Échec commercial d’un ouvrage : qui est responsable ?

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Échec commercial d’un ouvrage : qui est responsable ?

L’Essentiel : L’échec commercial d’un ouvrage ne peut pas systématiquement engager la responsabilité de l’éditeur, qui n’est tenu qu’à une obligation de moyens. Dans l’affaire Eyrolles, l’auteur n’a pas pu imputer cet échec à l’éditeur, qui avait reçu un mandat exclusif pour la diffusion et la distribution. Malgré des ventes décevantes, l’éditeur a respecté ses obligations en organisant des présentations et en référencant l’ouvrage dans des catégories stratégiques. Les libraires, quant à eux, choisissent souvent les titres à commander, rendant difficile l’imposition d’un ouvrage, même avec des efforts de promotion.

L’échec commercial d’un ouvrage n’engage pas en soi, la responsabilité de l’éditeur dès lors que ce dernier n’est soumis qu’à une obligation de moyen. A ce titre, les clauses du contrat d’édition doivent encadrer parfaitement les obligations de promotion et de commercialisation de l’éditeur.  

Affaire Eyrolles

Un auteur n’a pu engager la responsabilité du Groupe Eyrolles au titre de l’échec commercial de son ouvrage. Par contrat de diffusion-distribution, l’auteur avait conféré à titre exclusif à l’éditeur, mandat d’effectuer l’ensemble des opérations commerciales et techniques relatives à la diffusion et à la distribution de ses ouvrages.

L’auteur s’était inquiété du peu de ventes de son livre. En réponse, l’éditeur l’a informé de son souhait de mettre fin au contrat de diffusion-distribution, en raison d’un chiffre d’affaires négatif (taux de retour de 40 %). Les parties se sont opposées sur les mauvais résultats obtenus pour la vente de l’ouvrage.

Périmètre du contrat d’édition

Il était stipulé au contrat que le diffuseur-distributeur s’engageait à prendre en charge le service commercial de l’éditeur et assurait pour son compte:

— la prospection des membres de son réseau par tous moyens tant en France qu’à l’étranger,

— la réception et le stockage des ouvrages en provenance de l’éditeur ou de ses fournisseurs,

— la réception, le traitement administratif, informatique et comptable des commandes,

— l’exécution physique des commandes notamment sorties de stock, emballage et expédition,

— la facturation et le traitement des retours,

— le suivi des comptes clients et notamment les relances, fermetures de comptes et procédures judiciaires.

La publicité et la promotion étaient à la charge de l’éditeur. Le diffuseur-distributeur avait la possibilité d’inclure les ouvrages de l’éditeur dans sa propre publicité, ainsi que dans l’ensemble de ses documents de promotion. L’éditeur conservait aussi la possibilité de réaliser des documents de promotion qui lui sont spécifiques, de passer des annonces dans la presse et de mener toute action de promotion qui viendrait en complément de l’action menée par le diffuseur-distributeur. Dans tous ces cas, les actions de publicité et de promotion réalisées par l’éditeur et le diffuseur-distributeur étaient mises en place en étroite collaboration.

Le diffuseur-distributeur agissait au titre du contrat comme commissionnaire, il facturait et encaissait tout paiement relatif à la vente des ouvrages en son nom et pour le compte de l’éditeur. Il était prévu i) d’une part, que l’éditeur établissait un relevé mensuel des ventes réalisées permettant de connaître le chiffre d’affaires net réalisé, en prenant en compte les retours effectués par les libraires qui font l’objet d’avoirs et que l’auteur (par le biais de sa propre société) établirait sa facture d’un montant HT égal à 65 % du chiffre d’affaires net hors TVA réalisé par l’éditeur.

D’autre part, s’agissant des provisions pour retour, une provision de 10 % était perçue sur le chiffre d’affaires net hors TVA des six premiers mois à compter de la 1re date de mise en vente, avec un ajout précisant i) 50 % de provision pour le premier mois de mise en place, ii) en cas de retours supérieurs à 30 % le diffuseur-distributeur se réservait la possibilité d’augmenter ces provisions.

Obligation de moyens respectée

L’éditeur, qui avait pour obligation de prospecter les membres de son réseau par tous moyens afin d’assurer la diffusion de l’ouvrage, a rempli son obligation de moyens en organisant une présentation de l’ouvrage à ses représentants; en adressant à ses représentants, à la même date, un courriel avec une biographie de son auteur pour les aider à éclairer son propos et le contenu du livre, soulignant que l’auteur avait fait de très bonnes ventes avec son précédent livre; en référençant l’ouvrage dans la catégorie ‘Livre du mois’ dans la section histoire et en le plaçant sur sa grille d’office; en parvenant à placer et à vendre 1.026 exemplaires en moins de 2 mois dans plus de 600 points de vente, alors que son taux moyen de placement en 2013 était de 430 exemplaires par titre; en référençant l’ouvrage sur les plateformes professionnelles et de vente en ligne, favorisant sa vente sur internet.

En raison de la «grille d’office», l’éditeur ne pouvait pas imposer l’ouvrage aux libraires, qui achètent les ouvrages et bénéficient d’avoirs en cas de retours. Dans le cadre de la «grille d’office», les nouveautés sont choisies par le libraire par catégorie d’ouvrages et quantités pré-déterminées et non par titres; 90 % des libraires refusent ce système et choisissent chacun des titres d’ouvrages et les quantités commandées pour chacun d’eux, par le biais de «l’office à façon/ personnalisé» ou par des commandes directes; l’objectif de ses représentants est de générer le plus de commandes par titres, appelées «notés».

Par ailleurs, s’il est exact que l’éditeur demande aux points de vente de respecter un délai de 3 mois entre la réception des nouveautés et leur retour, ce délai ne peut leur être imposé et en pratique de nombreux libraires préfèrent retourner rapidement les ouvrages qui ne correspondant pas à leur attente afin de ne pas pénaliser leur trésorerie. Télécharger la décision

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la responsabilité de l’éditeur en cas d’échec commercial d’un ouvrage ?

L’échec commercial d’un ouvrage ne peut pas être attribué à la responsabilité de l’éditeur, tant que ce dernier est soumis à une obligation de moyens. Cela signifie que l’éditeur doit mettre en œuvre tous les efforts raisonnables pour promouvoir et commercialiser l’ouvrage, mais il n’est pas garant du succès commercial.

Les clauses du contrat d’édition doivent donc définir clairement les obligations de l’éditeur en matière de promotion et de commercialisation. Si l’éditeur a respecté ces obligations, il ne peut être tenu responsable des résultats de vente, même si ceux-ci sont décevants.

Quelles étaient les circonstances de l’affaire Eyrolles ?

Dans l’affaire Eyrolles, un auteur a tenté d’engager la responsabilité du Groupe Eyrolles en raison de l’échec commercial de son livre. L’auteur avait donné à l’éditeur un mandat exclusif pour gérer toutes les opérations commerciales et techniques liées à la diffusion et à la distribution de son ouvrage.

L’éditeur a décidé de mettre fin au contrat de diffusion-distribution en raison d’un chiffre d’affaires négatif, avec un taux de retour de 40 %. Les deux parties ont alors eu des désaccords concernant les résultats de vente de l’ouvrage, ce qui a conduit à des tensions contractuelles.

Quelles étaient les obligations du diffuseur-distributeur selon le contrat d’édition ?

Le contrat stipulait que le diffuseur-distributeur devait prendre en charge le service commercial de l’éditeur. Cela incluait plusieurs responsabilités, telles que :

– La prospection des clients potentiels en France et à l’étranger.

– La réception et le stockage des ouvrages.

– Le traitement administratif et comptable des commandes.

– L’exécution physique des commandes, y compris l’emballage et l’expédition.

– La facturation et le traitement des retours.

– Le suivi des comptes clients, y compris les relances et les procédures judiciaires.

Ces obligations étaient essentielles pour assurer une bonne diffusion et distribution des ouvrages.

Qui était responsable de la promotion des ouvrages ?

La responsabilité de la publicité et de la promotion des ouvrages incombait à l’éditeur. Bien que le diffuseur-distributeur puisse inclure les ouvrages de l’éditeur dans sa propre publicité, l’éditeur avait également la possibilité de mener ses propres actions promotionnelles.

Les actions de promotion devaient être réalisées en étroite collaboration entre l’éditeur et le diffuseur-distributeur. Cela garantissait que les efforts de promotion étaient coordonnés et maximisaient les chances de succès commercial des ouvrages.

Comment l’éditeur a-t-il respecté son obligation de moyens ?

L’éditeur a respecté son obligation de moyens en prenant plusieurs initiatives pour promouvoir l’ouvrage. Parmi celles-ci, on peut citer :

– L’organisation d’une présentation de l’ouvrage à ses représentants.

– L’envoi d’un courriel contenant une biographie de l’auteur pour aider à la promotion.

– Le référencement de l’ouvrage dans la catégorie ‘Livre du mois’ et sa mise en avant sur la grille d’office.

– La vente de 1.026 exemplaires en moins de deux mois dans plus de 600 points de vente.

Ces actions démontrent que l’éditeur a fait des efforts significatifs pour assurer la diffusion de l’ouvrage, même si le succès commercial n’a pas été au rendez-vous.

Quelles étaient les limitations imposées aux libraires concernant les retours d’ouvrages ?

L’éditeur a demandé aux points de vente de respecter un délai de trois mois entre la réception des nouveautés et leur retour. Cependant, ce délai ne pouvait pas être imposé aux libraires, qui avaient la liberté de retourner les ouvrages rapidement s’ils ne correspondaient pas à leurs attentes.

En pratique, de nombreux libraires préfèrent retourner les ouvrages qui ne se vendent pas rapidement pour éviter de pénaliser leur trésorerie. Cela souligne la difficulté pour l’éditeur de contrôler les retours et, par conséquent, d’assurer le succès commercial de ses ouvrages.


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