Accusations de contrefaçon : jamais sans décision définitive

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Accusations de contrefaçon : jamais sans décision définitive
L’Essentiel : Les accusations de contrefaçon sans décision judiciaire définitive peuvent constituer un acte de dénigrement. En effet, dénoncer un concurrent comme contrefacteur sans preuve légale jette le discrédit sur ses produits. Même en l’absence de concurrence directe, la diffusion d’informations nuisibles peut être considérée comme dénigrante. Toutefois, si l’information est d’intérêt général et factuellement fondée, elle peut relever de la liberté d’expression, à condition d’être exprimée avec mesure. Dans l’affaire Design Market, des allégations de contrefaçon ont été publiées sans décision de justice, entraînant un préjudice pour la société, qui a été indemnisée pour ses pertes.

Le fait de dénoncer à la clientèle les agissement d’un concurrent désigné comme contrefacteur alors qu’aucune décision ne vient en établir la réalité est constitutif d’acte de dénigrement.

L’absence d’une situation de concurrence directe et effective

Même en l’absence d’une situation de concurrence directe et effective entre les personnes concernées, la divulgation, par l’une, d’une information de nature à jeter le discrédit sur un produit ou un service commercialisé par l’autre, peut constituer un acte de dénigrement.

Cependant, lorsque l’information en cause se rapporte à un sujet d’intérêt général et repose sur une base factuelle suffisante, cette divulgation relève du droit à la liberté d’expression, qui inclut le droit de libre critique, et ne saurait, dès lors, être regardée comme fautive, sous réserve qu’elle soit exprimée avec une certaine mesure (Cass. 1re civ., 11 juill. 2018, n° 17-21.457)

Les conditions du dénigrement

Il est ainsi constant que le dénigrement est constitué lorsque les propos visent les produits, les services ou l’activité d’une entreprise et sont tenus dans le but d’inciter une partie de la clientèle de l’entreprise visée à s’en détourner.

De même, le fait de dénoncer à la clientèle les agissement d’un concurrent désigné comme contrefacteur alors qu’aucune décision ne vient en établir la réalité est constitutif d’acte de dénigrement.

Affaire Design Market

En l’espèce, la société Design Market établit, au moyen d’un procès-verbal de constat dressé par Me [U], commissaire de justice, le 16 août 2021, que la société [B] a, sur son site internet accessible au public, publié un article intitulé “Quand les faux TOGO vintage trompent le consommateur” soulignant que “de nombreuses market-places proposent des TOGO retapissés ou “vintage” et que “la plupart de ces offres sont des contrefaçons”.

Elle cite un TOGO dit “retapissé” de la market place “société Design Market” et publie des photographies le comparant à un TOGO dit authentique, soulignant que “la plupart de ces offres sont des contrefaçons ne respectant ni la qualité des matériaux ni la fabrication du TOGO. Les toiles de fond et les étiquettes sont aussi contrefaites”.

La société Design Market produit également une copie d’écran démontrant que cet article est demeuré en ligne jusqu’au mois de décembre 2021, le conseil de la société [B] indiquant, dans un courriel du 3 janvier 2022, que la mention a été retirée à la suite d’une demande formulée en ce sens par le juge des référés du tribunal de commerce, saisi par assignation du 5 novembre 2021.

Elle établit encore que des courriels ont été adressés en septembre 2021 à des clients potentiels qui l’interrogeaient sur l’authenticité des modèles vendus sur les market places telles que Design Market, la société [B], par l’intermédiaire de salariés, répondant que de nombreux modèles sont faux.

Ces propos tenus publiquement, de nature à jeter le discrédit sur les produits mis en ligne sur la plateforme de la société Design Market alors même qu’aucune décision de justice n’avait encore été rendue, constitue un fait de dénigrement.

La société justifie d’un préjudice matériel constitué par une perte de chance de réaliser des transactions qui sera indemnisé à hauteur de 500 euros et un préjudice moral, intégralement réparé par l’allocation d’une somme de 500 euros. En revanche, les frais exposés dans le cadre de la procédure de référé engagée devant le tribunal de commerce ne sauraient faire l’objet d’une indemnisation dans ce cadre.

Q/R juridiques soulevées :

Qu’est-ce que le dénigrement dans le contexte commercial ?

Le dénigrement est défini comme un acte consistant à porter atteinte à la réputation d’une entreprise, de ses produits ou de ses services. Cela se produit généralement lorsque des propos sont tenus dans le but d’inciter les clients à se détourner de l’entreprise visée. Il est important de noter que même en l’absence de concurrence directe, la divulgation d’informations pouvant nuire à la réputation d’un produit ou service peut être considérée comme du dénigrement.

Quelles sont les conditions qui caractérisent un acte de dénigrement ?

Pour qu’un acte soit qualifié de dénigrement, plusieurs conditions doivent être remplies. Tout d’abord, les propos doivent viser spécifiquement les produits, services ou l’activité d’une entreprise. Ensuite, ces propos doivent être formulés dans l’intention d’inciter une partie de la clientèle à se détourner de l’entreprise concernée. Par exemple, dénoncer un concurrent comme contrefacteur sans preuve légale constitue également un acte de dénigrement.

Comment la liberté d’expression est-elle liée au dénigrement ?

La liberté d’expression joue un rôle crucial dans le contexte du dénigrement. Lorsqu’une information est d’intérêt général et repose sur des bases factuelles solides, sa divulgation peut être protégée par le droit à la liberté d’expression. Cependant, cette protection est conditionnée par le fait que l’information soit exprimée avec mesure. Ainsi, des critiques fondées et mesurées ne peuvent pas être considérées comme fautives, même si elles portent atteinte à la réputation d’une entreprise.

Quels sont les faits de l’affaire Design Market ?

Dans l’affaire Design Market, la société a été victime de dénigrement par la société [B], qui a publié un article sur son site internet. Cet article affirmait que de nombreux produits TOGO proposés sur des market-places étaient des contrefaçons. Design Market a fourni des preuves, y compris un procès-verbal de constat et des captures d’écran, montrant que l’article est resté en ligne jusqu’à ce qu’un juge ordonne son retrait. Les propos tenus par [B] ont été jugés comme jetant le discrédit sur les produits de Design Market sans qu’aucune décision de justice n’ait été rendue.

Quelles ont été les conséquences pour Design Market ?

Suite à ces actes de dénigrement, la société Design Market a subi un préjudice matériel et moral. Le tribunal a reconnu une perte de chance de réaliser des transactions, ce qui a conduit à une indemnisation de 500 euros pour le préjudice matériel. De plus, un montant équivalent a été alloué pour le préjudice moral. Cependant, les frais engagés pour la procédure de référé n’ont pas été indemnisés dans ce cadre. Cela souligne l’importance de la protection juridique contre le dénigrement dans le milieu commercial.

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