L’Essentiel : Le TGI de Paris a décidé de ne pas suspendre la diffusion du film « Grâce à Dieu », affirmant que la liberté d’information prime sur la présomption d’innocence des personnes citées. Le film traite des victimes de pédophilie au sein de l’archevêché de Lyon, impliquant un prêtre actuellement mis en examen. Le tribunal a jugé que le risque d’atteinte à la présomption d’innocence était limité, car les spectateurs sont informés à la fin du film de ce principe. Cette décision souligne l’importance de concilier la liberté d’expression et le respect des droits individuels dans le cadre d’œuvres artistiques.
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Liberté d’informer c/ Présomption d’innocenceLa diffusion du film “Grâce à Dieu” ne sera pas suspendue. Le TGI de Paris a fait prévaloir la liberté d’information sur une possible atteinte à la présomption d’innocence des cadres religieux cités dans le film. Le film évoque le combat de victimes d’actes de pédophilie contre l’archevêché de Lyon, dans le cadre de faits reprochés à un prêtre, en utilisant les prénom et nom du demandeur. Le prêtre mis en cause dans le film est actuellement mis en examen des chefs d’attentat à la pudeur commis avec violence ou surprise sur mineurs de 15 ans et d’atteintes sexuelles avec contrainte, menace ou surprise. Il est en outre témoin assisté du chef de viol. Contrôle de proportionnalitéLe Tribunal a considéré que le risque d’atteinte à la présomption d’innocence était limité dès lors que les spectateurs sont informés, à l’issue du film, du principe de la présomption d’innocence dont bénéficie, comme toute personne, le prêtre cité. Cette mesure, effectuée d’office par les producteurs, vient ainsi rappeler que la personne mise en cause, qui n’a pas été condamnée, est toujours à ce jour innocente, répondant ainsi à l’objectif de l’article 9-1 du code civil qui commande de ne pas présenter comme acquise la culpabilité. Cette information vient juste à la fin du film, et avant le générique, ce qui permet l’information de tous les spectateurs assistant à la séance. Les mesures sollicitées en demande doivent aussi être strictement nécessaires et proportionnées. Or, la mesure visant ainsi à retarder la sortie du film, jusqu’à l’issue définitive de la procédure pénale mettant en cause le prêtre pourrait à l’évidence conduire, compte tenu des divers recours possibles (chambre de l’instruction, tribunal correctionnel, chambre des appels correctionnels, cour de cassation), à ne permettre sa sortie que dans plusieurs années, dans des conditions telles qu’il en résulterait une atteinte grave et très disproportionnée au principe de la liberté d’expression et à la liberté de création, un tel décalage aboutissant, de fait, à une impossibilité d’exploiter le film, oeuvre de l’esprit ; que cela créerait aussi des conditions économiques d’exploitation non supportables. Conditions de l’atteinte à la présomption d’innocenceL’article 9 du code civil indique que chacun a droit au respect de sa vie privée. Les juges peuvent, sans préjudice de la réparation du préjudice subi, prescrire toutes mesures, telles que séquestre, saisie et autres, propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à l’intimité de la vie privée : ces mesures peuvent, s’il y a urgence, être ordonnées en référé. La diffusion d’informations déjà notoirement connues du public n’est toutefois pas constitutive d’atteinte au respect de la vie privée. Il résulte de l’article 6 paragraphe 2 de la convention européenne des droits de l’homme que toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie. L’article 9-1 du code civil dispose en outre que chacun a droit au respect de la présomption d’innocence. Ainsi, lorsqu’une personne est, avant toute condamnation, présentée publiquement comme étant coupable de faits faisant l’objet d’une enquête ou d’une instruction judiciaire, le juge peut, même en référé, sans préjudice de la réparation du dommage subi, prescrire toutes mesures aux fins de faire cesser l’atteinte à la présomption d’innocence, et ce aux frais de la personne, physique ou morale, responsable de cette atteinte. L’atteinte à la présomption d’innocence suppose, pour être caractérisée, que la diffusion litigieuse contienne des conclusions définitives, manifestant un préjugé tenant pour acquise la culpabilité. Ces droits doivent se concilier avec le droit à la liberté d’expression, consacré par l’article 10 de la convention européenne des droits de l’homme. A cet égard, la liberté d’expression ne peut être soumise qu’à des ingérences que dans les cas où celles-ci, prévues par la loi et poursuivant un but légitime dans une société démocratique, constituent des mesures nécessaires au regard du paragraphe 2 de l’article 10 de la convention européenne des droits de l’homme et ne portent pas une atteinte disproportionnée à l’exercice de cette liberté. Spécialement, s’agissant d’une oeuvre de l’esprit dont le retrait est demandé, même à titre temporaire, avant sa diffusion, le demandeur doit démontrer le risque d’une atteinte grave et manifeste à ses droits, ne pouvant être réparée par une autre mesure. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le sujet principal du film « Grâce à Dieu » ?Le film « Grâce à Dieu » aborde le combat de victimes d’actes de pédophilie contre l’archevêché de Lyon. Il met en lumière des faits reprochés à un prêtre, en utilisant les prénom et nom du demandeur. Ce prêtre est actuellement mis en examen pour des infractions graves, notamment des attentats à la pudeur commis avec violence ou surprise sur des mineurs de 15 ans, ainsi que des atteintes sexuelles avec contrainte, menace ou surprise. Il est également considéré comme témoin assisté dans une affaire de viol, ce qui souligne la gravité des accusations portées contre lui. Pourquoi le TGI de Paris a-t-il décidé de ne pas suspendre la diffusion du film ?Le Tribunal judiciaire (TGI) de Paris a jugé que la liberté d’information devait prévaloir sur la présomption d’innocence des personnes citées dans le film. Il a estimé que le risque d’atteinte à la présomption d’innocence était limité, car les spectateurs sont informés à la fin du film du principe de présomption d’innocence dont bénéficie le prêtre. Cette information, fournie par les producteurs, rappelle que la personne mise en cause n’a pas été condamnée et est donc toujours présumée innocente. Quelles sont les implications du contrôle de proportionnalité dans cette décision ?Le contrôle de proportionnalité est un principe juridique qui exige que les mesures prises soient nécessaires et proportionnées par rapport à l’objectif visé. Dans ce cas, le TGI a considéré que retarder la sortie du film jusqu’à la fin de la procédure pénale pourrait entraîner une atteinte grave à la liberté d’expression et à la liberté de création. Un tel retard pourrait rendre impossible l’exploitation du film, ce qui aurait des conséquences économiques non supportables pour les producteurs. Comment la présomption d’innocence est-elle protégée par la loi ?La présomption d’innocence est protégée par plusieurs articles du code civil et de la convention européenne des droits de l’homme. L’article 9-1 du code civil stipule que chacun a droit au respect de la présomption d’innocence, et l’article 6 paragraphe 2 de la convention européenne précise que toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à preuve du contraire. Les juges peuvent prescrire des mesures pour faire cesser une atteinte à cette présomption, mais cela doit être fait sans préjudice de la réparation du dommage subi. Quelles conditions doivent être remplies pour qu’il y ait atteinte à la présomption d’innocence ?Pour qu’il y ait atteinte à la présomption d’innocence, la diffusion d’informations doit contenir des conclusions définitives qui manifestent un préjugé en faveur de la culpabilité. Il est également important que la diffusion d’informations soit faite avant toute condamnation, car cela pourrait influencer l’opinion publique et compromettre le droit à un procès équitable. La liberté d’expression doit être équilibrée avec le droit à la présomption d’innocence, et toute ingérence dans cette liberté doit être justifiée par des raisons légitimes. Quel rôle joue la liberté d’expression dans ce contexte ?La liberté d’expression est un droit fondamental protégé par l’article 10 de la convention européenne des droits de l’homme. Dans le contexte de la diffusion du film « Grâce à Dieu », cette liberté est essentielle pour garantir que des œuvres artistiques puissent être présentées au public sans censure injustifiée. Cependant, cette liberté n’est pas absolue et peut être soumise à des restrictions, mais celles-ci doivent être prévues par la loi et nécessaires dans une société démocratique. Le demandeur doit prouver qu’il existe un risque d’atteinte grave et manifeste à ses droits pour justifier une ingérence dans la liberté d’expression. |
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