Cour d’appel de Bordeaux, 27 octobre 2021, N° RG 18/04136
Cour d’appel de Bordeaux, 27 octobre 2021, N° RG 18/04136

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Bordeaux

Thématique : Vidéosurveillance : à nouveau site, nouvelle autorisation

Résumé

La société Axeo a régulièrement consulté le comité d’entreprise et informé ses salariés de la vidéosurveillance dans ses locaux à Mérignac. Cependant, les faits litigieux se sont déroulés sur un nouveau site à Martignas, où aucune démarche d’information n’avait été entreprise. L’absence de déclaration préalable à la CNIL et d’information individuelle des salariés sur ce dispositif rend la vidéo utilisée pour prouver la faute de M. X irrecevable. En conséquence, le licenciement de M. X, fondé sur des preuves illicites, ne peut être justifié, et la cour confirme le jugement du conseil de prud’hommes.

S’il n’est pas contesté que la société Axeo avait régulièrement consulté le comité d’entreprise, avait déclaré à la CNIL l’existence d’une vidéosurveillance de ses locaux, et avait informé ses salariés de l’existence de ce dispositif, toutes ces diligences concernaient ses locaux situés à Mérignac, alors que les faits litigieux se sont déroulés sur son nouveau site de Martignas, pour lequel aucune démarche n’avait été entreprise, alors qu’en outre, il n’était pas démontré que le salarié ait été informé de l’existence de ce système de surveillance sur le nouveau site.

S’agissant de locaux différents, l’emplacement des caméras est également différent, si bien qu’une nouvelle procédure d’autorisation doit être entreprise par l’employeur, et chaque salarié doit notamment être informé de l’existence et de l’emplacement des caméras sur le nouveau site.

Dans ces conditions, la vidéo prise par l’employeur afin d’établir la faute du salarié (agression physique d’un collègue) ainsi que les photographies qui en ont été extraites ne sont pas recevables.

Si aux termes de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention, encore faut-il que cette preuve soit licite, et ainsi recevable. L’article L.1222-4 du code du travail dispose notamment qu »aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance’.

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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION A

ARRÊT DU : 27 OCTOBRE 2021

(Rédacteur : Monsieur Rémi Figerou, conseiller)

PRUD’HOMMES

N° RG 18/04136 – N° Portalis DBVJ-V-B7C-KRI4

Monsieur B X

c/

SA AXEO

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 22 juin 2018 (RG n° F 17/01070) par le conseil de prud’hommes – formation paritaire de BORDEAUX, section industrie, suivant déclaration d’appel du 13 juillet 2018,

APPELANT :

Monsieur B X, né le […] à […], de

nationalité française, profession chef d’équipe assainissement, demeurant […],

représenté et assisté par Maître Olivier MEYER de la SCP GUÉDON – MEYER, avocat au barreau de BORDEAUX,

INTIMÉE :

SA Axeo, siret n° 414 874 446, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, […],

représentée par Maître Annie TAILLARD de la SCP ANNIE TAILLARD AVOCAT, avocate au barreau de BORDEAUX,

assistée de Maître Émilie MARTIN substituant Maître Magali BOUTIN de la SELAS BARTHÉLÉMY AVOCATS, avocates au barreau de NICE,

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 20 septembre 2021 en audience publique, devant la cour composée

de :

Madame G H-I, présidente

Madame Sophie Masson, conseillère

Monsieur Rémi Figerou, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffière lors des débats : Sylaine Déchamps,

Greffière lors du prononcé : D-X E-F,

ARRÊT :

— contradictoire,

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur B X a été embauché en qualité de chauffeur poids lourd par la société Axeo, filière du groupe industriel Suez, suivant contrat à durée indéterminée à effet du 9 juin 2008.

Aux derniers états de la relation contractuelle, M. X occupait le poste de chef d’équipe assainissement.

M. X a fait l’objet de deux avertissements en date du 20 août 2014 et du 3 octobre 2014, et d’une mise à pied disciplinaire le 9 juillet 2015.

Par lettre en date du 8 février 2017, M. X a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 17 février 2017, avec notification d’une mise à pied à titre conservatoire.

Par courrier du 23 février 2017, M. X a été licencié pour cause réelle et sérieuse.

Par lettre du 7 mars 2017, M. X a contesté les motifs de son licenciement.

Par lettre du 14 mars 2017, la société Axeo a maintenu les motifs du licenciement.

Monsieur X a saisi le conseil de prud’hommes de Bordeaux, le 7 juillet 2017 aux fins de contester la licéité de la mise en place de la vidéosurveillance, son licenciement pour cause réelle et sérieuse et solliciter diverses sommes à titre d’indemnité.

Par jugement du 22 juin 2018, le conseil de prud’hommes a :

Avant dire droit,

— dit que la vidéo sur le site de Martignas produite, constitue une preuve illicite à défaut de déclaration auprès de la CNIL et d’information/consultation du CE et du CHSCT, et d’information individuelle de Monsieur X ;

— dit que la déclaration du système de vidéosurveillance effectuée sur le site de Martignas le 20 février 2017 est irrecevable puisque cette déclaration/modification faite auprès de la CNIL a été faite postérieurement au visionnage des faits qui ont eu lieu le 8 février 2017 ;

— dit que la société Axeo ne prouve pas :

— une déclaration auprès de la CNIL du système de vidéosurveillance sur le site de Martignas avant le 8 février 2017,

— une information consultation du comité d’entreprise pour le site de Martignas avant le 8 février 2017,

— une information consultation du CHSCT pour le site de Martignas avant le 8 février 2017,

— une information individuelle auprès de Monsieur X avant le 8 février 2017.

— déclaré irrecevables et inopposables les pièces adverses n° 1-2-4-5-6 ;

Sur le fond,

— dit que le licenciement de M. X repose sur une cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

— débouté ce dernier de l’intégralité de ses demandes ;

— condamné M. X à verser 50 euros sur le fondement de l’article 700 du code procédure civile à la société Axeo ;

— condamné M. X aux dépens sur le fondement de l’article 696 du code procédure civile et frais éventuels d’exécution ;

— débouté la société Axeo de sa demande de paiement de la somme de 5 000 euros au titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Par déclaration au greffe en date du 13 juillet 2018, M. X a relevé appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières écritures en date du 18 juin 2021, M. X demande à la cour de :

— déclarer recevable et bien fondé son appel ;

— confirmer le jugement du conseil de Prud’hommes sur l’irrecevabilité et l’inopposabilité des pièces adverses n° 1, 2, 4, 5 et 6 ;

— dire que la vidéo sur le site de Martignas produite, constitue une preuve illicite à défaut de déclaration auprès de la CNIL et d’information consultation du comité d’entreprise et du CHSCT et de son information individuelle ;

— réformer le jugement du conseil de prud’hommes pour le surplus ;

— dire qu’il a fait l’objet d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse le 23 février

2017 ;

— dire recevable la demande de rappel de salaires du 19 décembre 2016 au 6 janvier 2017 et les congés payés y afférents ;

— condamner la SA Axeo à lui verser les sommes suivantes :

* 1 440 euros au titre de salaire du 19 décembre 2016 au 6 janvier 2017

* 144 euros au titre d’indemnité de congés payés afférents

* 36 000 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

— réformer le jugement sur l’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code procédure civile ;

— condamner la SA Axeo à lui verser une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code procédure civile devant le conseil de prud’hommes et devant la cour d’appel ;

— débouter la SA Axeo de ses demandes ;

— condamner la SA Axeo aux entiers dépens et frais éventuels d’exécution.

Aux termes de ses dernières écritures du 18 janvier 2021, la SA Axeo demande à la cour :

— In limine litis, de déclarer irrecevable la demande de rappel de salaire et d’indemnité de congés payés y afférente,

— A titre subsidiaire, de débouter M. X de sa demande de rappel de salaire et d’indemnité de congés payés y afférente,

— infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Bordeaux en ce qu’il a déclaré irrecevables ses pièces 1, 2, 4, 5 et 6,

— déclarer recevables ses pièces 1, 2, 4, 5 et 6,

— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a dit que le licenciement de Monsieur X reposait sur une cause réelle et sérieuse,

— constater que le licenciement de Monsieur X était parfaitement justifié,

— confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Bordeaux en ce qu’il a débouté M. X de l’ensemble de ses demandes,

— débouter M. X de l’intégralité de ses demandes,

— infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Bordeaux en ce qu’il l’a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

— condamner M. X au paiement, à son bénéfice, de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

— confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Bordeaux en ce qu’il a condamné M. X au paiement de la somme de 50 euros au titre de l’article 700 du code procédure civile,

— condamner au surplus M. X au paiement, à son bénéfice, de la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens et frais de procédure.

Pour plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la fin de non-recevoir

La société fait valoir que la demande du salarié en paiement d’un rappel de salaire est irrecevable parce que nouvelle.

M. X oppose les termes de l’article 566 du code du travail aux termes duquel les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

En l’espèce, la saisine du conseil de prud’hommes par Monsieur X est intervenue le 7 juillet 2017, soit postérieurement au 1er août 2016, de sorte que conformément aux dispositions de l’article 45 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 relatif à la justice prud’homale et au traitement judiciaire du contentieux du travail, l’article 8 de ce même décret qui a supprimé l’article R.1452-7 du code du travail autorisant la présentation même en appel de demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail, est applicable.

Ainsi, les dispositions des articles R.1452-6 et R.1452-7 du code du travail, respectivement relatifs au principe de l’unicité de l’instance et à la recevabilité des demandes nouvelles formées en appel ayant été abrogées depuis le 1er août 2016, il y a lieu d’appliquer l’article 566 du code de procédure civile qui précise que les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

En première instance, M. X n’a pas sollicité de rappel de salaires. Il sollicite devant la cour un tel rappel de salaire pour la période du 19 décembre 2016 au 6 janvier 2017, au motif que l’entreprise aurait été fermée sans qu’il en soit préalablement avisé.

Cette demande ne tend pas aux mêmes fins que celle visant à obtenir que son licenciement soit déclaré sans cause réelle et sérieuse.

Elle n’en constitue pas plus l’accessoire ou le complément nécessaire, alors qu’elle aurait pu être présentée en dehors de toute procédure de licenciement.

Dès lors, cette demande est irrecevable par application des articles 564 et suivants du code de procédure civile.

Sur la rupture du contrat de travail pour cause réelle et sérieuse

Le licenciement doit reposer sur une cause réelle et sérieuse c’est à dire exacte et pertinente. Le juge forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Le doute profite au salarié.

La lettre de licenciement dont les motifs énoncés fixent les limites du litige est motivée comme suit :

‘… le mercredi 8 février 2017, vous avez eu une altercation d’abord verbale puis physique avec un de nos chauffeurs intérimaires. En effet, dès votre arrivée le matin au dépôt, vous lui avez demandé de vous rendre l’adaptateur de votre camion en l’accusant de l’avoir volé. Il a certifié le contraire et une jouxte verbale s’en est suivie, au cours de laquelle vous avez proféré des insultes à son égard. Alors que vous quittiez le dépôt, il vous a suivi et vous a demandé qui vous étiez ‘pour lui parler comme ça’. Vous vous êtes alors retourné, vous vous êtes dirigé vers lui puis, vous l’avez violemment empoigné et avez été jusqu’à le mettre à terre. Il n’a été relevé que quelques minutes après, par un autre collaborateur. Ces violences verbales puis physiques, quelle qu’en soit la cause, ne sont absolument pas tolérables. Elles portent atteinte à l’image que nous souhaitons donner de notre entreprise et ne correspondent absolument pas à nos valeurs’ votre attitude confirme le comportement que nous déplorons depuis plusieurs mois qui n’est plus en phase avec les valeurs de l’entreprise et porte atteinte au bon fonctionnement de la société. En effet, pour rappel, pas moins de deux avertissements et une mise à pied depuis juillet 2014, vous ont été notifiés. Malgré ces sanctions, vous continuez à vous obstiner dans la provocation, le dénigrement de l’autorité, le non respect des régles applicables au sein de la société et l’insubordination, Pire vous faites désormais preuve de violences verbales et physiques avec vos collègues de travail. Malgré les différentes sanctions et nos divers entretiens, nos remarques verbales et nos réponses à vos courriers, votre comportement ne cesse de nuire à l’entreprise et devient de plus en plus préjudiciable. Pire encore, vous vous entêtez à entretenir le conflit avec la direction. Invraisemblablement, vous n’admettez pas vos torts comme à chaque fois que nous vous reprochons vos manquements.Votre mauvaise foi est trés nuisible pour notre agence et ne nous permet plus de collaborer dans de bonnes conditions. Votre esprit contestataire et sans cesse en rébellion, ne sont plus supportables. Ces derniers évenements et votre manque de lucidité sur la gravité de vos actes et votre comportement viennent encore confirmer la désinvolture dont vous faites preuve et fragiliser encore notre relation de confiance. Le conflit permanent que vous entendez engager avec la Direction et maintenant, avec vos collègues ne peut perdurer. Malgré tous nos efforts pour vous conserver au sein de la Société, votre comportement est totalement inacceptable et rend impossible le maintien de nos relations contractuelles. Au regard de ces différents éléments, nous ne pouvons que constater que vos graves manquements aux obligations essentielles vous incombant rendent impossible toute poursuite de notre relation contractuelle. Aussi, nous sommes au regret de vous signifier votre licenciement pour cause réelle et sérieuse.’

La preuve des faits du 8 février 2017 reprochés à M. X, repose sur un enregistrement de vidéosurveillance du parking de l’entreprise, et sur une attestation.

M. X demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré irrecevables les pièces versées par l’employeur, relatives à l’enregistrement d’une vidéo surveillance du jour des faits, et de photos qui en auraient été extraites.

Sur la preuve des faits du 8 février 2017

Si aux termes de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention, encore faut-il que cette preuve soit licite, et ainsi recevable.

L’article L.1222-4 du code du travail dispose notamment qu »aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance’.

En l’espèce, s’il n’est pas contesté que la société Axeo avait régulièrement consulté le comité d’entreprise, avait déclaré à la CNIL l’existence d’une vidéosurveillance de ses locaux, et avait informé ses salariés de l’existence de ce dispositif, toutes ces diligences concernaient ses locaux situés à Mérignac, alors que les faits litigieux se sont déroulés sur son nouveau site de Martignas, pour lequel aucune démarche n’avait été entreprise, alors qu’en outre, il n’est pas démontré que M. X ait été informé de l’existence de ce système de surveillance sur le nouveau site.

Or, s’agissant de locaux différents, l’emplacement des caméras était également différent, si bien qu’une nouvelle procédure d’autorisation devait être entreprise par l’employeur, et chaque salarié devait notamment être informé de l’existence et de l’emplacement des caméras sur le nouveau site.

D’ailleurs, quelques jours après les faits, le 20 février 2017, la société Axeo a déclaré à la CNIL son système de vidéosurveillance pour le site de Martignas (piéce n° 10 de la société Axeo).

Dans ces conditions, la vidéo prise le 8 février 2017, ainsi que les photographies qui en ont été extraites ne sont pas recevables.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il a jugé illicites et irrecevables les pièces 1, 2, 4, 5, et 6 de la société Axeo.

La preuve des faits reprochés à M. X, le 8 février 2017, repose également selon l’employeur sur l’attestation de M. Y.

Ce dernier atteste de ce que le 8 février 2015, vers 7h15, M. X lui aurait demandé de lui rendre un adaptateur, l’accusant de lui avoir volé. Il lui aurait répondu qu’il n’aurait pas volé une telle pièce. Alors que M. X l’aurait insulté, il lui aurait demandé qui il était pour lui parler ainsi, M. X serait revenu vers lui et l’aurait empoigné violemment ce qui l’aurait fait tomber au sol. Il ajoutera que d’autres salariés l’auraient aidé à se relever, et que le lendemain, il aurait souffert d’une sciatique.

M. X conteste cette version des faits et affirme que c’est lui qui aurait été agressé par M. Y.

Toutefois, il résulte de sa propre pièce n° 36, soit le témoignage de M. Z, que si celui-ci affirme que M. Y se serait laissé tomber, le témoin a ensuite demandé à Monsieur X de le lâcher, et il a ensuite aidé M. Y à se relever.

Dans ces conditions, ainsi que les premiers juges l’ont jugé, l’altercation entre M. X et un autre salarié de la société est avérée, et il résulte du témoignage de Messieurs Y et Z, que M. X avait bien empoigné son collègue, puisque M. Z lui avait demandé de le lâcher alors qu’il était au sol, élément essentiel que M. X omet volontairement de rappeler dans sa relation des faits.

Il convient en outre d’observer que s’il avait été démontré que M. Y avait agressé M. X, il aurait appartenu à celui-ci, en sa qualité de chef d’équipe, de calmer son agresseur et de l’inviter à cesser toute velléité d’affrontement, en demandant éventuellement si celui-ci ne voulait rien entendre à son supérieur hiérarchique d’intervenir.

En conséquence, l’altercation reprochée à Monsieur X est avérée et constitue à elle seule

une cause réelle et sérieuse de licenciement.

La lettre de licenciement fait état de trois sanctions antérieures (deux avertissements et une mise à pied disciplinaire) que M. X conteste en tout ou partie. Mais l’altercation établie suffit à fonder un licenciement et l’examen des faits sanctionnés antérieurement n’est pas nécessaire.

Sans demander d’indemnisation, M. X fait état de ce qu’il n’a pas été remboursé après le vol d’une paire de lunettes dans son vestiaire, du non respect par l’employeur des préconisations du médecin du travail, enfin d’un ‘management détestable’ s’apparentant à du harcèlement moral.

L’employeur n’a pas déclaré le vol auprès de son assureur mais cet événement est sans lien avec les faits énoncés dans la lettre de licenciement.

Ensuite, il n’est pas établi que la société aurait méconnu les préconisations du médecin du travail dès lors que la restriction posée par le praticien (limiter l’utilisation de machines provoquant des vibrations dos – type pelle -) est postérieure au reproche tenant au refus de conduire un tel engin.

Enfin et s’agissant du harcèlement moral, M. X fait état d’une enquête diligentée au sein de l’entreprise relativement aux méthodes managériales du responsable d’exploitation – M. A – et de la lettre de son épouse à l’employeur du 15 mai 2015.

La société conteste l’existence d’une enquête diligentée par un délégué du personnel suite à des plaintes de salariés relatives aux méthodes de management de M. A ; elle écarte tout lien entre les difficultés de santé du salarié et ses conditions de travail.

Lorsque survient un litige relatif à un harcèlement moral, il revient au juge de dire si le salarié présente des faits qui, pris dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral ; au vu de ces éléments, il incombe à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

M. X qui ne fait état d’aucun fait précis, ne verse aucune pièce utile au soutien de difficultés rencontrées avec M. A lequel atteste avoir démissionné de l’entreprise pour rejoindre un emploi mieux rémunéré et non à la demande de l’employeur.

À réception du second avertissement relatif au défaut de port de casque, M. X a répondu que cette obligation n’était pas affichée dans le dépôt, que ‘sinon, c’est du harcèlement’.

La société ne produit pas de pièce au soutien du bien-fondé de cette sanction.

Le 15 mai 2015, Mme X a écrit à l’employeur que ‘depuis un an et 1/2, mon époux a changer de caractère. Je pense qu’il déprime, j’ai peur pour notre avenir. Je ne voudrais pas qu’il fasse une bêtise’.

La société n’a ensuite pas entendu M. X et n’établit pas que l’avertissement litigieux était fondé sur des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Cependant, la cour relève que M. X ne tire aucune conséquence de droit entre le harcèlement et les faits du 8 février 2017 dont il sera souligné qu’il conteste la véracité.

Sur la demande de dommages et intérêts de la société Axeo pour procédure abusive

M. X a utilisé son droit de relever appel d’une décision de justice qui lui faisait grief, sans qu’il soit démontré qu’il ait agi de manière dilatoire ou abusive.

En conséquence, la société Axeo sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les autres demandes

M. X qui succombe en appel, sera condamné aux dépens ainsi qu’à payer à la société Axeo la somme de 200 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement déféré dans l’ensemble de ses dispositions.

Y ajoutant :

Déclare irrecevable la demande de rappel de salaires présentée par M. X.

Déboute les parties de leurs autres demandes.

Condamne M. X aux dépens ainsi qu’à payer à la société Axeo la somme de 200 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.

Signé par Madame G H-I, présidente et par D-X E-F, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 


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