Tracts syndicaux diffamatoires

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Tracts syndicaux diffamatoires

L’Essentiel : La responsabilité en cascade s’applique à la distribution de tracts syndicaux, permettant de poursuivre l’auteur principal, tel qu’un syndicat, même s’il n’est pas le directeur de publication. Par exemple, un tract diffamatoire dirigé par le secrétaire général de la CGT le rend responsable. La Cour de cassation a relaxé ce syndicat pour des propos jugés excessifs mais relevant de la liberté d’expression syndicale, dans le cadre d’un conflit social. Les limites de cette liberté sont strictes, mais les expressions utilisées, bien que provocatrices, n’excèdent pas celles permises dans un tel contexte.

La responsabilité en cascade joue aussi en matière de distribution de tracts syndicaux. Le régime est toutefois quelque peu adapté puisque l’auteur (l’annonceur, le syndicat) peut être poursuivi à titre principal. Un syndicat ne peut donc, pour échapper à une poursuite pour diffamation, se retrancher derrière le fait qu’il n’est ni directeur de publication, imprimeur, vendeur, distributeur et/ou afficheur des tracts en cause. 

Tract : qui poursuivre ?

Dès lors qu’un tract présenté comme diffamatoire a été réalisé sous la direction du secrétaire général du syndicat CGT, ce dernier est qualifiable de directeur de la publication au sens de l’article 42 de la loi du 29 juillet 1881. En revanche, les qualités de trésorier du syndicat CGT et membre du conseil syndical, ne permettent pas de considérer l’auteur du délit d’injure publique ni comme complice de ce délit en l’absence d’établissement à son encontre de faits déterminés de complicité personnelle, positifs et conscients. Pour rappel, les articles 42 et 43 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse s’appliquent aux infractions commises par voie de tract.

Relaxe et liberté d’expression syndicale

La Cour de cassation a confirmé la relaxe du syndicat CGT du délit d’injure publique envers un particulier à raison de la diffusion dans un tract syndical, des expressions « cancer orchestré » et « direction autiste ».  En effet, comme en l‘espèce, l’existence d’un conflit social sévère justifie d’apprécier plus souplement la diffamation.

Si les propos ne doivent pas dépasser les limites admissibles d’une polémique née d’un conflit social, la liberté d’expression ne peut cependant connaître d’ingérence ou de restrictions, en une telle circonstance, que pour des motifs impérieux dont l’existence doit être établie. Si l’expression « cancer orchestré par le PDG et son staff », est à l’évidence outrancière, celle de « direction autiste », s’entend au sens figuré comme un déni de réalité qui pousse à s’isoler et à refuser de communiquer et d’écouter autrui et la comparaison des conditions de travail dans la société avec celles des travailleurs soumis au STO est à l’évidence provocatrice, les passages incriminés n’excèdent pas les limites de la liberté d’expression syndicale autorisée dans un contexte faisant suite à un conflit social sévère.

Rappel sur la responsabilité en cascade

Aux termes de l’article 42 de la loi du 29 juillet 1881, sont passibles comme auteurs principaux des délits par voie presse : 1° les directeurs de publications ou éditeurs, quelles que soient leurs professions ou leurs dénominations et, dans les cas prévus au deuxième alinéa de l’article six, les codirecteurs de la publication ; 2° à leurs défauts, les auteurs ; 3° à défaut des auteurs, les imprimeurs ; 4° à défaut des imprimeurs, les vendeurs, les distributeurs et afficheurs. Dans les cas prévus au deuxième alinéa de l’article 6, la responsabilité subsidiaire des personnes visées aux paragraphes 2°, 3° et 4° joue comme s’il n’y avait pas de directeur de la publication lorsque, contrairement aux dispositions de la loi de 188, un codirecteur de la publication n’a pas été désigné. Selon l’article 43, lorsque les directeurs ou codirecteurs de la publication sont en cause, les auteurs sont poursuivis comme complices.

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Q/R juridiques soulevées :

Qui peut être poursuivi pour un tract diffamatoire ?

Dès qu’un tract est jugé diffamatoire et qu’il a été réalisé sous la direction du secrétaire général d’un syndicat, ce dernier peut être considéré comme le directeur de publication selon l’article 42 de la loi du 29 juillet 1881.

Cela signifie qu’il est passible de poursuites en tant qu’auteur principal. En revanche, d’autres membres du syndicat, comme le trésorier ou un membre du conseil syndical, ne peuvent pas être tenus responsables sans preuves de complicité personnelle.

Les articles 42 et 43 de cette loi s’appliquent spécifiquement aux infractions commises par voie de tract, ce qui renforce la responsabilité des directeurs de publication dans ce contexte.

Quelle est la position de la Cour de cassation sur la liberté d’expression syndicale ?

La Cour de cassation a récemment confirmé la relaxe du syndicat CGT pour des propos jugés injurieux dans un tract, tels que « cancer orchestré » et « direction autiste ».

Cette décision souligne que, dans le cadre d’un conflit social sévère, la diffamation peut être appréciée de manière plus souple. Les propos, bien que provocateurs, ne dépassent pas les limites de la liberté d’expression syndicale, tant qu’ils restent dans le contexte d’un conflit social.

Il est important de noter que la liberté d’expression ne doit pas être restreinte sans motifs impérieux, et que les propos doivent être interprétés dans leur contexte.

Qu’est-ce que la responsabilité en cascade ?

La responsabilité en cascade, selon l’article 42 de la loi du 29 juillet 1881, établit une hiérarchie des responsables en matière de délits par voie de presse.

Les directeurs de publication ou éditeurs sont considérés comme les auteurs principaux. Si ces derniers ne sont pas identifiés, la responsabilité peut être transférée aux auteurs, puis aux imprimeurs, et enfin aux vendeurs, distributeurs et afficheurs.

Cette structure permet de garantir que, même en l’absence d’un directeur de publication, d’autres parties peuvent être tenues responsables des contenus publiés. L’article 43 précise également que les auteurs peuvent être poursuivis comme complices si les directeurs de publication sont impliqués.


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