Tribunal judiciaire de Strasbourg, 25 octobre 2024, n° RG 23/08387
Tribunal judiciaire de Strasbourg, 25 octobre 2024, n° RG 23/08387

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Strasbourg

Thématique : Droit d’option et conditions d’indemnisation : une analyse des enjeux liés à l’expatriation et à la reprise des droits à l’allocation chômage.

 

Résumé

Le tribunal a jugé recevable la demande de droit d’option de M. [W], qui contestait la décision de POLE EMPLOI. Il a soutenu que son expatriation aux Pays-Bas, pour suivre son épouse, justifiait un allongement du délai d’un an pour l’ouverture de ses droits à l’allocation chômage. Le tribunal a reconnu que M. [W] avait travaillé suffisamment pour bénéficier de l’allocation d’aide au retour à l’emploi, calculée sur la période 2017/2018. En conséquence, FRANCE TRAVAIL GRAND EST a été condamné à verser à M. [W] une indemnité de 2 990,33 euros, ainsi qu’une somme de 1 000 euros pour les frais de justice.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

25 octobre 2024
Tribunal judiciaire de Strasbourg
RG n°
23/08387

N° RG 23/08387 – N° Portalis DB2E-W-B7H-MICK

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE STRASBOURG
11ème Chambre Civile, Commerciale
et des Contentieux de la Protection
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 5]

11ème civ. S4

N° RG 23/08387
N° Portalis DB2E-W-B7H-MICK

Minute n°24/

Copie exec. à :
– Me Olivier GAL
– Me Caroline MAINBERGER

Le

Le Greffier
Olivier GAL
Me Caroline MAINBERGER

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT DU
25 OCTOBRE 2024

DEMANDEUR :

Monsieur [Z] [W]
demeurant [Adresse 4]
[Localité 6]
représenté par Me Olivier GAL, substitué par Me Charlotte BARBY, avocats au barreau de STRASBOURG, vestiaire : 212

DEFENDERESSE :

FRANCE TRAVAIL GRAND EST (anciennement POLE EMPLOI GRAND EST)
agissant par son représentant légal
dont le siège social est sis [Adresse 2]
pris en son établissement site [Adresse 8] sis [Adresse 1]
[Localité 5]
représenté par Me Caroline MAINBERGER, substituée par Me Emma JENNY, avocats au barreau de STRASBOURG, vestiaire : 283

OBJET : Contestation d’une décision d’un organisme portant sur l’affiliation ou un refus de reconnaissance d’un droit

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Catherine GARCZYNSKI, 1ère Vice-Présidente
Stéphanie BAEUMLIN, Greffier lors des débats
Maryline KIRCH, Greffier lors du prononcé

DÉBATS :
A l’audience publique du 02 Septembre 2024 à l’issue de laquelle le Président, Catherine GARCZYNSKI, 1ère Vice-Présidente, a avisé les parties que le jugement serait prononcé par mise à disposition au greffe à la date du 18 Octobre 2024. Le délibéré a été prorogé au 25 Octobre 2024.

JUGEMENT :
Contradictoire en premier ressort,
Rendu par mise à disposition au greffe,
Signé par Catherine GARCZYNSKI, 1ère Vice-Présidente et par Maryline KIRCH, Greffier

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 26 janvier 2023, POLE EMPLOI a indiqué à M. [W] [Z] qu’il ne pouvait donner une suite favorable à sa demande de bénéficier du droit d’option – possibilité pour un salarié privé d’emploi, dont le droit précédemment ouvert n’est pas épuisé, d’opter pour un nouveau droit – au motif qu’il ne remplissait pas les conditions du droit d’option, tel que prévu par l’article 26 §3 du règlement d’assurance chômage, annexé au décret n°2019-797 du 26 juillet 2019.

Il a fait une réclamation auprès de POLE EMPLOI le 2 février 2023, à laquelle il lui a été répondu, le 7 février 2023, que son dernier emploi étant le 31/12/2021 aux PAYS BAS, il était non frontalier, de sorte que cette période n’était pas prise en compte pour une demande de droit d’option.

Puis il a sollicité une médiation auprès de la médiatrice régionale de Pole Emploi, qui lui a répondu, les 18 février 2023 et 5 mai 2023, que l’Institution ne modifiait pas sa position. Il lui était expliqué que la fin de son précédent contrat de travail avant celle du 31/12/2021 était le 31/08/2018, laquelle ne se trouvait pas dans le “délai de forclusion”, et que la période non frontalière postérieure au 31/08/2018 ne permettait pas d’allonger ce délai ; il en était déduit que la condition initiale d’étude du droit d’option n’était pas satisfaite, de sorte que la reprise de droit sur la fin du contrat de travail du 01/11/2013 était légitime.

Par requête du 28 septembre 2023 de son avocat, enregistrée au greffe le 28 septembre 2023, M. [W] a saisi le tribunal aux fins de voir annuler la décision du directeur d’Agence Pole Emploi du 26 janvier 2023, voir constater que ses droits à l’allocation de retour à l’emploi (ARE) devaient être calculés sur la période 2017/2018 et voir condamner POLE EMPLOI GRAND EST à lui payer la somme de 2 694,23 euros (sur la base d’une allocation qui aurait dû s’élever à 53,13 euros au regard de son salaire journalier de 93,21 euros en 2017/2018, soit un montant global de 32 303,04 euros) au titre de la somme qu’il aurait dû percevoir en plus à compter du 18 mai 2022, outre 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il faisait valoir avoir travaillé dans le cadre d’un contrat de travail à durée déterminée en 2017/2018, ayant pris fin de manière anticipée pour suivre son épouse aux PAYS BAS, lui-même ayant travaillé aux PAYS BAS pendant 3 ans à compter du 1er septembre 2018.

Les parties ont été convoquées à l’audience du 4 décembre 2023. L’affaire a ensuite été renvoyée au 15 avril 2024, puis au 2 septembre 2024 avec un calendrier de procédure.

A l’audience du 2 septembre 2024, M. [W], représenté par son conseil, se réfère à ses conclusions du 16 août 2024, par lesquelles il maintient ses demandes, sauf à porter celle en paiement du “delta” d’ARE à la somme de 2 990,33 euros.

Il conteste la décision de POLE EMPLOI en se fondant en droit sur l’article R 5422-2 du code du travail et l’article 7 §3 du règlement chômage du 26 juillet 2019.

Il conteste l’irrecevabilité de sa demande opposée en défense.

Il soutient que le délai d’un an prévu par l’article 7 §1 pour l’ouverture des droits peut être prolongé, selon l’article 7 §3, jusque 3 ans lorsque le demandeur d’emploi a accompagné son conjoint qui s’est expatrié, ce qui est son cas, ayant suivi son épouse, Mme [T], aux PAYS BAS, laquelle y avait été envoyée en mission par lettre du 26 juillet 2018, soit avant que lui-même y travaille à compter du 1er septembre 2018. Il fait observer que, si la lettre prévoyait que son épouse prenait ses fonctions à compter du 3 septembre 2018, c’est parce que le 1er septembre était un samedi.

Il estime donc pouvoir bénéficier de l’allongement du délai d’un an prenant fin le 31 août 2019, du fait de la période d’expatriation dans la limite des trois ans, de sorte que sa demande n’est pas irrecevable. Il rappelle s’être incrit à POLE EMPLOI le 2 janvier 2022 et demande le bénéfice de l’option à compter du 18 mai 2022, date de sa première demande.

Sur le fond, il demande à ce que ses droits soient calculés en fonction de son emploi du 01/01/2017 au 31/08/2018, sa durée d’affiliation étant suffisante (608 jours) et non de celui du 02/11/2011 au 01/11/2013. Il indique avoir perçu une allocation brute de 49,07 euros sur le reliquat de 452 jours restant, soit 22 224,84 euros, alors que selon le courrier de rechargement de ses droits du 6 septembre 2023, il avait droit à 611 jours à 57,64 euros bruts, soit un montant total de 35 218,04, soit 45% de plus.

Il n’a pu faire ses calculs qu’avec les informations données concernant ses droits, de sorte qu’il estime remplie la condition posée à l’article R5422-2 du code du travail.

Si POLE EMPLOI lui a notifié la recharge de ses droits à compter du 6 septembre 2023, il considère avoir subi un préjudice du fait qu’il n’en a pas bénéficié sur la période antérieure.

FRANCE TRAVAIL GRAND EST, nouvelle dénomination de POLE EMPLOI GRAND EST, représenté par son conseil, se réfère à ses conclusions du 18 juillet 2024, sollicitant le débouté des demandes et la condamnation de M. [W] à lui payer la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il soutient que la demande de droit d’option formulée le 18 mai 2022 est irrecevable comme forclose, au regard, tant de l’attestation de détachement établie par l’employeur de Mme [T], qui indique que le détachement a débuté le 1er septembre 2019, que de la lettre de mission produite par M. [W], selon laquelle le détachement commençait le 3 septembre 2018, puisque lui-même a déclaré avoir travaillé aux PAYS BAS à compter du 1er septembre 2018, soit antérieurement.

Sur le fond, il fait valoir que M.[W] a bénéficié d’un rechargement de ses droits le 6 septembre 2023 avec une allocation journalière de 54,61 euros, soit un montant supérieur à celui indiqué dans sa requête. Il ajoute que le tableau produit est inintelligible.

L’affaire a été mise en délibéré au 18 octobre 2024, délibéré prorogé à ce jour.

MOTIFS

L’article R 5422-2 du code du travail concernant les conditions d’attribution de l’allocation d’assurance aux travailleurs privés d’emploi dispose que :

“I.-Lorsque l’intéressé a exercé une activité salariée alors qu’il n’avait pas encore épuisé les droits à l’allocation d’assurance qui lui avaient été précédemment accordés, il bénéficie, en cas de perte de cette nouvelle activité, de la reprise du versement du reliquat de ses droits jusqu’à leur épuisement.

(…)

II.-Lorsque l’intéressé n’a pas épuisé les droits à l’allocation d’assurance qui lui ont été précédemment accordés et qu’il remplit les conditions qui permettraient une ouverture de nouveaux droits, il peut, par dérogation aux dispositions du I du présent article, opter pour une durée, et le montant d’indemnisation auquel il a droit en fonction de cette durée, prenant exclusivement en compte ces nouveaux droits si :

1° Le montant global du droit de son reliquat est inférieur ou égal à un montant fixé dans l’accord relatif à l’assurance chômage prévu à l’article L. 5422-20 ;

2° Ou le montant global du droit qui lui aurait été servi en l’absence de reliquat est supérieur au montant de l’allocation journalière du reliquat d’au moins une fraction fixée dans l’accord relatif à l’assurance chômage prévu à l’article L. 5422-20.

III.-Lorsque l’intéressé n’a pas épuisé les droits à l’allocation d’assurance qui lui ont été précédemment accordés au titre des contrats prévus aux articles L. 6221-1 et L. 6325-1, et qu’il remplit les conditions qui permettraient une ouverture de nouveaux droits, il peut, par dérogation aux dispositions du I du présent article, opter pour une durée et un montant d’indemnisation prenant exclusivement en compte ces nouveaux droits.”

Et aux termes de l’article 26 § 3 du règlement d’assurance chômage annexé au décret n°2019-797 du 26 juillet 2019, inclus dans le chapitre 1 du titre 1 concernant les bénéficiaires de l’allocation d’aide au retour à l’emploi,

– Le salarié privé d’emploi, qui a cessé de bénéficier du service des allocations alors que la période d’indemnisation précédemment ouverte n’était pas épuisée, peut, à sa demande, opter pour l’ouverture de droits à laquelle il aurait été procédé dans les conditions et modalités fixées au présent titre, en l’absence de reliquat de droits, si les deux conditions suivantes sont satisfaites :

– il totalise des périodes d’emploi dans les conditions définies par l’article 3, d’une durée d’au moins 130 jours travaillés ou 910 heures travaillées ;

– le montant de l’allocation journalière du reliquat de droit est inférieur ou égal à 20 euros ou le montant global du droit qui aurait été servi en l’absence de reliquat est supérieur d’au moins 30 % au montant global du reliquat, ces montants étant déterminés conformément aux articles 14 à 16 et 17 bis à 19.

L’option peut être exercée à l’occasion d’une reprise des droits consécutive à une fin de contrat de travail qui n’a pas déjà donné lieu à cette possibilité.

Le choix du droit qui aurait été servi en l’absence de reliquat est irrévocable.

En cas d’exercice de l’option, le reliquat de droits issu de l’ouverture de droits précédente est déchu. La prise en charge prend effet à compter de la demande de l’allocataire.

L’allocataire qui réunit les conditions requises pour exercer l’option est informé du caractère irrévocable de l’option, de la perte du reliquat de droits qui en résulte, des caractéristiques de chacun des deux droits concernant notamment la durée et le montant de l’allocation journalière et des conséquences de l’option sur le rechargement des droits.

L’option peut être exercée dans un délai de 21 jours à compter de la date de la notification de l’information mentionnée ci-dessus.

La décision de l’allocataire doit être formalisée par écrit.

– Sur la recevabilité de la demande de droit d’option

Aux termes de l’article 7 du règlement d’assurance chômage annexé au décret n°2019-797 du 26 juillet 2019, inclus dans le chapitre 1 du titre 1 concernant les bénéficiaires de l’allocation d’aide au retour à l’emploi,
§ 1er – La fin du contrat de travail prise en considération pour l’ouverture des droits doit se situer dans un délai de douze mois dont le terme est la veille de l’inscription comme demandeur d’emploi ou, le cas échéant, du premier jour du mois au cours duquel la demande d’allocation prévue au §1er de l’article 39 a été déposée.

§ 2 – La période de douze mois est allongée :

a) Des journées d’interruption de travail
(…)

§ 3 – La période de douze mois est en outre allongée des périodes durant lesquelles :

(…)

b) L’intéressé a accompagné son conjoint qui s’était expatrié pour occuper un emploi salarié ou une activité professionnelle non salariée hors du champ d’application mentionné à l’article 2 du décret auquel est annexé le présent règlement.

L’allongement prévu dans les cas mentionnés au présent paragraphe est limité à trois ans.

(…)

En l’espèce, la fin du contrat de travail de M. [W] est le 31 août 2018, la veille de l’inscription comme demandeur d’emploi est le 1er janvier 2022 et le jour de la demande de droit d’option est le 18 mai 2022.

Le demandeur se prévaut de l’allongement du délai au titre du b) du §3 ci-dessus.

FRANCE TRAVAIL produit une “lettre de mission” en date du 26 juillet 2018 de la société [10], employeur de Mme [T] [P] (qui a signé la lettre à cette date) par laquelle il lui est indiqué à l’article 1 (objet) qu’elle sera détachée “à compter du 3 septembre 2018 (sous réserve de l’obtention des autorisations administratives)” aux PAYS-BAS, en restant sous l’autorité exclusive de la société [10] ; il est précisé à l’article 2 (durée de la mission) que la durée du présent avenant est convenue pour une “durée d’un an, soit jusqu’au 31 août 2019, sous réserve de cas de force majeure”.

Les articles 1 et 2 apparaissent en contradiction puisque, vu sa durée, le détachement aurait du commencer le 1er septembre 2018, mais, comme le relève M. [W], le fait que le 1er septembre 2018 soit un samedi explique la date du 3 septembre 2018 mentionnée, qui est un lundi.

Il résulte de cette lettre de mission, dont la valeur probante n’est pas contestée, que la déclaration de rattachement du 4 février 2022 de la société [10] est entachée d’une erreur en ce qu’elle indique que la période de détachement de Mme [T], qui a réintégré l’agence de [Localité 11] le 1er septembre 2021, avait commencé le 1er septembre 2019.

Il est établi par l’attestation employeur remplie le 08/10/2018, produite par M. [W], que son contrat de travail à durée déterminée en FRANCE a pris fin le 31 août 2018, avec comme motif la fin de contrat.

La qualité de conjoint de Mme [T] n’est pas contestée.

La décision de l’employeur de détacher sa salariée en mission aux PAYS BAS est antérieure à la fin de contrat de M. [W].

Il en résulte qu’il peut prétendre avoir accompagné cette dernière qui devait s’expatrier pour occuper un emploi salarié. Le fait qu’il ait lui-même occupé un emploi aux PAYS BAS à compter du 1er septembre 2018 n’exclut pas qu’il ait suivi Mme [T].

En conséquence, le délai de 12 mois doit être prolongé de la durée de l’expatriation dans la limite de trois ans.

En l’espèce, le détachement de Mme [T] s’est terminé le 31 août 2021, de sorte qu’il a duré trois ans, moins deux jours si on prend en compte la date du 3 septembre 2018, si bien que le délai de douze mois est allongé de cette durée, soit un délai total de 4 ans moins 2 jours.

Dès lors, M. [W] ayant fait sa demande de droit d’option le 18 mai 2022, le délai écoulé entre la veille du premier jour de ce mois, soit le 30 avril 2022, et le 31 août 2018, dernier jour de son contrat de travail, est inférieur à 4 ans moins deux jours, de sorte que sa demande est recevable.

C’est donc à tort que la forclusion de sa demande lui est opposée.

– Sur le bien-fondé

Il ressort de l’article R 5422-2 du code du travail et de l’article 26 §3 du règlement d’assurance chômage, annexé au décret n°2019-797 du 26 juillet 2019, précités, que M. [W] pouvait opter pour l’ouverture de droits à l’ARE en fonction de son dernier contrat de travail du 01/01/2017 au 31/08/2018 si :
– il totalisait des périodes d’emploi dans les conditions définies par l’article 3, d’une durée d’au moins 130 jours travaillés ou 910 heures travaillées ;

– le montant de l’allocation journalière du reliquat de droit était inférieur ou égal à 20 euros ou le montant global du droit qui aurait été servi en l’absence de reliquat était supérieur d’au moins 30 % au montant global du reliquat, ces montants étant déterminés conformément aux articles 14 à 16 et 17 bis à 19.

Si POLE EMPLOI lui a indiqué le 26 janvier 2023 qu’il ne remplissait pas les conditions du droit d’option, telles que prévues par l’article 26 §3 du règlement d’assurance chômage, annexé au décret n°2019-797 du 26 juillet 2019, il n’a jamais motivé sa décision au regard de ces conditions, mais selon la réponse donnée à sa réclamation et les explications ultérieures fournies, par la forclusion de sa demande ; d’ailleurs, l’objet mentionné de la décision du 26 janvier 2023 était le suivant : “droit d’option non recevable”.

Dans le cadre de la présente instance, FRANCE TRAVAIL ne soutient pas que les conditions de fond ne sont pas remplies, se contentant de critiquer le tableau excel du demandeur et de dire qu’il a bénéficié d’un rechargement de ses droits en date du 6 septembre 2023, après épuisement de ceux précédemment ouverts.

Il n’est pas contesté que M. [W] a travaillé 608 jours au sein de l’[7] [Localité 9] GRAND EST entre le 1er janvier 2017 et le 31 aout 2018, de sorte que sa durée d’affiliation est suffisante. A tout le moins, le nombre de jours travaillés est de 436 jours selon le courrier adressé par POLE EMPLOI le 6 septembre 2023 concernant le rechargement de ses droits, ce qui reste suffisant.

M. [W] justifie par le courrier de POLE EMPLOI du 30 mai 2022, notamment la page 3 concernant l’information sur ses droits, qu’il avait droit à une allocation journalière d’un montant brut de 49,17 euros, au titre de ses droits non épuisés, soit un montant supérieur à 20 euros.

Il ressort du même courrier qu’au 16 mai 2022, il lui restait 454 jours d’indemnisation.

C’est donc à juste titre qu’il chiffre le montant global du reliquat de droits à lui servir en fonction des 452 jours restant à indemniser au 18 mai 2022, soit 452 X 49,17 = 22 224,84 euros.

Pour être supérieur d’au moins 30 % à cette somme, le montant global du droit qui aurait été servi en l’absence de reliquat doit être supérieur à 28 892,29 euros (22 224,84 + 6 667,45).

M. [W] calcule le montant global qui lui aurait été servi en l’absence de reliquat en fonction du relevé de situation qui lui a été adressé par POLE EMPLOI le 20 octobre 2023, selon lequel l’allocation à lui servir est de 57,64 euros par jour sur 611 jours, soit un montant global de 57,64 X 611 = 35 218,04 euros. Ce calcul est clair et justifié par le relevé de situation de 2023. FRANCE TRAVAIL n’en propose pas d’autre.

Il en résulte que c’est à juste titre que le demandeur fait valoir que le montant global qui lui aurait été servi aurait été supérieur d’au moins 30 % au montant global du reliquat.

C’est donc à tort que POLE EMPLOI a rejeté la demande de droit d’option de M. [W].

Il convient donc de dire que M. [W] aurait dû bénéficier du droit d’option, sans qu’il y ait lieu toutefois à annulation de la décision administrative rendue, qui n’apparaît pas de la compétence du juge judiciaire.

– Sur la demande en paiement

M. [W] demande la différence entre :
– les allocations dont il a bénéficié depuis le 18 mai 2022 jusqu’au 30 novembre 2023, à hauteur de 28 135,27 euros,
– et les allocations dont il aurait dû bénéficier s’il avait été fait droit à sa demande, soit la somme de 31 215,6 euros (540 X 57,64 €).

Cette différence est ainsi de 2 990,33 euros.

FRANCE TRAVAIL ne conteste pas les allocations que M. [W] déclare avoir reçues sur la période précitée.

Il convient donc de faire droit à la demande.

– Sur les dépens et frais non compris dans les dépens

FRANCE TRAVAIL, succombant, sera condamné aux dépens et à payer à M. [W] la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, lui-même étant débouté de sa propre demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort :

DÉCLARE recevable la demande de droit d’option de M. [W] formée le 18 mai 2022,

DIT que M. [W] aurait dû bénéficier du droit d’option si bien que ses droits à l’allocation d’aide au retour à l’emploi auraient dus être calculés sur la période 2017/2018 ;

DIT n’y avoir lieu à annulation de la décision rendue par POLE EMPLOI ;

CONDAMNE FRANCE TRAVAIL GRAND EST à payer à M. [Z] [W] la somme de 2 990,33 euros, au titre de la différence entre l’allocation d’aide au retour à l’emploi qu’il aurait dû percevoir et celle qu’il a effectivement perçue entre le 18 mai 2022 et le 30 novembre 2023 ;

CONDAMNE FRANCE TRAVAIL GRAND EST à payer à M. [Z] [W] la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE FRANCE TRAVAIL GRAND EST aux dépens et le déboute de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;

CONSTATE que le présent jugement est exécutoire de droit à titre provisoire.

Ainsi fait et prononcé les jour, mois et an susdits, siégeant Madame GARCZYNSKI, 1ère Vice-Présidente, présidant l’audience, assistée de Madame le greffier, qui ont signé la minute de la présente décision.

Le Greffier La 1ère Vice-Présidente
Maryline KIRCH Catherine GARCZYNSKI


 


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon