Obligation d’entretien d’une œuvre d’art

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Obligation d’entretien d’une œuvre d’art

L’Essentiel : La responsabilité du cessionnaire en matière d’entretien d’une œuvre d’art est cruciale. Dans l’affaire de la sculpture « Patinoire », la Commune de Vitry sur Seine a été jugée fautive pour ne pas avoir assuré la conservation de l’œuvre, malgré son état de dégradation. Les juges ont souligné que la commune, en tant que propriétaire, devait veiller à l’intégrité de la sculpture et consulter l’auteur ou ses ayants droit avant de décider de son enlèvement. Toutefois, la demande d’indemnisation des titulaires des droits a été rejetée, car ils n’avaient pas démontré une exploitation active de leurs droits.

Responsabilité du cessionnaire

Comme l’illustre cette affaire, le défaut d’entretien d’une œuvre d’art, voir sa perte par le cessionnaire, n’emporte pas nécessairement de condamnation.

Une sculpture en bois monumentale intitulée « Patinoire » a été acquise par la Commune de Vitry sur Seine en 1976 et a été déposée à son initiative à une date indéterminée entre 2003 et 2014. La commune de Vitry sur Seine n’ayant pu fournir  aucun élément relatif au sort subi par l’œuvre postérieurement à sa dépose, les juges en ont déduit que celle-ci avait été jetée ou détruite ou, qu’à tout le moins, la Commune n’était plus en capacité de la restituer aux héritiers de l’auteur.

Œuvre devenue « dangereuse »

La Commune de Vitry Sur Seine estimait n’avoir commis aucune faute à l’occasion de l’enlèvement de la sculpture en raison de son état de dégradation qui la rendait dangereuse pour les usagers de la voie publique. Ce à quoi le Tribunal a répondu qu’en sa qualité de propriétaire du support matériel de l’œuvre, il appartenait à la Commune de veiller à la préservation de son intégrité en procédant à son entretien régulier. Or, la commune de Vitry sur Seine ne justifiait  d’aucune intervention sur la sculpture postérieure à 1989. Si la sculpture en bois avait, malgré un entretien régulier, subi des dégradations telles qu’il n’était plus possible ni de la restaurer, ni, pour des impératifs de sécurité publique, de la maintenir sur le site de son installation, il appartenait à la Commune de prendre contact avec l’auteur ou ses ayants droit pour les associer à la décision relative à la destination de l’œuvre postérieurement à sa dépose.

En décidant unilatéralement d’enlever l’oeuvre sans s’assurer de sa conservation, la commune de Vitry-sur-Seine a commis une faute susceptible de priver les titulaires des droits patrimoniaux de la possibilité à l’avenir d’exercer ceux-ci.

Préjudice inexistant

Cette perte de chance des titulaires des droits a néanmoins été appréciée à l’aune de la nature de l’œuvre en cause, sculpture monumentale de grande dimension (270 x 850 x850 cm), destinée à être installée dans l’espace public et par nature difficilement déplaçable, et relativisée dès lors qu’il subsiste des photographies de l’œuvre pouvant être reproduites et exposées.

Les titulaires des droits ne justifiant à aucun moment avoir cherché à exploiter les droits qu’ils opposaient à la Commune autrement que par l’intermédiaire de photographies de l’œuvre, leur  demande d’indemnisation a été rejetée.

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Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la responsabilité du cessionnaire dans le cas de la sculpture « Patinoire » ?

Le cessionnaire, dans ce cas, la Commune de Vitry sur Seine, n’est pas nécessairement condamné pour le défaut d’entretien ou la perte d’une œuvre d’art.

Dans l’affaire de la sculpture « Patinoire », acquise en 1976, la commune n’a pas pu fournir d’éléments concernant le sort de l’œuvre après sa dépose entre 2003 et 2014.

Les juges ont donc conclu que la sculpture avait probablement été détruite ou jetée, et que la commune n’était plus en mesure de la restituer aux héritiers de l’auteur.

Cette situation illustre que la responsabilité du cessionnaire peut être limitée si aucune preuve de négligence ou de faute n’est établie.

Pourquoi la Commune de Vitry sur Seine a-t-elle considéré que l’œuvre était devenue « dangereuse » ?

La Commune de Vitry sur Seine a justifié l’enlèvement de la sculpture en raison de son état de dégradation, qui la rendait potentiellement dangereuse pour les usagers de la voie publique.

Cependant, le Tribunal a souligné que, en tant que propriétaire, la commune avait la responsabilité de préserver l’intégrité de l’œuvre par un entretien régulier.

Il a été noté que la commune n’avait pas effectué d’interventions sur la sculpture depuis 1989, ce qui soulève des questions sur son engagement à maintenir l’œuvre en bon état.

Si la sculpture avait été dégradée malgré un entretien adéquat, la commune aurait dû consulter l’auteur ou ses ayants droit avant de prendre une décision concernant son enlèvement.

Quel a été le jugement concernant le préjudice des titulaires des droits ?

Le préjudice des titulaires des droits a été évalué en tenant compte de la nature de l’œuvre, qui était une sculpture monumentale de grande taille, difficilement déplaçable et destinée à l’espace public.

Bien qu’il ait été reconnu qu’il y avait une perte de chance pour les titulaires des droits, cette perte a été relativisée par le fait qu’il existait des photographies de l’œuvre.

Ces photographies pouvaient être reproduites et exposées, ce qui a conduit à une appréciation moins sévère du préjudice.

De plus, les titulaires des droits n’ont pas démontré qu’ils avaient tenté d’exploiter leurs droits autrement que par le biais de ces photographies, ce qui a conduit au rejet de leur demande d’indemnisation.


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