Responsabilité des commissaires-priseurs

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Responsabilité des commissaires-priseurs

L’Essentiel : Dans une affaire de vente aux enchères, des acheteurs ont acquis en 1979 un tableau prétendument de Jean-Jacques HENNER. En 2007, un expert a contesté son authenticité, affirmant qu’il s’agissait d’une copie. Les acheteurs ont alors assigné les commissaires-priseurs pour obtenir la nullité de la vente et une indemnisation. Cependant, les juges ont débouté leur demande, estimant que la preuve de l’inauthenticité de l’œuvre n’était pas suffisante. La lettre d’un auteur de catalogue raisonné n’a pas suffi à remettre en cause le certificat d’authenticité, d’autant plus qu’aucune expertise judiciaire n’avait été réalisée.

Vente d’un faux aux enchères ?

Dans cette affaire, des acheteurs ont acquis en 1979 par adjudication un tableau intitulé « Baigneuse » présenté comme étant de Jean-Jacques HENNER.  En 2007, dans le cadre de la revente projetée de l’oeuvre, un expert a contesté son authenticité, affirmant qu’il s’agissait d’une copie d’une oeuvre intitulée « Solitude ».  Les acheteurs ont alors assigné les commissaires-priseurs devant le TGI de Paris, aux fins de nullité de la vente et d’indemnisation du préjudice subi.

A l’époque de l’adjudication litigieuse, la responsabilité du commissaire-priseur et de l’expert était régie par le décret du 21 novembre 1956 abrogé par le décret du 25 mars 1985.  L’article 23 de ce décret consacrait la responsabilité solidaire de l’expert et du commissaire-priseur quant aux indications portées sur le catalogue de la vente. En application de ces dispositions et lorsque la nullité de la vente ne peut être prononcée, l’acquéreur peut agir directement à l’encontre tant du commissaire-priseur que de l’expert l’ayant assisté dans la vente, sur le fondement de l’article 1382 du code civil. Il appartient néanmoins au demandeur à l’action en responsabilité de démontrer une faute commise par le commissaire-priseur et l’expert. À cet égard, en application du décret précité, il était de principe que la responsabilité de l’expert et du commissaire-priseur n’était pas engagée  du seul fait d’une attribution inexacte d’un tableau à un peintre et qu’il fallait que leur erreur soit fautive.

Opportunité d’une expertise judiciaire

Les juges ont débouté les acheteurs de leur demande pour défaut de preuve que l’œuvre ne serait pas authentique, la perte de chance de gain alléguée n’étant pas certaine.  Pour démontrer que l’oeuvre litigieuse n’était pas de la main du peintre HENNER contrairement à ce qui était affirmé dans le catalogue de la vente du 3 juillet 1979 organisée par l’étude TAJAN, l’acheteur avait présenté une lettre de l’auteur d’un catalogue raisonné du peintre HENNER. Cet élément n’est pas suffisamment probant  pour remettre en cause le certificat d’authenticité établi lors de la vente, de surcroît lorsque qu’aucune expertise judiciaire ou même amiable n’a été diligentée pour démontrer le défaut d’authenticité de l’œuvre.

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Q/R juridiques soulevées :

Quel est le contexte de la vente du tableau « Baigneuse » ?

Dans cette affaire, des acheteurs ont acquis en 1979 un tableau intitulé « Baigneuse », présenté comme étant de Jean-Jacques HENNER, lors d’une vente aux enchères.

En 2007, alors qu’ils projetaient de revendre l’œuvre, un expert a contesté son authenticité, affirmant qu’il s’agissait d’une copie d’une autre œuvre intitulée « Solitude ».

Les acheteurs, face à cette contestation, ont décidé d’assigner les commissaires-priseurs devant le Tribunal de Grande Instance (TGI) de Paris, demandant la nullité de la vente et une indemnisation pour le préjudice subi.

Cette situation soulève des questions sur la responsabilité des experts et des commissaires-priseurs dans le cadre des ventes aux enchères.

Quelles étaient les responsabilités des commissaires-priseurs et des experts à l’époque de la vente ?

À l’époque de l’adjudication litigieuse, la responsabilité des commissaires-priseurs et des experts était régie par le décret du 21 novembre 1956, qui a été abrogé par le décret du 25 mars 1985.

L’article 23 de ce décret stipulait que l’expert et le commissaire-priseur étaient solidairement responsables des indications portées sur le catalogue de la vente.

Cela signifie que si une erreur était commise dans l’attribution d’une œuvre, l’acquéreur pouvait agir contre les deux parties sur le fondement de l’article 1382 du code civil.

Cependant, il incombait au demandeur de prouver une faute de la part du commissaire-priseur et de l’expert, et il était établi que leur responsabilité n’était pas engagée simplement en raison d’une attribution inexacte.

Pourquoi les juges ont-ils débouté les acheteurs de leur demande ?

Les juges ont débouté les acheteurs de leur demande en raison d’un défaut de preuve concernant l’authenticité de l’œuvre.

La perte de chance de gain alléguée par les acheteurs n’était pas considérée comme certaine.

Pour tenter de prouver que l’œuvre n’était pas authentique, l’acheteur avait présenté une lettre d’un auteur d’un catalogue raisonné du peintre HENNER.

Cependant, cet élément n’a pas été jugé suffisamment probant pour remettre en cause le certificat d’authenticité établi lors de la vente.

De plus, aucune expertise judiciaire ou amiable n’avait été diligentée pour démontrer le défaut d’authenticité de l’œuvre, ce qui a joué en défaveur des acheteurs.

Quelles sont les implications de cette affaire pour les acheteurs d’œuvres d’art ?

Cette affaire met en lumière les risques encourus par les acheteurs d’œuvres d’art lors de ventes aux enchères.

Elle souligne l’importance de la diligence raisonnable avant d’acquérir une œuvre, notamment en ce qui concerne l’authenticité.

Les acheteurs doivent être conscients que la responsabilité des commissaires-priseurs et des experts n’est pas automatiquement engagée en cas d’attribution inexacte.

Il est donc crucial de s’assurer de la validité des certificats d’authenticité et, si nécessaire, de faire appel à des experts pour des évaluations supplémentaires.

Enfin, cette affaire rappelle l’importance de la documentation et des preuves solides pour soutenir toute contestation d’authenticité.


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