Liberté de parole dans l’hémicycle européen

·

·

Liberté de parole dans l’hémicycle européen

L’Essentiel : Le Tribunal de 1ère instance de l’Union a annulé les sanctions imposées à l’eurodéputé Janusz Korwin-Mikke pour des propos tenus dans l’hémicycle. Bien que ses déclarations aient été jugées choquantes, le règlement intérieur du Parlement ne permet pas de sanctionner un député sans trouble des travaux. La liberté d’expression, bien que fondamentale dans les démocraties, n’est pas absolue et peut être restreinte sous certaines conditions. En l’espèce, l’article 166 stipule que des sanctions ne peuvent être appliquées qu’en cas de perturbation grave des séances, ce qui n’a pas été le cas ici.

Annulation de sanctions

Le Tribunal de 1ère instance de l’Union a annulé les décisions du bureau du Parlement européen infligeant des sanctions à l’eurodéputé Janusz Korwin-Mikke en raison de propos tenus dans l’hémicycle. Nonobstant le caractère particulièrement choquant des propos de l’eurodéputé, en l’absence de trouble de la séance ou de perturbation des travaux du Parlement, le règlement intérieur du Parlement ne permettait pas de sanctionner un eurodéputé en raison de propos tenus dans le cadre de ses fonctions parlementaires

Historique de l’affaire

Lors de la séance plénière du Parlement du 7 juin 2016 sur « L’état actuel des aspects extérieurs du programme européen sur la migration : pour une nouvelle entente sur la migration » et de celle du 1 er mars 2017 ayant eu pour objet le « Gender pay gap » (écart de rémunération entre les femmes et les hommes), Janusz Korwin-Mikke était intervenu en tenant des propos virulents contre les migrants et les femmes.

Le président du Parlement lui avait alors infligé plusieurs sanctions, à savoir la perte de son droit à indemnité de séjour pour une durée, respectivement, de dix et de trente jours et la suspension temporaire de sa participation à l’ensemble des activités du Parlement pour des périodes respectives de cinq et de dix jours consécutifs. Par ailleurs, dans le cadre de la décision du 14 mars 2017, le président du Parlement a interdit au député de représenter le Parlement pour une période d’un an.

Principe de la liberté d’expression

Selon une approche classique, le Tribunal a souligné que la liberté d’expression occupe une place essentielle dans les sociétés démocratiques, elle constitue un droit fondamental. Toutefois, le droit à la liberté d’expression ne constitue pas une prérogative absolue et son exercice peut être soumis, sous certaines conditions, à des restrictions. Ces restrictions doivent s’apprécier strictement et les ingérences dans la liberté d’expression ne sont permises que si elles répondent à une triple condition. Elles doivent être « prévues par la loi », viser un objectif d’intérêt général et ne pas être excessives. Le Tribunal a considéré que la liberté d’expression des parlementaires doit se voir accorder une protection accrue au vu de l’importance fondamentale que le Parlement joue dans une société démocratique. Cependant, l’exercice de cette liberté au sein du Parlement doit parfois s’effacer devant les intérêts légitimes que sont la protection du bon ordre des activités parlementaires et la protection des droits des autres parlementaires. Il s’ensuit que le règlement interne d’un parlement ne pourrait prévoir la possibilité de sanctionner des propos tenus par les parlementaires que dans l’hypothèse où ceux-ci portent atteinte à son fonctionnement efficace ou représentent une forme de danger sérieux pour la société, tels que des appels à la violence ou à la haine raciale.

Article 166 du règlement intérieur du Parlement

En l’espèce, l’article 166 du règlement intérieur du Parlement prévoit dans sa version  modifiée entrée en vigueur le 16 janvier 2017, des sanctions « [d]ans le cas où un député trouble la séance ou perturbe les travaux du Parlement d’une manière grave en violation des principes définis à l’article 11 […] ». Cette version vise l’interdiction de « tout propos ou comportement diffamatoire, raciste ou xénophobe ». Toutefois, qu’il s’agisse de « comportements » ou de « propos »,  la condition supplémentaire à l’application des sanctions est celle d’une perturbation des travaux du Parlement. Or, en l’occurrence, il n’y avait pas eu de trouble ou de perturbation dans l’hémicycle.

Télécharger la décision

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sanctions ont été infligées à Janusz Korwin-Mikke par le Parlement européen ?

Janusz Korwin-Mikke a été sanctionné par le président du Parlement européen suite à ses interventions jugées inappropriées lors de deux séances plénières. Les sanctions comprenaient la perte de son droit à indemnité de séjour pour des périodes de dix et trente jours, ainsi que la suspension temporaire de sa participation aux activités du Parlement pour cinq et dix jours consécutifs.

De plus, une décision prise le 14 mars 2017 a interdit à Korwin-Mikke de représenter le Parlement pendant un an. Ces mesures ont été prises en réponse à ses propos virulents sur des sujets sensibles tels que la migration et l’écart de rémunération entre les sexes, qui ont été perçus comme offensants et inappropriés dans le cadre des débats parlementaires.

Pourquoi le Tribunal de 1ère instance a-t-il annulé ces sanctions ?

Le Tribunal de 1ère instance de l’Union a annulé les sanctions imposées à Janusz Korwin-Mikke en raison de l’absence de trouble ou de perturbation des travaux du Parlement lors de ses interventions. Bien que ses propos aient été jugés choquants, le règlement intérieur du Parlement ne permet pas de sanctionner un eurodéputé pour des déclarations faites dans le cadre de ses fonctions parlementaires, à moins qu’il n’y ait eu une perturbation significative.

Le Tribunal a également souligné l’importance de la liberté d’expression dans les sociétés démocratiques, affirmant que les parlementaires doivent bénéficier d’une protection accrue pour leurs discours. Cela signifie que les restrictions à la liberté d’expression doivent être strictement justifiées et ne peuvent être appliquées que dans des circonstances spécifiques, telles que des comportements qui nuisent au bon fonctionnement du Parlement.

Quel est le principe de la liberté d’expression selon le Tribunal ?

Le Tribunal a affirmé que la liberté d’expression est un droit fondamental dans les sociétés démocratiques, mais qu’elle n’est pas absolue. Son exercice peut être soumis à des restrictions, qui doivent être justifiées par des critères stricts. Ces restrictions doivent être prévues par la loi, viser un objectif d’intérêt général et ne pas être excessives.

En ce qui concerne les parlementaires, le Tribunal a précisé que leur liberté d’expression doit être protégée de manière renforcée, compte tenu du rôle essentiel du Parlement dans une démocratie. Cependant, cette liberté peut être limitée pour préserver l’ordre des activités parlementaires et protéger les droits des autres membres. Les sanctions ne peuvent être appliquées que si les propos tenus portent atteinte au fonctionnement efficace du Parlement ou représentent un danger sérieux pour la société.

Quelles sont les conditions d’application des sanctions selon l’article 166 du règlement intérieur du Parlement ?

L’article 166 du règlement intérieur du Parlement stipule que des sanctions peuvent être appliquées si un député trouble la séance ou perturbe gravement les travaux du Parlement, en violation des principes définis à l’article 11. Cette disposition vise à interdire les propos ou comportements diffamatoires, racistes ou xénophobes.

Cependant, pour que des sanctions soient justifiées, il doit y avoir une perturbation avérée des travaux parlementaires. Dans le cas de Janusz Korwin-Mikke, le Tribunal a constaté qu’il n’y avait pas eu de trouble ou de perturbation dans l’hémicycle lors de ses interventions, ce qui a conduit à l’annulation des sanctions. Cela souligne l’importance de la condition de perturbation dans l’application des sanctions au sein du Parlement.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon