Cour d’appel de Lyon, 26 octobre 2017
Cour d’appel de Lyon, 26 octobre 2017

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Lyon

Thématique : Un kiosque à journaux est-il un fonds de commerce ?   

Résumé

Un kiosque à journaux peut être exploité sur le domaine public, même s’il ne constitue pas un fonds de commerce au sens strict. La clé réside dans l’existence d’une clientèle autonome, qui permet de revendiquer la propriété de cette clientèle, indépendamment de la précarité de l’occupation. Dans une affaire récente, un kiosque a été cédé avec succès, car il avait su attirer une clientèle de passage, sans lien avec des activités publiques. Ainsi, la cession a été validée, démontrant que la vente pouvait être qualifiée de fonds de commerce, malgré l’absence de droit au bail.

Fonds de commerce et domaine public

Il est de principe constant que si l’acquisition de la propriété commerciale est incompatible avec l’occupation du domaine public, qui ne peut être que temporaire et à laquelle il peut être mis fin sans indemnité, aucune disposition légale ou réglementaire n’interdit l’exploitation d’un fonds de commerce sur le domaine public (l’article L.2124-32-1 du code général de la propriété des personnes publiques). Un fonds de commerce peut être exploité sur le domaine public sous réserve de l’existence d’une clientèle propre.

Au sens des articles L.141-5 et L.142-2 du code de commerce le fonds de commerce est composé d’un ensemble de biens meubles corporels et incorporels affectés à l’exploitation de l’activité commerciale, comprenant notamment l’enseigne, le nom commercial, le droit au bail, la clientèle et l’achalandage, le mobilier commercial, le matériel, l’outillage, les autorisations d’exploitation et les droits de propriété intellectuelle. L’existence d’une clientèle autonome, réelle et certaine constitue l’élément essentiel et déterminant du fonds de commerce, tandis que le droit au bail n’est pas de plein droit un élément nécessaire du fonds.

Monnayer le droit de présentation

Si dans certaines hypothèses la propriété commerciale, qui se caractérise principalement par le droit au renouvellement du bail des locaux d’exploitation, peut être un facteur économique déterminant, elle ne relève pas, en effet, de l’essence même du fonds de commerce, qui se définit comme une universalité de fait regroupant des moyens matériels et immatériels de production de biens et de services dans le but d’attirer une clientèle propre. Ainsi, la précarité de l’emplacement n’est pas incompatible avec l’existence d’un fonds de commerce dans les hypothèses où l’activité a généré une clientèle autonome, propriété du commerçant.

En conséquence, même si l’exploitation d’un kiosque à journaux ne constitue pas un fonds de commerce, la clientèle acquise par le cédant peut tout de même être céder par le biais du droit de présentation.

Cession de fonds validée

Dans une affaire récente, un kiosque à journaux situé sur le domaine public libre d’accès à tous, bénéficiait d’un emplacement privilégié et attirait une clientèle de passage, sans lien avec une quelconque activité développée par la commune ou l’un de ses concessionnaires, et ne fréquentant pas un établissement ou un service public. Les conditions de la création d’une clientèle propre à l’activité de vente de journaux, objet de la cession étaient donc incontestablement réunies.

La cession du Kiosque à un tiers a donc été validée. La vente du Kiosque pouvait légitimement être qualifiée de vente de fonds de commerce, puisqu’il était établi que les cédants avaient constitué une clientèle propre, dont ils pouvaient revendiquer la propriété nonobstant la précarité de leur titre d’occupation du domaine public. C’était donc à tort que le cessionnaire avait recherché la responsabilité des vendeurs pour manquement à leur obligation précontractuelle de renseignements quant à la nature du bien vendu.

Ils n’étaient pas davantage fondés à soutenir qu’ils ont été victimes de manœuvres dolosives en raison de la dissimulation volontaire par les cédants de leur propre acte d’acquisition, dont ils ont appris ultérieurement qu’il portait sur un simple droit de présentation.

Surtout, le cessionnaire ne pouvait en aucun cas ignorer que le fonds, exploité sur le domaine public, ne comprenait pas de droit au bail, alors que l’acte, qui ne fait aucune référence à un quelconque bail commercial, expose clairement que le kiosque ne bénéficie que d’une autorisation d’occupation temporaire. La société d’avocats, rédactrice du contrat, n’a pas improprement retenu la qualification de vente de fonds de commerce en présence d’une clientèle autonome, réelle et certaine.

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