L’Essentiel : L’association SOS Racisme a déposé une plainte contre une société HLM pour traitement illicite de données personnelles, révélant que des informations sur l’origine ethnique des candidats à la location étaient collectées sans leur consentement. Une enquête a montré que la commission d’attribution des logements avait rejeté des demandes en se basant sur la mixité sociale, mais en tenant compte des origines raciales. La société a été condamnée à une amende de 25 000 euros, car la loi interdit la conservation de telles données sans consentement explicite, ce qui constitue une violation des droits des individus concernés.
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Données nominatives sur l’appartenance ethniqueLe lièvre a été levé suite à une plainte déposée auprès du doyen des juges d’instruction du TGI de Nanterre par l’association SOS Racisme. Celle-ci avait utilisé la retranscription d’un enregistrement téléphonique réalisé à l’insu d’une personne en charge du dossier d’un locataire évincé selon lequel « On est obligés d’appliquer cela dans des tours et notamment à Nanterre parce que c’est déjà des tours qui vivent très mal, il y a beaucoup de problèmes et on essaie de mixer un peu toutes les origines et tous les revenus, donc voilà, c’est pas moi qui décide, hein, c’est la commission ». Au terme de l’instruction pénale, la société anonyme d’habitations à loyer modéré (HLM), a été condamnée à une amende de 25 000 euros pour avoir, sans le consentement exprès des candidats à la location d’une HLM, mis en place un traitement de données faisant apparaître leurs origines raciales et ethniques. La commission d’attribution des logements avait rejeté plusieurs demandes après avoir estimé que « compte tenu du nombre de locataires d’origine africaine ou antillaise installés dans la tour Ouessant, elle devait, au titre de la mixité sociale, refuser à ce candidat Noir le logement qu’il sollicitait ». Un extrait du » fichier principal des candidats » montrait la présence et l’utilisation effective de champs relatifs aux nationalités et surtout aux origines des candidats. Selon l’expert informatique désigné, cette base de données était utilisable dans le cadre d’une structure client/ serveur permettant à toute personne bénéficiant d’un code d’accès de l’interroger. Article 226-19 du Code pénalL’infraction était constituée au sens des articles 226-19 al. 1 et 226-23 du Code pénal et l’article 8 et l’article 2 de la loi 78-17 du 06/ 01/ 1978 et réprimée par les articles 226-19 al. 1, 226-22-2, 226-31 du Code pénal : « Le fait, hors les cas prévus par la loi, de mettre ou de conserver en mémoire informatisée, sans le consentement exprès de l’intéressé, des données à caractère personnel qui, directement ou indirectement, font apparaître les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses, ou les appartenances syndicales des personnes, ou qui sont relatives à la santé ou à l’orientation sexuelle ou à l’identité de genre de celles-ci, est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende. » Décision de la CNIL n° 01-061 du 20 décembre 2001Contrairement à ce que soutenait l’organisme de gestion locative, une telle mention de l’origine des candidats ou des locataires en place n’est pas autorisée par la décision de la CNIL n° 01-061 du 20 décembre 2001 portant recommandation relative aux fichiers de gestion du patrimoine immobilier à caractère social. Cette décision proscrit au contraire la collecte de toute » information relative aux » origines » du demandeur ou au pays de naissance de ses parents « . Il n’était pas seulement question de la mention du lieu de naissance mais d’un champ spécifique » origine « . Sur l’existence de l’élément intentionnel de l’infraction, le champ informatif relatif à l’origine des candidats et locataires était inscrit dans la structure informatique mise en place et renseigné pour chaque dossier ouvert. Son existence était connue aussi bien du personnel chargé d’entrer les données dans la mémoire informatisée que du personnel de direction. Mixité sociale c/ Mixité ethniqueA noter que la mixité sociale est un objectif législatif qui ne doit pas être confondu avec la mixité ethnique. A ce titre, l’article 56 de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions (articles L. 441 à L. 441-2-6 du code de la construction et de l’habitat) pose que l’attribution des logements locatifs sociaux doit notamment prendre en compte la diversité de la demande constatée localement ; elle doit favoriser l’égalité des chances des demandeurs et la mixité sociale des villes et des quartiers. Absence de consentement des locatairesPour rappel, l’article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique et aux libertés dispose que ne sont pas soumis à l’interdiction de collecter ou traiter des données à caractère personnel faisant apparaître les origines raciales ou ethniques, si la finalité des fichiers l’exige mais à la condition que les personnes aient donné leur consentement exprès. Or, l’organisme de gestion locative n’a jamais produit de document portant consentement des personnes concernées pour la mise en mémoire ou la conservation des données relatives à leur origine. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle plainte a été déposée par l’association SOS Racisme ?L’association SOS Racisme a déposé une plainte auprès du doyen des juges d’instruction du TGI de Nanterre. Cette plainte a été motivée par des propos tenus lors d’un enregistrement téléphonique, où une personne impliquée dans la gestion des logements a évoqué la nécessité d’appliquer des critères de mixité sociale dans l’attribution des logements. Ces propos ont été interprétés comme une forme de discrimination, car ils suggèrent que les origines raciales et ethniques des candidats à la location influençaient les décisions d’attribution des logements. L’enregistrement a révélé que la commission d’attribution des logements avait des pratiques qui semblaient favoriser une certaine mixité, mais qui, en réalité, pouvaient conduire à des refus basés sur l’origine ethnique des candidats. Quelles sanctions ont été imposées à la société HLM ?La société anonyme d’habitations à loyer modéré (HLM) a été condamnée à une amende de 25 000 euros. Cette sanction a été prononcée en raison de la mise en place d’un traitement de données qui révélait les origines raciales et ethniques des candidats à la location, sans leur consentement exprès. Cette décision souligne l’importance du respect des lois sur la protection des données personnelles, notamment celles qui interdisent la collecte d’informations sensibles sans le consentement des individus concernés. La condamnation de la société HLM met en lumière les conséquences juridiques d’une telle pratique, qui va à l’encontre des droits des locataires. Quels articles du Code pénal ont été violés dans cette affaire ?L’infraction a été constituée au sens des articles 226-19 al. 1 et 226-23 du Code pénal, ainsi que des articles 8 et 2 de la loi 78-17 du 6 janvier 1978. Ces articles stipulent que la mise en mémoire informatisée de données à caractère personnel, sans le consentement exprès de l’intéressé, est illégale. En particulier, l’article 226-19 al. 1 précise que la conservation de données révélant les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, religieuses, ou d’autres informations sensibles, est punie de cinq ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende. Cette législation vise à protéger les individus contre la discrimination et l’atteinte à leur vie privée. Quelle était la position de la CNIL concernant la collecte de données sur l’origine des candidats ?La CNIL, dans sa décision n° 01-061 du 20 décembre 2001, a clairement stipulé que la collecte d’informations relatives aux origines des candidats ou des locataires n’est pas autorisée. Cette décision proscrit la mention de l’origine dans les fichiers de gestion du patrimoine immobilier à caractère social. La CNIL a souligné que même la mention du lieu de naissance ne suffisait pas à justifier la collecte de données sur l’origine. L’existence d’un champ spécifique « origine » dans la base de données de l’organisme de gestion locative a été considérée comme une violation des règles de protection des données, car elle était connue et utilisée par le personnel impliqué dans la gestion des dossiers. Quelle est la différence entre mixité sociale et mixité ethnique ?La mixité sociale et la mixité ethnique sont deux concepts distincts, bien que souvent confondus. La mixité sociale est un objectif législatif qui vise à favoriser la diversité sociale dans les logements, en tenant compte des différentes catégories socio-économiques des demandeurs. En revanche, la mixité ethnique se réfère spécifiquement à la diversité des origines raciales et ethniques des habitants d’un quartier. L’article 56 de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 souligne que l’attribution des logements doit favoriser l’égalité des chances et la mixité sociale, sans pour autant se baser sur des critères ethniques. Pourquoi l’absence de consentement des locataires est-elle problématique ?L’absence de consentement des locataires pour la collecte de données à caractère personnel, notamment celles relatives à leur origine raciale ou ethnique, constitue une violation des lois sur la protection des données. Selon l’article 8 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, la collecte de telles données n’est permise que si les personnes concernées ont donné leur consentement exprès. Dans cette affaire, l’organisme de gestion locative n’a pas pu fournir de preuve de ce consentement, ce qui a conduit à la condamnation pour traitement illégal de données. Cela souligne l’importance de respecter les droits des individus en matière de vie privée et de protection des données personnelles. |
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