Méconnaissance des procédures internes de passation des contrats : Cour de cassation, Chambre sociale, 15 février 2023, 21-14.122

·

·

Méconnaissance des procédures internes de passation des contrats : Cour de cassation, Chambre sociale, 15 février 2023, 21-14.122

* * * REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS SOC.

HA

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 15 février 2023

Rejet

Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 145 F-D

Pourvoi n° J 21-14.122

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 FÉVRIER 2023

La société Monsieur Bricolage, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 21-14.122 contre l’arrêt rendu le 2 février 2021 par la cour d’appel d’Orléans (chambre sociale A, section 1), dans le litige l’opposant :

1°/ à M. [M] [C], domicilié [Adresse 3],

2°/ à Pôle emploi Haut-de-France, dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Seguy, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Monsieur Bricolage, après débats en l’audience publique du 4 janvier 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Seguy, conseiller rapporteur, M. Pietton, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Orléans, 2 février 2021), M. [C] a été engagé à compter du 18 janvier 2010 en qualité de directeur marketing et publicité, statut cadre dirigeant, par la société Monsieur Bricolage (la société).

2. Licencié le 18 novembre 2015, il a contesté cette mesure devant la juridiction prud’homale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

3. La société fait grief à l’arrêt de la condamner à payer au salarié une somme à titre de solde de congés payés, de dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, de la condamner à lui payer des sommes à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’indemnité de licenciement, d’indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, de lui ordonner de rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées au salarié du jour de son licenciement au jour de l’arrêt dans la limite de six mois d’indemnités de chômage et de la condamner à payer au salarié une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile, alors « que la cour d’appel ne peut statuer que sur les dernières conclusions régulièrement déposées et signifiées par les parties ; qu’en se prononçant au visa des conclusions déposées et signifiées le 27 avril 2020 par la société en exposant succinctement les prétentions et moyens soutenus par celle-ci, sans se référer aux nouvelles conclusions déposées le 1er décembre 2020 et complétant son argumentation précédente avec une nouvelle production à l’appui, la cour d’appel, qui ne les a pas prises en considération dans sa motivation, a violé les articles 455, alinéa 1er, et 954, alinéa 3, devenu alinéa 4, du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. La cour d’appel a, en dépit du visa erroné de ses conclusions, statué sur toutes les prétentions et au vu de tous les moyens que l’employeur formulait dans ses dernières conclusions.

5. Le moyen n’est donc pas fondé.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

6. La société fait le même grief à l’arrêt, alors :

« 1°/ que la méconnaissance des procédures internes de passation des contrats peut constituer une faute lourde justifiant un licenciement ; que par une note de service du 24 août 2011, la direction juridique de la société Monsieur Bricolage avait indiqué les procédures à suivre concernant la conclusion ou la modification des contrats conclus par les sociétés du groupe ; que cette note de service du 24 août 2011 prévoyait que L’assistance ou l’avis de la direction juridique est obligatoirement requis chaque fois que par sa nature, sa durée, son montant ou les autres clauses qu’il comporte, un contrat est susceptible de présenter des conséquences importantes pour la société Monsieur Bricolage, ses filiales ou l’une des sociétés du groupe » ; que cette procédure concernait tous les documents engageant la société, quel que soit le domaine concerné, qu’il s’agisse du contrat initial, d’un renouvellement ou d’un avenant ; qu’en énonçant que la seule limite imposée au délégataire concerne les hypothèses de modification dans des proportions anormales ou importantes de la durée ou du prix des contrats. Il n’était donc pas prévu de consultation systématique du service juridique » et qu’ il y a donc lieu de retenir, contrairement à ce qu’a jugé le conseil de prud’hommes d’Orléans, que le salarié avait le pouvoir de signer, avec les agences de publicité et de communication, les contrats concernant la publicité et les relations extérieures ainsi que les avenants aux contrats existants, sans qu’en l’espèce la note de service alléguée destinée au COMOP puisse y faire obstacle et sans avoir préalablement à consulter le service juridique » ; qu’en décidant que cette note de service était inopposable au salarié cependant qu’il faisait partie du COMOP et qu’il devait, par conséquent, s’y soumettre, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble l’article L. 3121-46 du code du travail ;

2°/ qu’il est interdit aux juges du fond de dénaturer les documents qui lui sont soumis ; que par une note de service du 24 août 2011, la direction juridique de la société Monsieur Bricolage avait indiqué que L’assistance ou l’avis de la direction juridique est obligatoirement requis chaque fois que par sa nature, sa durée, son montant ou les autres clauses qu’il comporte, un contrat est susceptible de présenter des conséquences importantes pour la société Monsieur Bricolage, ses filiales ou l’une des sociétés du groupe » ; que cette procédure concernait tous les documents engageant la société, quel que soit le domaine concerné, qu’il s’agisse du contrat initial, d’un renouvellement ou d’un avenant ; qu’en énonçant que la seule limite imposée au délégataire concerne les hypothèses de modification dans des proportions anormales ou importantes de la durée ou du prix des contrats. Il n’était donc pas prévu de consultation systématique du service juridique » et qu’ il y a donc lieu de retenir, contrairement à ce qu’a jugé le conseil de prud’hommes d’Orléans, que le salarié avait le pouvoir de signer, avec les agences de publicité et de communication, les contrats concernant la publicité et les relations extérieures ainsi que les avenants aux contrats existants, sans qu’en l’espèce la note de service alléguée destinée au COMOP puisse y faire obstacle et sans avoir préalablement à consulter le service juridique », la cour d’appel a limité la portée de la note à la seule modification dans des proportions anormales ou importantes de la durée ou du prix des contrats en violation du principe selon lequel il est interdit au juge de dénaturer les documents qui lui sont soumis ;

3°/ qu’il appartient à l’employeur de rapporter la preuve de la faute grave qu’il impute au salarié ; qu’en estimant que l’employeur ne rapportait pas la preuve de la faute lourde qu’il avait imputée au salarié quand la société Monsieur Bricolage produisait aux débats la note de service du 24 août 2011 par laquelle la direction juridique avait rappelé que L’assistance ou l’avis de la direction juridique est obligatoirement requis chaque fois que par sa nature, sa durée, son montant ou les autres clauses qu’il comporte, un contrat est susceptible de présenter des conséquences importantes pour la société Monsieur Bricolage, ses filiales ou l’une des sociétés du groupe », la cour d’appel a violé l’article L. 3121-46 du code du travail ;

4°/ que par délégation de pouvoirs du 11 février 2014, le salarié s’était engagé à procéder ou faire procéder à tout achat de matériels et/ou de prestations de services pour les besoins de la direction générale, sans prendre d’engagements ou signer de contrats d’une durée anormalement longue ou à des conditions inhabituelles notamment en terme de prix ou de durée, sauf accord de l’autorité délégatrice » ; qu’en énonçant que la seule limite imposée au délégataire concernait les hypothèses de modification dans des proportions anormales ou importantes de la durée ou du prix des contrats et qu’il n’était donc pas prévu de consultation systématique du service juridique, que les modifications apportées aux avenants litigieux ne portaient que sur la durée de sorte qu’elles ne pouvaient être qualifiées d’anormales ou d’importantes cependant que les avenants au contrat principal et au contrat secondaire conclus avec la société Publicis Dialog mettaient en place des conditions inhabituelles et transformaient deux contrats à durée indéterminée résiliables à tout moment moyennant le respect d’un préavis de trois mois ou six mois, en contrats à durée déterminée de trois ans sans aucune possibilité de rupture avant la fin de cette période le 31 mars 2018, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble l’article L. 3121-46 du code du travail ;

5°/ qu’en toute hypothèse par délégation de pouvoirs du 11 février 2014, le salarié s’était engagé à procéder ou faire procéder à tout achat de matériels et/ou de prestations de services pour les besoins de la direction générale, sans prendre d’engagements ou signer de contrats d’une durée anormalement longue ou à des conditions inhabituelles notamment en terme de prix ou de durée, sauf accord de l’autorité délégatrice » ; qu’en énonçant que la seule limite imposée au délégataire concernait les hypothèses de modification dans des proportions anormales ou importantes de la durée ou du prix des contrats et qu’il n’était donc pas prévu de consultation systématique du service juridique et que les modifications apportées aux avenants litigieux ne portaient que sur la durée de sorte qu’elles ne pouvaient être qualifiées d’anormales ou d’importantes sans rechercher, comme elle y était invitée par les écritures d’appel de la société Monsieur Bricolage, si les avenants litigieux ne constituaient pas des engagements conclus à des conditions inhabituelles, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 3141-26 du code du travail ;

6°/ que constitue une faute lourde le fait pour un ingénieur d’avoir omis de donner des informations d’importance au service commercial de son employeur dès lors que cette omission volontaire a eu notamment pour but de favoriser la société sous-traitante ; que la société Monsieur Bricolage faisait valoir qu’ il est certain qu’en tant qu’ancien salarié du groupe Publicis pendant dix ans, le salarié avait conservé des liens étroits avec ses anciens collègues. C’était d’ailleurs la raison pour laquelle il avait quelques mois après son entrée en fonction résilié le contrat avec l’agence LMY et R pour travailler avec la société Publicis Dialog. Lorsque la situation de la gouvernance du groupe Monsieur Bricolage est apparue instable après l’échec de la fusion avec Kingfischer au printemps 2015, le salarié a souhaité préserver les intérêts du prestataire Publicis Dialog en figeant la durée des contrats pour trois ans, et ce au détriment des intérêts financiers de la société MBSA » ; qu’en se bornant à considérer que l’employeur ne pouvait pas prononcer un licenciement pour faute lourde sans même rechercher, comme elle y était invitée, si le salarié n’avait pas omis volontairement de donner des informations d’importance à son employeur dans le but de favoriser la société Publicis, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 3141-26 du code du travail ;

7°/ que la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; que les juges du fond ne peuvent examiner un motif de licenciement qui n’y est pas énoncé ; qu’en énonçant que le retard à communiquer ces avenants au service juridique le 9 juillet 2015 est justifié par la préparation d’un congrès à New-York en juin 2015 qui a engendré une importante charge de travail dans les mois précédents. La transmission d’un avenant non signé par le salarié et portant la seule signature de la SAS Publicis Dialog ne lui est pas directement imputable, cette transmission ayant été faite par son assistante au temps où il était hospitalisé » cependant que l’employeur reprochait au salarié dans la lettre de licenciement d’avoir dissimulé cet avenant, la cour d’appel a violé l’article L. 1232-6 du code du travail ;

8°/ que par des écritures demeurées sans réponse, la société Monsieur Bricolage développait une argumentation complémentaire aux fins de s’opposer à la demande indemnitaire du salarié ; qu’en ne s’expliquant pas sur les observations de l’employeur visant à contester le montant de l’indemnisation sollicitée par le salarié, la cour d’appel a privé sa décision de motifs en violation de l’article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

7. La cour d’appel a constaté que le salarié, directeur marketing et publicité, cadre dirigeant, membre du comité de direction de la société à la date des faits, directement associé aux décisions stratégiques dans son domaine de compétence pour lequel il disposait d’une large autonomie d’action, était bénéficiaire de délégations de pouvoir seulement limitées aux hypothèses de modification dans des proportions anormales ou importantes de la durée ou du prix des contrats.

8. Elle a fait ressortir que les modifications qui lui étaient reprochées ne concernaient que la durée de deux contrats existants conclus avec la société Publicis dialog, allongée de trois ans par des avenants comportant une contrepartie tarifaire en faveur de l’employeur, que ces avenants n’avaient pas modifié les stipulations contractuelles sur la perte des droits d’auteur par la société ni bouleversé l’économie des contrats au détriment de l’employeur. Elle a ainsi nécessairement répondu, en l’écartant, au moyen prétendument laissé sans réponse, selon lequel le salarié aurait privilégié la société Publicis.

9. La cour d’appel en a déduit, sans dénaturation, d’une part, que le salarié avait le pouvoir de signer ces avenants sans être tenu de consulter préalablement le service juridique et sans que la note de service du 24 août 2011, émanant de la direction juridique et destinée au comité opérationnel de la société, puisse y faire obstacle, d’autre part, que les modifications apportées par ces avenants n’excédaient pas les limites des délégations de pouvoir dont il disposait.

10. Ayant retenu que le salarié avait seulement tardé à communiquer les avenants au service juridique pour un motif dont il justifiait, que la transmission d’un avenant non signé ne lui était pas directement imputable et que les autres motifs énoncés à la lettre de licenciement n’étaient pas davantage établis, elle a décidé, dans l’exercice des pouvoirs qu’elle tient de l’article L. 1235-1 du code du travail, que le licenciement ne procédait pas d’une cause réelle et sérieuse.

11. Le moyen, qui manque en fait en sa cinquième branche et qui, sous couvert d’un grief de défaut de motivation, ne tend qu’à remettre en cause devant la Cour de cassation l’appréciation souveraine par la cour d’appel de la valeur et de la portée des éléments de preuve soumis à son examen pour estimer le montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, les juges du fond n’étant pas tenus de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de s’expliquer sur les pièces qu’ils décidaient d’écarter, n’est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Monsieur Bricolage aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille vingt-trois.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Monsieur Bricolage

PREMIER MOYEN DE CASSATION

La société MONSIEUR BRICOLAGE fait grief à l’arrêt partiellement infirmatif attaqué de l’avoir condamnée à payer à Monsieur [M] [C] un solde de congés payés de 6 748,77 euros, et statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant, d’avoir dit que le licenciement de Monsieur [M] [C] était dépourvu de cause réelle et sérieuse, de l’avoir condamnée à payer à Monsieur [M] [C] les sommes de 100 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 28 874 euros à titre d’indemnité de licenciement, 39 555 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, 3 955,50 euros au titre des congés payés afférents, d’avoir ordonné le remboursement par la société MR BRICOLAGE aux organismes concernés les indemnités de chômage versées au salarié du jour de son licenciement au jour de l’arrêt dans la limite de six mois d’indemnités de chômage, et de l’avoir condamnée à payer à Monsieur [M] [C] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

ALORS QUE la cour d’appel ne peut statuer que sur les dernières conclusions régulièrement déposées et signifiées par les parties ; qu’en se prononçant au visa des conclusions déposées et signifiées le 27 avril 2020 par la société MR BRICOLAGE en exposant succinctement les prétentions et moyens soutenus par celle-ci, sans se référer aux nouvelles conclusions déposées le 1er décembre 2020 par la société MR BRICOLAGE et complétant son argumentation précédente avec une nouvelle production à l’appui, la cour d’appel, qui ne les a pas prises en considération dans sa motivation, a violé les articles 455, alinéa 1er, et 954, alinéa 3, devenu alinéa 4, du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

La société MONSIEUR BRICOLAGE fait grief à l’arrêt partiellement infirmatif attaqué de l’avoir condamnée à payer à Monsieur [M] [C] un solde de congés payés de 6 748,77 euros, et statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant, d’avoir dit que le licenciement de Monsieur [M] [C] était dépourvu de cause réelle et sérieuse, de l’avoir condamnée à payer à Monsieur [M] [C] les sommes de 100 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 28 874 euros à titre d’indemnité de licenciement, 39 555 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, 3 955,50 euros au titre des congés payés afférents, d’avoir ordonné le remboursement par la société MR BRICOLAGE aux organismes concernés les indemnités de chômage versées au salarié du jour de son licenciement au jour de l’arrêt dans la limite de six mois d’indemnités de chômage, et de l’avoir condamnée à payer à Monsieur [M] [C] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

1° ALORS QUE la méconnaissance des procédures internes de passation des contrats peut constituer une faute lourde justifiant un licenciement ; que par une note de service du 24 août 2011, la direction juridique de la société MR BRICOLAGE avait indiqué les procédures à suivre concernant la conclusion ou la modification des contrats conclus par les sociétés du groupe ; que cette note de service du 24 août 2011 prévoyait que « L’assistance ou l’avis de la Direction juridique est obligatoirement requis chaque fois que par sa nature, sa durée, son montant ou les autres clauses qu’il comporte, un contrat est susceptible de présenter des conséquences importantes pour la Société MR BRICOLAGE, ses filiales ou l’une des Sociétés du Groupe » (cf. prod n° 3, p. 10 et prod n° 7) ; que cette procédure concernait tous les documents engageant la société, quel que soit le domaine concerné, qu’il s’agisse du contrat initial, d’un renouvellement ou d’un avenant (cf. prod n° 7) ; qu’en énonçant que « la seule limite imposée au délégataire concerne les hypothèses de modification dans des proportions anormales ou importantes de la durée ou du prix des contrats. Il n’était donc pas prévu de consultation systématique du service juridique » et qu’« il y a donc lieu de retenir, contrairement à ce qu’a jugé le conseil de prud’hommes d’Orléans, que Monsieur [M] [C] avait le pouvoir de signer, avec les agences de publicité et de communication, les contrats concernant la publicité et les relations extérieures ainsi que les avenants aux contrats existants, sans qu’en l’espèce la note de service alléguée destinée au COMOP puisse y faire obstacle et sans avoir préalablement à consulter le service juridique » ; qu’en décidant que cette note de service était inopposable à Monsieur [C] cependant que le salarié faisait partie du COMOP et qu’il devait, par conséquent, s’y soumettre, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble l’article L. 3121-46 du code du travail ;

2° ALORS QU’il est interdit aux juges du fond de dénaturer les documents qui lui sont soumis ; que par une note de service du 24 août 2011, la direction juridique de la société MR BRICOLAGE avait indiqué que « L’assistance ou l’avis de la Direction juridique est obligatoirement requis chaque fois que par sa nature, sa durée, son montant ou les autres clauses qu’il comporte, un contrat est susceptible de présenter des conséquences importantes pour la Société MR BRICOLAGE, ses filiales ou l’une des Sociétés du Groupe » (cf. prod n° 3, p. 10 et prod n° 7) ; que cette procédure concernait tous les documents engageant la société, quel que soit le domaine concerné, qu’il s’agisse du contrat initial, d’un renouvellement ou d’un avenant (cf. prod n° 7) ; qu’en énonçant que « la seule limite imposée au délégataire concerne les hypothèses de modification dans des proportions anormales ou importantes de la durée ou du prix des contrats. Il n’était donc pas prévu de consultation systématique du service juridique » et qu’« il y a donc lieu de retenir, contrairement à ce qu’a jugé le conseil de prud’hommes d’Orléans, que Monsieur [M] [C] avait le pouvoir de signer, avec les agences de publicité et de communication, les contrats concernant la publicité et les relations extérieures ainsi que les avenants aux contrats existants, sans qu’en l’espèce la note de service alléguée destinée au COMOP puisse y faire obstacle et sans avoir préalablement à consulter le service juridique », la cour d’appel a limité la portée de la note à la seule modification dans des proportions anormales ou importantes de la durée ou du prix des contrats en violation du principe selon lequel il est interdit au juge de dénaturer les documents qui lui sont soumis ;

3° ALORS QU’il appartient à l’employeur de rapporter la preuve de la faute grave qu’il impute au salarié ; qu’en estimant que l’employeur ne rapportait pas la preuve de la faute lourde qu’il avait imputée au salarié quand la société MONSIEUR BRICOLAGE produisait aux débats la note de service du 24 août 2011 par laquelle la direction juridique avait rappelé que « L’assistance ou l’avis de la Direction juridique est obligatoirement requis chaque fois que par sa nature, sa durée, son montant ou les autres clauses qu’il comporte, un contrat est susceptible de présenter des conséquences importantes pour la Société MR BRICOLAGE, ses filiales ou l’une des Sociétés du Groupe », la cour d’appel a violé l’article L. 3121-46 du code du travail ;

4° ALORS QUE par délégation de pouvoirs du 11 février 2014, Monsieur [M] [C] s’était engagé à « Procéder ou faire procéder à tout achat de matériels et/ou de prestations de services pour les besoins de la Direction Générale, sans prendre d’engagements ou signer de contrats d’une durée anormalement longue ou à des conditions inhabituelles notamment en terme de prix ou de durée, sauf accord de l’autorité délégatrice » (cf. prod n° 19) ; qu’en énonçant que la seule limite imposée au délégataire concernait les hypothèses de modification dans des proportions anormales ou importantes de la durée ou du prix des contrats et qu’il n’était donc pas prévu de consultation systématique du service juridique, que les modifications apportées aux avenants litigieux ne portaient que sur la durée de sorte qu’elles ne pouvaient être qualifiées d’anormales ou d’importantes cependant que les avenants au contrat principal et au contrat secondaire conclus avec la société PUBLICIS DIALOG mettaient en place des conditions inhabituelles et transformaient deux contrats à durée indéterminée résiliables à tout moment moyennant le respect d’un préavis de trois mois ou six mois (pièces n° 9 et 10), en contrats à durée déterminée de trois ans sans aucune possibilité de rupture avant la fin de cette période le 31 mars 2018, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble l’article L. 3121-46 du code du travail ;

5° ALORS QU’EN TOUTE HYPOTHÈSE par délégation de pouvoirs du 11 février 2014, Monsieur [M] [C] s’était engagé à « Procéder ou faire procéder à tout achat de matériels et/ou de prestations de services pour les besoins de la Direction Générale, sans prendre d’engagements ou signer de contrats d’une durée anormalement longue ou à des conditions inhabituelles notamment en terme de prix ou de durée, sauf accord de l’autorité délégatrice » (cf. prod n° 19) ; qu’en énonçant que la seule limite imposée au délégataire concernait les hypothèses de modification dans des proportions anormales ou importantes de la durée ou du prix des contrats et qu’il n’était donc pas prévu de consultation systématique du service juridique, et que les modifications apportées aux avenants litigieux ne portaient que sur la durée de sorte qu’elles ne pouvaient être qualifiées d’anormales ou d’importantes sans rechercher, comme elle y était invitée par les écritures d’appel de la société MR BRICOLAGE, si les avenants litigieux ne constituaient pas des engagements conclus à des conditions inhabituelles, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 3141-26 du code du travail ;

6° ALORS QUE constitue une faute lourde le fait pour un ingénieur d’avoir omis de donner des informations d’importance au service commercial de son employeur dès lors que cette omission volontaire a eu notamment pour but de favoriser la société sous-traitante ; que la société ME BRICOLAGE faisait valoir qu’ « il est certain qu’en tant qu’ancien salarié du Groupe PUBLICIS pendant dix ans, Monsieur [M] [C] avait conservé des liens étroits avec ses anciens collègues. C’était d’ailleurs la raison pour laquelle il avait quelques mois après son entrée en fonction résilié le contrat avec l’Agence LMY et R pour travailler avec la Société PUBLICIS DIALOG. Lorsque la situation de la gouvernance du Groupe MR BRICOLAGE est apparue instable après l’échec de la fusion avec KINGFISCHER au printemps 2015 (pièce adverse n° 15), Monsieur [M] [C] a souhaité préserver les intérêts du prestataire PUBLICIS DIALOG en figeant la durée des contrats pour trois ans, et ce au détriment des intérêts financiers de la Société MBSA » (cf. prod n° 3, p. 12) ; qu’en se bornant à considérer que l’employeur ne pouvait pas prononcer un licenciement pour faute lourde sans même rechercher, comme elle y était invitée, si le salarié n’avait pas omis volontairement de donner des informations d’importance à son employeur dans le but de favoriser la société PUBLICIS, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 3141-26 du code du travail ;

7° ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; que les juges du fond ne peuvent examiner un motif de licenciement qui n’y est pas énoncé ; qu’en énonçant que « le retard à communiquer ces avenants au service juridique le 9 juillet 2015 est justifié par la préparation d’un congrès à New-York en juin 2015 qui a engendré une importante charge de travail dans les mois précédents. La transmission d’un avenant non signé par Monsieur [M] [C] et portant la seule signature de la SAS PUBLICIS DIALOG ne lui est pas directement imputable, cette transmission ayant été faite par son assistante au temps où il était hospitalisé » cependant que l’employeur reprochait au salarié dans la lettre de licenciement d’avoir dissimulé cet avenant, la cour d’appel a violé l’article L. 1232-6 du code du travail ;

8° ALORS QUE par des écritures demeurées sans réponse, la société MR BRICOLAGE développait une argumentation complémentaire aux fins de s’opposer à la demande indemnitaire de Monsieur [C] (cf. prod n° 3, p. 22 et 23 et prod n° 18) ; qu’en ne s’expliquant pas sur les observations de l’employeur visant à contester le montant de l’indemnisation sollicitée par le salarié, la cour d’appel a privé sa décision de motifs en violation de l’article455 du code de procédure civile.

Questions / Réponses juridiques

Quels étaient les principaux reproches formulés à l’encontre de Mme [D] lors de ses entretiens annuels d’évaluation ?

Les entretiens annuels d’évaluation de Mme [D] entre 2013 et 2018 ont mis en lumière plusieurs reproches significatifs. Parmi ceux-ci, on note un manque de densification de la production commerciale, des difficultés dans la prise de rendez-vous, ainsi qu’un manque de développement de son portefeuille clients.

Ces éléments ont été considérés comme des indicateurs d’insuffisance professionnelle, ce qui a conduit à des préoccupations quant à sa performance au sein de la société JCDecaux France.

Il est important de souligner que Mme [D] a contesté la signature de ces évaluations, mais a reconnu avoir eu connaissance de leur contenu.

Les évaluations étaient divisées en deux parties : l’une pour l’entretien d’évaluation et l’autre pour l’entretien professionnel, ce dernier n’ayant pas été communiqué à Mme [D].

Comment Mme [D] a-t-elle justifié son insuffisance de performance ?

Mme [D] a attribué son insuffisance de performance à plusieurs facteurs, notamment le retrait de l’agence Planning, qui représentait une part significative de son chiffre d’affaires. Elle a soutenu que ce retrait a eu un impact direct sur sa capacité à atteindre les objectifs fixés.

En 2016, par exemple, elle n’a atteint que 74,8 % de son objectif commercial, tandis que ses collègues commerciaux grands comptes ont atteint 102 % de leurs objectifs.

Elle a également mentionné qu’un plan d’action avait été mis en place par JCDecaux France dès 2014 pour l’aider à devenir moins dépendante de l’agence Planning, mais elle a estimé que ce plan n’était pas suffisant pour compenser la perte de clients.

En outre, elle a fait valoir qu’elle avait réalisé des performances satisfaisantes dans le passé, atteignant 120 % de ses objectifs en 2015, ce qui démontre qu’elle pouvait réussir dans son rôle.

Quels éléments ont été présentés par la société JCDecaux pour justifier le licenciement de Mme [D] ?

La société JCDecaux a présenté plusieurs éléments pour justifier le licenciement de Mme [D] pour insuffisance professionnelle. Parmi ces éléments, on trouve des rapports d’évaluation qui soulignent des difficultés relationnelles avec les clients, une incapacité à développer son portefeuille, et un manque d’organisation.

JCDecaux a également mis en avant que les objectifs fixés étaient réalistes et que d’autres commerciaux avaient réussi à les dépasser. En 2019, par exemple, Mme [D] n’avait atteint que 87 % de son objectif, alors que d’autres commerciaux avaient réalisé 100 % de leurs objectifs.

De plus, la société a souligné que des plans d’action avaient été mis en œuvre pour soutenir Mme [D] dans son activité, mais qu’elle n’avait pas su en tirer parti.

Enfin, JCDecaux a fait état de mécontentements récurrents de clients, notamment de l’agence Planning, qui avaient conduit à des décisions de retrait de certains comptes de son portefeuille.

Quelles conséquences le licenciement a-t-il eu sur la santé de Mme [D] ?

Le licenciement de Mme [D] a eu des conséquences significatives sur sa santé mentale et physique. Elle a signalé avoir subi des arrêts de travail et a été prise en charge médicalement pour des consultations en psychologie du travail.

Les arrêts de travail qu’elle a subis, notamment en 2015, 2016 et 2017, ont été attribués à une souffrance psychologique liée à ses conditions de travail.

Mme [D] a également mentionné que les agissements de son employeur, qu’elle a qualifiés de harcèlement moral, ont contribué à sa détérioration de santé.

Cependant, la société JCDecaux a contesté le lien entre son état de santé et les conditions de travail, arguant que les certificats médicaux ne prouvaient pas ce lien.

Quelles décisions ont été prises par la cour d’appel concernant le licenciement et l’exécution déloyale du contrat de travail ?

La cour d’appel a confirmé le jugement initial concernant le licenciement de Mme [D], considérant qu’il reposait sur une cause réelle et sérieuse. Elle a noté que les éléments présentés par JCDecaux justifiaient le licenciement pour insuffisance professionnelle.

Cependant, la cour a également reconnu que Mme [D] avait été victime d’exécution déloyale de son contrat de travail. Elle a condamné la société JCDecaux à verser à Mme [D] une somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour cette exécution déloyale.

En outre, la cour a ordonné à JCDecaux de payer 2 000 euros au titre des frais engagés par Mme [D] en première instance et en appel, en raison de la décision infirmée qui avait initialement condamné Mme [D] à payer 100 euros à la société.

Ces décisions illustrent un équilibre entre la reconnaissance des manquements de Mme [D] et les obligations de l’employeur envers son salarié.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon