Résiliation de bail et conséquences financières : enjeux et procédures en matière locative

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Résiliation de bail et conséquences financières : enjeux et procédures en matière locative

Constitution du bail

Par acte sous seing privé du 7 mai 2022, M. [C] [O] a consenti un bail d’habitation à M. [I] [L] pour des locaux situés à [Adresse 2] [Localité 4], avec un loyer mensuel de 550 euros et une provision pour charges de 15 euros.

Commandement de payer

Le 22 mars 2024, M. [C] [O] a délivré un commandement de payer à M. [I] [L], lui enjoignant de régler un arriéré locatif de 7 005 euros dans un délai de six semaines, en se référant à une clause résolutoire.

Information des autorités

La commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de M. [I] [L] le 26 mars 2024.

Assignation en justice

Le 3 juin 2024, M. [C] [O] a assigné M. [I] [L] devant le juge des contentieux de la protection pour faire constater la résiliation du bail, demander son expulsion et obtenir le paiement de diverses sommes, dont 565 euros d’indemnité mensuelle d’occupation et 8 135 euros d’arriéré locatif.

Audience et demandes des parties

Lors de l’audience du 15 octobre 2024, M. [C] [O] a confirmé qu’aucun paiement intégral du loyer n’avait été effectué avant l’audience, tandis que M. [I] [L] a demandé des délais de paiement, reconnaissant ses difficultés financières et son arriéré locatif.

Recevabilité de la demande

M. [C] [O] a justifié la recevabilité de sa demande en ayant notifié l’assignation au représentant de l’État plus de six semaines avant l’audience et en ayant saisi la commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives deux mois avant l’assignation.

Résiliation du bail

Le juge a constaté que le commandement de payer n’avait pas été suivi de paiement dans le délai imparti, entraînant la résiliation du bail depuis le 3 mai 2024, et a ordonné l’expulsion de M. [I] [L] et de tous occupants.

Dette locative et délais de paiement

M. [I] [L] a été condamné à payer 8 135 euros à M. [C] [O] pour l’arriéré locatif, le juge ayant débouté sa demande de délais de paiement en raison de l’absence de reprise des paiements de loyer.

Indemnité d’occupation

Une indemnité d’occupation de 565 euros par mois a été fixée, payable à partir du 3 mai 2024 jusqu’à la libération des lieux.

Frais de justice et exécution provisoire

M. [I] [L] a été condamné aux dépens de la procédure, tandis que le juge a décidé que l’ordonnance serait exécutoire de droit à titre provisoire, sans indemnité supplémentaire pour M. [I] [L] en raison de sa situation économique.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

5 novembre 2024
Tribunal judiciaire d’Avignon
RG n°
24/00395
COUR D’APPEL DE NÎMES
TRIBUNAL JUDICIAIRE D’AVIGNON

N° RG 24/00395 – N° Portalis DB3F-W-B7I-JYHJ

Minute N° : 24/00417
Procédure civile de droit commun
ORDONNANCE DE REFERE
Code de procédure Civile art.454

DU 05 Novembre 2024

Dossier + Copie + Copie exécutoire délivrés à :M.[O]
Copie délivrée à :M.[L]-PREFECTURE
le :05/11/2024

DEMANDEUR

Monsieur [C] [O]
[Adresse 3]
[Localité 1]
comparant

DÉFENDEUR :

Monsieur [I] [L]
[Adresse 2]
[Localité 4]
comparant

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Madame Isabelle DUMAS, Vice-Président,

assisté de Madame Béatrice OGIER, Greffier

DÉBATS :

Après avoir entendu à l’audience du 15 Octobre 2024 les parties comparantes ou leurs conseils, le président les a informés que l’affaire était mise en délibéré et que l’ordonnance serait rendue ce jour, par mise à disposition au greffe.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 7 mai 2022, M. [C] [O] a consenti un bail d’habitation à M. [I] [L] portant sur des locaux situés [Adresse 2] [Localité 4], moyennant le paiement d’un loyer mensuel de 550 euros et d’une provision pour charges de 15 euros.

Par acte de commissaire de justice du 22 mars 2024, le bailleur a fait délivrer au locataire un commandement de payer dans un délai de six semaines la somme principale de 7 005 euros au titre de l’arriéré locatif dû au 19 mars 2024, en visant une clause résolutoire.

La commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de M. [I] [L] le 26 mars 2024.

Faisant valoir que des loyers restés impayés, par acte du 3 juin 2024, M. [C] [O] a fait assigner M. [I] [L] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d’Avignon statuant en référé pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire, être autorisé à faire procéder à l’expulsion de M. [I] [L] et obtenir sa condamnation au paiement des sommes suivantes :

−565 euros au titre de l’indemnité mensuelle d’occupation d’un montant égal à celui du loyer et des charges, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à libération des lieux,
−8 135 euros à titre de provision sur l’arriéré locatif comprenant l’échéance de mai 2024, avec intérêts au taux légal,
−500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens qui comprendront le coût du commandement de payer.

L’assignation a été notifiée au représentant de l’État dans le département le 5 juin 2024, et un diagnostic social et financier a été réalisé. Ses conclusions ont été reçues au greffe avant l’audience, à laquelle il en a été donné lecture.

À l’audience du 15 octobre 2024 à laquelle l’affaire a été évoquée, M. [C] [O] sollicite le bénéfice de son acte introductif d’instance. Il précise qu’il n’y a pas eu de reprise du paiement intégral du loyer courant avant l’audience, au sens de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, et indique que la dette actualisée s’élève à la somme de 10 950 euros. Il s’oppose à l’octroi de délais de paiement.

M. [I] [L], comparant en personne, sollicite des délais de paiement sur la base de mensualités de 120 euros. Il reconnaît n’avoir pas repris le paiement du loyer courant et devoir l’arriéré locatif. Il expose qu’il a rencontré des difficultés financières après la perte de son emploi et qu’il a dû rembourser des dettes contractées par son fils. Il ajoute qu’il a retrouvé un emploi en qualité de conducteur de machine le 1er mars 2024 dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée.

Il n’a pas été fait état de l’existence d’une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation concernant M. [I] [L].

À l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré jusqu’à ce jour, où elle a été mise à disposition des parties au greffe.

MOTIVATION

1. Sur la demande de constat de la résiliation du bail

1.1. Sur la recevabilité de la demande

M. [C] [O] justifie avoir notifié l’assignation au représentant de l’État dans le département plus de six semaines avant l’audience.

Il justifie également avoir saisi la commission de coordination des actions prévention des expulsions locatives deux mois au moins avant la délivrance de l’assignation.

Son action est donc recevable au regard des dispositions de l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.

1.2. Sur la résiliation du bail

Aux termes de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 modifié par la loi du 27 juillet 2023, tout contrat de bail d’habitation contient une clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie. Cette clause ne produit effet que six semaines après un commandement de payer demeuré infructueux.

En l’espèce, un commandement de payer reproduisant textuellement les dispositions légales et la clause résolutoire contenue dans le contrat de bail a été signifié au locataire le 22 mars 2024. Or, d’après l’historique des versements, la somme de 7 005 euros n’a pas été réglée par ce dernier dans le délai de six semaines suivant la signification de ce commandement et aucun plan d’apurement n’a été conclu dans ce délai entre les parties.

Le bailleur est donc bien fondé à se prévaloir des effets de la clause résolutoire, dont les conditions sont réunies depuis le 3 mai 2024.

Il convient, en conséquence, d’ordonner au locataire ainsi qu’à tous les occupants de son chef de quitter les lieux, et, pour le cas où les lieux ne seraient pas libérés spontanément, d’autoriser M. [C] [O] à faire procéder à l’expulsion de toute personne y subsistant.

Cependant, dès lors qu’aucune circonstance ne justifie la réduction du délai prévu à l’article L.412-1 du code des procédures civiles d’exécution, il convient de rappeler que l’expulsion ne pourra avoir lieu qu’à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance au locataire d’un commandement de quitter les lieux.

2. Sur la dette locative et les délais de paiement

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des contentieux de la protection saisi en référé peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En l’espèce, M. [C] [O] verse aux débats un décompte démontrant qu’à la date du 3 mai 2024, M. [I] [L] lui devait la somme de 8 135 euros, comprenant l’échéance de mai 2024.

M. [I] [L] n’apportant aucun élément de nature à remettre en cause ce montant, il sera condamné à payer cette somme au bailleur, à titre de provision, avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation valant mise en demeure pour la totalité de la somme réclamée.

Selon l’article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d’office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu’il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l’audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l’article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative.

Lorsque le juge est saisi en ce sens par le bailleur ou par le locataire, et à la condition que celui-ci ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l’audience, les effets de la clause de résiliation de plein droit peuvent être suspendus pendant le cours des délais ainsi accordés par le juge.

En l’espèce, il ressort des éléments du dossier, et notamment des explications données à l’audience, que les loyers ne sont plus payés depuis le mois d’août 2023.

Le paiement des loyers courants n’étant pas repris et le défendeur ne paraissant manifestement pas en état de solder la dette dès lors qu’aucun versement n’a été effectué depuis le 7 juillet 2023, il convient de débouter M. [I] [L] de sa demande de délais de paiement.

3. Sur l’indemnité d’occupation

En cas de maintien dans les lieux du locataire ou de toute personne de son chef malgré la résiliation du bail, une indemnité d’occupation sera due. Au regard du montant actuel du loyer et des charges, son montant sera provisoirement fixé à la somme mensuelle de 565 euros.

L’indemnité d’occupation est payable et révisable dans les mêmes conditions que l’étaient le loyer et les charges, à partir du 3 mai 2024, et ne cessera d’être due qu’à la libération effective des locaux avec remise des clés à M. [C] [O] ou à son mandataire.

4. Sur les frais du procès et l’exécution provisoire

Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité et de la situation économique de la partie condamnée.

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, M. [I] [L], qui succombe à la cause, sera condamné aux dépens de la présente instance qui comprendront le coût du commandement de payer.

En revanche, compte tenu de sa situation économique, il n’y a pas lieu de le condamner à une quelconque indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Selon l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement. Selon le dernier alinéa de l’article 514-1 du même code, le juge ne peut toutefois pas écarter l’exécution provisoire de droit lorsqu’il statue en référé. La présente ordonnance sera donc assortie de l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS,

Le juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

CONSTATE que la dette locative visée dans le commandement de payer du 22 mars 2024 n’a pas été réglée dans le délai de six semaines,

CONSTATE, en conséquence, que le contrat conclu le 7 mai 2022 entre M. [C] [O], d’une part, et M. [I] [L], d’autre part, concernant les locaux situés au [Adresse 2] [Localité 4] est résilié depuis le 3 mai 2024,

DIT n’y avoir lieu d’octroyer des délais de paiement à M. [I] [L],

ORDONNE à M. [I] [L] de libérer de sa personne, de ses biens, ainsi que de tous occupants de son chef, les lieux situés au [Adresse 2] [Localité 4] ainsi que, le cas échéant, tous les lieux loués accessoirement au logement,

DIT qu’à défaut de libération volontaire, il pourra être procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef avec l’assistance de la force publique,

DIT que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d’exécution,

RAPPELLE que l’expulsion ne pourra avoir lieu qu’hors période hivernale et à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la délivrance d’un commandement d’avoir à libérer les lieux,

CONDAMNE M. [I] [L] au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle égale au loyer et aux charges qui auraient été dus en cas de poursuite du bail, soit 565 euros par mois,

DIT que cette indemnité d’occupation, qui se substitue au loyer dès le 3 mai 2024, est payable dans les mêmes conditions que l’étaient le loyer et les charges, jusqu’à libération effective des lieux et remise des clés au bailleur ou à son mandataire,

CONDAMNE M. [I] [L] à payer à M. [C] [O] la somme de 8 135 euros à titre de provision sur l’arriéré locatif comprenant l’échéance du mois de mai 2024, avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation,

RAPPELLE que la présente ordonnance est exécutoire de droit à titre provisoire,

DÉBOUTE M. [C] [O] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [I] [L] aux dépens comprenant notamment le coût du commandement de payer du 22 mars 2024 et celui de l’assignation du 3 juin 2024.

Ainsi jugé par mise à disposition au greffe le 5 novembre 2024, et signé par le juge et la greffière susnommés.

Le Greffier Le Juge


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