Tribunal judiciaire de Paris, 3 décembre 2009
Tribunal judiciaire de Paris, 3 décembre 2009

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris

Thématique : Controverse sur l’interopérabilité des jeux vidéo : le cas Nintendo et les cartes R4

Résumé

La controverse sur l’interopérabilité des jeux vidéo se concentre sur les cartes R4, permettant l’utilisation de jeux piratés sur la console Nintendo DS. Malgré les poursuites de Nintendo contre les revendeurs, les juges ont rejeté ses demandes, invoquant l’exception d’interopérabilité. Ils ont souligné que la décompilation du code était légale si elle était nécessaire pour l’interopérabilité. De plus, l’utilisation des logos Nintendo sur les emballages des Linkers n’a pas été considérée comme une contrefaçon, car ces produits sont compatibles et ne créent pas de confusion. Enfin, le tribunal a noté que l’éditeur n’avait pas prouvé l’efficacité de ses mesures de protection.

La société Nintendo a constaté l’importation et la commercialisation en France de dispositifs techniques (cartes dénommées R4, DS Linker) permettant d’utiliser des jeux vidéo piratés sur sa console DS. Ces cartes illicites sont commercialisées dans des boutiques spécialisées et sur certains sites Internet. La société Nintendo a poursuivi sans succès les revendeurs, toutes les demandes contentieuses de la société Nintendo ont été rejetées.
Sur le point de la contrefaçon de logiciel (le jeu vidéo ayant cette qualification), les juges ont opté pour l’exception d’interopérabilité. La conception des cartes en cause a notamment été possible par l’étude des codes des logiciels de sécurité de la carte et de la console Nintendo DS. Pour ce faire, l’autorisation de l’éditeur n’était pas requise des lors que la reproduction ou la traduction est indispensable pour obtenir les informations nécessaires a l’interopérabilité d’un logiciel crée de façon indépendante avec d’autres logiciels (article L 122-6 du code de la propriété intellectuelle). Selon les juges, « le logiciel ne peut vivre en autarcie, c’est la raison pour laquelle il a fallu organiser l’interopérabilité des programmes entre eux afin qu’ils se reconnaissent et puissent communiquer. Dans cette perspective, l’accès au code source est nécessaire ce qui implique un acte de décompilation et le législateur a permis cet acte de décompilation dans la mesure où il est limité aux seules parties du programme nécessaires à l’interopérabilité. En l’espèce, il n’est pas établi que les informations obtenues pour la mise au point du Linker (carte) destiné à être opérationnel sur la console Nintendo aient excédé les limites fixées par la loi. »
Sur la question de la contrefaçon de marque, l’apparition totale ou partielle du logo – Nintendo DS – sur les boîtes et les emballages contenant les Linkers ainsi que l’apparition du logo – Nintendo – sur l’écran de la console après mise en route du Linker, ne sont pas des actes de contrefaçon. En effet, il s’agit d’un usage autorisé de la marque pour des produits qui ne peuvent pas prêter à confusion. Il ne s’agit pas de produits ou de services identiques mais de produits compatibles entre eux ce qui explique l’usage des lettres DS Usage autorisé de la marque DS.
Sur le volet de l’atteinte à une mesure technique de protection, le tribunal a reproché à l’éditeur de n’avoir pas fait la preuve de l’efficacité des mesures mises en place (condition de la protection juridique de ces dispositifs).
De façon plus générale, les juges ont relevé que le Linker offre de nombreuses applications et rend possible mais non certaine son utilisation à des fins frauduleuses: « Dans la même situation que le revendeur de magnétoscopes qui ne peut savoir si parmi ses nombreux clients, certains vont détourner l’appareil vendu de la fonction domestique pour dupliquer à l’infini des films et les revendre, la situation étant la même pour les commerçants qui vendent des cassettes vierges, des magnétoscopes, tous objets qui peuvent très bien être détournés de leurs fonctions pour un usage frauduleux » (CA Paris, 13 octobre 1998).

Mots clés : jeux,jeu vidéo

Thème : Jeux et loteries

A propos de cette jurisprudence : juridiction :  Tribunal de Grande Instance de Paris | 3 decembre 2009 | Pays : France

 


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