L’Essentiel : Un salarié a été licencié pour faute grave après avoir enregistré des données confidentielles sur un disque dur externe, envoyé des emails à des tiers contenant des informations sensibles, et consulté des sites pornographiques durant ses heures de travail. L’employeur a initié une procédure de licenciement, incluant une mise à pied conservatoire. Les fichiers créés sur l’ordinateur professionnel sont présumés avoir un caractère professionnel, permettant à l’employeur d’y accéder librement. De plus, la présence de photographies pornographiques sur le disque dur n’a pas suffi à prouver la responsabilité du salarié, mais les actes de détournement de données ont constitué un manquement à son obligation de loyauté.
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Faute grave du salariéUn salarié a été licencié pour faute grave pour avoir i) enregistré des données confidentielles de l’entreprise sur un disque dur externe, ii) envoyé des mails à des tiers comprenant parfois des pièces confidentielles et iii) consulté pendant son temps de travail des sites pornographiques. L’employeur a enclenché la procédure de licenciement notifiant au salarié une mise à pied conservatoire dans la lettre de convocation à un entretien préalable de licenciement. Documents présumés à caractère professionnelIl est acquis que les dossiers et fichiers créés par un salarié sur l’ordinateur mis à sa disposition par l’employeur sont présumés avoir un caractère professionnel et l’employeur peut donc y accéder librement. Il en est de même pour une clef USB et un disque dur externe connectés à l’ordinateur professionnel. En l’espèce, il résulte du procès-verbal de constat dressé que le disque dur externe était bien connecté sur l’ordinateur mis à disposition du salarié et qu’aucun des fichiers qu’il contenait n’était identifié ou dénommé comme personnel. Dès lors, l’employeur pouvait y accéder librement en dehors de la présence de son salarié. Droit de recourir à un huissierL’employeur pouvait également dans les mêmes conditions faire constater le contenu du disque par un huissier de justice hors la présence du salarié, le procès-verbal de constat constitue un moyen de preuve licite. Nature du logiciel de récupération des donnéesPrécision utile, il a été jugé que la mise en oeuvre d’un logiciel de récupération de données ne constitue pas un dispositif de contrôle des salariés justifiant leur information préalable. Contrôle des emails professionnelsL’employeur a constaté l’existence de plusieurs mails litigieux provenant de la boîte mail professionnelle du salarié mais également de la boîte email PERSONNELLE du salarié. Sur les mails émanant de la boîte professionnelle, il résultait du procès-verbal de constat qu’ils n’étaient pas identifiés comme personnel. Dès lors, ils étaient présumés être de nature professionnelle et l’employeur pouvait y accéder librement hors la présence du salarié. De même les photographies à caractère pornographique retrouvées sur le disque dur de l’ordinateur professionnel n’étaient pas identifiées comme «personnel». L’employeur pouvait donc faire constater la présence et le contenu de ces photographies et de ces mails intégrés au disque dur de l’ordinateur professionnel mis à disposition du salarié par un huissier de justice hors la présence du salarié. En revanche, en ce qui concerne les mails ou courriels émanant de la messagerie Orange personnelle du salarié, distincte de la messagerie professionnelle dont celui-ci disposait pour les besoins de son activité, l’employeur ne pouvait y avoir accès librement même si le salarié se servait de l’ordinateur professionnel pour envoyer et recevoir des messages sur cette adresse. En effet, même si en l’espèce, l’employeur justifiait d’un risque ou événement particulier, une suspicion légitime de concurrence déloyale, il ne pouvait ouvrir ces mails ou courriels qu’en présence du salarié ou celui-ci dûment appelé ce qui n’était pas le cas en l’espèce. En conséquence, ces messages électroniques ont été écartés des débats en ce que leur production en justice porte atteinte au secret des correspondances. Présence de photographies pornographiquesEn ce qui concerne les photographies pornographiques, dès lors que les salariés ne disposaient pas d’un mot de passe unique mais commun afin de permettre l’accès à chaque poste en l’absence d’un salarié, la seule présence de photographies à caractère pornographique sur le disque dur de l’ordinateur professionnel du salarié, ne suffisait pas à démontrer qu’il était à l’origine de la consultation puis de l’enregistrement et ce d’autant, qu’aucune information sur la date et l’heure de téléchargement ou d’enregistrement n’était indiquée dans le procès-verbal. Dans un attendu surprenant, les juges ont relevé qu’ « en tout état de cause, il convient de rappeler que le téléchargement et le stockage de documents pornographiques ne constituent pas une cause réelle et sérieuse de licenciement sauf en cas d’usage abusif ». Copie illicite de documents par le salariéL’employeur a obtenu gain de cause en raison de l’enregistrement par le salarié de nombreuses données personnelles et données confidentielles appartenant à la société (matrices d’étude de faisabilité, modèles de promesse de vente, matrice suivi client, protocole lotissement ou encore un acte de vente authentique). Le salarié avait manifestement pour projet de créer une société et de mener une activité concurrente à celle de son employeur, projet développé ce pour partie pendant son temps de travail et avec le matériel et les données confidentielles de son employeur. Manquement à l’obligation de loyauté du salariéCes actes ont constitué un manquement certain du salarié à son obligation de loyauté même en l’absence de clause d’exclusivité, celui-ci ayant mis à profit les facilités de son emploi pour se livrer ou tenter de se livrer pour son compte ou à titre bénévole à des activités concurrentes à celle de son employeur. Il a en outre enregistré des informations confidentielles de la société et relevé des informations contenues dans les fichiers de son employeur et constituant son savoir-faire dans un but personnel en vue de créer une société même de nature civile exerçant une activité concurrente à celle de son employeur. L’ensemble de ces faits pris en leur ensemble constitue une faute grave rendant impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les raisons du licenciement pour faute grave du salarié ?Le salarié a été licencié pour faute grave en raison de plusieurs comportements inappropriés. Premièrement, il a enregistré des données confidentielles de l’entreprise sur un disque dur externe, ce qui constitue une violation des règles de confidentialité. Deuxièmement, il a envoyé des emails à des tiers contenant des pièces confidentielles, compromettant ainsi la sécurité des informations de l’entreprise. Enfin, il a consulté des sites pornographiques pendant ses heures de travail, ce qui est incompatible avec ses obligations professionnelles. Ces actes ont conduit l’employeur à enclencher une procédure de licenciement, incluant une mise à pied conservatoire. Quels sont les droits de l’employeur concernant l’accès aux documents professionnels ?L’employeur a le droit d’accéder librement aux dossiers et fichiers créés par un salarié sur l’ordinateur mis à sa disposition. Cela inclut également les données stockées sur des dispositifs externes comme une clé USB ou un disque dur externe connectés à l’ordinateur professionnel. Dans le cas présent, le disque dur externe était connecté à l’ordinateur du salarié, et aucun fichier n’était identifié comme personnel. Ainsi, l’employeur pouvait y accéder sans la présence du salarié, ce qui est conforme à la législation en vigueur sur la gestion des données professionnelles. L’employeur peut-il faire appel à un huissier pour constater le contenu d’un disque dur ?Oui, l’employeur a le droit de faire constater le contenu d’un disque dur par un huissier de justice, même en l’absence du salarié. Cette démarche est légale et le procès-verbal de constat établi par l’huissier constitue un moyen de preuve licite. Cela permet à l’employeur de s’assurer que les données sont bien celles de l’entreprise et de documenter les infractions potentielles commises par le salarié. Quelles sont les implications de l’utilisation d’un logiciel de récupération de données ?L’utilisation d’un logiciel de récupération de données ne constitue pas un dispositif de contrôle des salariés, ce qui signifie que l’employeur n’est pas obligé d’informer le salarié de son utilisation. Cela a été confirmé par la jurisprudence, qui a établi que cette pratique ne nécessite pas de notification préalable au salarié. Ainsi, l’employeur peut utiliser ces outils pour vérifier le contenu des dispositifs de stockage sans enfreindre les droits du salarié. Comment l’employeur peut-il gérer l’accès aux emails professionnels et personnels ?L’employeur a le droit d’accéder aux emails professionnels du salarié, même en l’absence de celui-ci, tant que ces emails ne sont pas identifiés comme personnels. Dans le cas présent, les emails litigieux provenant de la boîte professionnelle n’étaient pas marqués comme personnels, ce qui a permis à l’employeur d’y accéder librement. En revanche, les emails provenant de la messagerie personnelle du salarié ne peuvent pas être consultés sans sa présence, même si l’ordinateur professionnel est utilisé pour les envoyer ou les recevoir. Cela protège le secret des correspondances personnelles. Quelle est la position des juges concernant la présence de photographies pornographiques sur un ordinateur professionnel ?Les juges ont noté que la simple présence de photographies pornographiques sur l’ordinateur professionnel ne suffit pas à prouver que le salarié en est responsable. En l’absence de mot de passe unique pour chaque poste, il est difficile d’attribuer la consultation ou le téléchargement de ces fichiers à un salarié en particulier. De plus, le téléchargement et le stockage de documents pornographiques ne constituent pas, en soi, une cause réelle et sérieuse de licenciement, sauf en cas d’usage abusif. Quelles sont les conséquences de la copie illicite de documents par le salarié ?La copie illicite de documents confidentiels par le salarié a conduit à la perte de confiance de l’employeur. Le salarié a enregistré des données sensibles, telles que des matrices d’étude de faisabilité et des modèles de promesse de vente, dans le but de créer une société concurrente. Ces actes ont été considérés comme une violation grave de ses obligations professionnelles, justifiant ainsi le licenciement pour faute grave. Comment le manquement à l’obligation de loyauté a-t-il été évalué ?Le manquement à l’obligation de loyauté a été évalué à travers les actions du salarié, qui a utilisé les ressources de l’entreprise pour développer une activité concurrente. Même en l’absence d’une clause d’exclusivité, le salarié a profité de son emploi pour se livrer à des activités concurrentes, ce qui constitue une violation de ses obligations. Ces comportements ont été jugés suffisamment graves pour justifier un licenciement, car ils compromettent la confiance nécessaire dans la relation employeur-employé. |
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