Requalification des CDD d’usage en CDI : enjeux et conséquences

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Requalification des CDD d’usage en CDI : enjeux et conséquences

L’Essentiel : Selon l’ARCEPicle L 1242-1 du code du travail, un contrat à durée déterminée (CDD) ne peut pas pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale de l’entreprise. Il doit être établi pour une tâche précise et temporaire, dans des cas spécifiques tels que le remplacement d’un salarié ou un accroissement temporaire d’activité. Dans une affaire jugée par la Cour d’appel de Bordeaux, des CDD d’usage d’aide de plateau ont été requalifiés en CDI, car la société n’a pas prouvé le caractère temporaire de l’emploi, entraînant une indemnisation pour le salarié.

CDD d’usage d’aide de plateau

Selon l’article L 1242-1 du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Un CDD ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants :

1° remplacement d’un salarié (dans 5 cas limitativement énumérés) ;

2° accroissement temporaire d’activité de l’entreprise ;

3° emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire des emplois,

4° remplacement d’un chef d’entreprise artisanale, industrielle ou commerciale, d’une personne exerçant une profession libérale (….)

5° remplacement d’un chef d’exploitation agricole (….).

En application du 3° de l’article L 1242-2, l’article D 1242-1 a énuméré les secteurs d’activité dans lesquels des contrats à durée déterminée peuvent être conclus pour les emplois pour lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois comme les secteurs suivants : (….)

6° les spectacles, l’action culturelle, l’audiovisuel, la production cinématographique, l’édition phonographique (….).

Selon l’article L 1242-12 alinéa premier du code du travail, le contrat de travail à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif. À défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée. La situation de fait et les contrats de travail mis en place.

En l’espèce, une société de production se prévalait de son activité de production de téléfilms dans le secteur audiovisuel pour justifier du recours au CDD d’usage d’aide de plateau et affirmait que cette activité était par nature temporaire. Or, l’examen des 14 lettres d’engagement et 30 contrats à durée déterminée conclus avec le salarié ont montré que :

– la mention ‘contrat à durée déterminée’ ne figure sur aucune des 14 lettres d’engagement établies au début de la période en litige,

– selon les 14 lettres d’engagement, l’intervenant spécialisé est rémunéré au ‘cachet brut’,

– les 14 lettres d’engagement portent comme motif du recours au contrat à durée déterminée : ‘renfort intermittent’,

– les 30 contrats de travail à durée déterminée établis de 2005 à 2010 inclus, portent en titre ‘contrat de travail à durée déterminée d’intervenant technique’,

– les 22 premiers contrats de travail établis de 2005 à février 2009 inclus portent en tête de leur texte le visa des articles L 121-1-1 et suivants, puis L 1242-1 (nouvelle numérotation) et suivants du code du travail,

– les 22 premiers contrats de travail établis de 2005 à février 2009 inclus portent comme motif du recours au contrat à durée déterminée : ‘renfort intermittent’,

Les juges ont requalifié l’ensemble des CDD conclus en un CDI. En effet, la mention du motif ‘renfort intermittent’ comme motif de recours à des contrats à durée déterminée tel qu’elle figurait sur les 14 lettres d’engagement et sur les 22 contrats de travail à durée déterminée ‘ordinaires’, ne correspond à la mention d’aucun des cinq motifs énumérés à l’article L 1242-2 du code du travail (remplacement de salarié, accroissement temporaire d’activité, contrat saisonnier d’usage, remplacement de chef d’entreprise non agricole, remplacement de chef d’entreprise agricole) et ne répond donc pas aux exigences de l’article L1242-12 du même code.

CDD d’usage et preuve du caractère temporaire de l’emploi

La société ne fournissait aucune démonstration que la fonction salariée d’aide de plateau exercée en son sein demeurait une activité par nature temporaire à certaines périodes. Elle ne démontrait pas qu’entre les activités de tournage auxquelles elle a employé le salarié, il n’existait aucune autre activité de tournage pour d’autres téléfilms ou séries télévisées.

Le cumul de 14 lettres d’engagement et des 22 contrats à durée déterminée irréguliers antérieurs ne démontrait en l’espèce qu’un recours abusif de la société aux contrats à durée déterminée, mais non pas un usage constant, paisible et légitime de recours à des contrats à durée déterminée ‘d’usage’ qu’aurait pu justifier une véritable activité à caractère temporaire.

CDD d’usage abusifs : l’indemnisation du salarié

Selon l’article L 1245-2 alinéa 2 du code du travail, lorsque le juge prud’homal fait droit à la demande du salarié de requalification d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, il lui accorde une indemnité, à la charge de l’employeur, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire. Cette disposition s’applique sans préjudice de l’application des dispositions du titre III du présent livre (livre II : le contrat de travail) relatives aux règles de rupture du contrat de travail à durée indéterminée.

En l’espèce, la méconnaissance des dispositions des articles L 1242-2 et L 1242-12 lors de l’établissement et de la mise en oeuvre des 44 contrats litigieux est sanctionnée par leur requalification en contrat à durée indéterminée. Par ailleurs, Selon l’article L 1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n’est pas motivé par une faute grave, le salarié à droit, s’il justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus d’au moins deux ans, à un préavis de deux mois.

Selon l’article L 1234-5 du même code, lorsque le salarié n’exécute pas le préavis, il a droit, sauf s’il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice. Le salarié titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte une année d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement. Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire. Selon l’article R 1224-2 du code du travail, pris pour l’application des dispositions légales ci-avant, l’indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté auquel s’ajoutent deux cinquièmes de mois par année au-delà de dix ans d’ancienneté.

Si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse et que l’une au l’autre des parties refuse la réintégration du salarié, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l’employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Le salarié a également droit au montant des intérêts légaux. Selon l’article 1153 du code civil, dans les obligations qui se bornent au paiement d’une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l’exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, sauf règles particulière au commerce et au cautionnement. Ces dommages-intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d’aucune perte. Ils ne sont dus que du jour de la sommation de payer ou d’un autre acte équivalent.

Selon l’article 1153-1 du code civil, en toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l’absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n’en décide autrement. En cas de confirmation pure et simple par le juge d’appel d’une décision allouant une indemnité en réparation d’un dommage, celle-ci porte de plein droit intérêt au taux légal à compter du jugement de première instance. Dans les autres cas, l’indemnité allouée en appel porte intérêt à compter de la décision d’appel.

Mots clés : CDD d’usage

Thème : CDD d’usage

A propos de cette jurisprudence : juridiction :  Cour d’appel de Bordeaux | Date. : 13 mai 2014 | Pays : France

Q/R juridiques soulevées :

Qu’est-ce qu’un CDD d’usage selon le code du travail ?

Un CDD d’usage, selon l’article L 1242-1 du code du travail, est un contrat de travail à durée déterminée qui ne peut être utilisé que pour des tâches précises et temporaires.

Il ne doit pas pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Les cas dans lesquels un CDD peut être conclu incluent le remplacement d’un salarié, un accroissement temporaire d’activité, des emplois saisonniers, ou le remplacement de chefs d’entreprise.

Quels sont les motifs légaux pour conclure un CDD ?

Les motifs légaux pour conclure un CDD sont énumérés dans l’article L 1242-2 du code du travail. Ils incluent :

1. Le remplacement d’un salarié absent.
2. L’accroissement temporaire d’activité.
3. Les emplois saisonniers.
4. Le remplacement d’un chef d’entreprise artisanale ou commerciale.
5. Le remplacement d’un chef d’exploitation agricole.

Ces motifs doivent être clairement définis dans le contrat pour éviter toute requalification en CDI.

Quelles sont les conséquences d’une requalification d’un CDD en CDI ?

La requalification d’un CDD en CDI a des conséquences significatives pour l’employeur. Selon l’article L 1245-2, si un juge accorde cette requalification, le salarié a droit à une indemnité d’au moins un mois de salaire.

De plus, si le licenciement du salarié n’est pas justifié par une faute grave, il peut également avoir droit à un préavis et à une indemnité de licenciement, calculée en fonction de son ancienneté et de sa rémunération.

Comment prouver le caractère temporaire d’un emploi ?

Pour prouver le caractère temporaire d’un emploi, l’employeur doit démontrer que la fonction exercée est par nature temporaire. Cela inclut la nécessité de montrer qu’il n’existe pas d’autres activités de tournage ou de travail à long terme.

Dans le cas étudié, la société n’a pas réussi à prouver que l’emploi d’aide de plateau était temporaire, ce qui a conduit à une requalification des CDD en CDI.

Quelles sont les indemnités dues en cas de licenciement abusif ?

En cas de licenciement abusif, le salarié a droit à plusieurs indemnités. Selon l’article L 1234-1, un salarié avec au moins deux ans d’ancienneté a droit à un préavis de deux mois.

De plus, l’indemnité de licenciement est calculée en fonction de l’ancienneté et ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté, plus deux cinquièmes de mois par année au-delà de dix ans.

Quels sont les droits du salarié en cas de non-respect des dispositions légales ?

Si les dispositions légales ne sont pas respectées lors de l’établissement d’un CDD, le salarié peut demander une requalification en CDI. En cas de licenciement non justifié, il a également droit à une indemnité, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Les intérêts légaux peuvent également s’appliquer sur les indemnités dues, selon l’article 1153 du code civil, ce qui renforce la protection des droits du salarié.


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