Cour d’appel de Paris, 21 avril 2023
Cour d’appel de Paris, 21 avril 2023

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Thématique :

Résumé

L’ajout du terme « Petit » à une marque similaire ne suffit pas à éviter la contrefaçon. En effet, « Le Petit Gorille », désignant un restaurant, constitue une contrefaçon de la marque « Le Gorille ». Le public, familier avec le restaurant original, pourrait croire qu’il s’agit d’un établissement secondaire. Cette confusion est renforcée par la proximité visuelle et phonétique des deux noms. La cour a ainsi jugé que la société Hulkalou avait commis des actes de contrefaçon, entraînant une réparation de 10 000 euros pour le préjudice subi par la société Le Gorille.

Ajouter « Le Petit » à une marque similaire à celle déposée par un concurrent (afin de désigner un restaurant) ne suffit pas à écarter la contrefaçon de marque. « Le Petit Gorille » désignant un restaurant est bien la contrefaçon de la marque verbale « Le Gorille » (10 000 euros en réparation du préjudice).

Nonobstant l’ajout du terme «’PETIT’» dans le signe incriminé, le public pertinent qui cherche à se rendre au restaurant et qui connaît le restaurant «’Le Gorille’», dont la renommée en tant que tel est démontrée, sera amené à considérer qu’il s’agit d’un établissement secondaire du restaurant varois, installé à [Localité 4], en référence à l’établissement premier, installé à [Localité 5].
Il sera ainsi conduit à croire que les services en cause proviennent d’une même entreprise ou à tout le moins d’une entreprise économiquement liée.Dès lors la contrefaçon de la marque verbale «’LE GORILLE’» n° 3 038’176 est caractérisée.
——–
République française
Au nom du peuple français
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 2
ARRÊT DU 21 AVRIL 2023
(n°71, 8 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 21/12904 – n° Portalis 35L7-V-B7F-CEAWH
Décision déférée à la Cour : jugement du 25 mai 2021 – Tribunal Judiciaire de PARIS – 3ème chambre 3ème section – RGn°20/02321
APPELANTES
Mme [G] [V]
Née le 2 mai 1944 à [Localité 5]
De nationalité française
Retraitée
Demeurant [Adresse 2]
S.A.R.L. SOCIETE D’EXPLOITATION DU BAR LE GORILLE, agissant en la personne de sa gérante, Mme [I] [Z], domiciliée en cette qualité au siège social situé
[Adresse 1]
[Localité 5]
Immatriculée au rcs de Fréjus sous le numéro 340 118 793
Représentées par Me Patrick VILBERT, avocat au barreau de PARIS, toque E 1068
INTIMEE
S.A.R.L. HULKALOU, prise en la personne de son gérant, M. [C] [F], domicilié en cette qualité au siège social situé
[Adresse 3]
[Localité 4]
Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro 810 504 928
Représentée par Me Jean-Paul COMBENEGRE, avocat au barreau de PARIS, toque A0080
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 9 février 2023, en audience publique, devant la Cour composée de:
Mme Véronique RENARD, Présidente
Mme Laurence LEHMANN, Conseillère
Mme Agnès MARCADE, Conseillère
qui en ont délibéré
Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT
ARRET :
Contradictoire
Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
Signé par Mme Véronique RENARD, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
Vu le jugement contradictoire rendu le 25 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Paris qui a’:
– déclaré Mme [V] déchue de ses droits sur la marque verbale n°3038176 à compter du 12 janvier 2016 pour les services de « restaurants, cafétérias et bars » visés dans son enregistrement,
– dit que la partie la plus diligente devra porter à la connaissance de l’INPI la présente décision devenue définitive, afin que soit inscrite au registre national des marques la mention rectificative ci-dessus,
– débouté Mme [V] et la société Le Gorille de leurs demandes en contrefaçon de marque et en parasitisme,
– condamné in solidum Mme [V] et la société Le Gorille à payer à la société Hulkalou la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné Mme [V] et la société Le Gorille in solidum en tous les dépens,
– ordonné l’exécution provisoire.
Vu l’appel interjeté le 8 juillet 2021 par Mme [G] [V] et la Société d’exploitation du bar Le Gorille (ci-après dénommée la société Le Gorille),
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique 12 mars 2022 par Mme [G] [V] et la société Le Gorille, appelantes, qui demandent à la cour de’:
– recevoir Mme [V] et la société Le Gorille en leur appel du jugement rendu par la 3ème chambre 3ème section du tribunal judiciaire de Paris en date du 25 mai 2021 (RG n°20/02321) et les y déclarer bien fondées.
Y faisant droit,
– infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Et statuant à nouveau,
– dire et juger que Mme [V] et la société Le Gorille rapportent la preuve de l’exploitation sérieuse, permanente et continue de la marque LE GORILLE dans les classes de produits et services visées par l’acte d’enregistrement et son renouvellement, au visa de l’article L.714-5 du code de la
propriété
<
intellectuelle
,
– dire et juger que la société Hulkalou exerçant son activité de restauration à [Localité 4] et, en tout cas, sur le territoire national, sous la dénomination LE PETIT GORILLE reproduit et utilise sans autorisation la marque protégée LE GORILLE dont Mme [V] est la légitime propriétaire dans le secteur de la restauration sur le territoire national.
En conséquence,
– faire interdiction à la société Hulkalou d’utiliser la dénomination LE PETIT GORILLE dans les huit jours de la signification de l’arrêt à intervenir sous quelque forme que ce soit au titre de son exploitation commerciale de restauration sous une astreinte de 1 000 euros par jour de retard et infraction constatée,
– dire et juger que la cour demeurera compétente pour liquider l’astreinte prononcée,
– dire et juger que la société Hulkalou exerçant son activité de restauration à [Localité 4] et, en tout cas, sur le territoire national, sous la dénomination LE PETIT GORILLE commet des actes de contrefaçon dont’elle doit réparation au profit de la titulaire de la marque et de la société Le Gorille,
– condamner la société Hulkalou exerçant son activité de restauration à [Localité 4] et, en tout cas, sur le territoire national, sous la dénomination LE PETIT GORILLE au paiement des sommes suivantes à titre de dommages et intérêts :
– au profit de Mme [V], la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice moral,
– au profit de la société Le Gorille, la somme de 100 000 euros en réparation de son préjudice patrimonial,
– l’ensemble avec intérêts au légal à compter de la première mise en demeure du 5septembre 2017 ou, à tout le moins, à compter de l’assignation.
A titre subsidiaire,
– dire et juger que la société Hulkalou exerçant son activité de restauration à [Localité 4] et, en tout cas, sur le territoire national, sous la dénomination LE PETIT GORILLE a commis des actes de concurrence déloyale et de parasitisme dont elle doit réparation au profit de la société Le Gorille,
– condamner la société Hulkalou exerçant son activité de restauration à [Localité 4] et, en tout cas, sur le territoire national, sous la dénomination LE PETIT GORILLE au paiement des sommes suivantes à titre de dommages et intérêts :
– au profit de Mme [V], la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice moral,
– au profit de la société d’exploitation du bar Le Gorille, la somme de 100 000 euros en réparation de son préjudice patrimonial,
– l’ensemble avec intérêts au légal à compter de la première mise en demeure du 5septembre 2017 ou, à tout le moins, à compter de l’assignation.
– ordonner la capitalisation des intérêts dans les termes et conditions fixés par l’article 1343-2 du code civil,
– ordonner la publication de l’arrêt à intervenir sur le site internet de la société Hulkalou et dans les journaux au choix des demanderesses aux frais et à la charge exclusive de la société intimée sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard,
– dire et juger que la cour demeurera compétente pour liquider l’astreinte prononcée,
– débouter la société Hulkalou de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions et de son appel incident,
– condamner la société Hulkalou au paiement de la somme de 5 000 euros au profit de chacune des appelantes, soit 10 000 euros au total sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Hulkalou en tous les dépens de première instance et d’appel qui comprendront les frais du constat d’huissier dressé le 7 mai 2019 et dont le recouvrement pourra être directement poursuivi par Me Patrick Vilbert dans les conditions prévues à l’article 699 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 14décembre 2021 par la société Hulkalou, intimée, qui demande à la cour de’:
– confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
– condamner in solidum Mme [V] et la société Le Gorille à payer à la société Hulkalou la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– les condamner aux dépens,
Vu l’ordonnance de clôture rendue le 17 novembre 2022 ;
SUR CE,
Il est expressément renvoyé pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.
La société Le Gorille, immatriculée le 10 mars 1987, exploite un établissement de restauration situé à [Localité 5], sous la dénomination « Le Gorille », connue depuis les années 1950, avec le début de la renommée du port et les premiers films de [Y] [E].
Mme [V] est titulaire de la marque verbale française LE GORILLE n°3038176, déposée à l’INPI le 30 juin 2000 en classes 42 et 43, pour désigner les «services d’hébergement et de restauration (alimentation), de restaurants, de cafétérias, de services de préparation de grillades (restauration), de bars, de maisons de repos et de convalescence, services hôteliers; approvisionnement en matière de restauration (traiteur) ; restaurants à service rapide et permanent, restaurants libre-service », régulièrement renouvelée, et en dernier lieu le 25 juin 2020.
La société Le Gorille bénéficie d’une licence exclusive selon contrat conclu le 8 septembre 2000 pour la durée de la protection de cette marque et son renouvellement.
La société Hulkalou exploite, sous le nom commercial et l’enseigne LE PETIT GORILLE, depuis le 1er juillet 2015, un fonds de commerce de restauration, bar, brasserie qui est situé [Adresse 3], devant l’entrée du parc [U] [K].
Estimant que l’exploitation par la société Hulkalou de ce fonds de commerce sous la dénomination «’LE PETIT GORILLE’» porte atteinte à ses droits sur la marque LE GORILLE, Mme [V] a, par l’intermédiaire de son conseil, adressé à cette dernière une première lettre recommandée le 5 septembre 2017, la mettant en demeure de cesser d’utiliser ladite marque, puis, après différents échanges, une seconde lettre de mise en demeure le 1er mars 2018, laquelle n’a pas permis de trouver une issue amiable au litige.
Après avoir fait établir un constat d’huissier de justice le 7 mai 2019, Mme [V] et la société Le Gorille ont, par acte du 27 décembre 2019, fait assigner la société Hulkalou devant le tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire, de Paris en contrefaçon de marque et concurrence déloyale.
Sur la déchéance de la marque verbale LE GORILLE n°3 038’176
La société Hulkalou sollicite la déchéance des droits de Mme [V] sur la marque «’LE GORILLE’» dont elle est titulaire en ce qu’elle désigne les services de’«’restaurants, cafétérias, bars’».
L’article L.714-5 du code de la <
propriété
<
intellectuelle
, dans sa version applicable en l’espèce, dispose que :
« Encourt la déchéance de ses droits le propriétaire de la marque qui, sans justes motifs, n’en a pas fait un usage sérieux, pour les produits et services visés dans l’enregistrement, pendant une période ininterrompue de cinq ans.
Est assimilé à un tel usage :
a) L’usage fait avec le consentement du propriétaire de la marque ou, pour les marques collectives, dans les conditions du règlement ;
(‘)
La déchéance peut être demandée en justice par toute personne intéressée. Si la demande ne porte que sur une partie des produits ou des services visés dans l’enregistrement, la déchéance ne s’étend qu’aux produits ou aux services concernés.
( »)
La preuve de l’exploitation incombe au propriétaire de la marque dont la déchéance est demandée. Elle peut être apportée par tous moyens.
La déchéance prend effet à la date d’expiration du délai de cinq ans prévu au premier alinéa du présent article. Elle a un effet absolu. »
En l’espèce, la demande en déchéance de la société Hulkalou ayant été formulée pour la première fois le 15 janvier 2021, la période de cinq années à prendre en considération s’étend du 15 janvier 2016 au 15 janvier 2021 et le tribunal sera suivi sur ce point, sauf à effectivement fixer le point de départ du délai au 15 janvier 2016 et non pas au 12 janvier 2016 comme indiqué par erreur manifeste au dispositif du jugement.
La société Hulkalou soutient que Mme [V] et la société Le Gorille justifient d’un usage du signe verbal LE GORILLE, pour la période concernée, exclusivement à titre de dénomination commerciale, de nom commercial et d’enseigne de la société éponyme et non pas pour désigner les services de « restaurants, cafétérias et bars » de la classe 43 visés par la marque n°3 038’176 qui lui est opposée.
Pour justifier d’un usage sérieux de cette marque, les appelantes produisent’devant la cour des factures de caisses de 2016 à 2021 du snack-bar Le Gorille montrant la vente de différents plats et boissons ainsi que des extraits de commentaires sur le site Trip Advisor de 2015 à 2017 comportant des avis recommandés de clients sur les services offerts par le bar restaurant.
Ces pièces suffisent à établir que le signe sert à identifier, aux yeux du consommateur, l’origine des services de «’restaurants, cafétérias, bars’» et partant son usage à titre de marque.
En conséquence la demande de déchéance de la marque LE GORILLE n°3 038’176 doit être rejetée et le jugement infirmé de ce chef.
Sur la contrefaçon
Mme [V] et la société Le Gorille poursuivent la société Hulkalou en contrefaçon de la marque LE GORILLE n°3 038’176 lui reprochant de faire usage du signe LE PETIT GORILLE pour désigner son établissement de restauration situé à [Localité 4].
La société Hulkalou conteste tout risque de confusion entre les signes pris dans leur appréciation globale.
L’article L713-2 du code de la <
propriété
<
intellectuelle
dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 13 novembre 2029 applicable à l’espèce dispose que :
«’Est interdit, sauf autorisation du titulaire de la marque, l’usage dans la vie des affaires pour des produits ou des services :
(‘)
2° D’un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association du signe avec la marque.
Les services de «’restauration, bar, brasserie’» proposés par la société Hulkalou sont identiques ou similaires aux services désignés par la marque verbale opposée par la société Le Gorille en classe 43, à savoir les services de « restaurants, cafétérias et bars ».
Le signe incriminé ne constituant pas la reproduction à l’identique de la marque verbale LE GORILLE qui est opposée, il convient de rechercher s’il n’existe pas entre les signes un risque de confusion, lequel comprend le risque d’association, qui doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce ; cette appréciation globale doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique et conceptuelle des signes en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci en tenant compte de leurs éléments distinctifs et dominants.
Les signes en cause ont deux éléments sur trois en commun, l’article défini «’LE’» et le nom «’GORILLE’» qui constituent l’intégralité de la marque verbale opposée.
Visuellement et phonétiquement, les signes sont proches, la seule différence entre eux tenant à l’ajout de l’adjectif «’PETIT’» dans le signe incriminé aux termes «’LE GORILLE’».
Conceptuellement, les signes font référence à un singe et à un petit ou jeune singe.
Si la société Hulkalou explique la référence au gorille par l’emplacement de l’établissement faisant face au parc [U] [K] en lien avec la célèbre chanson de l’artiste et ajoute que le pouvoir d’attraction de l’établissement parisien est purement local de même que la renommée de l’établissement Le Gorille est limitée à la ville de [Localité 5], pour autant, aucune des pièces qu’elle produit ne justifie que le public comprendra que le nom du restaurant parisien fait effectivement un clin d »il à la chanson de l’artiste [U] [K] et par ailleurs, le signe opposé est une marque française dont la portée est nationale.
Nonobstant l’ajout du terme «’PETIT’» dans le signe incriminé, le public pertinent qui cherche à se rendre au restaurant et qui connaît le restaurant «’Le Gorille’», dont la renommée en tant que tel est démontrée, sera amené à considérer qu’il s’agit d’un établissement secondaire du restaurant varois, installé à [Localité 4], en référence à l’établissement premier, installé à [Localité 5]. Il sera ainsi conduit à croire que les services en cause proviennent d’une même entreprise ou à tout le moins d’une entreprise économiquement liée.
Dès lors la contrefaçon de la marque verbale «’LE GORILLE’» n° 3 038’176 est caractérisée.
Sur la concurrence déloyale et parasitaire
L’action en concurrence déloyale et parasitaire formée à titre subsidiaire devient sans objet.
Sur les mesures réparatrices
Il sera fait droit à la mesure d’interdiction dans les termes ci-après précisés au dispositif du présent arrêt, ce sous astreinte compte tenu de la résistance avérée de la société Hulkalou.
Il n’y a pas lieu cependant pour la cour de se réserver la liquidation de cette astreinte.
Aux termes de l’article L.716-4-10 du code de la <
propriété
<
intellectuelle
,
Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :
1° Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3° Et les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements <
intellectuels
, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de la contrefaçon.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.
En l’espèce, il n’est produit par la société Le Gorille aucune pièce comptable ou attestation comptable permettant de quantifier un éventuel manque à gagner subi du fait des actes de contrefaçon. Il ressort néanmoins des comptes Infogreffe versés aux débats une baisse de son chiffre d’affaires en 2019 par rapport à celui de 2016 (1 058 520 euros en 2016, 1’047780 euros en 2017, 620 740 euros en 2018 et 589 118 euros en 2019). Par ailleurs les derniers comptes publiés au titre de l’exercice 2019 par la société Hulkalou montrent un chiffre d’affaires de 936’025 euros et un résultat bénéficiaire de 87’219 euros.
En considération de ces éléments pris distinctement et compte tenu du fait que la société Hulkalou ne peut être la seule cause de la baisse du chiffre d’affaires de la société Le Gorille, il sera alloué à cette dernière la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice patrimonial subi du fait des actes de contrefaçon commis à son encontre.
L’atteinte portée à la marque dont Mme [V] est titulaire de par son affaiblissement et la banalisation de son pouvoir distinctif sera réparée par l’octroi de la somme de 5 000 euros à titre de dommages intérêts, le surplus de la demande non justifié étant rejeté.
Ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de le la présente décision et les intérêts se capitaliseront dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.
Les dommages intérêts alloués étant de nature à réparer intégralement le préjudice subi par les appelantes, il n’y a pas lieu de faire droit à la mesure de publication qui est en outre sollicitée.
Sur les autres demandes
Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles seront infirmées.
Partie perdante, la société Hulkalou sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.
En outre, la société Le Gorille a dû engager en cause d’appel des frais non compris dans les dépens qu’il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge. Il y a lieu en conséquence de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif du présent arrêt.
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement rendu le 25 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Paris en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute la société Hulkalou de sa demande en déchéance de la marque «’LE GORILLE’» n°3038176.
Dit qu’en faisant usage sur le territoire français de la dénomination «’LE PETIT GORILLE’» pour désigner un établissement de restauration, la société Hulkalou a commis des actes de contrefaçon de la marque «’LE GORILLE’» n°3038176 au préjudice de Mme[V] et de la Société d’Exploitation du bar Le Gorille.
En conséquence,
Fait interdiction à la société Hulkalou de poursuivre ces agissements ce, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai de 45 jours à compter de la signification du présent arrêt et, pour une durée de six mois.
Condamne la société Hulkalou à payer à’Mme [V] la somme de 5 000 euros et à la Société d’Exploitation du bar Le Gorille la somme de 10 000 euros à titre de dommages intérêts, le tout avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.
Dit que les intérêts se capitaliseront dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.
Déclare sans objet les demandes subsidiaires en concurrence déloyale et parasitaire.
Déboute chacune des parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires.
Condamne la société Hulkalou à payer, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, à Mme [V] la somme de 2’500 euros et à la société Le Gorille celle de 2’500 euros.
Condamne la société Hulkalou aux dépens de première instance et d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
La Greffière La Présidente

 

 


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