L’Essentiel : Le détournement du statut d’autoentrepreneur en salariat déguisé peut entraîner des sanctions, notamment un redressement URSSAF. Dans l’affaire Sud Radio, l’URSSAF a requalifié les sommes versées à un animateur en salaires, soulignant un lien de subordination. Bien que l’animateur ait été immatriculé comme indépendant, son contrat de prestation de services démontrait qu’il travaillait sous l’autorité de Sud Radio, sans maîtrise du contenu éditorial. La juridiction a ainsi conclu que son activité relevait d’un emploi salarié, en raison des conditions de travail imposées par la société, ce qui a conduit à la requalification de son statut.
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Le détournement du statut d’autoentrepreneur en salariat déguisé peut être sanctionné, entre autres, par un redressement URSSAF (requalification des sommes versées au prestataire en salaires). Affaire Sud RadioL’URSSAF Rhône Alpes a réintégré dans l’assiette des cotisations de la société Sud Radio les sommes versées à l’animateur de l’émission « Qu’est-ce qui vous fait courir », requalifiées en salaires. Détournement du statut d’autoentrepreneurL’auto-entrepreneur, immatriculé en qualité d’animateur culturel indépendant avait conclu avec la SA Sud Radio Services un contrat de prestation de services par lequel la radio s’engageait à lui confier une émission quotidienne, consistant dans l’interview de personnalités connues dans les milieux politiques, culturels, sportifs et économiques, avec un minimum de 60 émissions au cours de la durée du contrat. Ce contrat prévoyait que l’enregistrement des émissions serait effectué dans les locaux de Sud Radio à Paris, et que l’animateur conférait l’exclusivité radiophonique de ses prestations et des émissions durant la durée du contrat. L’animateur devait par ailleurs faire preuve de rigueur et d’exactitude dans la production et l’animation à l’antenne, livrer les éléments finalisés en fonction des demandes de la société Sud Radio, laquelle était responsable en dernier ressort du contenu éditorial de l’émission. Renversement de la présomption de non salariatSelon l’article L. 8221-6 du code du travail, sont présumés ne pas être liés avec le donneur d’ordre par un contrat de travail dans l’exécution de l’activité donnant lieu à immatriculation ou inscription, les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d’allocations familiales. L’existence d’un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque les indépendants fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d’ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci. Est présumé travailleur indépendant celui dont les conditions de travail sont définies exclusivement par lui-même ou par le contrat les définissant avec son donneur d’ordre. En l’occurrence, l’animateur a été immatriculé à l’URSSAF avec retard (un mois après le début de ses missions). La présomption de non salariat ne lui était donc pas applicable. L’existence d’un lien de subordination ne dépend ni de la volonté des parties ni de la qualification donnée à la prestation effectuée mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité du travailleur. Est ainsi considéré comme travailleur salarié celui qui accomplit un travail pour un employeur dans un lien de subordination juridique permanente, défini comme « l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. » L’examen du contrat de prestation de services conclu entre les parties démontrait que la prestation du prestataire s’intégrait dans le cadre d’un service organisé, le prestataire enregistrant ses émissions dans les locaux de la société Sud Radio et avec le matériel fourni par cette dernière, n’étant pas maître du contenu éditorial de ses émissions, et soumis aux directives de la société co-contractante. La juridiction a considéré que l’activité du prestataire relevait d’une activité salariale, normalement exercée, dans le secteur de l’audiovisuel faisant partie des secteurs dans lesquels il est d’usage d’y recourir en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère temporaire de l’emploi, dans le cadre d’un contrat à durée déterminée. Télécharger la décision |
Q/R juridiques soulevées :
Qu’est-ce que le détournement du statut d’autoentrepreneur ?Le détournement du statut d’autoentrepreneur se réfère à la situation où une personne immatriculée en tant qu’autoentrepreneur est en réalité soumise à un lien de subordination similaire à celui d’un salarié. Cela peut se produire lorsque les conditions de travail et les directives imposées par le donneur d’ordre ressemblent à celles d’un contrat de travail classique. Dans ce cas, les sommes versées peuvent être requalifiées en salaires, entraînant des sanctions telles qu’un redressement URSSAF. Quelle est l’affaire Sud Radio et son impact ?L’affaire Sud Radio illustre un cas concret de détournement du statut d’autoentrepreneur. L’URSSAF Rhône Alpes a requalifié les paiements effectués à un animateur de radio en salaires, ce qui a eu pour conséquence de réintégrer ces sommes dans l’assiette des cotisations sociales. Cette décision souligne l’importance de la nature des relations de travail et des conditions dans lesquelles les prestations sont fournies. Elle met en lumière les risques encourus par les entreprises qui utilisent des autoentrepreneurs dans des conditions qui pourraient être considérées comme du salariat déguisé. Quelles sont les conditions pour établir un lien de subordination ?Le lien de subordination est établi lorsque le travailleur exécute un travail sous l’autorité d’un employeur, qui a le pouvoir de donner des ordres, de contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements. Dans le cas de l’animateur de Sud Radio, plusieurs éléments ont été pris en compte : l’enregistrement des émissions dans les locaux de la radio, l’utilisation de matériel fourni par celle-ci, et le fait que l’animateur n’avait pas le contrôle sur le contenu éditorial. Ces facteurs ont conduit à la requalification de son statut. Comment la présomption de non-salariat est-elle renversée ?La présomption de non-salariat, selon l’article L. 8221-6 du code du travail, s’applique aux personnes immatriculées qui ne sont pas considérées comme liées par un contrat de travail. Cependant, cette présomption peut être renversée si les conditions de travail montrent un lien de subordination. Dans le cas de l’animateur, son immatriculation tardive à l’URSSAF a joué un rôle déterminant. Cela a permis de démontrer qu’il était en réalité dans une situation de travail salarié, malgré son statut d’autoentrepreneur. Quels sont les critères pour considérer un travailleur comme salarié ?Pour qu’un travailleur soit considéré comme salarié, il doit accomplir un travail dans un lien de subordination juridique permanente. Cela signifie que les conditions de travail doivent être définies par l’employeur, et non par le travailleur lui-même. Dans l’affaire Sud Radio, l’animateur était soumis aux directives de la société, ce qui a conduit à la conclusion que son activité relevait d’un emploi salarié, malgré le contrat de prestation de services qui le liait à la radio. |
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