Contrefaçon musicale : décisions judiciaires et enjeux de propriété intellectuelle

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Contrefaçon musicale : décisions judiciaires et enjeux de propriété intellectuelle

L’Essentiel : Le Tribunal de Première Instance de Mons a jugé en 2005 que la chanson « Frozen » était une reproduction non autorisée de « Ma vie fout l’camp ». Cependant, le TGI de Paris a ensuite écarté toute contrefaçon, soulignant que les similarités musicales, bien que présentes, ne constituaient pas une appropriation. Les juges ont noté que la suite mélodique de cinq notes, commune aux trois œuvres, était couramment utilisée et accessible à tout compositeur. Ainsi, malgré des éléments similaires, chaque œuvre conservait une originalité propre, ne justifiant pas une action en contrefaçon selon l’article L. 122-4 du Code de la Propriété Intellectuelle.

Procédure franco-belge

Par jugement en date du 18 novembre 2005, le Tribunal de Première Instance de MONS (Belgique), statuant comme en référé, avait estimé que la chanson “Frozen” constituait « une reproduction et une adaptation non autorisée de la ligne mélodique » de la chanson “Ma vie fout l’camp” composée par Monsieur A. et a fait injonction aux producteurs de disque de cesser sur le territoire belge tout acte de distribution, d’offre en vente, de communication quelconque au public des phonogrammes édités par elles et comportant l’enregistrement du titre « Frozen ». Faisant valoir que les chansons intitulées “Ma vie fout l’camp” et “Frozen” reproduisent en réalité l’une et l’autre le thème musical de l’oeuvre intitulée “Bloodnight”, un nouvel auteur a assigné toutes les parties devant le TGI de Paris.

Absence de contrefaçon

Les juges ont écarté toute contrefaçon. Les tonalités, la vitesse d’exécution, l’écriture et l’interprétation des deux œuvres musicales, bien que similaires pour certains, restent librement accessibles à tout compositeur dans son choix musical. Une suite mélodique de cinq notes, (commune aux trois œuvres en question), de faible ambitus (mouvement conjoint évoluant par degrés successifs), peut parfaitement inspirer un compositeur sans que celui-ci ait eu à puiser dans une oeuvre préexistante, seul l’emploi plus sophistiqué qu’il peut en faire, notamment par la répétition de certaines de ces notes et une écriture rythmique moderne syncopée relevant plus certainement de sa propre inspiration et de son goût musical à en individualiser l’énoncé.

Il résultait de l’écoute des trois oeuvres musicales en cause, que si celles-ci font apparaître au début de leur thème, comme la partie principale à l’écoute, une suite mélodique de cinq notes, le passage en question est couramment utilisé sous une forme plus ou moins dépouillée et n’était pas en tant que tel susceptible d’appropriation. Les œuvres musicales ne produisaient pas une même impression d’ensemble et présentaient une originalité propre.

Article L. 122-4 du Code de la Propriété Intellectuelle

Pour rappel, aux termes de l’article L. 122-4 du Code de la Propriété Intellectuelle, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en va de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque.

Mots clés : Contrefaçon de musique

Thème : Contrefaçon de musique

A propos de cette jurisprudence : juridiction :  Tribunal de Grande instance de Paris | Date : 6 janvier 2012 | Pays : France

Q/R juridiques soulevées :

Qu’est-ce qui a conduit à la décision du Tribunal de Première Instance de Mons ?

R1 : La décision a été prise suite à une plainte concernant la chanson « Frozen », qui a été jugée comme une reproduction non autorisée de « Ma vie fout l’camp », composée par Monsieur A.

Le tribunal a examiné les éléments de la plainte et a conclu que « Frozen » ne respectait pas les droits d’auteur liés à l’œuvre originale. En conséquence, il a ordonné aux producteurs de disques de cesser toute distribution, vente ou communication publique de « Frozen » sur le territoire belge.

Cette décision a mis en lumière les enjeux liés à la propriété intellectuelle dans le domaine musical, en soulignant la nécessité de respecter les droits des créateurs.

Pourquoi le TGI de Paris a-t-il écarté les accusations de contrefaçon ?

R2 : Les juges ont constaté que, bien que certaines similitudes existaient, les œuvres musicales avaient des tonalités, vitesses d’exécution et écritures distinctes, ce qui les rendait originales.

Ils ont noté que la suite mélodique de cinq notes, commune aux trois œuvres, était un motif musical accessible à tout compositeur. Cela signifie que l’inspiration peut être tirée de motifs musicaux sans enfreindre les droits d’auteur.

Les juges ont également souligné que l’impression d’ensemble produite par chaque œuvre était différente, ce qui renforce l’idée que chaque composition possède sa propre originalité.

Que dit l’article L. 122-4 du Code de la Propriété Intellectuelle ?

R3 : Cet article stipule que toute reproduction ou représentation d’une œuvre sans le consentement de l’auteur est illicite, y compris pour les adaptations et transformations.

Cela signifie que les créateurs ont le droit exclusif de contrôler l’utilisation de leur travail, ce qui inclut la possibilité de donner ou de refuser des autorisations pour l’utilisation de leurs œuvres.

Cette législation vise à protéger les droits des créateurs et à garantir que leur travail ne soit pas utilisé sans autorisation, ce qui est essentiel pour encourager la créativité et l’innovation dans le domaine artistique.

Quelle est l’importance de cette jurisprudence ?

R4 : Cette jurisprudence souligne l’importance de la protection des droits d’auteur tout en reconnaissant la liberté créative des compositeurs, même lorsqu’ils s’inspirent de motifs musicaux communs.

Elle établit un équilibre entre la protection des œuvres originales et la possibilité pour les artistes de s’inspirer d’éléments musicaux existants sans risquer des accusations de contrefaçon.

Cela permet de favoriser un environnement créatif où les artistes peuvent explorer de nouvelles idées tout en respectant les droits des autres. Cette décision a des implications significatives pour l’industrie musicale et la manière dont les œuvres sont protégées.


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