En application de l’article L. 121-4 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au cas d’espèce, le conjoint du chef d’une entreprise artisanale, commerciale ou libérale qui y exerce de manière régulière une activité professionnelle peut opter pour le statut de conjoint salarié. Le conjoint d’un dirigeant de société peut ainsi bénéficier d’un tel statut.
Aux termes de l’article L. 8283-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au présent litige, ‘en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.’ En application de ces dispositions, il suffit d’établir que l’un des époux a eu une participation effective à titre professionnel et habituel à l’activité de son conjoint dans des circonstances qui ne relèvent pas de l’assistance entre époux. Il est de principe que le lien de subordination en ce cas n’a pas à être caractérisé. Selon l’article L. 121-8 du code de commerce dans sa version en vigueur au présent litige, les dispositions des articles L. 121-4 précitées sont aussi applicables aux personnes liées au chef d’entreprise par un pacte civil de solidarité. COUR D’APPEL d’ANGERS Chambre Sociale ARRÊT N° Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/00319 – N° Portalis DBVP-V-B7D-EQO4. Jugement Au fond, origine Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LAVAL, décision attaquée en date du 16 Mai 2019, enregistrée sous le n° F18/00063 ARRÊT DU 25 Mai 2023 APPELANTE : Madame [J] [H] [Adresse 1] [Localité 2] représentée par Maître Philippe GOUPILLE, avocat au barreau d’ANGERS INTIMEES : S.A.S. BIO COLLOIDAL [Adresse 8] [Localité 3] – FRANCE représentée par Maître Cécile FROGER OUARTI de la SELARL BFC AVOCATS, avocat au barreau du MANS S.A.S. ALOKABIO [Adresse 8] [Localité 3] – FRANCE représentée par Maître Cécile FROGER OUARTI de la SELARL BFC AVOCATS, avocat au barreau du MANS COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 Mars 2023 à 9 H 00, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame DELAUBIER, conseillère chargée d’instruire l’affaire. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Président : Mme Marie-Christine DELAUBIER Conseiller : Madame Estelle GENET Conseiller : Mme Claire TRIQUIGNEAUX-MAUGARS Greffier lors des débats : Madame Viviane BODIN ARRÊT : prononcé le 25 Mai 2023, contradictoire et mis à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. Signé par Madame Marie-Christine DELAUBIER, conseiller faisant fonction de président, et par Madame Viviane BODIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. * FAITS ET PROCÉDURE La société par actions simplifiée (SAS) Bio Colloïdal, immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 24 février 2010, est spécialisée dans le secteur d’activité de la fabrication d’aliments homogénéisés et diététiques. Elle était dirigée par M. [P] [F]. La SAS Alokabio dont M. [P] [F] a été le dirigeant jusqu’au 11 août 2017 a pour activité la recherche et le développement en autres sciences physiques et naturelles. Mme [J] [H] et M. [P] [F] ont conclu un pacte civil de solidarité (Pacs) le 8 décembre 2011, lequel a été dissous le 2 février 2017. Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 6 juillet 2012 à effet au 4 juillet précédent, la société par actions simplifiée Bio Colloïdal a engagé Mme [H] en qualité d’assistante commerciale. Le 23 novembre 2016, Mme [H] et la société Bio Colloïdal ont signé une rupture conventionnelle du contrat de travail, lequel a pris fin le 30 décembre 2016. Faisant valoir que les sociétés Bio Colloïdal et Alokabio l’avaient employée illégalement de septembre 2010 à juillet 2012 pour la première, et d’avril 2015 jusqu’au 30 décembre 2016 pour la seconde, Mme [H] a saisi le conseil de prud’hommes de Laval le 6 juin 2018, aux fins de solliciter la condamnation de chaque société au paiement d’une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé. Elle réclamait en outre à l’encontre de la société Alokabio un rappel de salaire, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents ainsi qu’une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement. Enfin, elle sollicitait la condamnation solidaire des deux sociétés au paiement d’une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens. En réplique, la société Bio Colloïdal a soulevé l’irrecevabilité des demandes présentées par Mme [H] à son encontre. Au fond, les deux sociétés se sont opposées à ses prétentions, sollicitant en outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Reconventionnellement, la société Bio Colloïdal demandait que soit ordonnée sous astreinte la restitution de l’ensemble des documents lui appartenant et toujours en possession de Mme [H]. Par jugement du 16 mai 2019, le conseil de prud’hommes de Laval a : – dit que la demande de Mme [H] est recevable ; – fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire de Mme [H] à 3838,42 euros ; – débouté Mme [H] de sa demande de reconnaissance de travail dissimulé à l’encontre de la société Bio Colloïdal et de la société Alokabio ; – débouté Mme [H] de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de la société Bio Colloïdal et de la société Alokabio ; – débouté la société Bio Colloïdal de sa demande reconventionnelle de restitution de documents sous astreinte ; – dit n’y avoir lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile ; – condamné Mme [H] aux entiers dépens. Mme [H] a interjeté appel de cette décision par déclaration transmise par voie électronique au greffe de la cour d’appel le 7 juin 2019, son appel portant sur l’ensemble des dispositions lui faisant grief, telles qu’énoncées dans sa déclaration. Les sociétés Bio Colloïdal et Alokabio ont constitué avocat en qualité de partie intimée le 19 juin 2019. L’ordonnance de clôture a été prononcée le 19 octobre 2022 et l’affaire a été fixée à l’audience du conseiller rapporteur du 7 novembre 2022 lors de laquelle elle a fait l’objet d’un renvoi. Puis, par avis du 9 décembre 2022, le greffe a informé les parties du rabat de l’ordonnance de clôture et de sa fixation au 15 février 2023, l’affaire étant convoquée à l’audience du conseiller rapporteur du 6 mars 2023. MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES Mme [H], dans ses dernières conclusions d’appelante n°2, régulièrement communiquées, transmises au greffe le 26 janvier 2023 par voie électronique, ici expressément visées et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, demande à la cour de : – la juger recevable et bien fondée en son appel et ses demandes ; – infirmer le jugement entrepris ; – juger que la société Bio Colloïdal l’a employée illégalement dans le cadre d’un travail dissimulé de septembre 2010 à juillet 2012 ; – en conséquence, condamner la société Bio Colloïdal à lui verser la somme de 23 030,52 euros sur le fondement des dispositions de l’article L.8223-1 du code du travail ; – juger qu’elle a illégalement été employée par la société Alokabio dans le cadre d’un travail dissimulé ; – en conséquence, condamner la société Alokabio à lui verser : * au titre de l’indemnité de travail dissimulé sur le fondement de l’article L.8283-1 du code du travail : 23 030,52 euros ; * 1919,21 euros au titre de l’indemnité sur le fondement de l’article L.1235-3 du code du travail d’un montant minimal égal à 0,5 mois de salaire en raison de son ancienneté dans la société (un an et demi) ; * 3838,42 euros à titre d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement ; * 7676,84 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, et 767,70 euros de congés payés afférents ; – condamner la société Alokabio au titre d’un rappel de salaire pour la période de travail dissimulé à hauteur de 76 768,40 brut, outre 7 676,84 brut au titre des congés payés ; – condamner solidairement les sociétés Bio Colloïdal et Alokabio à lui payer la somme de 3500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ; – confirmer le jugement pour le surplus et ses dispositions non contraires et débouter les sociétés Bio Colloïdal et Alokabio de leur appel incident visant à obtenir sa condamnation à restituer une clé USB sous astreinte, et à leur verser des dommages et intérêts pour procédure abusive ; – condamner solidairement les sociétés Bio Colloïdal et Alokabio aux entiers dépens. Au soutien de ses demandes, Mme [H] fait valoir en substance qu’entre septembre 2010 et juillet 2012, elle a exercé une activité professionnelle au profit de la société Bio Colloïdal dont M. [P] [F] était le président depuis le 27 février 2010. Elle s’estime fondée en conséquence à se prévaloir du statut de conjoint salarié dont elle remplit les conditions prévues par l’article L. 121-4 du code de commerce, avec les conséquences de droit en résultant. Elle rappelle que de jurisprudence constante, l’existence d’un lien de subordination n’a pas à être établie et que l’absence de rémunération ne fait pas échec à l’application du statut revendiqué. Enfin, elle considère que l’infraction de travail dissimulé est caractérisée puisque nonobstant son activité professionnelle, elle n’a pas été déclarée et n’a perçu aucune rémunération ainsi qu’en atteste le défaut de délivrance de tout bulletin de paie. Par ailleurs, elle assure justifier d’une participation régulière à l’activité de M. [F] au sein de la société Alokabio d’avril 2015 jusqu’au 30 décembre 2016 ce, à titre habituel et professionnel, dans des conditions ne relevant pas de l’assistance entre personnes pacsées, de sorte qu’il convient de lui reconnaître le statut de conjoint salarié. Elle en déduit qu’elle occupait un emploi salarié, non déclaré au sein de la société Alokabio, et pour lequel elle n’a perçu aucune rémunération. * Par conclusions d’intimées n°2, régulièrement communiquées, transmises au greffe par voie électronique le 2 janvier 2023, ici expressément visées, et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, les sociétés Bio Colloïdal et Alokabio demandent à la cour de: – infirmer le jugement attaqué en ce qu’il a : – débouté la société Bio Colloïdal de sa demande de restitution de ses documents sous astreinte ; – dit n’y avoir lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile; – le confirmer en ses autres dispositions ; – statuant de nouveau : – ordonner la restitution de l’ensemble des documents stockés sur une clé USB appartenant à l’entreprise en la possession de Mme [H] sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 30 décembre 2016 ; – condamner Mme [H] à payer à chacune la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement des dispositions de l’article 559 du code de procédure civile ; – condamner la même à payer à chacune la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Les sociétés intimées contestent fermement les allégations de Mme [H], lesquelles ne sont étayées par aucune autre pièce que celles qu’elle s’est constituée par elle-même ou procuré auprès de proches dont certains n’ont jamais été clients de l’une ou de l’autre société. La société Bio Colloïdal souligne que Mme [H] a quitté l’entreprise en emportant l’ordinateur portable, propriété de l’employeur, et qu’elle s’est également permise d’utiliser ses données stockées sur une clé USB dont elle sollicite la restitution. Enfin, les société Bio Colloïdal et Alokabio font valoir que Mme [H] ne communique aucun nouvel élément devant la cour de sorte que son appel est dilatoire et abusif, et justifie sa condamnation à des dommages et intérêts en application des articles 32-1 et 559 du code de procédure civile. MOTIFS DE LA DÉCISION A titre liminaire, il doit être observé qu’aucune des parties n’a relevé appel du jugement en ce qu’il a déclaré recevable l’action engagée par Mme [H] et que devant la cour, la société Bio Colloïdal ne soulève plus aucune fin de non-recevoir sur ce point. Cette disposition doit donc être considérée comme définitive. – Sur le statut de conjoint salarié et le travail dissimulé au sein de la société Bio Colloïdal entre septembre 2010 et juillet 2012 : Aux termes de l’article L. 8283-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au présent litige, ‘en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.’ En application de l’article L. 121-4 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au cas d’espèce, le conjoint du chef d’une entreprise artisanale, commerciale ou libérale qui y exerce de manière régulière une activité professionnelle peut opter pour le statut de conjoint salarié. Le conjoint d’un dirigeant de société peut ainsi bénéficier d’un tel statut. En application de ces dispositions, il suffit d’établir que l’un des époux a eu une participation effective à titre professionnel et habituel à l’activité de son conjoint dans des circonstances qui ne relèvent pas de l’assistance entre époux. Il est de principe que le lien de subordination en ce cas n’a pas à être caractérisé. Selon l’article L. 121-8 du code de commerce dans sa version en vigueur au présent litige, les dispositions des articles L. 121-4 précitées sont aussi applicables aux personnes liées au chef d’entreprise par un pacte civil de solidarité. En l’espèce, il est établi que M. [P] [F] a dirigé la société Bio Colloïdal en sa qualité de président à compter du 27 février 2010, que M. [F] et Mme [H] ont vécu en concubinage avant de contracter un pacte civil de solidarité le 8 décembre 2011 et qu’enfin, aucun contrat de travail n’a été conclu entre la société Bio Colloïdal et Mme [H], ni bulletins de paie émis avant le mois de juillet 2012. Le contrat de travail signé le 6 juillet 2012 avec effet au 4 juillet 2012 par Mme [H] et la société Bio Colloïdal manifeste que celle-ci avait opté pour le statut de conjoint salarié. En conséquence, il revient à la cour de rechercher si Mme [H], ainsi qu’elle le prétend, établit avoir participé effectivement à l’activité de la société Bio Colloïdal, à titre professionnel et habituel mais ce, sur la seule période du 8 décembre 2011 au 4 juillet 2012. En effet, en application des dispositions précitées dans leur version en vigueur au cas d’espèce, Mme [H] n’est pas fondée à revendiquer le bénéfice du statut de conjoint salarié sur la période antérieure au 8 décembre 2011 durant laquelle elle vivait en concubinage avec M. [F] sans être liée avec celui-ci par un mariage ou par un Pacs. Au surplus, la cour constate que subsidiairement, Mme [H] ne sollicite pas autrement la reconnaissance de sa qualité de salariée en invoquant en particulier l’existence d’un lien de subordination qu’il lui appartiendrait alors de caractériser en l’absence de contrat de travail apparent. A l’appui de ses allégations, Mme [H] verse aux débats les éléments suivants: – deux attestations de M. [U] [B], de l’imprimerie des Hauts de Vilaine, dans lesquelles celui-ci se présente lui-même comme ‘technico-commercial, ami de M. [Y] [H]’ (père de Mme [H]) et indique uniquement que ‘Mme [J] [H] était mon interlocutrice au sein de la société Bio Colloïdal. Notre collaboration a débuté en septembre 2011 avec les premières commandes en avril 2012.’ – un mail de Mme [D] [P] adressé à Mme [H] dans lequel elle ‘certifie que pendant la période d’été 2015 à décembre 2017, [J] [H] était mon interlocutrice principale pour les projets de communication pour la marque Aloka Bio (cosmétiques biologiques) pour laquelle on menait des actions de marketing et image de marque (Infographies, magazines, publications sur réseaux sociaux, e-mailing, etc) récurrentes. Egalement, elle était mon interlocutrice sur des campagnes ponctuelles pour la marque Biocolloïdal, comme des e-mailings et des campagnes SMS lors des salons.’ -une attestation de Mme [L] [T], naturopathe qui relate avoir ‘à de nombreuses reprises, rencontré [J] [H] sur des salons de bien-être, notamment à [Localité 5] sur le salon zen, ayant besoin de conseiller ‘l’argent colloïdale’ dans le cadre de mon activité. J’ai également acheté ce produit sur le stand de Bio-colloïdal sous les conseils de [J] entre 2010 et 2015″ ; – une attestation de Mme [I] [X] qui assure avoir rencontré Mme [H] sur un salon en février 2011 sur le stand Bio Colloïdal. Mme [H] produit par ailleurs une liste des salons organisés en 2012 et auxquels elle aurait participé, établie par ses soins, ainsi que des attestations de proches : l’une de son père qui relate avoir retrouvé sa fille sur le salon bio de [Localité 7] le samedi 24 septembre 2011où elle travaillait sur le stand Bio Colloïdal, accompagnée d’une photographie, non datée, d’une femme de dos sur un stand du même nom ; une autre de sa mère indiquant en substance qu’elle voyait peu sa fille depuis la rentrée 2010 en raison de son travail accaparant chez Bio Colloïdal ajoutant qu’inquiète, elle s’était déplacée le 25 septembre 2011 sur le salon bio de [Localité 7] afin de la voir. Enfin, Mme [H] communique le témoignage de deux amis, Mme [G] [E] et M. [R] [A], affirmant pour la première avoir rendu visite à Mme [H] le 30 octobre 2011 sur le salon bio de [Localité 6] et pour le second s’être rendu le 2 octobre 2011 sur le salon bio d'[Localité 4] et s’être arrêté au stand Bio Colloïdal où Mme [H] travaillait. Ces éléments sont insuffisants à établir que Mme [H] a participé effectivement à l’activité de la société Bio Colloïdal ce, à titre professionnel et habituel, sur la période du 8 décembre 2011 au 4 juillet 2012. En effet, comme le souligne la société Bio Colloïdal, les attestations émanent de proches, de membres de la famille ou d’amis de Mme [H] dont l’impartialité peut être légitimement mise en doute. Surtout, la plupart de ces pièces ne se rapportent pas précisément à la période du 8 décembre 2011 au 4 juillet 2012, mais se référent, principalement, à la période de concubinage l’ayant précédée (attestations de Mmes [I] [X], [G] [E], et de MM. [R] [A] et [H]), ou à la période concomitante à la relation de travail contractuelle (attestation de Mme [D] [P]). En tout état de cause, elles sont trop imprécises quant aux fonctions qu’aurait exercées l’appelante sur la période concernée (attestation de M. [B]). Il y est fait état, pour certaines en termes généraux, de la présence de Mme [H] sur des salons avant juillet 2012, les attestants déclarant l’y avoir rencontrée sans que cela n’établisse une participation effective à l’activité de l’entreprise, celle-ci pouvant assister à titre personnel au salon auquel la société de son concubin participait, et même y prodiguer des ‘conseils’ à titre amical. Les photographies produites, sans précision de date ou de lieu, dont l’une montre une personne de dos sans que Mme [H] ne puisse formellement être identifiée, sont impropres à démontrer l’accomplissement d’un travail au sein de la société entre le 8 décembre 2011 et le 4 juillet 2012. Enfin, il apparaît que Mme [H] suivait des études supérieures entre 2009 et 2011 et son curriculum vitae communiqué par la société Bio Colloïdal révèle que celle-ci a occupé un emploi d’animatrice en août 2011 et d’agent hospitalier en octobre 2011. Il en résulte qu’en l’absence de caractérisation d’une activité professionnelle exercée au profit de la société Bio Colloïdal à titre professionnel et habituel, le statut de conjoint salarié ne saurait être reconnu en faveur de Mme [H] sur la période comprise entre le 8 décembre 2011 et le 4 juillet 2012. Par suite, l’indemnité forfaitaire réclamée au titre d’un emploi dissimulé, en l’occurrence non établi, sera rejetée et le jugement confirmé de ce chef. – Sur la relation de travail au sein de la société Alokabio, le rappel de salaire et le travail dissimulé : Mme [H] prétend que durant l’exécution de son contrat de travail au sein de la société Bio Colloïdal, elle a aussi été amenée à travailler pour la société Alokabio qui appartient au groupe Bio Colloïdal. Elle revendique en conséquence l’application du statut de conjoint salarié dans sa relation avec la société Alokabio à compter d’avril 2015 jusqu’au 30 décembre 2016, date d’effet de la rupture conventionnelle signée avec la société Bio Colloïdal. La société Alokabio rappelle qu’elle n’employait aucun salarié et qu’elle n’avait quasiment aucune activité. Elle explique que lors de sa création, elle a acheté les formules de crème, lesquelles n’ont jamais été validées par un toxicologue l’obligeant alors à avoir recours à un laboratoire pour modifier certaines formules, ce qui explique les quelques mails échangés avec le docteur [K]. Elle évoque l’existence d’une convention de prestations de service conclue entre les deux sociétés intimées et assure que les quelques tâches accomplies par Mme [H] ont été réalisées dans le cadre de son emploi avec la société Bio Colloïdal pour lequel elle percevait une rémunération valorisée et en lien avec l’activité des deux sociétés. Il est constant que M. [F] a dirigé de la société Alokabio dont il a été le président entre le 29 avril 2015 et le 11 août 2017. A l’appui de ses prétentions, Mme [H] verse aux débats ces différents éléments : – le mail de Mme [D] [P] déjà cité ; – une attestation de Mme [N] [K], docteur en pharmacie, présidente de la SASU [K] Laboratory Concept, laquelle affirme que Mme [H] a été leur ‘interlocutrice privilégiée de l’été 2015 à janvier 2017″; – un courriel de Mme [M] [C], cheffe de publicité chez Rebelle-Santé, qui ‘certifie que Mme [J] [H] a été mon interlocutrice principale de 2014 à 2016 comme annonceur de la société Aloka Bio’ ; – le témoignage de Mme [W] [S], gérante de la SARL l’Agence Nature qui précise que ‘Mme [J] [H] de la société Bio Colloïdal et Alokabio a été notre interlocutrice privilégiée durant la période septembre 2014 jusqu’en décembre 2016 pour la société Bio Colloïdal et de la période d’août 2015 à décembre 2016 pour la société Alokabio. Nous avons collaboré ensemble sur diverses conceptions de documents de communication.’ Les auteurs de ces mails et attestations désignent tous de manière invariable Mme [H] comme leur ‘interlocutrice’ principale ou privilégiée de la société Alokabio y compris pour des périodes où la société n’existait pas encore ce, sans véritablement préciser la nature de leur relation (Mme [K]) ni différencier leur collaboration avec chacune des deux sociétés sauf à préciser exactement les périodes concernées (Mme [S]). En tout état de cause, ces pièces ne permettent pas de corroborer les allégations de Mme [H] quant aux nombreuses tâches qu’elle aurait accomplies pour le développement de la société Alokabio pendant plusieurs années et qu’elle liste de la manière suivante : développement de produits de la gamme Aloka, de leur conception jusqu’à leur packaging, développement commercial de la société par sa présence à des salons et conférences, l’administration du site internet et de l’ensemble des supports de communication, la charge de la stratégie de communication et le développement du marketing de la société. De plus, le docteur [N] [K] a précisé dans une autre attestation communiquée par la société Alokabio avoir échangé avec Mme [H] seulement par quatre mails dans le cadre de la refonte de produits cosmétiques en juin 2016 et novembre 2016. Enfin, l’expert comptable des sociétés Bio Colloïdal et Alokabio, témoigne qu’une convention de prestations d’assistance a été signée le 1er octobre 2016 entre la SAS Colloïdal France désignée comme prestataire et la SAS Alokabio comme bénéficiaire (pièce 11). Dans ces conditions, les quelques courriels que Mme [H] a été amenée à envoyer à certains interlocuteurs de la société Alokabio sur son temps de travail au sein de la société Bio Colloïdal, ne sauraient suffire à caractériser une prestation de travail accomplie de manière régulière et à titre professionnel pour le seul compte de la société Alokabio. En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes présentées par Mme [H] à titre de rappel de salaires, d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé et au titre de la rupture de la relation de travail non démontrée. – Sur la restitution de documents appartenant à la société Bio Colloïdal : La société Bio Colloïdal affirme que Mme [H] a quitté son employeur en emportant l’ordinateur portable propriété de celui-ci et en utilisant les données de la société sur une clé USB. Réclamant la restitution uniquement ‘ des documents stockés sur cette clé’, elle explique que la salariée a écrit un ouvrage sans autorisation de la société dans lequel elle livre des informations lui appartenant. Mme [H] souligne le caractère imprécis et confus de cette demande, relevant que la société Bio Colloïdal ne mentionne pas les données concernées et ne rapporte pas la preuve de leur propriété comme celle de l’existence de l’ouvrage qu’elle aurait prétendument écrit. De fait, dans le dispositif comme dans les motifs de ses conclusions, la société Bio Colloïdal ne précise nullement les documents dont elle sollicite la restitution et ne justifie pas de l’utilisation de ces données dans un ouvrage que Mme [H] aurait écrit. Au-delà de la question de propriété intellectuelle que pourrait soulever ce litige et pour laquelle aucune action n’a manifestement été engagée par la société, il doit être relevé que cette dernière ne produit ni l’ouvrage dont elle fait état, ni même des extraits de celui-ci qui seraient de nature à confirmer ses propos. Elle se contente de verser une attestation de M. [Z] [F], co-fondateur de la société, qui affirme que Mme [H] serait partie avec une clé USB, sans préciser ce qu’elle contenait de sorte que la cour n’est pas plus renseignée sur la relation éventuelle entre le supposé livre de Mme [H] et cette clé USB qu’elle aurait conservée. La société sera par conséquent déboutée de sa demande et le jugement dont appel confirmé sur ce point. – Sur la demande de dommages et intérêts pour appel abusif : Sur le fondement des articles 32-1 et 559 du code de procédure civile, les sociétés Bio Colloïdal et Alokabio reprochent à Mme [H] d’avoir engagé une action en justice ‘parfaitement infondée’ et surtout relevé appel du jugement sans verser en cause d’appel de nouvelles pièces. L’exercice d’une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou encore d’erreur grossière équipollente au dol. L’appréciation inexacte qu’une partie fait de ses droits n’est pas en soi, constitutive d’une faute caractérisant un abus du droit d’agir. En l’occurrence, le fait que Mme [H] ait été déboutée de l’ensemble de ses demandes en première instance comme en appel ne suffit à lui seul à caractériser cet abus. Par conséquent, la société Bio Colloïdal sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts et le jugement sera confirmé à ce titre. – Sur les frais irrépétibles et les dépens : Le jugement doit être confirmé en ses dispositions relatives à l’application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens. Il est équitable de laisser à la charge de chaque partie les frais qu’elles ont pu exposer à l’occasion de ce litige. Elles seront déboutées de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile. En revanche, Mme [J] [H], partie perdante, doit être condamnée aux entiers dépens de la procédure d’appel. PAR CES MOTIFS : La COUR, Statuant dans les limites de l’appel, par arrêt contradictoire, prononcé publiquement et par mise à disposition au greffe, – Confirme le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Laval le 16 mai 2019 en toutes ses dispositions ; Y ajoutant, – Rejette la demande présentée par la société Bio Colloïdal et la société Alokabio pour appel abusif ; – Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel ; – Condamne Mme [J] [H] aux entiers dépens de la procédure d’appel. LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT, Viviane BODIN M-C. DELAUBIER |
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Quel est le principal litige entre la société Mika Ichoka et M. [Y] ?Le principal litige entre la société Mika Ichoka et M. [Y] concerne la requalification des contrats de travail de M. [Y] en contrats à temps complet, ainsi que le paiement des salaires dus pour les périodes travaillées. M. [Y] a été engagé en tant que livreur par la société Mika Ichoka, mais il n’a pas signé de contrat de travail écrit. La société soutient que M. [Y] a refusé de signer le contrat, tandis que M. [Y] affirme qu’il n’a jamais reçu de contrat écrit. La cour a confirmé que l’absence de contrat écrit fait présumer que le travail est à temps complet, et il incombe à l’employeur de prouver le contraire. Quelles sont les conséquences de l’absence de contrat écrit pour M. [Y] ?L’absence de contrat écrit a des conséquences significatives pour M. [Y]. Selon l’article L. 3123-6 du code du travail, un contrat de travail à temps partiel doit être écrit et mentionner la durée de travail. En l’absence de ce document, la loi présume que le contrat est à temps complet. Cela signifie que M. [Y] est en droit de revendiquer un salaire correspondant à un emploi à temps plein, ainsi que des rappels de salaires pour les heures supplémentaires effectuées. La cour a donc requalifié les contrats de M. [Y] en contrats à durée indéterminée à temps complet, ce qui lui permet de réclamer des sommes importantes au titre des salaires dus. Comment la société Mika Ichoka a-t-elle tenté de défendre sa position ?La société Mika Ichoka a tenté de défendre sa position en affirmant que M. [Y] avait refusé de signer le contrat de travail qu’elle lui avait présenté. Elle a également soutenu que M. [Y] avait reçu des bulletins de salaire mentionnant les heures travaillées et que ces documents prouvaient qu’il ne travaillait pas au-delà des heures indiquées. Cependant, la cour a rappelé que c’est à l’employeur de prouver la durée exacte du travail convenu et que M. [Y] n’était pas dans l’impossibilité de prévoir ses horaires. La société n’a pas fourni de preuves suffisantes pour renverser la présomption de travail à temps complet. Quelles sommes M. [Y] a-t-il été condamné à recevoir ?M. [Y] a été condamné à recevoir plusieurs sommes au titre de rappels de salaires et d’indemnités. Parmi les montants notables, il a obtenu : – 35 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 8 décembre 2016 au 11 janvier 2017. – 5 937,98 euros pour la période de juin 2018 à mars 2019, correspondant à des salaires sur temps complet et minima conventionnels. – 8 438,78 euros pour des heures supplémentaires effectuées entre juin et juillet 2018, ainsi qu’entre octobre 2018 et mars 2019. – 1 000 euros de dommages-intérêts pour non-respect des règles relatives au temps de repos. – 1 531,87 euros pour le mois d’avril 2019, en plus de 153,18 euros au titre des congés payés afférents. Ces montants illustrent l’ampleur des manquements de l’employeur et les droits de M. [Y] en tant que salarié. Quelles ont été les décisions de la cour concernant la résiliation judiciaire du contrat de travail ?La cour a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [Y] aux torts de l’employeur, considérant que les manquements de la société Mika Ichoka à ses obligations contractuelles étaient suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat. Ces manquements incluent l’absence de fourniture de travail, le non-respect des minima salariaux, l’absence de contrat écrit, et le non-paiement des salaires dus. La cour a également déclaré que la résiliation judiciaire produisait les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ce qui a des implications sur les indemnités que M. [Y] peut réclamer. Quels sont les impacts de cette décision sur l’employeur ?Les impacts de cette décision sur l’employeur, la société Mika Ichoka, sont significatifs. En étant condamnée à verser des sommes importantes à M. [Y], la société doit faire face à des conséquences financières lourdes. De plus, la requalification des contrats de travail en contrats à temps complet expose la société à des obligations salariales qu’elle n’avait pas anticipées. La cour a également condamné la société à verser des dommages-intérêts pour non-respect des règles de santé et de sécurité, ainsi que pour travail dissimulé, ce qui pourrait nuire à sa réputation et à sa situation financière. Enfin, la société doit également assumer les frais de justice, ce qui ajoute une pression supplémentaire sur ses ressources. |
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