Mécontentement du consommateur : la liberté d’expression prime

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Mécontentement du consommateur : la liberté d’expression prime

L’Essentiel : La liberté d’expression est primordiale, notamment dans le cadre des critiques en ligne des consommateurs. Dans une affaire récente, une société de semelles orthopédiques a tenté de faire retirer des commentaires négatifs sur un forum, arguant qu’ils étaient dénigrants. Cependant, le tribunal a jugé que ces critiques, bien que virulentes, ne constituaient pas un dénigrement fautif. Les messages, qui exprimaient des expériences personnelles, ne visaient pas à nuire à la société mais à partager des avis. Ainsi, la liberté d’expression des consommateurs a été préservée, soulignant l’importance de la critique constructive dans un espace public.

La critique en ligne d’un produit par un consommateur relève de la liberté d’expression. Hors cas d’un abus, le dénigrement n’est pas applicable.

Dénigrement de produits sur un forum

Une société qui a pour activité la fabrication de semelles orthopédiques n’a pu obtenir le retrait de messages d’internautes ayant vivement critiqué ses produits sur le forum de discussion du site courseapied.net.

Demande infructueuse de retrait de messages

Au sens de l’article 809 alinéa 1 du code de procédure civile, le juge des référés peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Sur la base de l’article 6. I. 8 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, l’autorité judiciaire peut prescrire en référé ou sur requête, au prestataire d’hébergement ou au fournisseur d’accès, toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne.

La société a fait valoir sans succès que les termes « arnaque », « escroc », « idiot » visant ses produits étaient manifestement illicites et dénigrants et que les commentaires postés ne se basaient sur aucun fondement.

La liberté d’expression est la règle

En effet, la liberté d’expression est la règle et ne peut être limitée qu’en cas de preuve d’un abus tel que le dénigrement fautif ; le dénigrement fautif au sens de l’article 1240 du code civil, qui consiste à jeter le discrédit en répandant des informations malveillantes sur les produits, le travail ou la personne d’un concurrent, doit être apprécié en fonction de l’auteur des propos incriminés, qu’il s’agisse d’un consommateur ou d’un concurrent de la société qui se prétend victime.

En l’espèce, rien ne permettait d’établir qu’il s’agissait de faux messages d’internautes émanant en réalité d’un concurrent cherchant à dénigrer les produits de la société dans un contexte de concurrence déloyale.

Liberté de parole du consommateur

La juridiction a pris soin d’observer que les messages ne citaient aucun produit concurrent et plusieurs d’entre eux étaient positifs à l’égard des produits commercialisés par la société. Si dans certains messages le terme ‘arnaque’ ou ‘escroc’ peut paraître virulent, il reste cependant dans les limites de ce qui peut être admis d’un consommateur sur un forum dédié à la discussion et à l’expression des consommateurs sur leurs expériences et notamment leur déconvenue ou mécontentement.  La publication des messages litigieux ne caractérisait donc pas un trouble manifestement illicite.

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  • Q/R juridiques soulevées :

    Quel est le cadre légal concernant la critique en ligne d’un produit ?

    La critique en ligne d’un produit par un consommateur est protégée par la liberté d’expression, un droit fondamental. Selon le droit français, le dénigrement n’est applicable que dans des cas d’abus avérés.

    Cela signifie que tant qu’un consommateur exprime son opinion de manière honnête et sans intention malveillante, il est en droit de partager ses expériences, même si celles-ci sont négatives.

    Les articles du code civil et de la loi pour la confiance dans l’économie numérique encadrent cette liberté, en précisant que les juges peuvent intervenir uniquement en cas de trouble manifestement illicite.

    Quelles ont été les conséquences pour la société de semelles orthopédiques ?

    La société de semelles orthopédiques a tenté d’obtenir le retrait de critiques sévères sur un forum, mais sa demande a été rejetée.

    Les messages critiquant ses produits, jugés virulents, n’ont pas été considérés comme manifestement illicites par la juridiction.

    La société a argué que des termes comme « arnaque » et « escroc » étaient dénigrants, mais le tribunal a estimé que ces commentaires relevaient de l’expression légitime d’un consommateur.

    Il a été noté que les critiques ne ciblaient pas d’autres produits concurrents, ce qui a renforcé la position de la liberté d’expression.

    Comment la liberté d’expression est-elle protégée dans ce contexte ?

    La liberté d’expression est un principe fondamental qui ne peut être restreint qu’en cas de dénigrement fautif, tel que défini par l’article 1240 du code civil.

    Le dénigrement fautif implique la diffusion d’informations malveillantes visant à nuire à la réputation d’un produit ou d’une personne.

    Dans le cas présent, la juridiction a souligné qu’il n’y avait pas de preuves que les messages provenaient d’un concurrent cherchant à nuire à la société.

    Ainsi, la protection de la liberté d’expression a prévalu, permettant aux consommateurs de partager leurs expériences sans crainte de représailles légales.

    Quels éléments ont été pris en compte par la juridiction ?

    La juridiction a examiné plusieurs éléments avant de rendre sa décision.

    Elle a noté que les messages critiques ne mentionnaient pas de produits concurrents et que certains commentaires étaient même positifs à l’égard des produits de la société.

    Cela a été déterminant pour établir que les critiques ne constituaient pas un trouble manifestement illicite.

    Le tribunal a également pris en compte le contexte d’un forum de discussion, où les consommateurs partagent leurs expériences, y compris leurs mécontentements, ce qui est une pratique courante et acceptée.

    Quelle est la portée de cette décision pour les consommateurs ?

    Cette décision renforce la position des consommateurs en matière de liberté d’expression sur les plateformes en ligne.

    Elle établit un précédent selon lequel les critiques, même sévères, peuvent être considérées comme des opinions légitimes tant qu’elles ne sont pas fondées sur des mensonges ou des intentions malveillantes.

    Les consommateurs peuvent donc s’exprimer librement sur leurs expériences sans craindre des actions en justice, tant que leurs propos restent dans le cadre de la vérité et de l’honnêteté.

    Cela encourage un dialogue ouvert et transparent entre les consommateurs et les entreprises, favorisant ainsi une meilleure qualité de produits et services.


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