Droits des Photographes : L’Exception de Courte Citation et le Droit Moral

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Droits des Photographes : L’Exception de Courte Citation et le Droit Moral

L’Essentiel : Dans l’affaire opposant Mme X. à un éditeur, le Tribunal de grande instance de Paris a statué sur la contrefaçon liée à la reproduction non autorisée d’images de son film « Passageways ». Malgré la défense de l’éditeur invoquant l’exception de courte citation, les juges ont retenu que la reproduction intégrale de moments clés du film ne pouvait être considérée comme brève. De plus, l’atteinte au droit moral de Mme X. a été reconnue, les images ayant été présentées dans un ordre dénaturant l’œuvre originale. Cette décision souligne l’importance du respect des droits des photographes et de l’intégrité de leur création.

Mme X. a écrit et réalisé un film intitulé « Passageways » portant sur l’oeuvre de l’artiste contemporain James TURRELL. Le Centre National d’Art et de Culture Georges Pompidou est intervenu comme coproducteur.
Ayant constaté une reproduction de quatre images du film « Passageways », malgré son refus et dans des conditions dénaturantes, dans un ouvrage sur James Turrell, Mme X a poursuivi l’éditeur.
En défense, l’éditeur invoquait l’exception de courte citation et notamment la brièveté de la reprise des images en cause. Cette exception a été rejetée et la contrefaçon a été retenue par les juges (20.000 euros à titre de dommages-intérêts) : l’importance des images extraites de moments clés du film et le fait qu’elles aient été intégralement reproduites, empêche que l’on puisse admettre le caractère bref de la reproduction. De plus, les photographies en question n’étaient pas destinées à informer le lecteur mais à illustrer l’ouvrage.
Par ailleurs, l’atteinte au droit moral de Mme X a été constituée : les images ont été reproduites dans un ordre différent de celui conçu et réalisé par Mme X. dans son film. Ces modifications de l’oeuvre, qui ne permettent pas d’appréhender la chronologie des événements, en dénaturent la portée et constituent une violation du droit moral de l’auteur.
2 autres points intéressants soulevés par les juges :
– la mention « copyright » n’a pas de valeur légale en France ;
– pour apprécier le préjudice de Mme X, les tarifs de la Réunion des Musées Nationaux relatifs à la reproduction d’images même s’ils n’ont qu’une valeur indicative, peuvent être pris en compte.

Mots clés : images d’un film,image,catalogue,biographie,TURRELL,photographie,séquence audiovisuelle,photographe,citation,droit de citation,édition

Thème : Droits des photographes

A propos de cette jurisprudence : juridiction :  Tribunal de grande instance de Paris | Date : 8 juin 2006 | Pays : France

Q/R juridiques soulevées :

Qu’est-ce que l’exception de courte citation ?

L’exception de courte citation est un principe juridique qui permet la reproduction d’extraits d’œuvres protégées par le droit d’auteur sans nécessiter l’autorisation de l’auteur.

Cette exception est généralement appliquée dans un cadre limité, où la reproduction doit être faite dans un but d’information, d’analyse ou de critique.

Elle vise à favoriser la libre circulation des idées et des connaissances tout en respectant les droits des créateurs. Cependant, il est crucial que la citation soit effectivement courte et ne porte pas atteinte à l’œuvre originale.

Pourquoi les juges ont-ils rejeté l’argument de l’éditeur ?

Les juges ont rejeté l’argument de l’éditeur en raison de la nature des images reproduites.

Ils ont constaté que les images extraites du film « Passageways » étaient des éléments clés de l’œuvre de Mme X et avaient été reproduites dans leur intégralité.

Cette reproduction intégrale ne pouvait pas être considérée comme une « courte citation », car elle dépassait les limites de ce qui est acceptable dans le cadre de l’exception.

De plus, les juges ont noté que les images n’étaient pas utilisées pour informer, mais pour illustrer l’ouvrage, ce qui a renforcé leur décision.

Qu’est-ce que le droit moral ?

Le droit moral est un concept juridique qui protège l’intégrité de l’œuvre d’un auteur et le respect de son intention créative.

En France, ce droit est inaliénable et perpétuel, ce qui signifie qu’il ne peut pas être cédé ou renoncé, même si les droits patrimoniaux le sont.

Le droit moral permet à l’auteur de s’opposer à toute modification, déformation ou atteinte à son œuvre qui pourrait nuire à son honneur ou à sa réputation.

Dans le cas de Mme X, les juges ont reconnu que la reproduction des images dans un ordre différent de celui prévu par l’auteure constituait une violation de son droit moral.

Quelle est la signification de la mention « copyright » en France ?

En France, la mention « copyright » n’a pas de valeur légale.

La protection des droits d’auteur est automatique dès la création de l’œuvre, sans qu’il soit nécessaire d’apposer une mention spécifique.

Cela signifie que les auteurs bénéficient de droits sur leurs créations dès qu’elles sont fixées sur un support tangible, qu’il s’agisse d’un livre, d’un film ou d’une œuvre d’art.

Ainsi, même sans la mention « copyright », l’œuvre est protégée par le droit d’auteur, et l’auteur peut revendiquer ses droits en cas de contrefaçon.

Conclusion sur l’affaire de Mme X

L’affaire de Mme X et son film « Passageways » met en lumière les défis auxquels sont confrontés les artistes contemporains en matière de droits d’auteur.

Les décisions judiciaires soulignent l’importance de respecter les droits moraux des auteurs et de comprendre les limites des exceptions de citation.

Cette affaire sert de rappel aux éditeurs et aux créateurs de contenu sur la nécessité de respecter les œuvres originales et de ne pas les dénaturer.

Elle illustre également la complexité des questions juridiques entourant la propriété intellectuelle dans le domaine de l’art contemporain.


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