Cour d’appel de Toulouse, 22 février 2018
Cour d’appel de Toulouse, 22 février 2018

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Toulouse

Thématique : Noms de groupes musicaux : l’action en concurrence déloyale

Résumé

En matière de protection des noms de groupes de musique, l’action en concurrence déloyale est recevable, y compris en référé. Les membres d’un groupe musical peuvent agir contre une formation concurrente utilisant la même dénomination, comme « Lorraine Cross », si un risque de confusion est établi. Cette action, distincte de celle visant la protection d’un droit privatif, nécessite la démonstration d’une faute. Dans le cas présent, les demandeurs ont saisi le juge des référés pour faire cesser des actes de concurrence déloyale, sans invoquer la contrefaçon de leur marque, ce qui a permis de ne pas relever de la compétence exclusive du TGI.

Action en référé recevable

En matière de protection des noms de groupes de musique, l’action en concurrence déloyale est recevable, y compris en référé. L’action en référé (articles 808 et 809 du code de procédure civile) des membres d’un groupe contre une formation musicale concurrente dotée de la même dénomination (« Lorraine Cross ») et disposant d’une certaine notoriété sur les réseaux sociaux, a été jugée recevable. Le risque de confusion manifeste entre deux formations musicales distinctes rend vraisemblable la commission d’actes de concurrence déloyale (trouble manifestement illicite).

Frictions procédurales avec les droits d’auteur

Selon l’article L 331-1 du code de la propriété intellectuelle, les actions civiles et les demandes relatives à la propriété littéraire et artistique, y compris lorsqu’elles portent également sur une question connexe de concurrence déloyale, sont exclusivement portées devant des tribunaux de grande instance, déterminés par voie réglementaire. L’article 4 du code de procédure civile dispose que l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties dans l’acte introductif de l’instance et dans les conclusions en défense et peut être modifié par des demandes incidentes.

Action principale, action accessoire

Lorsque l’action en violation de droits d’auteur est formulée à titre accessoire de l’action en concurrence déloyale, l’article 12 du code de procédure civile permet au juge de donner ou restituer aux faits leur exacte qualification sans toutefois pouvoir changer le fondement juridique invoqué par les parties et auquel elles ont entendu limiter le débat.

L’action en concurrence déloyale est une action en responsabilité civile qui se distingue de l’action visant la protection d’un droit privatif. Même si les deux actions peuvent être complémentaires et être engagées cumulativement dès lors que les éléments constitutifs de l’une et l’autre sont réunis, leur fondement juridique est distinct et leurs cause et objectif sont différents. Notamment, l’action en concurrence déloyale exige une faute alors que la seule démonstration de l’atteinte à un droit privatif suffit à sa protection.

En l’espèce, les demandeurs ont clairement saisi le juge des référés exclusivement d’une action en concurrence déloyale pour faire cesser des actes estimés concurrents. Ils n’ont pas saisi le juge (pas même à titre accessoire), d’une action visant la protection d’un droit privatif tel que la marque « Lorraine Cross » et le logo qu’ils ont eux-mêmes déposés à l’INPI. Même s’ils évoquaient l’existence de cette marque, ils n’ont pas soutenu sa contrefaçon. Ils reprochaient à la formation musicale concurrente, d’user du même nom, d’utiliser ses outils de communication, de commettre des actes de désorganisation dans le but de décrédibiliser le groupe, soit tous actes fautifs de concurrence déloyale susceptibles de créer une situation de confusion de nature à permettre le détournement du public attaché au groupe musical initial.

En conséquence, le litige ne relevait pas de la compétence exclusive du TGI (article L 331-1 du code de la propriété intellectuelle) qui ne s’applique à l’action en concurrence déloyale que lorsqu’elle est connexe à une action principale relative à la propriété littéraire et artistique, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.

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