Xavier Bertrand obtient gain de causeIl est relativement rare qu’un éditeur de presse initie des poursuites pour diffamation. La société Médiapart a été déboutée en cassation, de son action en diffamation contre l’ancien secrétaire général de l’UMP, Xavier Bertrand. Médiapart avait publié plusieurs articles reproduisant, notamment, des extraits d’enregistrements de conversations privées tenues dans le cadre de l’affaire Bettencourt. Xavier Bertrand., alors secrétaire général de l’UMP, questionné par des journalistes au sujet de l’évolution de l’affaire avait, en marge d’une réunion publique, tenu les propos suivants : « Ce sont des méthodes d’un autre temps. Et quand certains médias, et notamment, un site utilisant des méthodes fascistes … on n’est pas décidé à laisser s’implanter dans notre pays des méthodes d’un autre temps ». Mediapart s’était alors constituée partie civile du chef de diffamation publique. Propos non diffamatoiresLa cour a retenu que la formulation des expressions « méthodes d’un autre temps » et « méthodes fascistes » ne renferment en elles-mêmes l’expression d’aucun fait précis en ce que i) l’expression « méthodes d’un autre temps » est l’appréciation subjective du caractère suranné d’une façon d’agir et ii) l’expression « méthodes fascistes » ne revêt son caractère de précision en droit de la diffamation qu’à la condition de renfermer l’imputation de faits précis. Bonne foi retenueEn tout état de cause, la bonne foi a été admise. Médiapart a revendiqué un rôle majeur dans la révélation du contenu des écoutes Bettencourt impliquée dans une polémique politique portant sur les conditions de financement de la campagne présidentielle de 2007. La bonne foi doit être appréciée compte tenu de cette implication et du fait que Xavier Bertrand s’est exprimé en sa qualité d’homme politique et partisan de Nicolas Sarkozy. Sur la légitimité du but poursuivi, l’ancien secrétaire général de l’UMP était fondé à réagir à la mise en cause du Président de la République et de l’un de ses ministres par la société Médiapart. Ses propos, en dépit du mot « écoutes » qui constituent une maladresse, portaient sur des enregistrements de conversations illégaux, prohibés par l’article 226-1 du code pénal et reposaient sur un support factuel et juridique suffisant, aucune des personnes écoutées n’ayant été d’accord pour que ces enregistrements fussent mis en ligne par la société Médiapart. L’expression « fasciste » tend également à se banaliser en désignant l’adversaire avec lequel on est en totale opposition. La Cour de cassation a donc confirmé que Xavier Bertrand s’est exprimé par hyperbole dans la seule intention de manifester son indignation sur des événements ressentis comme des attaques de nature politique. Le bénéfice de la bonne foi lui a donc été accordé, en sa qualité d’homme politique pouvant recourir à l’exagération, en raison de propos qui peuvent être qualifiés d’excessifs et inappropriés mais qui restent dans les limites admises du débat politique et médiatique. |
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Quel était le contexte de l’affaire entre Médiapart et Xavier Bertrand ?L’affaire entre Médiapart et Xavier Bertrand s’inscrit dans le cadre de la publication d’articles par le site d’information, qui reproduisait des extraits d’enregistrements de conversations privées liés à l’affaire Bettencourt. Xavier Bertrand, alors secrétaire général de l’UMP, avait exprimé des critiques sur les méthodes utilisées par certains médias, qualifiant ces dernières de « méthodes d’un autre temps » et de « méthodes fascistes ». Ces propos ont conduit Médiapart à se constituer partie civile pour diffamation, ce qui a déclenché une série de procédures judiciaires. La cour a finalement statué en faveur de Xavier Bertrand, considérant que ses propos ne constituaient pas une diffamation au sens juridique du terme. Pourquoi la cour a-t-elle jugé que les propos de Xavier Bertrand n’étaient pas diffamatoires ?La cour a déterminé que les expressions utilisées par Xavier Bertrand, telles que « méthodes d’un autre temps » et « méthodes fascistes », ne contenaient pas d’imputation de faits précis. L’expression « méthodes d’un autre temps » a été considérée comme une appréciation subjective, tandis que l’expression « méthodes fascistes » n’était pas suffisamment précise pour constituer une diffamation. En effet, pour qu’une déclaration soit considérée comme diffamatoire, elle doit impliquer des faits concrets et vérifiables, ce qui n’était pas le cas ici. Quelles ont été les considérations de la cour concernant la bonne foi de Médiapart ?La cour a reconnu la bonne foi de Médiapart, qui a affirmé avoir joué un rôle crucial dans la révélation des écoutes liées à l’affaire Bettencourt. Cette bonne foi a été appréciée dans le contexte de l’implication de Médiapart dans une polémique politique, notamment en ce qui concerne le financement de la campagne présidentielle de 2007. Xavier Bertrand, en tant qu’homme politique, avait le droit de réagir aux accusations portées contre le Président de la République et un de ses ministres, ce qui a également influencé la décision de la cour. Comment la cour a-t-elle interprété l’utilisation du terme « fasciste » par Xavier Bertrand ?La cour a noté que l’utilisation du terme « fasciste » par Xavier Bertrand pouvait être perçue comme une hyperbole, une exagération utilisée pour exprimer son indignation face à des attaques politiques. Cette interprétation est importante car elle souligne que, dans le cadre du débat politique, des propos peuvent être excessifs mais demeurent dans les limites acceptables de l’expression. La banalisation du terme « fasciste » dans le discours politique a également été prise en compte, ce qui a permis à la cour de conclure que les propos de Bertrand, bien que jugés inappropriés, ne constituaient pas une diffamation. Quelles implications cette décision a-t-elle pour la liberté d’expression dans le débat politique ?Cette décision a des implications significatives pour la liberté d’expression dans le débat politique, en établissant que les hommes politiques peuvent utiliser des expressions fortes pour exprimer leur indignation sans craindre des poursuites pour diffamation. Elle souligne également l’importance de la bonne foi dans les discours politiques, permettant aux acteurs politiques de s’exprimer librement sur des sujets controversés. Cependant, cette liberté d’expression doit être équilibrée avec la responsabilité de ne pas porter atteinte à la réputation d’autrui par des accusations non fondées. En somme, la décision de la cour renforce la protection de la liberté d’expression tout en rappelant les limites de la diffamation dans le contexte politique. |
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