Création de sa propre société par un salarié

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Création de sa propre société par un salarié

Preuve d’une activité concurrente effective

Le seul enregistrement au RCS de la société d’un salarié (gérant minoritaire) concurrente à celle de son employeur n’emporte pas ipso facto violation de son obligation de loyauté.  L’employeur doit établir que l’activité commerciale du salarié était effective et réelle.  Le licenciement d’un salarié pour manquement à son obligation de loyauté, à la suite de la découverte par l’employeur de la création d’une société concurrente, en violation de la clause d’exclusivité liant les parties, a été jugé comme abusif.

Obligation de loyauté du salarié

Il ressortait de la lettre de licenciement que l’employeur reprochait à son salarié un manquement à son obligation de loyauté en raison de la création par lui d’une société concurrente pendant qu’il était en arrêt maladie, en violation de la clause d’exclusivité insérée au contrat de travail. L’employeur avait produit les statuts de la société du salarié dans laquelle il détenait 49 % du capital social et dont l’activité était concurrente à celle de l’employeur ( Conseils, ventes de logiciel et de matériel, maintenance, développement applicatif, installation, formation et plus généralement toutes opérations industrielles, commerciales, mobilières ou immobilières se rapportant directement ou indirectement à l’objet similaires ou connexes »).

Toutefois, l’employeur ne produisait aucun élément justifiant d’une activité de la société,  préalablement au licenciement du salarié. Le premier bilan d’exercice de la société n’a pas suffi à établir l’existence d’une activité économique (pas de chiffre d’affaires).

Modèle de clause de loyauté

A toutes fins utiles, la clause suivante pourra être stipulée au contrat de travail du salarié :

« Le salarié s’engage à consacrer d’une manière exclusive et constante toute son activité professionnelle à la société. L’exercice de toute autre activité professionnelle, quelle qu’en soit la nature, soit pour son propre compte soit pour le compte de tiers lui est interdit sauf autorisation expresse de la société. Pour cette raison, le salarié, en signant le présent contrat, prend le double engagement formel de : i) de réserver l’exclusivité de ses services à la société, ii) traiter lui-même les travaux qui lui sont confiés sans les sous-traiter et sans recourir à une assistance extérieure qui ne serait pas agréée par la société. En outre, le salarié déclare ne détenir, au jour de la signature des présentes, directement, indirectement ou par personne interposée, aucun intérêt ou participation dans des entreprises concurrentes ou susceptibles de concurrencer la société ».

Notion de faute grave

Pour rappel, la faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée du préavis. L’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

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Questions / Réponses juridiques

Qu’est-ce que la mise en relation électronique entre employeurs et salariés ?

La mise en relation électronique entre employeurs et salariés fait référence à l’utilisation de plateformes numériques qui facilitent le contact entre les travailleurs et les entreprises à la recherche de services.

Ces plateformes peuvent prendre différentes formes, allant de simples sites d’annonces d’emploi à des agences d’intérim ou des prestataires techniques.

La légalité de ces plateformes a été confirmée par des décisions judiciaires, notamment dans le cas de la société Brigad, qui a été examinée par les juges.

Quelle est l’activité de la société Brigad ?

La société Brigad se spécialise dans l’exploitation d’une plateforme numérique qui met en relation des travailleurs indépendants, appelés « extras », avec des entreprises du secteur de la restauration.

Les indépendants s’inscrivent gratuitement sur la plateforme, à condition de prouver leur expérience dans le domaine de l’hôtellerie et leur immatriculation au Registre du commerce et des sociétés.

Brigad ne rémunère pas directement ces travailleurs, mais facilite leur mise en relation avec des employeurs ayant des besoins spécifiques.

Quels sont les enjeux juridiques liés à la plateforme Brigad ?

Les enjeux juridiques autour de Brigad concernent la qualification de son activité.

Certains ont tenté de la qualifier d’agence d’intérim, ce qui aurait impliqué des obligations légales spécifiques.

Cependant, les juges ont statué que Brigad n’exerce pas cette activité, car les travailleurs inscrits sont des indépendants et non des salariés, ce qui dissipe les accusations d’exercice illégal de la profession d’agence d’intérim.

Comment la loi encadre-t-elle les plateformes de mise en relation ?

La loi du 8 août 2016 a introduit un cadre juridique pour les plateformes de mise en relation électronique, en créant un nouveau titre dans le code du travail.

Ce cadre vise à définir la responsabilité sociale des plateformes et à établir des conditions d’exercice pour les travailleurs indépendants utilisant ces services.

L’article L. 8221-6 du code du travail précise que les travailleurs indépendants ne sont pas présumés liés par un contrat de travail avec le donneur d’ordre, sauf si des conditions de subordination sont établies.

Qu’est-ce que le trouble manifestement illicite dans ce contexte ?

Le trouble manifestement illicite se réfère à une perturbation qui constitue une violation évidente de la loi.

Dans le cas de Brigad, les juges n’ont pas retenu l’argument selon lequel la plateforme causait un trouble aux agences d’intérim autorisées.

Le président du tribunal de commerce a la capacité de prescrire des mesures conservatoires pour prévenir un dommage imminent, mais dans ce cas, aucune violation manifeste n’a été identifiée.

Quels sont les critères pour établir un lien de subordination ?

Un lien de subordination juridique permanente est établi lorsque les travailleurs fournissent des prestations dans des conditions qui les placent sous l’autorité d’un donneur d’ordre.

Cela signifie que si un travailleur indépendant est soumis à des directives et un contrôle constant de la part de l’employeur, cela pourrait indiquer une relation de travail salarié.

Cependant, dans le cas de Brigad, les juges ont déterminé que les travailleurs étaient indépendants, ce qui exclut la possibilité d’un lien de subordination.


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