Jurisprudence SciottoLa musique adoucit les mœurs, le droit du travail pourrait les durcir. Le monde de la musique classique semblait relativement épargné par la question de l’abus de CDD d’usage. La CJUE est venue rappeler par son arrêt Sciotto (C-331/17, 25/10/2018), que les travailleurs du secteur d’activité des fondations lyriques et symphoniques ne peuvent pas être exclus de la protection contre l’abus des contrats de travail à durée déterminée. Selon la CJUE, une danseuse de ballet (de la Fondazione Teatro dell’Opera di Roma), recrutée en vertu de plusieurs contrats à durée déterminée, est fondée à demander une requalification de ses CDD d’usage en un CDI sans que puisse lui être opposé une réglementation nationale spécifique applicable aux fondations lyriques et symphoniques excluant l’application du droit commun du travail. Accord-cadre du 18 mars 1999En effet, l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999 (annexé à la directive 1999/70/UE du 28 juin 1999) s’oppose à une telle réglementation nationale, lorsqu’il n’existe dans l’État membre aucune autre sanction effective des abus constatés dans ce secteur. L’accord-cadre prévoit des mesures minimales destinées à éviter la précarisation des salariés ; il impose aux États membres de prévoir au moins l’une des mesures suivantes : i) indication des raisons objectives justifiant le renouvellement des contrats ou bien ii) détermination de la durée maximale totale des contrats ou iii) du nombre de renouvellements de ceux-ci. Par ailleurs, afin de garantir la pleine efficacité de l’accord-cadre, une mesure de sanction doit être appliquée en cas d’usage abusif de contrats à durée déterminée successifs. Cette mesure doit être proportionnée, effective et dissuasive. Les États membres doivent ainsi adopter au moins l’une des mesures préventives prévues par l’accord-cadre , tout en disposant, à cet égard, d’une marge d’appréciation et de la faculté de tenir compte des besoins particuliers de secteurs d’activités spécifiques et/ou de certaines catégories de travailleurs. Législation italienne non conformeLa réglementation italienne dans le secteur d’activité des fondations lyriques et symphoniques ne prévoit aucune limite visée dans l’accord-cadre quant à la durée maximale totale de ces contrats ou au nombre de renouvellements de ceux-ci. En outre, il ne paraît pas non plus que le recours à des contrats de travail à durée déterminée successifs dans ce secteur soit justifié par une raison objective. Le caractère public des fondations lyriques et symphoniques est sans incidence sur la protection des travailleurs au titre de l’accord-cadre, puisque celui-ci est applicable à l’ensemble des travailleurs, quelle que soit la qualité, publique ou privée, de l’employeur. Le fait que l’Italie ait traditionnellement utilisé des contrats à durée déterminée dans le secteur spécifique ne dispense pas cet État du respect des obligations découlant de l’accord-cadre. Il n’existe pas de raison pour laquelle les objectifs de développement de la culture italienne et de sauvegarde du patrimoine historique et artistique italien exigeraient que les employeurs du secteur culturel et artistique engagent du personnel à durée déterminée. En l’espèce, la danseuse semblait avoir été engagée, durant plusieurs années, pour accomplir des tâches toujours similaires et donc pour des nécessités de la programmation usuelle (ce que les juges nationaux devront vérifier). L’accord-cadre n’établit pas une obligation générale des États membres de prévoir la transformation en un contrat à durée indéterminée, toutefois, lorsque la réglementation nationale interdit ce type de sanction dans un secteur spécifique (en l’espèce, celui des fondations lyriques et symphoniques), il faut qu’il y ait, dans ce même secteur, une autre mesure effective pour éviter et, le cas échéant, sanctionner l’utilisation abusive de contrats à durée déterminée successifs. |
→ Questions / Réponses juridiques
Quel est le statut social actuel des directeurs de collection vis-à-vis de l’AGESSA ?Le statut social des directeurs de collection est actuellement en suspens. En effet, la position de l’AGESSA a été mise en pause suite à un référé devant le Conseil d’État, introduit par le Syndicat national de l’édition (SNE). Cette situation crée une incertitude quant à la reconnaissance des directeurs de collection en tant qu’auteurs au sens de l’AGESSA, ce qui pourrait avoir des implications significatives sur leur statut professionnel et leurs droits sociaux. Quelles modifications ont été apportées par l’AGESSA en mai 2017 ?En mai 2017, l’AGESSA a modifié la fiche pratique relative à la « branche des écrivains » sur son site internet. Cette fiche précise les personnes et les activités qui relèvent du régime de sécurité sociale des artistes auteurs. Auparavant, il était possible pour les directeurs de collection d’être affiliés sous certaines conditions, mais la nouvelle version exclut désormais ces directeurs de ce régime, sauf s’ils sont également auteurs d’œuvres littéraires ou dramatiques. Cette exclusion de principe a des conséquences importantes sur les contrats entre éditeurs et directeurs de collection, entraînant des difficultés administratives et juridiques. Quelles sont les conséquences de la nouvelle règle de l’AGESSA ?La nouvelle règle de l’AGESSA impose une exclusion de principe des directeurs de collection du régime de sécurité sociale, sauf pour ceux qui sont également auteurs. Cela signifie que les directeurs de collection ne bénéficieront plus des protections sociales accordées aux artistes auteurs. Cette situation pourrait entraîner une révision des contrats existants entre éditeurs et directeurs de collection, ainsi que des complications administratives et financières pour les éditeurs. De plus, l’entrée en vigueur de cette règle pourrait avoir des effets immédiats, voire rétroactifs, en raison du décalage entre la conclusion des contrats et le versement des droits d’auteur. Quels auteurs sont concernés par l’article L. 382-1 du code de la sécurité sociale ?L’article L. 382-1 du code de la sécurité sociale stipule que les artistes auteurs d’œuvres littéraires et dramatiques sont affiliés obligatoirement au régime général de sécurité sociale. Cela inclut les auteurs de livres, brochures, traductions, adaptations, illustrations, et œuvres dramatiques. Ces auteurs bénéficient des mêmes prestations familiales que les salariés, ce qui souligne l’importance de leur statut au sein du régime de sécurité sociale. Les directeurs de collection, en revanche, ne sont pas inclus dans cette affiliation, sauf s’ils remplissent les conditions d’être également auteurs d’œuvres littéraires ou dramatiques. Quelles sont les préoccupations concernant la légalité de l’acte de l’AGESSA ?Il existe des préoccupations quant à la légalité de l’acte de l’AGESSA, notamment en ce qui concerne la compétence des ministres impliqués dans la prise de cette décision. Le fait que la ministre des solidarités, le ministre de l’action et des comptes publics, et la ministre de la culture n’étaient pas compétents pour prendre cet acte soulève des doutes sérieux sur la légalité de la « lettre » de l’AGESSA du 19 avril 2018. Cette incertitude juridique pourrait avoir des répercussions sur l’application de la nouvelle règle et sur les droits des directeurs de collection. |
Laisser un commentaire