Dénigrement publicitaire : conditions de la saisie de documents

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Dénigrement publicitaire : conditions de la saisie de documents

L’Essentiel : La saisie de documents peut être annulée si la société requérante ne présente pas d’indices plausibles de concurrence déloyale ou de dénigrement publicitaire. Dans l’affaire Babyliss, le concurrent a tenté de prouver que Babyliss avait copié ses codes de communication pour son produit ‘Digital Sensor’. Cependant, la saisie demandée n’était pas justifiée par un motif légitime selon l’article 145 du code de procédure civile. Ce dernier stipule qu’une mesure d’instruction doit être fondée sur des éléments crédibles, sans nécessiter la preuve des faits invoqués, mais en justifiant des suppositions.

Une saisie de documents peut être annulée lorsque la société à l’origine de la saisie ne présente pas d’indices suffisamment plausibles à l’appui des griefs de concurrence déloyale et de dénigrement publicitaire. Par ailleurs, ne constitue pas un dénigrement publicitaire, le fait pour des vendeurs, de comparer le produit avec celui de la concurrence. En effet, les argumentaires des commerciaux sont nécessairement construits par référence aux produits de la concurrence pour présenter les avantages des produits qu’ils entendent commercialiser.  

Affaire Babyliss

Dans l’affaire soumise, la saisie opérée par un concurrent de la société Babyliss en vue d’établir des actes de concurrence déloyale et dénigrement publicitaire, ne reposait pas sur un motif légitime au sens des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile.

Reprise de codes de communication

Affirmant que la société Babyliss, pour la commercialisation de son sèche-cheveux ‘Digital Sensor’, reprenait ses codes de la communication, le concurrent a dénoncé en vain, d’une part, la reprise par la société Babyliss sur son emballage ‘Digital Sensor’ de plusieurs éléments caractéristiques de son emballage ‘Supersonic’, soit la présentation du sèche-cheveux de face sur fond blanc, l’allégation relative à l’intelligence du produit, la représentation des flux d’air dans des tonalités roses, et en outre, dans la brochure qu’elle met à disposition des clients, la présentation du moteur entre deux doigts, la représentation de l’intérieur de la machine avec la mise en avant du microprocesseur et l’image d’un ingénieur en blouse …

Conditions de la saisie de documents

Le concurrent a déposé une requête devant le président du tribunal de commerce, au visa de l’article 145 du code de procédure civile, aux fins de désignation d’un huissier de justice, assisté d’un expert informatique, chargé de se rendre au siège social de la société Babyliss et prendre copie de documents, fichiers, correspondances, sous forme papier et/ou électronique.

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.

L’application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile suppose que soit constaté qu’il existe un procès « en germe » possible, sur la base d’un fondement juridique suffisamment déterminé et dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d’autrui.

Le juge, saisi d’une demande de rétractation d’une ordonnance sur requête ayant ordonné une mesure sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile et tenu d’apprécier au jour où il statue les mérites de la requête, doit s’assurer de l’existence d’un motif légitime, au jour du dépôt de la requête initiale et à la lumière des éléments de preuve produits à l’appui de la requête et de ceux produits ultérieurement devant lui, à ordonner la mesure probatoire et des circonstances justifiant de ne pas y procéder contradictoirement.

L’urgence n’est pas une condition requise pour que soient ordonnées sur requête des mesures d’instruction sur le fondement de l’article 145 ; l’existence de contestations sérieuses ne constitue pas un obstacle à la mise en oeuvre de la mesure sollicitée, l’application de cet article n’impliquant aucun préjugé sur la responsabilité des parties appelées à la procédure, ni sur les chances de succès du procès susceptible d’être ultérieurement engagé.

Risque de destruction et principe du contradictoire

Selon l’article 493 du code de procédure civile, l’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse. En application des dispositions combinées des articles 145 et 493, les circonstances propres au cas d’espèce justifiant une dérogation au principe de la contradiction doivent être caractérisées et le juge saisi d’une demande de rétractation doit vérifier, au besoin d’office, si cette exigence est satisfaite.

Les mesures sollicitées peuvent être ordonnées afin de garantir la préservation des éléments de preuves recherchés, dès lors que ces éléments ont pour objet de conserver les preuves des agissements fautifs. Toutefois, la seule invocation d’un risque de destruction de documents et fichiers sur supports informatiques relève de l’affirmation de principe et constitue un motif de portée générale susceptible d’être appliqué en toutes circonstances. La dérogation au principe de la contradiction ne se justifie pas sur le principe dès lors que des actes de concurrence déloyale sont dénoncés et que l’effet de surprise doit être préservé. En d’autres termes, le risque de dépérissement et de destruction des preuves doit être caractérisé.

Appréciation du motif légitime

Il résulte de l’article 145 du Code de procédure civile que le demandeur à une mesure d’instruction n’a pas à démontrer l’existence des faits qu’il invoque puisque cette mesure in futurum est destinée à les établir, mais qu’il doit justifier d’éléments rendant crédibles ses suppositions.

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Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions pour annuler une saisie de documents ?

Une saisie de documents peut être annulée si la société à l’origine de la saisie ne présente pas d’indices suffisamment plausibles pour soutenir ses accusations de concurrence déloyale et de dénigrement publicitaire.

Cela signifie que la partie qui demande la saisie doit fournir des preuves tangibles et crédibles pour justifier ses allégations. Si ces preuves ne sont pas jugées suffisantes, la saisie peut être considérée comme abusive et donc annulée.

De plus, il est important de noter que la simple comparaison des produits entre concurrents ne constitue pas un dénigrement publicitaire. Les commerciaux doivent souvent faire référence aux produits concurrents pour mettre en avant les avantages de leurs propres produits.

Qu’est-ce que l’affaire Babyliss implique ?

L’affaire Babyliss concerne une saisie effectuée par un concurrent de la société Babyliss, qui cherchait à prouver des actes de concurrence déloyale et de dénigrement publicitaire.

Cependant, cette saisie n’était pas fondée sur un motif légitime selon l’article 145 du code de procédure civile. Cela signifie que le concurrent n’a pas réussi à démontrer que ses accusations étaient suffisamment solides pour justifier une telle mesure.

L’absence de motifs légitimes a conduit à la remise en question de la validité de la saisie, soulignant l’importance de fournir des preuves concrètes dans ce type de litige.

Quelles sont les conditions pour une saisie de documents selon l’article 145 ?

L’article 145 du code de procédure civile stipule qu’une mesure d’instruction, comme la saisie de documents, peut être ordonnée si un motif légitime existe pour conserver ou établir des preuves avant un procès.

Cela implique qu’il doit y avoir un litige potentiel, avec un fondement juridique clair, et que la mesure d’instruction ne doit pas porter atteinte aux droits d’autrui.

Le juge doit évaluer la légitimité de la demande au moment où elle est faite, en tenant compte des preuves fournies. L’urgence n’est pas une condition nécessaire pour ordonner une telle mesure, mais la présence de contestations sérieuses ne doit pas empêcher son application.

Quel est le rôle du principe du contradictoire dans la saisie de documents ?

Le principe du contradictoire est fondamental dans les procédures judiciaires, garantissant que toutes les parties aient la possibilité de se défendre. Selon l’article 493 du code de procédure civile, une ordonnance sur requête peut être rendue sans contradictoire si le requérant a des raisons valables de ne pas appeler la partie adverse.

Cependant, pour justifier une dérogation à ce principe, des circonstances spécifiques doivent être établies. Le juge doit vérifier si ces conditions sont remplies, notamment en ce qui concerne le risque de destruction des preuves.

Il est déterminant que le risque de destruction soit clairement caractérisé et ne repose pas uniquement sur des affirmations générales, surtout dans des cas de concurrence déloyale.

Comment est appréciée la légitimité d’une demande de saisie ?

L’article 145 du code de procédure civile précise que le demandeur d’une mesure d’instruction n’a pas besoin de prouver les faits qu’il avance, car la mesure est destinée à établir ces faits.

Cependant, il doit fournir des éléments qui rendent ses suppositions crédibles. Cela signifie que des indices ou des preuves préliminaires doivent être présentés pour justifier la demande de saisie.

Cette exigence vise à éviter les abus et à garantir que les mesures d’instruction ne soient pas ordonnées sur des bases infondées. La crédibilité des éléments fournis est donc essentielle pour l’acceptation de la demande.


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