Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris
Thématique : Contrefaçon de contenus rédactionnels : une concurrence déloyale ?
→ RésuméLa contrefaçon de contenus rédactionnels soulève des questions complexes de propriété intellectuelle et de concurrence déloyale. Selon l’article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle, une œuvre doit refléter l’originalité et la personnalité de son auteur pour bénéficier d’une protection. Dans le cas de la société ‘Les Petits pigments’, le tribunal a jugé que les phrases litigieuses ne constituaient pas une œuvre protégée. De plus, la concurrence déloyale, fondée sur des actes contraires à la loyauté professionnelle, n’a pas été retenue, faute de preuves suffisantes pour établir un lien entre les deux entreprises.
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Pour rappel, conformément à l’article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur l’œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous comportant des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial.
En application de la directive 2001/29 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, qui harmonise la notion d’œuvre conditionnant la protection encadrée par ce texte, une oeuvre implique un objet original, c’est-à-dire une création intellectuelle propre à son auteur, qui en reflète la personnalité en manifestant ses choix libres et créatifs ; et cet objet doit être identifiable avec suffisamment de précision et d’objectivité, ce qui exclut une identification reposant essentiellement sur les sensations de la personne qui reçoit l’objet (CJUE, 12 septembre 2019, Cofemel, C-683/17, points 29 à 35).
Eu égard à ses objectifs, la protection associée au droit d’auteur, dont la durée est longue, est réservée aux objets méritant d’être qualifiés d’oeuvres (CJUE, Cofemel précité, point 50).
Par ailleurs, la propriété littéraire et artistique ne protège pas les idées ou concepts, mais seulement la forme originale sous laquelle ils se sont exprimés (Cass. 1re Civ., 29 novembre 2005, n°04-12-721 ; 1re Civ., 16 janvier 2013, n°12-13.027).
La concurrence déloyale, fondée sur le principe général de responsabilité civile édicté par l’article 1240 du code civil, consiste en des agissements s’écartant des règles générales de loyauté et de probité professionnelle applicables dans la vie des affaires tels que ceux créant un risque de confusion avec les produits ou services offerts par un autre. L’appréciation de la faute doit résulter d’une approche concrète et circonstanciée des faits.
Constitue également une concurrence déloyale et est ainsi fautif au sens de l’article 1240 du code civil le fait, pour un agent économique, de se placer dans le sillage d’une entreprise en profitant indument des investissements consentis ou de sa notoriété, ou encore de ses efforts et de son savoir-faire ; qualifié de parasitisme, il résulte d’un ensemble d’éléments appréhendés dans leur globalité (Cass. Com., 4 février 2014, n°13-11.044 ; Cass. Com., 26 janvier 1999, n° 96-22.457), et qu’il faut interpréter au regard du principe de liberté du commerce et de l’industrie.
Constitue encore une concurrence déloyale la pratique commerciale trompeuse au sens de l’article L. 121-2 du code de la consommation qui confère à son auteur un avantage indû sur un concurrent.
Nos Conseils :
1. Attention à la nécessité de démontrer de manière concrète et circonstanciée les éléments constitutifs d’une contrefaçon de droit d’auteur, en mettant en avant l’originalité de l’oeuvre et les choix créatifs reflétant la personnalité de l’auteur.
2. Il est recommandé de prouver de manière claire et précise les éléments constitutifs d’une concurrence déloyale, en mettant en avant les agissements s’écartant des règles de loyauté et de probité professionnelle, ainsi que les éléments de parasitisme ou de pratique commerciale trompeuse.
3. Il est essentiel de fournir des preuves solides et vérifiables pour imputer des faits à une partie, en évitant les présomptions défavorables basées uniquement sur des coïncidences telles que des homonymies, et en respectant le principe selon lequel la charge de la preuve incombe à celui qui allègue un fait.
Résumé de l’affaire
Les points essentiels
Contrefaçon de droit d’auteur
La demanderesse invoque un travail original tenant à « un univers original dédié à la création » et « un travail de réécriture » par une rédactrice professionnelle, mais le contenu en question ne reflète pas de choix créatifs reflétant la personnalité de leur auteur. Le tribunal conclut que le contenu du site internet en général et les phrases litigieuses en particulier ne sont pas protégés par le droit d’auteur.
Concurrence déloyale
La demanderesse tente d’imputer des faits de concurrence déloyale à Mme [B] en se basant sur la coïncidence entre le nom du site litigieux et le nom de cette dernière. Cependant, le tribunal estime que cette homonymie n’est pas suffisante pour retenir une présomption défavorable au défendeur. Par conséquent, toutes les demandes dirigées contre Mme [B] sont rejetées faute de preuves suffisantes.
Dispositions finales
La société Les Petits pigments perd le procès et est condamnée aux dépens. Sa demande d’indemnité de procédure est également rejetée.
– Met les dépens à la charge de la société Les Petits pigments
Réglementation applicable
– Code civil
– Code de la consommation
– Code de procédure civile
Article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle:
L’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur l’œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous comportant des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial.
Article 1240 du code civil:
La concurrence déloyale, fondée sur le principe général de responsabilité civile édicté par l’article 1240 du code civil, consiste en des agissements s’écartant des règles générales de loyauté et de probité professionnelle applicables dans la vie des affaires tels que ceux créant un risque de confusion avec les produits ou services offerts par un autre.
Article L. 121-2 du code de la consommation:
Constitue encore une concurrence déloyale la pratique commerciale trompeuse au sens de l’article L. 121-2 du code de la consommation qui confère à son auteur un avantage indû sur un concurrent.
Article 696 du code de procédure civile:
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
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