L’Essentiel : L’affaire Nintendo contre Bigben interactive illustre les enjeux de la contrefaçon dans l’industrie du jeu vidéo. Nintendo a accusé Bigben de violer un brevet européen concernant des manettes de jeu. En réponse, Bigben a contesté la validité du brevet, arguant d’un manque de nouveauté et d’activité inventive. Les juges ont finalement jugé que les caractéristiques techniques des manettes en question ne reproduisaient pas celles du brevet de Nintendo, soulignant l’absence de similitude dans la disposition des éléments. Cette décision met en lumière la complexité des litiges liés aux brevets dans un secteur en constante évolution.
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Les brevets, encore et toujours Les jeux vidéo font l’objet d’une protection juridique multiple. Avec les nombreuses évolutions technologiques connues par l’industrie du jeu vidéo, la protection par les brevets s’est étendue à toutes les composantes du jeu vidéo, y compris aux manettes de jeu. En cas de soupçons de contrefaçon, deux options (entre autres) s’ouvrent à l’éditeur du jeu vidéo : le référé et l’action au fond. Une récente affaire opposant les sociétés Nintendo et Bigben interactive permet de préciser les conditions de l’action en référé. Référé contrefaçon Selon l’article L.615-3 du Code de la propriété intellectuelle, « Toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, (…) toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d’actes argués de contrefaçon (…) ». Saisie en référé ou sur requête, la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve raisonnablement accessibles au demandeur rendent vraisemblable qu’il est porté atteinte à ses droits ou qu ‘une telle atteinte est imminente. En vertu des dispositions de l’article 771 du Code de procédure civile, c’est le Juge de la mise en état, lorsque la demande est postérieure à sa désignation, qui est compétent pour ordonner, le cas échéant, les mesures adéquates en cas de soupçons (fondés) de contrefaçon. Le juge appréciera si l’atteinte aux droits apparaît vraisemblable. Nintendo contre Bigben interactive Dans cette affaire, BIGBEN INTERACTIVE a reçu une mise en demeure NINTENDO CO LTD, aux termes de laquelle cette dernière indiquait détenir un brevet européen et considérait que les manettes de jeux commercialisées par elle contrefaisaient ledit brevet. En défense de cette action en contrefaçon de brevet, BIGBEN INTERACTIVE faisait valoir que la partie française du brevet devait être déclarée nulle, notamment pour extension au-delà du contenu de la demande, absence de nouveauté et d’activité inventive et défaut de titularité. Absence de preuve suffisante de la contrefaçon La société NINTENDO soutenait que les télécommandes arguées de contrefaçon, qui sont toutes compatibles avec ses propres consoles, reprenaient nécessairement les caractéristiques techniques couvertes par son brevet. La manette en question, qui est un dispositif d’actionnement de jeu, comprend un boîtier longitudinal, avec une première surface essentiellement plane, et une seconde surface essentiellement parallèle (de forme parallélépipédique allongée). La première partie d’actionnement de la manette litigieuse se présente sous la forme d’une croix directionnelle et la deuxième partie est composée d’une gâchette. Les télécommandes en cause disposent aussi d’une caméra de visée (un capteur optique). Les juges n’ont pas retenu la vraisemblance de la reprise de toutes ces caractéristiques de la manette NINTENDO. Même si un brevet est avant tout le reflet d’un fonctionnement, celui qui est opposé par la société NINTENDO prévoit des dispositions de forme, une attention étant portée aux emplacements de chaque dispositif, de sorte que la non-reprise de ces indications entraîne une absence de vraisemblance de la contrefaçon. Plus précisément, l’absence de similitude dans l’emplacement tant de la première partie d’actionnement, c’est-à-dire la croix directionnelle, que de la seconde partie d’actionnement, à savoir la gâchette, a pour conséquence qu’il n’est pas évident que la revendication du brevet soit reprise dans toutes ses caractéristiques. De surcroît, il était manifeste que la croix directionnelle et la gâchette ne sont pas disposées à proximité de la face avant.
Thème : Jeux video A propos de cette jurisprudence : juridiction : Tribunal de Grande instance de Paris | 15 fevrier 2013 | Pays : France |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les protections juridiques des jeux vidéo ?Les jeux vidéo bénéficient d’une protection juridique multiple, qui s’est élargie avec les évolutions technologiques de l’industrie. Cette protection inclut non seulement le logiciel et le contenu des jeux, mais également les composants matériels, comme les manettes de jeu. En cas de soupçons de contrefaçon, les éditeurs de jeux vidéo peuvent engager des actions légales, notamment par le biais d’un référé ou d’une action au fond. Ces options permettent de protéger les droits des créateurs et d’assurer le respect des brevets en vigueur. Qu’est-ce que le référé contrefaçon ?Le référé contrefaçon est une procédure juridique qui permet à toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon de saisir la juridiction compétente. Selon l’article L.615-3 du Code de la propriété intellectuelle, cette procédure vise à ordonner des mesures pour prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par un brevet. La juridiction ne peut ordonner ces mesures que si les éléments de preuve accessibles rendent vraisemblable l’atteinte aux droits du demandeur. Cela signifie qu’il doit exister des indices suffisants pour justifier l’intervention rapide du juge. Quel était le litige entre Nintendo et Bigben Interactive ?Dans l’affaire opposant Nintendo à Bigben Interactive, Nintendo a mis en demeure Bigben, affirmant que les manettes commercialisées par cette dernière enfreignaient un brevet européen. Bigben a contesté cette accusation en soutenant que le brevet était nul pour plusieurs raisons, notamment l’absence de nouveauté et de titularité. Cette situation a mis en lumière les enjeux liés à la protection des brevets dans l’industrie du jeu vidéo, ainsi que les stratégies de défense que peuvent adopter les entreprises accusées de contrefaçon. Quelles étaient les caractéristiques techniques en jeu dans cette affaire ?Nintendo a soutenu que les manettes de Bigben, compatibles avec ses consoles, reprenaient les caractéristiques techniques de son brevet. La manette litigieuse se composait d’un boîtier longitudinal avec une surface plane et une surface parallèle, ainsi que d’une croix directionnelle et d’une gâchette. Cependant, les juges ont estimé qu’il n’y avait pas de vraisemblance dans la reprise de toutes ces caractéristiques. Ils ont noté que les différences dans l’emplacement des dispositifs sur la manette empêchaient de conclure à une contrefaçon évidente. Quelle a été la conclusion des juges concernant la contrefaçon ?Les juges n’ont pas retenu la vraisemblance de la contrefaçon dans cette affaire. Ils ont souligné que, bien qu’un brevet reflète un fonctionnement, il inclut également des dispositions de forme. L’absence de similitude dans l’emplacement des dispositifs d’actionnement a conduit à une absence de vraisemblance de la contrefaçon. En d’autres termes, les différences notables dans la conception des manettes ont été déterminantes pour conclure qu’il n’y avait pas de violation des droits de propriété intellectuelle de Nintendo. Cette décision souligne l’importance de la précision dans la revendication des brevets. |
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