Tribunal judiciaire de Paris, 10 février 2017
Tribunal judiciaire de Paris, 10 février 2017

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris

Thématique : WordPress : compétence du juge français

Résumé

La reproduction de la marque d’un concurrent dans le permalien d’un lien promotionnel Adwords peut constituer une contrefaçon. Dans une affaire, l’annonceur a soutenu que l’internaute attentif pouvait distinguer les produits des titulaires de la marque des annonces concurrentes. Cependant, la jurisprudence de la CJUE a établi que le titulaire d’une marque peut interdire à un annonceur d’utiliser un mot clé identique à sa marque sans consentement, si cela crée une confusion sur l’origine des produits. En cas de contrefaçon, le préjudice est évalué en tenant compte des conséquences économiques et des bénéfices réalisés par le contrefacteur.

Contrefaçon par lien promotionnel

La reproduction de la marque d’un concurrent dans le permalien (lien court situé après le nom de domaine) d’un lien promotionnel Adwords est de nature à constituer une contrefaçon. Dans cette affaire, l’annonceur a tenté de se dédouaner en faisant valoir que l’internaute raisonnablement attentif était capable de distinguer les références produits provenant des titulaires de la marque des « annonces » clairement identifiées comme telles de celles qui provenaient d’entreprises concurrentes.

Application de la jurisprudence Google

Aux termes des arrêts Google France SARL et Google Inc. contre Louis Vuitton Malletier SA rendu le 23 mars 2010 et Interflora Inc. et Interflora British Unit contre Marks & Spencer pic et Flowers Direct Online Ltd rendu le 20 septembre 2011, la CJUE interprétant les dispositions de l’article 5§1 a) de la directive 89/104/CEE du 21 décembre 1988, devenue à droit constant la directive 2008/95/CE du 22 octobre 2008, a considéré que le titulaire d’une marque est habilité à interdire à un annonceur de faire, à partir d’un mot clé identique à ladite marque que cet annonceur a sans le consentement dudit titulaire sélectionné dans le cadre d’un service de référencement sur internet, de la publicité pour des produits ou des services identiques, si celle-ci ne permet pas ou permet seulement difficilement à l’ internaute moyen- soit normalement informé et raisonnablement attentif- de savoir si les produits ou les services visés par l’annonce proviennent du titulaire de la marque ou d’une entreprise économiquement liée à celui-ci ou, au contraire, d’un tiers, de sorte qu’il est porté atteinte à la fonction essentielle d’indication d’origine de la marque.

Référencement naturel et référencement payant

A la différence du référencement naturel et gratuit opéré par le moteur de recherche selon la pertinence objective des sites, le référencement publicitaire est payant et permet un affichage d’annonces publicitaires dans un espace précédant les résultats naturels en fonction des mots clés choisis et achetés par l’annonceur, ce que n’ignore pas l’internaute dont le niveau d’information lui permet de distinguer ces deux types de résultats et partant de privilégier celui issu d’un référencement naturel.

Au cas d’espèce, le fait que les marques reprises étaient employées sans aucune justification ni finalité descriptive ou d’information soient incluses dans le lien ou texte de l’annonce, a généré un risque de confusion par association puisqu’en l’absence d’autre indication et de façon spontanée, le consommateur sera enclin à supposer que sur le site de l’annonceur sont présentés des produits du titulaire de la marque ou à tout le moins que les deux entités sont économiquement liées.

Montant de l’indemnisation

L’article L.716-14 du code de la propriété intellectuelle définit les règles d’appréciation du préjudice résultant des actes de contrefaçon selon lesquelles sont pris en considération distinctement les conséquences économiques négatives dont le manque à gagner et la perte subies par la partie lésée, les bénéfices réalisés par le contrefacteur y compris les économies d’investissement et le préjudice moral causé au titulaire des droits du fait de l’atteinte.

En présence d’une contrefaçon, le chiffre d’affaires supposé -sans référence à la marge réalisée par la société – n’est pas en soi un critère pertinent de détermination du préjudice. Sur la base de 108 clics générés par l’annonce en cause, le titulaire de la marque a obtenu 10.000 euros de dommages et intérêts.

Rappel sur la contrefaçon de marque en ligne

En application de l’article L.717-1 du code de la propriété intellectuelle, constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur la violation des interdictions prévues aux articles 9, 10, 11 et 13 du règlement (CE) 40/94 du Conseil du 20 décembre 1993 sur la marque communautaire. L’article 9 (« Droit conféré par la marque communautaire » du Règlement (CE) n° 207/2009 du 26 février 2009 modifié dispose que l’enregistrement d’une marque de l’Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif. Sans préjudice des droits des titulaires acquis avant la date de dépôt ou la date de priorité d’une marque de l’Union européenne, le titulaire de cette marque de l’Union européenne est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d’un signe pour des produits ou services lorsque: a) ce signe est identique à la marque de l’Union européenne et est utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée,. b) ce signe est identique ou similaire à la marque de l’Union européenne et est utilisé pour des produits ou services identiques ou similaires aux produits ou services pour lesquels la marque de l’Union européenne est enregistrée, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public; le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque.

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