Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Usage mineur de la marque d’un tiers
→ RésuméL’usage de la marque « Chapelier » par la société poursuivie n’a pas été considéré comme une contrefaçon, car il était toujours intégré dans des phrases en anglais et non apposé de manière isolée sur les produits. Les sacs litigieux portaient exclusivement la marque US POLO ASSN, ce qui évitait toute confusion pour le consommateur. Le terme « Chapelier » était utilisé comme référence produit, sans indiquer l’origine des marchandises. Ainsi, l’usage de ce signe n’atteint pas la fonction essentielle des marques, qui est de garantir la provenance des produits, conformément aux articles L. 713-2 et L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle.
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Affaire Hervé Chapelier
L’usage non autorisé de la marque d’un tiers (« Chapelier ») suppose que ladite marque soit apposée de façon visible. Il est ainsi possible d’ajouter la marque d’un tiers sur des conditionnements / étiquettes si celle-ci se fond dans un ensemble. La CJUE (CJUE, 20 mars 2003, LTJ Diffusion, aff. C-291/00) a déjà considéré qu’un signe est identique à la marque s’il reproduit sans modification ni ajout tous les éléments constituant la marque ou si, considéré dans son ensemble, il recèle des différences si insignifiantes qu’elles peuvent passer inaperçues aux yeux d’un consommateur moyen.
Absence de contrefaçon
En l’espèce, le signe CHAPELIER n’a pas été utilisé seul par la société poursuivie pour contrefaçon mais toujours dans des locutions en anglais (“LIFE IS COLOR MEDIUM CHAPELIER ORANGE NAVY”, “LIFE IS COLOR MEDIUM CHAPELIER Orange/Marine”, “US POLO ASSN Life Is Color Medium Chapelier”) et n’a pas été apposé sur les sacs litigieux qui supportaient exclusivement la marque US POLO ASSN.
Marque et référence de produit
Le terme CHAPELIER accolé au mot “MEDIUM” ou à des codes-barres sur des étiquettes révèle que le signe a été utilisé à titre de référence pour commercialiser des produits et non comme indicateur de l’origine des produits ; le consommateur mis en présence du signe incriminé lors d’un achat sur les deux sites internet de la société SPARTOO ou lors de la réception de colis contenant les sacs commandés ne pouvait se méprendre sur l’origine des produits qu’il a commandés et acquis, clairement marqués US POLO ASSN. Le signe CHAPELIER n’a donc pas été utilisé à titre de marque, l’usage qui en a été fait n’étant pas susceptible de porter atteinte à la fonction essentielle des marques invoquées qui est de garantir au consommateur la provenance des produits ou services, en raison d’un risque de confusion dans l’esprit du public.
Article L. 713-2 du code de la propriété intellectuelle
Pour rappel, l’article L. 713-2 du CPI interdit, sauf autorisation du propriétaire, la reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque française, même avec l’adjonction de mots tels que : « formule, façon, système, genre, méthode », ainsi que l’usage d’une marque française reproduite, pour des produits ou services identiques à ceux désignés dans l’enregistrement. L’article L. 713-3 du même code interdit, sauf autorisation du propriétaire, s’il peut en résulter un risque de confusion dans l’esprit du public, la reproduction, l’usage ou l’apposition d’une marque française, ainsi que l’usage d’une marque reproduite, pour des produits ou services similaires à ceux désignés dans l’enregistrement, ainsi que l’imitation d’une marque et l’usage d’une marque imitée pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement.
En application de l’article 9 du règlement (CE) 207/2009/CE du 26 février 2009, la marque communautaire confère également à son titulaire un droit exclusif qui l’habilite à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires, notamment, a)
d’un signe identique à la marque communautaire pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée et b) d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque communautaire et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque communautaire et le signe, il existe un risque de confusion dans l’esprit du publie, le risque de confusion comprenant le risque d’association entre le signe et la marque. En vertu de cet article, il peut notamment être interdit d’apposer le signe sur les produits ou sur leur conditionnement, d’offrir les produits ou de les mettre dans le commerce ou de les détenir à ces fins et d’utiliser le signe dans les papiers d’affaires et la publicité.
La CJUE (12 juin 2008, aff. C-533106, 02 Holdings Ltd) a également considéré que le titulaire d’une marque enregistrée ne peut interdire à un tiers l’usage d’un signe similaire à sa marque en application de l’article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle que si 4 conditions sont réunies : i) un usage de la marque dans la vie des affaires, ii) un usage sans le consentement du titulaire de la marque, un usage pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, iv) un usage qui doit porter atteinte ou être susceptible de porter atteinte à la fonction essentielle de la marque qui est de garantir au consommateur la provenance des produits ou services, en raison d’un risque de confusion dans l’esprit du public.
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