Cour d’appel de Paris, 19 février 2021
Cour d’appel de Paris, 19 février 2021

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Thématique : Contrat de référencement internet : une obligation de moyens uniquement

Résumé

La SAS ALIZÉS DIFFUSION, exploitant un réseau de centres de bronzage, a confié à l’agence HEREWECAN la refonte de son site internet pour un montant total de 114.583 euros HT. Cependant, des factures demeurent impayées, réduisant le montant dû à 99.950 euros TTC après un règlement partiel. En contestation, le liquidateur a soutenu que la baisse de 43 % des visites sur le site constituait un manquement à une obligation de résultat. Toutefois, la cour a rappelé que les agences digitales n’ont qu’une obligation de moyens, rejetant ainsi les demandes de la société ALIZÉS.

Les agences digitales n’ont qu’une obligation de moyens quant à la conception et au référencement d’un site internet.

Refonte de site et référencement

La SAS ALIZÉS DIFFUSION, exploitant en succursales et en franchise un réseau d’une centaine de centres de bronzage sous l’enseigne ‘Point Soleil’, a confié son budget communication à la société HEREWECAN (société HWC), agence de communication spécialisée dans le digital, en vue de la refonte de son positionnement et de sa nouvelle identité visuelle ainsi que de la création de son nouveau site internet www.pointsoleil.com , suivant devis successifs totalisant la somme de 114.583 euros HT (137.499,60 euros TTC).

Factures impayées

Des factures émises par la société HWC, n’ont pas été honorées. Le montant impayé s’élevant initialement à hauteur de la somme de 117.024 euros TTC a été ramené à hauteur de la somme de 99.950 euros TTC, suite à un règlement partiel d’un montant de 17.074 euros.

Obligation de moyens à la charge des agences digitales

Pour contester les factures dues, le liquidateur de la société ALIZÉS a fait valoir en vain que le site commandé devait être un produit façonné avec une obligation de résultat et que la baisse de 43 % des visites d’internautes sur le nouveau site depuis sa mise en service, constituait un manquement à l’obligation de résultat d’une société spécialisée dans le digital. Or, seule une obligation de moyens est à la charge des agences digitales.

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 11

ARRET DU 19 FEVRIER 2021

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/05506 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B5I6B

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Février 2018 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° J201800005

APPELANTE

SAS ALIZES DIFFUSION

prise en la personne de ses représentants légaux

[…]

[…]

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Paris sous le numéro 335 172 854

représentées par Me Frédéric LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

et Me Maître Jean-François BERRADA, avocat plaidant du barreau PARIS

INTIMEE

SA BUSINESS & DECISION

prise en la personne de ses représentants légaux

[…]

[…]

immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Paris sous le numéro 384 518 114

assistée de Me Alexandra ABRAT, avocat au barreau de PARIS, toque : E804

PARTIES INTERVENANTES

LA SELAFA MJA agissant en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège en la personne de Maître Y X ès qualités de mandataire judiciaire et de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société ALIZES DIFFUSION INTERVENANT VOLONTAIRE

102, rue du Faubourg Saint-Denis

[…]

[…]

représentées par Me Frédéric LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

et Me Maître Jean-François BERRADA, avocat plaidant du barreau PARIS

LA SELARL 2M & ASSOCIES agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège en la personne de Maître Z A ès qualités d’Administrateur judiciaire de la société ALIZES DIFFUSION INTERVENANT VOLONTAIRE

[…]

[…]

représentées par Me Frédéric LALLEMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

et Me Maître Jean-François BERRADA, avocat plaidant du barreau PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 03 Décembre 2020, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée

de :

M. Denis ARDISSON, Président de la chambre

Mme D-Ange SENTUCQ, Président de chambre

Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Saoussen HAKIRI.

ARRÊT :

— contradictoire,

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par M. Denis ARDISSON, Président de la chambre et par Mme Saoussen HAKIRI, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

La SAS ALIZÉS DIFFUSION (société ALIZÉS), exploitant en succursales et en franchise un réseau d’une centaine de centres de bronzage sous l’enseigne ‘Point Soleil’, a confié son budget communication à la société HEREWECAN (société HWC), agence de communication spécialisée dans le digital, en vue de la refonte de son positionnement et de sa nouvelle identité visuelle ainsi que de la création de son nouveau site internet www.pointsoleil.com , suivant cinq devis successifs émis entre les 15 décembre 2014 et 13 mai 2015 et acceptés entre les 30 janvier et 15 mai 2015, totalisant la somme de 114.583 euros HT (137.499,60 euros TTC). Des factures émises par la société HWC, n’ont pas été honorées. Le montant impayé s’élevant initialement à hauteur de la somme de 117.024 euros TTC a été ramené à hauteur de la somme de 99.950 euros TTC, suite à un règlement partiel d’un montant de 17.074 euros intervenu le 29 septembre 2015.

Le 2 mars 2016, ont été attrait le même jour devant le tribunal de commerce de Paris, selon deux assignations différentes pour entendre condamner :

— la société ALIZÉS par la société HWC, en règlement de la somme de 99.950 euros (majorée des intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2015) au titre des factures en souffrance et en paiement de la somme de 20.000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive, l’indemnisation des frais irrépétibles étant requise et l’agence de communication faisant toute réserve à l’utilisation illicite de ses droits d’auteur relatifs au site internet, à l’identité visuelle et aux achats d’art réalisés dans le cadre du projet, dont elle estime en être demeurée propriétaire,

— la société HWC par la société ALIZÉS :

* à titre principal, en résolution du contrat, en raison d’une inexécution imputable au prestataire du fait du défaut de résultat, de ses fautes et négligences dans l’exécution de sa mission contractuelle, et en remboursement de la somme de 17.074 euros antérieurement payée, outre l’annulation corrélative des factures en souffrance et le paiement d’une somme globale de 525.000 euros de dommages et intérêts en réparation des préjudices subits en ordonnant toute compensation utile, l’indemnisation des frais irrépétibles étant requise, l’exploitante de centres de bronzage affirmant ne pas utiliser les droits d’auteur de l’agence de communication en indiquant que le site internet était obsolète et inopérant,

*subsidiairement en désignation d’un expert informatique.

Les parties ont chacune demandé la jonction des deux instances le 13 septembre 2016. Le 30 août 2017, le patrimoine de la société HWC a fait l’objet d’une transmission universelle à la S.A. BUSINESS & DÉCISION (société DÉCISION), son associée unique, laquelle est dès lors venue aux droits et obligations de son ancienne filiale et a repris l’instance devant le tribunal en y intervenant volontairement.

Estimant essentiellement que les prestations fournies par HWC étaient conformes à ce qu’avait accepté ALIZÉS et que les dysfonctionnements allégués de référencement du site internet avaient été démentis par les recherches Google effectuées par HWC, le tribunal, par jugement contradictoire du 22 février 2018 assorti de l’exécution provisoire, a joint les causes et a condamné la société ALIZÉS à payer à la société DÉCISION la somme de 99.950 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 2015, et la somme de 10.000 euros au titre des frais irrépétibles, la société ALIZÉS étant déboutées de toutes ses demandes et la société DÉCISION étant déboutée de sa demande indemnitaire pour résistance abusive.

* *

La société ALIZÉS a interjeté appel le 14 mars 2018 en intimant la société DÉCISION. Puis elle a été placée en redressement judiciaire par jugement du 24 avril 2018 du tribunal de commerce de Paris, ayant désigné la selarl 2M & Associés (prise en la personne de Maître Z A) en qualité d’administrateur judiciaire et la selafa MJA (en la personne de Maître Y X) en qualité de mandataire judiciaire. Dès lors, le 21 novembre 2018, la société DÉCISION (intimée) a assigné devant la cour en signifiant en outre notamment les copies du jugement dont appel et de la déclaration d’appel de la société ALIZÉS :

— la selarl 2M & Associés ès qualités, suivant acte délivré à ‘personne habilitée’ (Monsieur B C, collaborateur),

— la selafa MJA ès qualités, suivant acte délivré à ‘personne habilitée’ (Madame D-E F secrétaire),

l’instance correspondante, immatriculée sous le numéro RG 18/26917 ayant été jointe à la présente instance originelle par ordonnance du 13 février 2020 du magistrat de la mise en état.

Le redressement de la société ALIZÉS a été converti en liquidation judiciaire par jugement du 9 juillet 2019 du tribunal de commerce de Paris ayant désigné la selafa MJA (en la personne de Maître X) en qualité de liquidateur. Ce dernier est volontairement intervenu en sa nouvelle qualité à l’instance devant la cour, par conclusions (N° 3) télé-transmises le 24 septembre 2020.

Intervenante volontaire et comme telle appelante, la société MJA réclame ès qualités (de liquidateur judiciaire de la société ALIZÉS), aux termes de ses dernières écritures télé-transmises le 24 septembre 2020, la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles, prie la cour de la recevoir en son intervention volontaire, affirme que la société ALIZÉS n’utilise aucun droit d’auteur ou autre appartenant à la société DÉCISION et poursuit l’infirmation du jugement (sauf en ce qu’il a prononcé la jonction des instances) en sollicitant le rejet de toutes les demandes de la société DÉCISION et en demandant à nouveau :

— à titre principal :

*la résolution judiciaire du contrat de prestations intervenu entre les sociétés ALIZÉS et DÉCISION en raison du défaut de résultat, des négligences et fautes de cette dernière, et de sa défaillance dans l’exécution de son obligation de résultat et de son devoir d’information,

*l’exonération corrélative du liquidateur judiciaire ès qualités de toute obligation à l’égard de la société DÉCISION et en conséquence de dire nulles et de nul effet les factures dont le paiement est sollicité,

*la condamnation de la société DÉCISION à lui rembourser la somme de 17.074 euros déjà avancée et à lui payer la somme de 525.000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice et du manque à gagner subi du fait de l’inexécution contractuelle ,

*le prononcé de toute compensation utile,

— subsidiairement, la désignation d’un expert judiciaire informaticien avec la mission décrite au dispositif des écritures,

— plus subsidiairement, si quelque somme que ce soit était mise à la charge de la société ALIZÉS, d’ordonner sa fixation au passif [de la liquidation judiciaire] de la société ALIZÉS.

Intimée, la société DÉCISION réclame, aux termes de ses dernières conclusions télé-transmises le 4 septembre 2019, la somme de 10.000 euros au titre des frais irrépétibles, demande la jonction avec l’affaire enrôlée sous le numéro 18/26917 devant cette même chambre et poursuit la confirmation du jugement (sauf en ce qu’il l’a déboutée de sa demande indemnitaire pour résistance abusive au paiement) tout en demandant le rejet des prétentions de la société ALIZÉS et de son liquidateur judiciaire ès qualités, soit :

— à titre principal, l’inscription désormais au passif de la société ALIZÉS de sa créance d’un montant de 99.500 euros TTC, et d’une somme de 20.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive, tout en faisant toute réserve à l’utilisation illicite de ses droits d’auteur relatifs au site internet, à l’identité visuelle et aux achats d’art réalisés dans le cadre du projet, dont elle estime être demeurée propriétaire tant qu’elle n’est pas intégralement payée, en raison de la clause de réserve de propriété figurant sur les devis originels,

— subsidiairement, s’il était décidé que l’agence de communication avait commis une faute dans l’exécution du contrat, de dire que seules les factures n° FA 0028 et FA 0083 sont concernées par la création du site litigieux et, en conséquence, les autres factures étant (selon l’intimée) étrangères aux griefs invoqués,

— fixer au passif de la société ALIZÉS le montant total de 66.732 euros TTC au titre des six autres factures,

— plus subsidiairement, ordonner, le cas échéant, toute compensation et, si une expertise judiciaire était ordonnée, d’en mettre les frais avancés à la charge de la société ALIZÉS et d’en compléter la mission selon les termes précisés dans le dispositif des conclusions, tout en estimant qu’une expertise n’est pas utile et qu’elle n’a été demandé que pour encore gagner du temps.

SUR CE, LA COUR,

La société DÉCISION demande la jonction avec l’affaire enrôlée sous le numéro 18/26917 devant cette même chambre. Il y a lieu cependant de constater que ladite jonction a déjà été faite par l’ordonnance de du 13 février 2020 du magistrat de la mise en état, de sorte que cette demande est sans objet. Par ailleurs, en se bornant à faire des réserves sur l’utilisation de ses droits d’auteur, la société DIFFUSION ne sollicite plus expressément de ‘donner acte’, lequel avait été à juste titre écarté par le tribunal en estimant que cette demande n’avait pas d’effet réel.

Le liquidateur judiciaire de la société ALIZÉS expose qu’en contractant avec la société DÉCISION (anciennement HWC) pour la création de son nouveau site internet, son administrée recherchait l’optimisation auprès des moteurs de recherche et le développement de sa clientèle internaute, pour en déduire :

— qu’il s’agissait de la commande d’un produit façonné avec une obligation de résultat, pour la création d’un site performant ‘référençable’ par Google,

– que la baisse de 43 % des visites d’internautes en 2015 par rapport à 2014 sur son nouveau site depuis sa mise en service en mars 2015, constitue un manquement à l’obligation de résultat d’une société spécialisée dans le digital,

tout en estimant que les titres et descriptifs des pages du site sont inexpressifs, la page d’accueil ne fait pas référence aux métiers de ‘Point Soleil’ (bronzage et aquabiking) excluant ainsi la possibilité pour un internaute d’aboutir sur le site, mal rédigés au regard des exigences de Google et que son plan est inexistant, tout en affirmant qu’un référencement suffisant sur le moteur de recherche Google était déterminant de l’engagement de la société ALIZÉS.

Le liquidateur judiciaire indique aussi que :

— le cahier fonctionnel des charges précise la composition de chaque rubrique (titre, textes et visuels) et en déduit que l’agence de communication avait à minima, l’obligation de créer des titres (balise title) permettant au site d’être référencé en estimant que leur rédaction est une prestation de base ne relevant pas d’une prestation [supplémentaire] d’optimisation (non commandée), et fait valoir qu’il résulte de l’audit que la société ALIZÉS a demandé à la société ORSON, que 31 % des pages du site contiennent des erreurs dans la ‘balise title’,

— la société HWC s’est engagée à optimiser le site internet qu’elle créait par la référence naturelle, selon la méthode dite SEO (Search Engine Optimization), ce qui l’obligeait à créer des titres permettant au site d’être référencé par les moteurs de recherche hors tout achat de mots clés, un site internet devant respecter le renseignement optimal de chaque page pour être identifiable par un moteur de recherche.

Il conteste, en revanche :

— tout efficacité à la réception prononcée en mars 2015, dont la société DÉCISION fait état, dès lors que [selon lui] la société ALIZÉS est profane en matière de site internet, ne disposait pas d’outils d’appréciation de la qualité des prestations et que les prestations, à exécutions successives, s’évaluent sur la durée, plusieurs semaines étant indispensables pour se rendre réellement compte de la portée et de l’impact du travail réalisé,

– la corrélation alléguée par la société DÉCISION, au regard du projet d’une nouvelle réglementation de septembre 2015 relatif au bronzage en cabine, dès lors, outre que les mises en gardes de santé publique relatives au bronzage par UV artificiels en cabine existent depuis toujours, que la baisse brutale du trafic sur le nouveau site ‘Point Soleil’ a été constatée dès le mois de mai 2015, d’autant que l’interdiction envisagée en septembre 2015 par le Sénat, n’a pas été suivie par l’Assemblée nationale, estimant qu’en lui suggérant une campagne de publicité sur internet dès la mise en ligne du nouveau site, l’agence de communication aurait chercher à masquer son indigence en créant artificiellement du trafic pendant deux mois.

Pour sa part, la société DÉCISION s’oppose à la demande de résolution du contrat, en estimant n’avoir souscrit qu’une obligation de moyen et en affirmant n’avoir commis aucune erreur dans son exécution. Elle indique :

— qu’il résulte du cahier fonctionnel des charges que la société HWC était en charge de la création de l’architecture du site (conception et développement selon devis d’un montant de 41.910 euros HT) mais non de la rédaction de son contenu, dont la ré-écriture et l’accompagnement rédactionnel faisaient partie d’un autre devis qui n’a pas été accepté par la société ALIZÉS, de sorte que le contenu du site relevait de la responsabilité uniquement de cette dernière, d’autant qu’elle n’avait jamais mentionné l’extension à des besoins connexes,

— que l’optimisation technique SEO du site ne doit pas être confondue avec l’optimisation elle-même du site, l’optimisation SEO correspondant à un devis d’un montant de 2.840 euros HT sur un total accepté d’un montant de 114.583 euros HT (soit 2,48 % du budget), tout en indiquant que l’optimisation contractuellement commandée correspond à une prestation consistant à rendre le site techniquement prêt pour un référencement optimisé, mais non de la réalisation de l’optimisation elle-même du site, le point 3.6 de la fiche de cadrage acceptée par les parties, précisant que cette prestation n’incluait pas l’écriture des ‘métas descriptions’, mais uniquement la préparation du site au référencement,

— les personnes en charge du projet au sein de la société ALIZÉS avaient une connaissance certaine du fonctionnement d’un site internet en ayant exploité le site précédent, que la réception du site même par un profane est néanmoins valable, d’autant qu’une phase de test a eu lieu permettant au client d’apprécier le fonctionnement du nouveau site et que la société ALIZÉS en avait passé commande en sa qualité de professionnelle pour les besoins de son activité commerciale.

L’intimée fait en outre valoir qu’elle ne s’est jamais engagée à dynamiser la clientèle de la société ALIZÉS, et estime que les difficultés rencontrées par l’exploitante du réseau de centres de bronzage, ne résultent pas du fonctionnement de son nouveau site internet, mais du désintérêt croissant du public pour le bronzage aux UV artificiels, suite aux campagnes d’alerte de ’60 millions de consommateurs’ de janvier 2015 sur les dangers pour la santé de l’exposition aux rayonnements, à l’interdiction prônée en février 2015 par l’Académie de médecine, qui considérait que cette technique était cancérigène, et au projet d’interdiction des cabines de bronzage à ultraviolets à partir de 2017, votée par le Sénat le 16 septembre 2015.

Il n’est pas contesté que :

— la fiche de cadrage proposée par la société HWC et acceptée le 5 janvier 2015 par la société ALIZÉS précisait que l’optimisation technique du référencement comprenait uniquement la préparation du site au référencement sans inclure l’écriture des ‘métas descriptions’,

— l’optimisation du référencement du site, objet du devis n° DE 054 du 26 mars 2015, n’a pas été accepté par la société ALIZÉS, de sorte que les prestations correspondantes ne faisaient pas partie des accords contractuels.

La société ALIZÉS a réceptionné le site mis en ligne mi-mars 2015, sans faire état d’anomalie dans le délai d’un mois prévu par l’article 3.9 de la fiche de cadrage. Les principales critiques émises par la société ORSON, concurrente de la société HWC, ultérieurement consultée par la société ALIZÉS, portent finalement essentiellement sur les contenus concernant la ‘meta description’ relevant de la société ALIZÉS elle-même, dès lors que la ré-écriture du site faisait partie des prestations du devis précité (n° DE 054) non accepté par la société ALIZÉS.

Il n’y a pas lieu, par ailleurs, de faire droit à la demande subsidiaire de la société ALIZÉS de désignation d’un expert judiciaire en raison de :

— l’ancienneté du litige, d’autant qu’en se bornant à demander la fixation de la mission de l’expert en des termes généraux, le liquidateur judiciaire ne précise pas les éléments techniques pour lesquels il se serait heurté à une difficulté de preuve,

— l’incapacité dans laquelle la société ALIZÉS se trouve désormais à en pré-financer le coût conformément à l’usage.

C’est donc à juste titre, en fonction des éléments disponibles dans le dossier, que les premiers juges ont estimé que les prestations fournies par la société HWC ont été conformes à ce qui avait été accepté par la société ALIZÉS et ont en conséquence rejeté les prétentions de cette dernière.

La société DÉCISION poursuit la confirmation du jugement, sauf en ce qu’il l’a déboutée de sa demande indemnitaire pour résistance abusive au paiement en faisant désormais état des nombreux mails et mises en demeure qu’elle a adressés sans succès à l’appelante. Il convient cependant de relever que c’est à juste titre que les premiers juges ont considéré que chacun peut se méprendre sur la nature et l’étendue de ses droits, les circonstances de la cause ne permettant pas de caractériser la mauvaise foi de la société ALIZÉS dans l’exercice de sa contestation des montants qu’il lui était demandé de payer, le rejet de la demande indemnitaire de la société DÉCISION devant aussi être confirmé.

Le liquidateur judiciaire a reconnu [conclusions page 5] que la société DÉCISION a déclaré sa créance par lettre recommandée AR du 7 mai 2018, laquelle lettre [pièce intimée n° 3] précise, outre le principal d’un montant de 99.950 euros, les intérêts arrêtés à la date du 23 avril 2018 (soit la veille de l’ouverture du redressement judiciaire) à la somme non contestée de 2.192,99 euros et le montant de l’indemnité de 10.000 euros allouée en première instance au titre des frais irrépétibles, soit la somme globale de 112.142,99 euros. L’instance ayant été introduite avant l’ouverture de la procédure collective de la société ALIZÉS, le juge du fond présentement saisi demeure compétent pour fixer le montant des créances au passif de celle-ci.

Succombant dans son recours, le liquidateur judiciaire de la société ALIZÉS ne peut pas prospérer dans sa demande ès qualités d’indemnisation des frais irrépétibles, mais il serait, en revanche, inéquitable de laisser à l’intimée, la charge définitive de ceux supplémentaires qu’elle a dus exposés en cause d’appel, la condamnation ci-après prononcée de ce chef étant à la charge de la liquidation judiciaire de la société ALIZÉS, l’action ayant été reprise et poursuivie par le liquidateur judiciaire dans l’intérêt des opérations de liquidation, le montant correspondant devant être payé dans les conditions de l’article L 622-17 du code de commerce.

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement en son principe sauf à préciser que les montants prononcés par le tribunal, majorés des intérêts ayant couru jusqu’au 23 avril 2018, sont désormais à inscrire au passif de la liquidation judiciaire de la SAS ALIZÉS DIFFUSION, soit la somme globale de 112.142,99 euros,

Condamne la selafa MJA (en la personne de Maître Y X) ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS ALIZÉS DIFFUSION à verser à la S.A. BUSINESS & DÉCISION la somme de 5.000 euros dans les conditions de l’article L 622-17 du code de commerce, au titre des frais irrépétibles d’appel,

Condamne en outre la selafa MJA ès qualités aux dépens d’appel et précise qu’ils seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire,

Admet Maître Alexandra ABRAT, avocate, au bénéfice de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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