obligation de bonne foi à l’égard de la caution qui s’est engagée pour une somme manifestement disproportionnée par rapport à ses facultés financières.
L’existence de la disproportion doit s’apprécier tout d’abord au moment où la caution s’engage.
C’est à la caution personne physique qui invoque le caractère disproportionné de son engagement de le démontrer.
Pour être déchargé de son engagement de caution, M. [G] fait valoir que :
– au jour de la signature de l’acte de cautionnement, il était salarié (serveur dans la cafétéria de la gare routière de [Localité 6]) au salaire d’environ 1 600 euros par mois et n’avait aucun patrimoine immobilier de sorte que l’engagement de caution à hauteur de 400’000 francs était manifestement disproportionné au regard de ses revenus
– sa situation financière ne s’est pas améliorée par la suite notamment par suite de son départ à la retraite en 1998.
M. [X] s’oppose à cette demande aux motifs que :
– l’engagement disproportionné de la caution ne peut être invoqué qu’à l’égard du créancier bénéficiaire du cautionnement et en toute hypothèse, M. [G] ne justifie pas de cette disproportion au jour de l’engagement de caution.
Sur ce,
Contrairement à ce que soutient M. [X], la sanction prévue en présence d’un engagement de caution disproportionné prive le contrat de cautionnement d’effet à l’égard tant du créancier que des cofidéjusseurs lorsque, ayant acquitté la dette, ils exercent leur action récursoire.
M. [G] rapporte la preuve au moyen de son relevé de carrière qu’il a perçu la somme de 126 140 euros de salaires en 1991, juste avant de souscrire l’engagement de caution litigieux d’un montant de 400 000 Francs.
En revanche, il ne rapporte pas la preuve de la consistance de son patrimoine à cette date.
Le fait que l’engagement de caution soit ancien n’est pas de nature à renverser la charge de la preuve du caractère disproportionné de son engagement ce d’autant que M. [G] ne justifie pas des démarches entreprises pour justifier de l’état de son patrimoine.
La cour relève également que M. [G] a fait l’objet de procédures judiciaires fort peu de temps après son engagement de caution et qu’il était ainsi en mesure de conserver les justificatifs de son patrimoine en 1991/1992.
En conséquence la cour, confirmant le jugement de ce chef, rejette la demande tendant à voir décharger M. [G] de son obligation de cautionnement.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Infirmant le jugement de ce chef, la cour condamne M. [A] [X] à payer à M. [F] [G] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance.
M. [F] [G] étant bénéficiaire de l’aide juridictionnelle totale en appel, il n’y a pas lieu de faire droit à sa demande d’indemnisation des frais irrépétibles exposés à l’occasion de cette procédure.
Infirmant également le jugement déféré, la cour condamne M. [A] [X] aux dépens de première instance et dit que ce dernier supportera également les dépens de la procédure d’appel, lesquels seront recouvrés conformément à la Loi sur l’Aide juridique.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme le jugement déféré SAUF en ce qu’il a rejeté la demande de M. [F] [G] d’être déchargé de son engagement de caution ;
Statuant à nouveau et y ajoutant :
Déboute M. [A] [X] de l’intégralité de ses demandes ;
Condamne M. [A] [X] à payer à M. [F] [G] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance ;
Condamne M. [A] [X] aux dépens de première instance et d’appel et dit que ces derniers seront recouvrés conformément à la loi sur l’aide juridique ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Le greffier, La présidente,
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