Cour d’appel de Rennes, 18 septembre 2018
Cour d’appel de Rennes, 18 septembre 2018

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Rennes

Thématique : Cession de fonds de commerce et droits d’auteur

Résumé

La cession d’un fonds de commerce inclut souvent les actifs incorporels, tels que les droits d’auteur. Il est crucial d’inclure une clause spécifique dans le contrat de cession pour éviter des litiges. Dans une affaire récente, une artiste plasticienne a contesté la cession de ses droits, arguant que le cessionnaire avait exploité ses créations sans autorisation. Cependant, les juges ont statué que le contrat permettait une exploitation indirecte, même après la création d’une nouvelle société. De plus, l’artiste n’a pas réussi à prouver une lésion significative, rendant la rémunération forfaitaire justifiée.

Cession des actifs incorporels

Si la cession du fonds de commerce emporte celle des actifs incorporels dont les créations intellectuelles, il est préférable de prévoir au contrat de cession de droits une clause spécifique.  Une artiste plasticienne et graphiste, auteur de créations dans un style figuratif,  n’a pas obtenu gain de cause dans le cadre d’une action en nullité de cession de droits et accessoirement de contrefaçon dirigée contre le cessionnaire de ses droits. Le cessionnaire avait créé un nouveau fonds de commerce exploitant les créations associées à son ancien fonds.

Validité de la cession de droits

Le cessionnaire avait proposé d’acquérir les droits d’auteur attachés à plusieurs des modèles de la graphiste, moyennant rémunération forfaitaire. Le cessionnaire avait exploité directement les dessins en qualité d’artisan puis dans le cadre d’une entreprise individuelle puis dans le cadre d’une société à responsabilité limitée (EURL). Les dispositions de l’article L 131-3 du Code de la propriété intellectuelle ne visaient jusqu’à la publication de la loi 2016-925 du 7 juillet 2016 que les contrats de représentation, d’édition, et de production audiovisuelle, de sorte que la cession des droits d’exploitation sur les dessins n’était soumise à aucune exigence de forme, sinon aux règles des articles 1341 à 1346 ancien du Code civil.  Le contrat de cession stipulait que le cessionnaire pouvait commercialiser des produits en reproduisant les dessins de l’auteur « directement ou indirectement ». La possibilité conférée par le contrat de reproduire « indirectement » a été interprété par les juges comme permettant de continuer une exploitation dans le cadre de toute nouvelle création de société. La création d’un fonds n’interdit pas que soient apportés par son créateur des éléments existant antérieurement et qu’il exploitait déjà. Par la suite, la cession du fonds de commerce de l’EURL au profit de la SARL,  concomitante de la disparition de l’EURL et de la création de la SARL qui avait le même objet a nécessairement entraîné le transfert des éléments incorporels du fonds.

Contestation de la rémunération forfaitaire

L’auteur cédant a également tenté de faire valoir la nullité du contrat pour violation  de l’article L 131-5 du CPI (rescision pour lésion) : « En cas de cession du droit d’exploitation, lorsque l’auteur aura subi un préjudice de plus de sept douzièmes dû à une lésion ou à une prévision insuffisante des produits de l’oeuvre, il pourra provoquer la révision des conditions du contrat. Cette demande ne pourra être formée que dans le cas où l’oeuvre aura été cédée moyennant une rémunération forfaitaire. La lésion sera appréciée en considération de l’ensemble de l’exploitation par le cessionnaire des oeuvres de l’auteur qui se prétend lésé. ».

Il appartient à l’auteur de justifier de la lésion au regard de l’ensemble de l’exploitation de ses oeuvres et ce, en raison du fait que les parties n’ont pas pris l’exacte mesure des recettes que l’exploitation des dessins était susceptible d’engendrer au profit du cessionnaire. En l’espèce, c’est en fonction des résultats de l’exploitation que l’auteur aurait pu faire valoir ses droits. Or, les chiffres d’affaires générés par l’exploitation des dessins cédés étaient connus. L’auteur ne justifiait pas de la réalité de la lésion invoquée. Les oeuvres avaient également un caractère accessoire et la rémunération qui a été déterminée forfaitairement dans le contrat était justifiée.

Télécharger la décision

 

 


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon