Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Grenoble
→ RésuméL’affaire en appel concerne un litige familial sur la succession d’un couple décédé, avec M. [X] [M] contestant un jugement de 2019. Les parties, M. [X] et M. [K] [M], représentés par des avocats, s’opposent sur des créances liées à l’exploitation familiale. M. [X] affirme que son frère a reçu des avantages en nature, tandis que M. [K] réclame la reconnaissance de sa créance de salaire différé. La Cour d’appel a confirmé le jugement initial, rejetant les demandes de M. [X] et décidant que les dépens seraient affectés aux frais de partage, sans appliquer l’article 700 du code de procédure civile.
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L’affaire concerne un litige familial entre les enfants d’un couple décédé, concernant le partage de leur succession. Le tribunal de grande instance de Vienne a rendu un jugement en juillet 2019, qui a été contesté en appel par l’un des enfants. Le litige porte notamment sur une créance de salaire différé pour le travail effectué dans l’exploitation agricole familiale. La cour d’appel de Grenoble a confirmé la décision du tribunal de première instance, en rejetant la demande de l’appelant concernant la créance de salaire différé et les intérêts sur des sommes prêtées à son frère. Les frais de justice ont été répartis entre les parties et les avocats.
Affaire jugée en appel concernant une succession familiale
La Cour d’Appel de Grenoble a rendu un arrêt le 27 septembre 2022 concernant un litige familial relatif à une succession. L’appel a été interjeté par M. [X] [M] contre une décision du tribunal de grande instance de Vienne datant du 11 juillet 2019.Les parties en présence
M. [X] [M] et M. [K] [M] sont les parties en présence dans cette affaire. Ils sont représentés respectivement par Me Florence GUERAUD PINET et Me Hélène VACAVANT, avocats au barreau de Vienne.Les faits et les demandes
La succession des parents des parties en présence a été au cœur du litige. Des demandes de créance de salaire différé et d’intégration aux comptes de l’indivision successorale ont été formulées.Les arguments des parties
M. [X] [M] a argumenté que son frère avait bénéficié d’avantages en nature en travaillant sur l’exploitation familiale. De son côté, M. [K] [M] a justifié sa participation à l’exploitation et demandé la confirmation de sa créance de salaire différé.La décision de la Cour
La Cour a confirmé la décision du premier juge concernant la créance de salaire différé de M. [K] [M]. En revanche, elle a rejeté la demande de M. [X] [M] et a jugé irrecevables ses demandes d’intérêts et de remboursement de sommes prêtées à son frère.Les frais et les dépens
La Cour a décidé de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en raison du caractère familial du litige. Les dépens ont été employés en frais privilégiés de partage.N° RG 19/03440 – N° Portalis DBVM-V-B7D-KD5W C6 N° Minute : Copie Exécutoire délivrée le : à Me Florence GUERAUD PINET Me Hélène VACAVANT AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D’APPEL DE GRENOBLE CHAMBRE DES AFFAIRES FAMILIALES ARRET DU MARDI 27 SEPTEMBRE 2022 APPEL Jugement au fond, origine tribunal de grande instance de Vienne, décision attaquée en date du 11 juillet 2019, enregistrée sous le n° 17/00080 suivant déclaration d’appel du 5 août 2019 APPELANT : M. [X] [T] [H] [M] né le 18 Mai 1949 à [Localité 6] de nationalité Française [Adresse 1] [Localité 4] représenté par Me Florence GUERAUD PINET, avocat au barreau de VIENNE INTIME : M. [K] [M] né le 25 Août 1946 à [Localité 6] de nationalité Française [Adresse 2] [Localité 4] représenté par Me Hélène VACAVANT, avocat au barreau de VIENNE COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DELIBERE : Mme Anne BARRUOL, Présidente, Mme Martine RIVIERE, Conseillère, M. Philippe GREINER, Conseiller honoraire, DEBATS : A l’audience publique du 24 mai 2022, M. Philippe Greiner, conseiller, chargé du rapport, assisté de Mme Abla Amari greffière, a entendu les avocats en leurs conclusions, les parties ne s’y étant pas opposées, conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile. Elle en a rendu compte à la cour dans son délibéré et après prorogation du délibéré, l’arrêt a été rendu à l’audience de ce jour. [Z] [M] est décédé le 01/05/2009 et sa veuve, [S] [P] le 14/12/2012 laissant pour leur succéder leurs deux enfants, [K] et [X] [M]. Un procès-verbal de difficulté a été dressé par Maître [I], notaire à [Localité 7], le 31/05/2016. Saisi le 28/12/2016 par M. [K] [M], le tribunal de grande instance de Vienne a notamment, par jugement du 11/07/2019 : – déclaré recevable l’assignation en partage ; – ordonné l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage des successions réunies de [Z] [M] et de [S] [P] et désigné à cet effet Maître [E] [C], notaire à [Localité 5] ; – dit qu’il n’y a pas lieu à ce stade des opérations de partage de faire droit à la demande d’expertise immobilière présentée par M. [K] [M] ; – commis un juge pour la surveillance des opérations de partage ; – dit que M. [K] [M] détient à l’encontre de la succession de [S] [P] une créance de salaire différé pour la période du 26/08/1964 au 31/12/1971 ; – rejeté la demande de M. [X] [M] de créance de salaire différé sur la succession de sa mère ; – rejeté la demande de M. [X] [M] aux fins d’intégration aux comptes de l’indivision successorale des intérêts sur la somme de 50.000 francs prêtée à son frère M. [K] [M] et de la somme de 8.000 francs correspondant à un chèque n° 6259347 du 01/04/1984 ; – ordonné l’emploi des dépens en frais privilégiés de partage. Par déclaration du 05/08/2019, M. [X] [M] a interjeté appel partiel de cette décision. Dans ses conclusions d’appelant n° 2, il demande à la cour de : – déclarer recevable et fondé son appel ; – réformer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que M. [K] [M] détenait à l’encontre de la succession de [S] [P] une créance de salaire différé pour la période du 26/08/1964 au 31/12/1971, rejeté ses demandes de créance de salaire différé sur la succession de sa mère et aux fins d’intégration aux comptes de l’indivision successorale des intérêts sur la somme de 50.000 francs prêtée à son frère M. [K] [M] et de la somme de 8.000 francs correspondant à un chèque n° 6259347 du 01/04/1984 ; – rejeter la demande de créance de salaire différé de M. [K] [M] ; – dire que M. [X] [M] a droit à une créance de salaire différé de 65.000 francs, sauf à parfaire le montant en fonction des mesures expertales ; – voir intégrer dans les comptes de la succession les intérêts sur les 50.000 francs prêtés à son frère et la somme de 8.000 francs correspondant à un chèque n° 6259347 du 01/04/1984 ; – débouter M. [K] [M] de ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires ; – le condamner au paiement de 3.000 euros au titre des frais visés à l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens. Il fait valoir en substance que : – si son frère a aidé ses parents, il a bénéficié en contrepartie d’avantages en nature assimilables à une rémunération, a bénéficié du matériel et de l’outil de production et a exploité les terres sans verser de fermage à ses parents ; – en tout état de cause, la créance ne peut être due avant le 01/01/1968 ; – lui même a travaillé de manière continue sur l’exploitation en dehors de ses horaires de travail sans bénéficier d’aucun avantage en nature. Dans ses secondes conclusions d’intimé et d’appel incident du 20/05/2021, M. [K] [M] conclut au débouté de son frère de son appel, et à la confirmation de la décision déférée sauf en ce que sa créance de salaire différé a été limitée à la période du 26/08/1964 au 31/12/1971, celle-ci devant être calculée sur 10 ans, soit 135.525,13 euros à parfaire, et réclame enfin 3.000 euros au titre des frais visés à l’article 700 du code de procédure civile. MOTIFS DE LA DECISION Sur la créance de salaire différé de [K] [M] L’article L. 321-13, alinéa 1er, du code rural subordonne le bénéfice du salaire différé à la réunion de trois conditions : être descendant d’un exploitant agricole, avoir participé directement et effectivement à l’exploitation familiale après l’âge de 18 ans et n’avoir été associé ni aux bénéfices ni aux pertes de l’exploitation et ne pas avoir reçu de salaire en argent en contrepartie de la collaboration fournie. Il est de principe par ailleurs que si la participation régulière et sans contrepartie du descendant à l’exploitation ouvre droit à une créance de salaire différé, celle-ci n’est pas subordonnée à une participation permanente et exclusive à l’exploitation. En revanche, il ne doit pas s’agir d’une aide ponctuelle ou occasionnelle. Les parents exploitaient une ferme sise à [Localité 4]. La première condition fixée par le texte susmentionné est ainsi remplie. Tandis que M. [R], maire de cette localité, certifie que M. [K] [M] a été agriculteur toute sa vie, M. [L] déclare avoir travaillé comme journalier à la ferme [J] [M] dans les années 50/55 et avoir toujours vu M. [K] [M] travailler et vivre à la ferme et s’occuper de ses parents jusqu’à leurs derniers jours. MM. [N], [G] et [A], agriculteurs en retraite, attestent quant à eux, que M. [K] [M] (résidant à 400 m de la ferme [M]) a toujours exercé la profession d’agriculteur dans la ferme paternelle. Le docteur [O], médecin à [Localité 3], certifie de son côté que M. [K] [M] a été l’aidant principal de ses parents lorsque la dégradation de l’état de santé de ces derniers a entraîné une perte d’autonomie. Enfin, le relevé de compte retraite de M. [K] [M] de la Mutualité Sociale Agricole montre qu’à partir de 1972, il a obtenu des points au titre du régime non salarié agricole, et qu’il a été aide familial non salarié agricole du 01/01/1968 au 01/01/1972. L’intimé justifie ainsi d’une participation directe et effective à l’exploitation familiale. Concernant enfin l’absence de rémunération directe ou indirecte, aucun élément ne démontre que M. [K] [M] ait été associé aux bénéfices et aux pertes de l’exploitation, le versement d’argent de poche ne pouvant être considéré comme étant une contrepartie suffisante au travail fourni. De même, il n’est pas établi qu’avant 1972, il ait pu utiliser pour son propre compte le matériel et les terres de l’exploitation. Dans ces conditions, c’est par une exacte appréciation des circonstances de la cause que le premier juge a fait droit à la demande de salaire différé de M. [K] [M] en la limitant au 31/12/1971, puisque à compter de cette date, l’intéressé travaillait pour son propre compte. Le jugement déféré sera confirmé de ce chef. Sur la créance de salaire différé de M. [X] [M] Celui-ci verse aux débats plusieurs attestations : – le maire de la commune certifie que M. [X] [M] a bien travaillé sur l’exploitation, mais de manière occasionnelle ; – M. [D] indique qu’il travaillait régulièrement, en fonction de son temps libre; – M. [Y] écrit qu’il a travaillé les dernières journées chez ses parents ; – M. [F] (arrivé dans les années 1975 sur la commune de [Localité 4]) ajoute que M. [X] [M] aidait ses parents et son frère à la bonne marche de l’exploitation, la semaine et le week-end selon les besoins, ces dires étant confirmés par Mme [U] ; – enfin, Mme [V] écrit qu’il a travaillé régulièrement à la ferme. Les photos versées aux débats montrent que M; [X] [M] est intervenu sur la ferme familiale, les horaires de son travail salarié (l’après-midi et le soir) le permettant. Toutefois, ces attestations ne permettent pas d’établir que ce travail, certes effectif, était d’une ampleur telle qu’il ne pouvait être une aide ponctuelle ou occasionnelle, alors que l’intéressé occupait durant cette période un travail salarié. C’est donc exactement que le premier juge n’a pas retenu de créance de salaire différé au bénéfice de M. [X] [M]. Là encore, la décision attaquée sera confirmée sur ce point. Sur les intérêts portant sur les sommes de 50.000 francs et le remboursement de la somme de 8.000 francs Suivant acte sous seings privés du 10/09/2011, M. [X] [M] a prêté à son frère M. [K] [M] 30.000 francs le 28/12/1991 et 20.000 francs le 06/03/1992 pour financer un système d’irrigation, l’acte indiquant que ce montant a été remboursé le 10/09/2001. Par ailleurs, M. [X] [M] déclare qu’il a prêté 8.000 francs pour des roues de tracteur. Ces créances ne concernent pas les successions des deux parents, comme retenu dans le jugement déféré. Dès lors ces demandes sont irrecevables, par application de l’article 70 du code de procédure civile, comme ne se rattachant pas à la prétention originaire par un lien suffisant, le jugement étant confirmé de ce chef. Sur les frais irrépétibles Compte tenu du caractère familial du litige, il ne sera pas fait application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Enfin, les dépens seront employés en frais privilégiés de partage. PAR CES MOTIFS, La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe: Confirme le jugement déféré, sauf à préciser que les demandes en paiement d’intérêts et de la somme de 8.000 francs sont irrecevables ; Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ; Dit que les dépens de première instance et d’appel seront employés en frais privilégiés de partage ; Autorise les avocats qui en ont fait la demande à recouvrer directement les dépens dont ils ont fait l’avance sans avoir reçu provision ; PRONONCÉ par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile . SIGNÉ par la présidente, Anne Barruol, et par la greffière, Abla Amari, à laquelle la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire. La greffière La Présidente
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