Cour d’appel de Paris, 15 février 2011
Cour d’appel de Paris, 15 février 2011

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Résumé

Selon l’article L.1242-1 du Code du travail, les CDD d’usage ne doivent pas pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale de l’entreprise. La Cour d’appel de Paris a précisé que la mention d’un double motif dans un CDD, incluant des références à des textes, rend le contrat invalide. Ainsi, ce CDD doit être requalifié en CDI, entraînant des conséquences financières pour l’employeur, telles que des indemnités de licenciement. Cette décision souligne l’importance de la clarté et de la précision dans la rédaction des motifs de recours aux CDD d’usage, notamment dans le secteur de l’audiovisuel.

Selon l’article L.1242-1 du Code du travail, les contrats de travail à durée déterminée d’usage, quel qu’en soit le motif, ne peuvent avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Lorsque le recours aux CDD d’usage est autorisé, l’employeur doit le rédiger par écrit et y apposer certaines mentions obligatoires et notamment le motif précis du recours au CDD, auquel cas, le contrat est réputé être conclu pour une durée indéterminée.
C’est précisément sur le libellé de ce motif que la Cour d’appel de Paris a apporté dans plusieurs décisions du même jour, une précision importante. Un CDD qui comprend le double motif suivant n’est pas valable : i) « contrat est conclu en application des articles L.122-1 (L.1242-1) du Code du travail, de l’article I.1.2.1.B de la convention collective de la communication et de la production audiovisuelles, du protocole d’accord du 30/06/1983 relatif aux dispositions transitoires applicables à certains salariés dotés de contrats à durée déterminée, ainsi que de l’accord salarial du 28/02/2000 concernant les intermittents techniques employés par les sociétés du service public de l’audiovisuel » et ii) contrat conclu pour « renfort intermittent ».
Cette double motivation, dont l’une par seule référence à des textes, introduit une imprécision contraire à l’obligation légale d’énonciation d’un motif précis. Ce CDD doit donc être requalifié en CDI. En d’autres termes, les juges font de la précision et de la clarté des critères incontournables.
De plus, les juges ont conclu que le poste occupé par un chef monteur / chef opérateur du son-vidéo chez France Télévisions était destiné à répondre à une besoin permanent de l’employeur, selon le faisceau d’indices suivants :
– Recours à des CDD d’usage pendant plus de 21 ans ;
– Occupation de fonctions identiques pour un même salaire ;
– Recrutement en CDD d’usage d’autres chefs monteurs (ce qui témoigne d’un besoin structurel permanent de main d’oeuvre de cette sorte).
La fin du recours à des CDD d’usage requalifiés en CDI s’analyse comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse et emporte donc le paiement d’une indemnité légale de licenciement, d’une indemnité compensatrice de préavis, de dommages et intérêts, d’une indemnité de requalification qui ne peut être inférieure à un mois de salaire, des congés payés afférents et enfin du remboursement à l’assurance chômage (Pôle Emploi) des indemnités payées au salarié à compter du jour de son licenciement.
A noter que dans l’une des affaires soumises, les dommages et intérêts obtenus ont été conséquents : 40 000 euros. Cette somme tient compte de l’effectif de l’employeur, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement.

(1) L’article D. 1242-1.6° du code du travail prévoit que le secteur de l’audiovisuel est l’un des secteurs d’activité dans lequel il est d’usage constant de ne pas recourir au CDD: l’accord interbranches sur le recours au CDD d’usage dans le spectacle du 12 octobre 1998 et l’accord collectif national branche de la télédiffusion du 22 décembre 2006, confirment le principe du recours au CDD d’usage pour l’engagement des monteurs et des réalisateurs.


Mots clés : CDD d’usage – Audiovisuel

Thème : CDD d’usage – Audiovisuel

A propos de cette jurisprudence : juridiction :  Cour d’appel de Paris | Date. : 15 fevrier 2011 | Pays : France

Questions / Réponses juridiques

Qu’est-ce qu’un contrat de travail à durée déterminée d’usage selon le Code du travail ?

Un contrat de travail à durée déterminée d’usage (CDD d’usage) est un type de contrat qui, selon l’article L.1242-1 du Code du travail, ne peut pas être utilisé pour pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente d’une entreprise.

Cela signifie que ces contrats doivent être justifiés par des motifs spécifiques et ne peuvent pas être utilisés pour des postes qui nécessitent une présence continue. Si un CDD d’usage est mal rédigé ou ne respecte pas les conditions légales, il peut être requalifié en contrat à durée indéterminée (CDI).

Quelles sont les obligations de l’employeur lors de la rédaction d’un CDD d’usage ?

Lorsqu’un employeur souhaite recourir à un CDD d’usage, il doit respecter certaines obligations. Le contrat doit être rédigé par écrit et inclure des mentions obligatoires, notamment le motif précis justifiant le recours à ce type de contrat.

Si ces mentions ne sont pas respectées, le contrat peut être requalifié en CDI. Cela souligne l’importance de la clarté et de la précision dans la rédaction des motifs, car une formulation vague ou imprécise peut entraîner des conséquences juridiques pour l’employeur.

Quels sont les critères qui peuvent amener à requalifier un CDD d’usage en CDI ?

La requalification d’un CDD d’usage en CDI peut se produire si le contrat ne respecte pas les exigences légales, notamment en ce qui concerne la précision du motif.

Dans une décision de la Cour d’appel de Paris, il a été établi que des éléments tels que le recours prolongé à des CDD d’usage, l’occupation de fonctions identiques pour un même salaire, et le recrutement répétitif de personnel pour des postes similaires peuvent indiquer un besoin permanent de main-d’œuvre.

Ces critères sont essentiels pour déterminer si un CDD d’usage est justifié ou s’il s’agit d’une tentative de contourner les règles du travail.

Quelles sont les conséquences d’une requalification d’un CDD d’usage en CDI ?

La requalification d’un CDD d’usage en CDI a des conséquences significatives pour l’employeur. Cela est considéré comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ce qui entraîne plusieurs obligations financières.

L’employeur doit verser une indemnité légale de licenciement, une indemnité compensatrice de préavis, ainsi que des dommages et intérêts. De plus, une indemnité de requalification est due, qui ne peut être inférieure à un mois de salaire.

Les congés payés afférents et le remboursement des indemnités versées à l’assurance chômage (Pôle Emploi) sont également requis.

Quels éléments ont été pris en compte par les juges pour établir un besoin permanent chez France Télévisions ?

Dans l’affaire examinée par la Cour d’appel de Paris, plusieurs éléments ont été pris en compte pour établir que le poste de chef monteur / chef opérateur du son-vidéo chez France Télévisions répondait à un besoin permanent.

Les juges ont noté le recours à des CDD d’usage pendant plus de 21 ans, l’occupation de fonctions identiques pour un même salaire, et le recrutement continu de chefs monteurs.

Ces éléments ont constitué un faisceau d’indices démontrant que l’employeur avait un besoin structurel et permanent de main-d’œuvre dans ce domaine.

Quel montant de dommages et intérêts a été accordé dans l’une des affaires soumises ?

Dans l’une des affaires examinées, les dommages et intérêts accordés ont été conséquents, s’élevant à 40 000 euros.

Ce montant a été déterminé en tenant compte de plusieurs facteurs, notamment l’effectif de l’employeur, les circonstances de la rupture, le montant de la rémunération versée au salarié, ainsi que son âge et son ancienneté.

La capacité du salarié à trouver un nouvel emploi, en fonction de sa formation et de son expérience professionnelle, a également été prise en compte, ainsi que les conséquences du licenciement sur sa situation.

 


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