Cour d’appel de Rennes, 23 octobre 2024, RG n° 21/03995
Cour d’appel de Rennes, 23 octobre 2024, RG n° 21/03995

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Rennes

Thématique : La rémunération des heures supplémentaires

 

Résumé

M. [V] a demandé la jonction de deux procédures d’appel, visant à confirmer un jugement du conseil de prud’hommes de Nantes. Ce jugement a condamné la SAS Vives Eaux à lui verser des sommes pour rappel de salaire, congés payés, ainsi qu’une indemnité pour heures supplémentaires non réglées. La cour a reconnu que M. [V] avait effectivement réalisé des heures supplémentaires et a ordonné le versement des sommes correspondantes. De plus, le licenciement de M. [V] a été jugé nul, entraînant des indemnités pour licenciement abusif et manquement à l’obligation de sécurité de l’employeur.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

23 octobre 2024
Cour d’appel de Rennes
RG n°
21/03995

8ème Ch Prud’homale

ARRÊT N°426

N° RG 21/03995 et 21/04178 joints –

N° Portalis DBVL-V-B7F-RZH3

M. [U] [V]

C/

S.A.S. VIVES EAUX

Sur appel du jugement du Conseil de Prud’hommes de NANTES du 04/06/2021 – RG F19/00446

Infirmation partielle

Copie exécutoire délivrée

le : 24-10-24

à :

-Me Jean-David CHAUDET

-Me Grégory NAUD

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 23 OCTOBRE 2024

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Nadège BOSSARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Monsieur Hervé BALLEREAU, Président de chambre,

Assesseur : Mme Anne-Laure DELACOUR, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 05 Septembre 2024

En présence de Madame [O] [F], médiatrice judiciaire,

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 23 Octobre 2024 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANT et intimé à titre incident :

Monsieur [U] [V]

né le 09 Septembre 1964 à [Localité 5] (75)

demeurant [Adresse 1]

[Localité 3]

Ayant Me Jean-David CHAUDET de la SCP JEAN-DAVID CHAUDET, Avocat au Barreau de RENNES, pour postulant et représenté à l’audience par Me Marie COGOLUEGNES, Avocat plaidant du Barreau de NANTES

INTIMÉE et appelante à titre incident :

La S.A.S. VIVES EAUX prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

[Adresse 4]

[Localité 2]

Ayant Me Grégory NAUD de la SELARL AVOXA NANTES, Avocat au Barreau de NANTES, pour Avocat constitué

M. [U] [V] a été engagé par la société Vives Eaux, selon contrat de travail à durée indéterminée le 17 mai 2017, en qualité d’employé de marée, coefficient 135, à raison de 39 heures par semaine et avec une rémunération de 1 828,52 euros de mai à juin 2017 puis en qualité de responsable préparation quai nuit, coefficient 170, à compter du 1er juillet 2017, avec une rémunération de 2 641,32 euros.

La société Vives Eaux appartient à un groupe spécialisé dans la pêche côtière francaise, dans le mareyage, la transformation et la distribution des produits frais ou congelés.

La période d’essai d’un mois a été renouvelée une fois.

Le 30 mai 2018, la société Vives Eaux a proposé à M. [V] une rupture conventionnelle de son contrat de travail.

Le 12 juin 2018, M. [V] a refusé la proposition de rupture conventionnelle.

Le 29 juin 2018, le salarié a été convoqué à un entretien fixé au 10 juillet, préalable à un éventuel licenciement.

M. [V] a été victime d’un accident du travail le 12 juillet 2018 et placé en arrêt de travail le 13 juillet pour accident du travail lequel a été renouvelé jusqu’au 24 juillet suivant.

Par lettre recommandée datée du 14 juillet 2018, la société Vives Eaux a notifié à M. [V] son licenciement pour dégradation de son comportement portant atteinte à ses obligations contractuelles.

Le 16 juillet 2018, la société a procédé auprès de la caisse primaire d’assurance maladie à la déclaration de l’accident du travail du 12 juillet 2018.

—-

La caisse primaire d’assurance maladie a, le 8 octobre 2018, refusé de prendre en charge l’accident du 12 juillet 2018 au titre de la législation relative aux risques professionnels.

Par jugement du 14 octobre 2022, le Pôle social du Tribunal judiciaire a reconnu le caractère professionnel de l’accident survenu le 12 juillet 2018.

—-

Le 2 mai 2019, M. [V] a saisi le conseil de prud’hommes de Nantes aux fins de :

‘ Dire que :

– M. [V] n’avait pas été réglé de l’intégralité de ses heures de travail,

– la société n’avait pas exécuté loyalement le contrat de travail et avait violé 1’obligation de sécurité de résultat à laquelle elle était tenue en matière de santé et de sécurité de son salarié,

– le licenciement était entaché de nullité et en toute hypothèse, dépourvu de cause réelle et sérieuse,

‘ Condamner la SAS Vives Eaux à verser les sommes suivantes :

– 24.496,93 € bruts, à titre principal, au titre des heures supplémentaires et de nuit non réglées,

– 2.449,69 € bruts de congés payés afférents,

– 9.056,37 € bruts, à titre subsidiaire, au titre des heures supplémentaires et de nuit non réglées,

– 905,64 € bruts de congés payés afférents,

– 235,12 € bruts de majoration à valoir sur les jours fériés,

– 27.799,20 € nets d’indemnité pour travail dissimulé,

– 6.000 € nets de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l’exécution déloyale,

– 308,88 € bruts, à titre principal, de repos compensateurs dus s’agissant des heures de nuit,

– 30,89 € bruts de congés payés afférents,

– 176,09 € bruts, à titre subsidiaire, de repos compensateurs dus s’agissant des heures de nuit,

– 17,61 € bruts de congés payés afférents,

– 32,33 € bruts de rappel de salaire de base à valoir sur le mois de mai 2017,

– 3,23 € bruts de congés payés afférents,

– 334,07 € bruts de rappel de salaire de base à valoir sur le mois de juin 2017,

– 33,41 € bruts de congés payés afférents,

– 32.000 € nets, à titre principal, de dommages et intérêts pour licenciement nul,

– 32.000 € nets, à titre subsidiaire, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en écartant le barème pour inconventionnalité,

– 9.266 € nets, à titre infiniment subsidiaire pour le cas on le conseil ne retenait pas l’inopposabilité du plafonnement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 5.282 €, à titre encore plus subsidiaire, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l’article L.1235-3 du Code du travail,

– 648,18 € nets de solde d’indemnité légale de licenciement,

– 3.000 € nets au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens comprenant les éventuels frais d’exécution forcée par voie extra-judiciaire,

‘ Ordonner la remise des documents suivants : bulletin de paie récapitulatif, certificat de travail, attestation Pôle Emploi conforme à la décision à intervenir,

ainsi que tout document conforme à celle ci, et ce sous astreinte de 100 € par jour de retard, le Conseil se réservant compétence pour liquider cette astreinte,

‘ Intérêts de droit à compter de l’introduction de l’instance pour les sommes ayant le caractère de salaire et à compter de la décision à intervenir pour les autres sommes, outre l’anatocisme,

‘ Exécution provisoire de l’intégralité du jugement à intervenir,

‘ Fixer la moyenne mensuelle brute des salaires à 4.633,20 €,

‘ Dire qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décision à intervenir, et en cas d’exécution par voix extrajudiciaires, les sommes retenues par l’huissier instrumentaire devraient être supportées par la société défenderesse.

Par jugement du 4 juin 2021, le conseil de prud’hommes de Nantes a :

‘ fait droit à la demande de rappel de salaire pour les mois de mai et juin 2017 faite par M. [V],

‘ condamné la SAS Vives Eaux à payer à M. [V] les sommes suivantes :

– 32,33 € bruts au titre de rappel de salaire pour le mois de mai 2017,

– 3,23 € bruts pour les congés payés afférents,

– 334,07 € bruts au titre de rappel de salaire pour le mois de juin 2017,

– 33,41 € bruts pour les congés payés afférents,

‘ lesdites condamnations étant assorties des intérêts au taux légal à compter de la date de la saisine du conseil,

‘ condamné la SAS Vives Eaux à payer à M. [V] la somme de 1.200 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et débouté la partie défenderesse de sa demande formée au même titre,

‘ débouté M. [V] de l’ensemble de ses autres demandes,

‘ rappelé qu’en application de l’article R.1454-28 du Code du travail, l’exécution provisoire du présent jugement est de droit, le salaire mensuel moyen de référence étant fixé à 2.641,32 €,

‘ dit qu’à défaut de règlement spontané des condamnations de la présente décision, et en cas d’exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l’huissier instrumentaire devraient être supportées par la société défenderesse,

‘ laissé les dépens à la charge de la société défenderesse.

M. [V] a interjeté appel le 2 juillet 2021, cette déclaration ayant fait l’objet d’une déclaration d’appel rectificative le 6 juillet 2021 (RG 21/04178).

Le 26 avril 2022, le conseiller de la mise en état a, par ordonnance, joint les instances RG 21/03995 et RG 21/04178.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 17 février 2023 suivant lesquelles M. [V] demande à la cour de :

‘ Ordonner la jonction des procédures enregistrées sous les numéros RG 21/03995 (déclaration d’appel du 2 juillet 2021) et RG 21/04178 (déclaration d’appel du 6 juillet 2021), étant précisé que le second appel est rectificatif et vient ainsi s’incorporer à la déclaration d’appel du 2 juillet 2021,

‘ Accueillir l’appel formé par M. [V],

‘ Confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nantes le 4 juin 2021 en ce qu’il a :

– fait droit à la demande de rappel de salaire pour les mois de mai et juin 2017 faite par M. [V],

– condamné la SAS Vives Eaux à payer à M. [V] les sommes suivantes :

– 32,33 € bruts au titre de rappel de salaire pour le mois de mai 2017,

– 3,23 € bruts pour les congés payés afférents,

– 334,07 € bruts au titre de rappel de salaire pour le mois de juin 2017,

– 33,41 € bruts pour les congés payés afférents,

– 1.200 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, débouté la partie adverse de sa demande formée au même titre et laissé à la charge de cette dernière les dépens,

‘ Réformer la décision de première instance pour le surplus, en ce qu’elle a débouté M. [V] de l’ensemble de ses autres demandes,

Et statuant de nouveau,

‘ Juger que :

– M. [V] n’a pas été réglé de l’intégralité de ses heures de travail,

‘ Condamner la SAS Vives Eaux à verser les sommes suivantes :

– 5.407,64 € bruts, à titre principal, au titre des heures supplémentaires non réglées,

– 540,76 € bruts de congés payés afférents,

– 1.301,50 € bruts, à titre subsidiaire, au titre des heures supplémentaires et de nuit non réglées,

– 130,15 € bruts de congés payés afférents,

– 235,12 € bruts de majoration à valoir sur les jours fériés,

– 23,51 € bruts de congés payés afférents,

– 209,39 € bruts, à titre principal, de repos compensateurs dus s’agissant des heures de nuit,

A titre subsidiaire : 176,09 € bruts au titre des repos compensateurs dus s’agissant des heures de nuit réalisées, outre 17,61 € bruts au titre des congés payés afférents

– 18.845,40 € nets à titre d’indemnité pour travail dissimulé,

‘ Juger que :

– la société n’a pas exécuté loyalement le contrat de travail de M. [V] et a violé 1’obligation de sécurité de résultat à laquelle elle était tenue en matière de santé et de sécurité de son salarié,

– le licenciement est entaché de nullité et en toute hypothèse, dépourvu de cause réelle et sérieuse,

– doit être écarté le montant maximal d’indemnisation prévu par l’article L.1235-3 du Code du travail en raison de son inconventionnalité, ce plafonnement violant les dispositions de l’article 24 de la Charte sociale européenne, les articles 4 et 10 de la convention 158 de l’OIT et le droit au procès équitable,

En conséquence, lui allouer les sommes suivantes :

– A titre principal : 32.000 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

– A titre subsidiaire : 32.000 € nets en réparation de l’ensemble des préjudices professionnels, financiers et moraux subis dans le cadre de son licenciement, après avoir écarté le plafonnement prévu par l’article L. 1235-3 du code du travail en raison de son inconventionnalité, ce plafonnement violant les dispositions de l’article 24 de la Charte sociale européenne, les articles 4 et 10 de la convention 158 de l’OIT et le droit au procès équitable.

– à titre infiniment subsidiaire pour le cas où la cour ne retenait pas l’inopposabilité du plafonnement, 6 281,80 euros nets de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, correspondant à 2 mois de salaire en application de l’article L.1235-3 du Code du travail,

– à titre encore plus subsidiaire pour le cas où la cour ne retenait pas l’inopposabilité du plafonnement et déboutait M. [V] de ses demandes de rappel de salaires, 5.282 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l’article L.1235-3 du Code du travail,

Condamner en outre la SAS Vives Eaux à verser à Monsieur [V] les sommes de :

– 181,94 € nets de solde d’indemnité légale de licenciement,

– 2.100 € nets au titre des frais irrépétibles exposes dans le cadre la présente instance sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

‘ Ordonner la remise à M. [V] d’un bulletin de paie récapitulatif, d’un certificat de travail et d’une attestation Pôle Emploi conforme à la décision à intervenir ainsi que de tout document conforme à celle-ci, et ce, sous astreinte de 100 € par jour de retard,

‘ Débouter la SAS Vives Eaux de l’ensemble de ses demandes,

‘ Juger que :

– ces sommes porteront intérêts de droit à compter de l’introduction de l’instance pour celles ayant le caractère de salaire, et à compter de la décision à intervenir pour les autres sommes,

– les intérêts se capitaliseront en application de l’article 1343-2 du Code civil,

– à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décision à intervenir, et en cas d’exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l’huissier instrumentaire devront être supportées par la SAS Vives Eaux,

‘ Condamner la SAS Vives Eaux aux entiers dépens de l’instance.

Vu les écritures notifiées par voie électronique le 30 novembre 2021, suivant lesquelles la SAS Vives Eaux demande à la cour de :

‘ Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Nantes en ce qu’il fait droit à la demande de rappel de salaire formulée par M. [V] au titre des mois de mai et juin 2017,

‘ Confirmer, pour le reste, le jugement entrepris,

En conséquence,

‘ Débouter M. [V] de l’ensemble de ses demandes,

‘ Condamner M. [V] à verser à la SAS Vives Eaux la somme de 2.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,

‘ Condamner M. [V] aux éventuels dépens.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 6 juin 2024.

Par application de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties à leurs dernières conclusions sus-visées.

MOTIFS :

Sur les heures supplémentaires :

Selon l’article L3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

M. [V] expose avoir travaillé au delà des 39 heures par semaine prévues à son contrat de travail sans que ces heures supplémentaires n’aient été rémunérées.

Il communique un décompte sous la forme d’un tableau de ses heures de travail avec un cumul hebdomadaire de juin 2017 à août 2018 et un décompte des sommes dues selon le taux de majoration. Il y mentionne débuter sa prestation de travail entre 16 heures et 20 heures et terminer entre 1 heure et 6 heures du matin.

Les jours de récupération d’heures supplémentaires et les temps de pause sont pris en compte dans ce décompte.

Ces éléments dont donc suffisamment précis pour permettre à l’employeur d’y répondre.

Si la société Vives eaux ne communique pas de décompte des heures réellement travaillées par M. [V], elle produit une déclaration manuscrite rédigée par ce dernier le 27 décembre 2017 aux termes de laquelle il ‘certifie qu’à cette date, soit le 27 décembre 2017, la société Vives Eaux ne lui devait aucune heure de récupération ou supplémentaire’.

Ce quitus dont il n’est pas allégué qu’il aurait été rédigé sous la contrainte vaut reconnaissance par le salarié de ce qu’il a été rempli de ses droits en matière d’heures supplémentaires sur la période considérée.

L’employeur admet par ailleurs que M. [V] a pu être amené à dépasser sa durée du travail contractuellement prévue et souligne lui avoir alors alloué des jours de récupération sans en faire un décompte précis ni indiquer quelle nuit de travail ils compensaient.

Il communique les attestations des subordonnés de M. [V] lesquels travaillaient de nuit avec lui et dénoncent la prise de longues pauses par leur supérieur dont ils estiment qu’il n’était pas pleinement investi dans son travail et n’était pas toujours en mesure de répondre à leurs questions.

Toutefois, l’employeur lui-même avait félicité M. [V] pour son investissement dans son travail de sorte que l’effectivité du travail n’est pas valablement remise en cause.

Au regard des éléments ainsi débattus, la cour a la conviction que M. [V] a réalisé des heures supplémentaires non rémunérées au delà de celles comprises dans son salaire, mais sur la seule période postérieure au 27 décembre 2017.

L’article 2 de l’avenant du 29 février 2008 à la convention collective applicable prévoit une majoration de 25 % jusqu’à la 43ème heures et une majoration de 50 % pour les heures effectuées au-delà.

La société Vives Eaux est en conséquence condamnée à payer à M. [V] la somme de 1 301,50 euros au titre des heures supplémentaires accomplies et non rémunérées de janvier à août 2018 outre 130,15 euros de congés payés.

Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Sur la demande relative aux repos compensateurs pour heures de nuit :

L’article 1er de l’avenant étendu du 2 décembre 2002 à la convention collective applicable définit le travail de nuit comme tout travail accompli entre 21 h et 6 heures.

L’article 2 définit le travailleur habituel de nuit comme étant tout salarié qui accomplit :

– soit, au moins 2 fois par semaine, selon son horaire habituel et au moins 3 heures de son temps de travail effectif quotidien durant ladite période ;

– soit, au minimum 220 heures de travail effectif de nuit, au cours de 12 mois consécutifs.

Selon l’article L 3122-8 du code du travail, les travailleurs de nuit doivent bénéficier, au titre des périodes de nuit, de contreparties données obligatoirement sous forme d’un repos compensateur rémunéré. Une compensation salariale peut s’y ajouter.

L’article 3 de l’avenant étendu du 2 décembre 2002 prévoit que :

‘Les salariés ayant le statut de travailleur de nuit bénéficient d’un repos compensateur, suivant les horaires effectués annuellement :

Les salariés ayant le statut de travailleur de nuit bénéficient d’un repos qui ne peut être inférieur, pour 220 heures de travail de nuit effectuées pendant une année civile, à une journée de repos compensateur, puis selon le tableau ci-dessous :

520 heures : 1,5 jour

820 heures : 2,5 jours

1 120 heures : 3 jours

1 420 heures : 4 jours.

Les modalités de prise du repos sont négociées de gré à gré. A défaut l’employeur fixe les dates.’

L’article 4 prévoit que ‘Les majorations de salaire prévues par l’article 4.3 de la convention collective nationale pour les périodes comprises entre 22 heures et 5 heures du matin sont maintenues.

A cette majoration s’ajoute une nouvelle majoration de 20 % pour la tranche 21 heures – 22 heures.’

M. [V] sollicite en tant que travailleur habituel de nuit des repos compensateurs dont il soutient qu’il n’a pas bénéficié en intégralité considérant avoir uniquement perçu la contrepartie financière aux heures de nuit.

En prenant en compte les heures supplémentaires accomplies et non payées de janvier à août 2018, M. [V] a réalisé 866 heures de nuit de sorte qu’il avait droit à 2,5 repos compensateurs. Or il n’a bénéficié que de 2 jours. Il a droit à 0,5 jour.

Le salarié, qui n’a pas été en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos compensateur, a droit à l’indemnisation du préjudice subi, laquelle comporte à la fois le montant de l’indemnité de repos compensateur et le montant de l’indemnité de congés payés afférents.

La société Vives eaux est en conséquence condamnée à payer à M. [V] la somme de 46,73 euros bruts au titre des repos compensateur pour heures de nuit, outre 4,67 euros bruts au titre des congés payés afférents.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur le rappel de majoration des heures de travail effectuées pendant des jours fériés :

L’article 4-4 de la convention collective de la poissonnerie prévoit que ‘Lorsque le salarié est tenu de travailler pendant les jours fériés désignés ci-dessous, celui-ci bénéficie d’un repos compensateur d’une demi-journée si possible accolée à un jour de repos hebdomadaire. A défaut, la rémunération des heures effectuées ce jour-là est majorée de 25 p. 100.’

En vertu de l’article 4-5 de la convention collective, ‘au cas où un salarié est amené en raison des nécessités du service à travailler le 1er mai, il perçoit en plus du salaire de base correspondant au travail effectué, une indemnité égale à 100 p. 100 du salaire de base. »

M. [V] revendique avoir travaillé les 5 juin, 14 juillet, 15 août et 1er novembre 2017.

Il résulte du planning des jours fériés versé aux débats que M. [V] a travaillé le 1er mai 2018, le jeudi 10 mai 2018, alors férié, le 14 juillet 2018 et le 15 août 2018 soit au cours de quatre jours fériés.

Il avait droit pour la journée du 1er mai à une indemnité égale au salaire de base et pour chacun des autres jours fériés travaillés à un repos compensateur d’une demi-journée, ou, à défaut une majoration de 25 %.

Si M. [V] a bénéficié de onze jours de récupération en 2017, il n’est pas démontré par l’employeur que ces récupérations étaient affectées aux jours fériés et non aux heures supplémentaires, aucune mention relative au travail des jours fériés ne figurant en outre sur les bulletins de paie.

Quant à la reconnaissance par écrit par M. [V] de ce qu’à la date du 27 décembre 2017 la société Vives Eaux ne lui devait aucune heure de récupération ou supplémentaire, la formulation en heures s’analyse comme une référence à des heures supplémentaires et non aux jours fériés. C’est donc vainement que l’employeur considère M. [V] comme rempli de ses droits.

La société Vives eaux est en conséquence condamnée à payer à M. [V] la somme de 235,12 euros bruts au titre des majorations de salaire pour jours fériés travaillés, outre 23,51 euros bruts au titre des congés afférents.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur le travail dissimulé :

Selon l’article L. 8221-5 du code du travail, ‘Est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d’un bulletin de paie ou d’un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.’

L’absence de mention sur les bulletins de paie de l’intégralité des heures supplémentaires accomplies ne suffit pas à caractériser une intention de dissimulation de travail salarié. Il n’est pas plus démontré la mise en oeuvre d’une organisation systémique visant à dissimuler la réalité des heures travaillées.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté cette demande.

Sur la demande de rappel de salaire de mai et juin 2017 :

Le salarié sollicite un rappel de salaire au coefficient 170 pour avoir occupé le poste de Responsable Préparation Quai nuit dès le mois de mai, au lieu du mois de juillet tel que prévu au contrat de travail.

Il est établi par le planning des jours fériés et l’échange de SMS entre le dirigeant de la société, M. [G] [W], et M. [V] que ce dernier a travaillé de nuit à compter de mai 2017.

Il résulte des attestations communiquées que le poste de nuit était un poste de responsable préparation quai.

C’est donc à juste titre que le conseil de prud’hommes a fait droit à la demande de rappel de salaire à ce titre.

Il sera confirmé de ce chef.

Sur la demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale et manquement à l’obligation de sécurité :

L’employeur est tenu d’exécuter le contrat de travail de manière loyale.

Selon l’article L4121-1 du code du travail, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent :

1°) des actions de prévention des risques professionnels ;

2°) des actions d’information et de formation ;

3°) la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.

Le salarié invoque au soutien de sa demande indemnitaire une amplitude de travail conséquente et la violation des durées maximales de travail, l’impossibilité d’exercer effectivement son droit à congé, la violation des dispositions applicables au suivi médical des travailleurs de nuit et au droit au repos (absence de visite d’information et de prévention, non respect des repos compensateurs), l’absence d’information sur l’existence et l’utilisation du droit au repos et une mise à l’écart du salarié et une volonté affichée de le voir quitter les effectifs.

– sur le dépassement de la durée maximale de travail :

Aux termes de l’article L. 3121-35, alinéa 1er du code du travail, au cours d’une même semaine, la durée du travail ne peut dépasser quarante-huit heures.

La preuve du respect des seuils et plafonds prévus par le droit de l’Union européenne et des durées maximales de travail fixées par le droit interne incombe à l’employeur.

Le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à la réparation.

La société Vives eaux se réfère en l’espèce aux attestations de quatre salariés lesquelles n’évoquent pas les horaires de travail de M. [V].

Alors que les heures supplémentaires accomplies portaient l’amplitude de travail au delà de dix heures par jour sur cinq jours par semaine, la société Vives eaux ne démontre pas que la durée maximale de 48 heures de travail était respectée.

– sur l’exercice effectif du droit à congé :

En application des dispositions des articles L.3141-22 à L.3141-25 du code du travail, lorsque le contrat de travail du salarié est rompu avant que le salarié ait pu bénéficier du congé auquel il a droit, il reçoit pour la fraction de congé dont il n’a pas bénéficié une indemnité compensatrice de congés payés.

L’impossibilité de prendre des congés du fait de l’employeur peut donner lieu à l’allocation de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par le salarié.

En cas de litige portant sur le respect des droits légaux ou conventionnels à congés payés d’un salarié, la charge de la preuve incombe à l’employeur. Il lui appartient ‘de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité d’exercer effectivement son droit à congé, et, en cas de contestation, de justifier qu’il a accompli à cette fin les diligences qui lui incombent légalement’

En l’espèce, la société Vives eaux ne démontre pas avoir mis M. [V] en situation de prendre ses congés, lequel s’est vu en outre refuser une demande de congés payés.

La prise de jours de récupération invoquée par l’employeur est en outre sans lien avec celle de jour de congés payés, le fondement juridique étant différent.

Il en résulte que l’employeur n’a pas respecté ses obligations en matière d’exercice effectif du droit à congé du salarié.

– sur le contrôle médical du travailleur de nuit :

Selon l’article L.3122-11 du code du travail, tout travailleur de nuit bénéficie d’un suivi individuel régulier de son état de santé dans les conditions fixées à l’article L. 4624-1.

L’article L. 4624-1 prévoit que tout travailleur de nuit bénéficie d’un suivi individuel régulier de son état de santé. La périodicité de ce suivi est fixée par le médecin du travail en fonction des particularités du poste occupé et des caractéristiques du travailleur, selon des modalités déterminées par décret en Conseil d’Etat.

L’article R 3122-11 dispose que ‘Le suivi de l’état de santé des travailleurs de nuit a notamment pour objet de permettre au médecin du travail d’apprécier les conséquences éventuelles du travail de nuit pour leur santé et leur sécurité, notamment du fait des modifications des rythmes chronobiologiques, et d’en appréhender les répercussions potentielles sur leur vie sociale’.

En vertu de l’article article R4624-18, tout travailleur de nuit mentionné à l’article L. 3122-5 et tout travailleur âgé de moins de dix-huit ans bénéficie d’une visite d’information et de prévention réalisée par un professionnel de santé mentionné au premier alinéa de l’article L. 4624-1 préalablement à son affectation sur le poste.

L’avenant du 2 décembre 2002 à la convention collective, relatif au travail de nuit, prévoit que le travailleur de nuit bénéficiera d’une surveillance médicale particulière via la tenue de deux visites médicales par an.

En l’espèce, M. [V] a bénéficié d’une visite médicale d’embauche le 19 juin 2017 mais d’aucun suivi postérieur. Or, en quatorze mois de travail de nuit, M. [V] a perdu dix kilos, ce qui est confirmé par ses proches (épouse, enfants, mère) lesquels attestent s’être inquiétés pour sa santé.

– sur le non respect du droit au repos :

Selon l’article D3271-11 du code du travail,’A défaut de précision conventionnelle contraire, les salariés sont informés du nombre d’heures de repos compensateur de remplacement et de contrepartie obligatoire en repos portés à leur crédit par un document annexé au bulletin de paie. Dès que ce nombre atteint sept heures, ce document comporte une mention notifiant l’ouverture du droit à repos et l’obligation de le prendre dans un délai maximum de deux mois après son ouverture.’

L’article D. 3171-12 prévoit que lorsque des salariés d’un atelier, d’un service ou d’une équipe ne travaillent pas selon le même horaire collectif de travail affiché, un document mensuel, dont le double est annexé au bulletin de paie, est établi pour chaque salarié.

Ce document comporte les mentions prévues à l’article D. 3171-11 ainsi que :

1° Le cumul des heures supplémentaires accomplies depuis le début de l’année ;

2° Le nombre d’heures de repos compensateur de remplacement acquis en application des articles L. 3121-28, L. 3121-33 et L. 3121-37 ;

3° Le nombre d’heures de repos compensateur effectivement prises au cours du mois ;

4° Le nombre de jours de repos effectivement pris au cours du mois, dès lors qu’un dispositif de réduction du temps de travail par attribution de journées ou de demi-journées de repos dans les conditions fixées par les articles L. 3121-44 et D. 3121-27 s’applique dans l’entreprise ou l’établissement.

Outre qu’il n’a pas bénéficié de l’intégralité de ses droits à repos compensateurs, M. [V] n’a pas été informé de ses droits en violation des dispositions des articles D3171-11 et -12 du code du travail.

– sur la mise à l’écart :

Le salarié invoque avoir été mis à l’écart, avoir subi le mépris affiché par sa direction qui ne répondait pas à ses propositions et aux remontées qu’il pouvait être amené à réaliser, avoir été menacé de transformer son contrat de travail à durée indéterminée en contrat de travail à durée déterminée, avoir été soumis à une contrainte aux fins d’accepter une rupture conventionnelle, avec diffusion d’une information auprès de ses collègues selon laquelle il allait quitter les effectifs avant même sa réponse à cette proposition de rupture.

La diffusion de la perspective d’un départ de la société est établie sans que son imputabilité ne puisse être déterminée.

La seule production d’un courrier d’alerte adressé en juin 2017 à l’employeur par M. [V] au sujet du comportement de l’un de ses subordonnés ne suffit pas à caractériser une absence de réponse de l’employeur aux sollicitations du salarié.

Les attestations et courriers produits ne se réfèrent pas aux griefs évoqués de sorte qu’ils ne sont pas plus de nature à les caractériser.

Au regard de l’ensemble de ces éléments invoqués par le salarié au soutien d’une demande indemnitaire pour exécution déloyale et manquement à l’obligation de sécurité, la réalisation d’un risque pour la santé du salarié résulte du non respect du droit au repos, du droit au congés payés, de l’obligation de suivi médical du travailleur de nuit et de la durée maximale de travail.

L’employeur auquel il incombe de justifier qu’il a pris les mesures pour prévenir et remédier aux situations d’atteinte à la santé de son salarié, ne justifie que de la mise en oeuvre d’une visite médicale d’embauche sans démontrer la prise de mesures de prévention aux fins de respecter de la réglementation en matière de temps de travail et de repos.

Sa responsabilité est en conséquence engagée pour manquement à l’obligation de sécurité.

Les manquements invoqués ne caractérisent en revanche pas de déloyauté dans l’exécution du contrat de travail.

La société Vives eaux doit en conséquence être condamnée pour manquement à l’obligation de sécurité à réparer le préjudice subi par le salarié en lui versant la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Le jugement sera infirmé de de chef.

Sur la demande de nullité du licenciement :

Selon l’article L.1226-9 du code du travail, au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l’employeur ne peut rompre ce dernier que s’il justifie soit d’une faute grave de l’intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l’accident ou à la maladie.

L’article L.1226-13 dispose que toute rupture du contrat de travail prononcée en méconnaissance des dispositions des articles L. 1226-9 et L. 1226-18 est nulle.

M. [V] sollicite le prononcé de la nullité de son licenciement pour avoir été prononcé pendant une période de suspension de son contrat de travail consécutive à un accident du travail et pour un motif autre qu’une faute grave ou une impossibilité de maintien du contrat pour un motif étranger à l’accident au sens de L.1226-9 du code du travail.

En l’espèce, l’arrêt de travail de M. [V] en date du 13 juillet mentionne un accident du travail le 12 juillet 2018. Cet arrêt de travail, ultérieurement reconnu par le pôle social du tribunal judiciaire de Nantes en date du 14 octobre 2022 comme devant être pris au charge au titre des accidents du travail, était antérieur à la lettre de licenciement daté du 14 juillet 2018.

Il importe peu que l’entretien préalable au licenciement ait eu lieu avant la date de l’accident.

Il est de même inopérant d’invoquer en appel la fictivité d’un accident dont le caractère professionnel a été admis par la juridiction d’appel en matière de sécurité sociale.

Il en résulte qu’au jour de l’envoi de la lettre recommandée avec avis de réception de licenciement, le contrat de travail du salarié était suspendu à raison d’un accident du travail de sorte que son licenciement ne pouvait être prononcé que pour faute grave ou impossibilité de maintien du contrat pour un motif étranger à l’accident.

Or, le licenciement de M. [V] a été notifié pour une cause non qualifiée de faute grave ou impossibilité de maintien du contrat pour un motif étranger à l’accident.

Le licenciement a été prononcé en violation de dispositions de l’article L.1226-9 du code du travail de sorte qu’il est nul.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

***

Sur l’indemnité pour licenciement nul :

Selon l’article L1235-3-1 du code du travail, L’article L. 1235-3 n’est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d’une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article. Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l’exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l’employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Les nullités mentionnées au premier alinéa sont celles qui sont afférentes à : (…)

6° Un licenciement d’un salarié en méconnaissance des protections mentionnées aux articles L. 1225-71 et L. 1226-13.

L’indemnité est due sans préjudice du paiement du salaire, lorsqu’il est dû en application des dispositions de l’article L. 1225-71 et du statut protecteur dont bénéficient certains salariés en application du chapitre Ier du Titre Ier du livre IV de la deuxième partie du code du travail, qui aurait été perçu pendant la période couverte par la nullité et, le cas échéant, sans préjudice de l’indemnité de licenciement légale, conventionnelle ou contractuelle.

Au regard de l’ancienneté de M. [V] d’une année, de son âge de 53 ans au jour de son licenciement le 14 juillet 2018, de son salaire de 2 804 euros bruts (heures supplémentaires allouées comprises), de sa qualification, du délai qui lui a été nécessaire pour retrouver un emploi en contrat de travail à durée indéterminée le 1er septembre 2020 et de l’affliction morale que ce licenciement lui a fait subir, attestée par ses proches, le préjudice par lui subi du fait de ce licenciement nul sera réparé par l’allocation de la somme de 25 000 euros.

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a rejeté cette demande.

Sur la demande de solde d’indemnité légale de licenciement :

Selon l’article L1234-9 du code du travail, le salarié titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte 8 mois d’ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.

Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.

L’article R1234-2 prévoit que l’indemnité de licenciement ne peut être inférieure aux montants suivants :

1° Un quart de mois de salaire par année d’ancienneté pour les années jusqu’à dix ans ;

2° Un tiers de mois de salaire par année d’ancienneté pour les années à partir de dix ans.

En vertu de l’article R1234-4, le salaire à prendre en considération pour le calcul de l’indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié :

1° Soit la moyenne mensuelle des douze derniers mois précédant le licenciement, ou lorsque la durée de service du salarié est inférieure à douze mois, la moyenne mensuelle de la rémunération de l’ensemble des mois précédant le licenciement ;

2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n’est prise en compte que dans la limite d’un montant calculé à due proportion.

Au regard des heures supplémentaires dues pour la période de janvier à août 2018, le salaire à prendre en compte est celui des trois derniers mois lequel est le plus favorable et s’élève à 2 804 euros bruts.

Était en conséquence due à M. [V] au titre de l’indemnité légale de licenciement la somme de 876,25 euros. La société lui a versé celle de 799,69 euros de sorte que lui reste due la somme de 76,56 euros bruts au paiement de laquelle la société Vives eaux est condamnée.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les intérêts :

Conformément aux dispositions de l’article 1231-6 du code civil, les créances salariales sont assorties d’intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes pour celles qui étaient exigibles au moment de sa saisine.

En vertu de l’article 1231-7 du code civil, les dommages et intérêts alloués sont assortis d’intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

Le jugement est confirmé de ces chefs.

La société Vives eaux est condamnée aux dépens d’appel et au paiement de la somme de 2 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

statuant publiquement, contradictoirement, par arrêt prononcé par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement entrepris sauf le rappel de salaire et les congés payés afférents pour le mois de mai 2017 et le mois de juin 2017, le travail dissimulé, les dépens et la condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Le confirme de ces chefs,

statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Condamne la société Vives eaux à payer à M. [V] les sommes de :

– 1 301,50 euros au titre des heures supplémentaires accomplies et non rémunérées de janvier à août 2018 outre 130,15 euros de congés payés,

– 46,73 euros bruts au titre des repos compensateur pour heures de nuit, outre 4,67 euros bruts au titre des congés payés afférents,

– 235,12 euros bruts au titre des majorations de salaire pour jours fériés travaillés, outre 23,51 euros bruts au titre des congés afférents,

– 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité,

– 25 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement nul,

– 76,56 euros à titre de solde d’indemnité de licenciement,

Dit que les créances salariales sont assorties d’intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes et les créances indemnitaires à compter de la présente décision,

Condamne la société Vives eaux à payer à M. [U] [V] la somme de 2 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Vives eaux aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.


 


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