COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Rétention Administrative
CHAMBRE 1-11 RA
ORDONNANCE
DU 09 JUIN 2023
N° 2023/825
Rôle N° RG 23/00825 – N° Portalis DBVB-V-B7H-BLNKO
Copie conforme
délivrée le 09 Juin 2023 par courriel à :
-l’avocat
-le préfet
-le CRA
-le JLD/TJ
-le retenu
-le MP
Signature,
le greffier
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 08 Juin 2023.
APPELANT
Monsieur [S] [X]
né le 10 août 2004 à [Localité 1] (ALGERIE)
de nationalité algérienne
comparant en personne, assisté de Me Maeva LAURENS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, avocat choisi et de Mme [U] [N] (Interprète en langue arabe) en vertu d’un pouvoir général inscrit sur la liste des experts de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, par téléphone en raison de l’impossibilité d’assisté M. [X] en présentiel
INTIME
Monsieur le préfet des BOUCHES DU RHONE
représenté par Mme [B] [T]
MINISTÈRE PUBLIC :
Avisé et non représenté
DEBATS
L’affaire a été débattue en audience publique le 09 Juin 2023 devant Madame Catherine LEROI, Conseillère à la cour d’appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Mme Elodie BAYLE, Greffière,
ORDONNANCE
Contradictoire,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 09 Juin 2023 à 18h40,
Signée par Madame Catherine LEROI, Conseillère et Mme Elodie BAYLE, Greffière,
PROCÉDURE ET MOYENS
Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) ;
Vu l’arrêté portant obligation de quitter le territoire national pris le 05 novembre 2022 par le préfet des BOUCHES DU RHONE , notifié le 06 novembre 2022 à 14h10 ;
Vu la décision de placement en rétention prise le 09 avril 2023 par le préfet des BOUCHES DU RHONE notifiée le même jour à 12h50;
Vu l’ordonnance du 08 juin 2023 rendue par le Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE décidant le maintien de Monsieur [S] [X] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire ;
Vu l’appel interjeté le 09 juin 2023 par Monsieur [S] [X] ;
Monsieur [S] [X] a comparu et a été entendu en ses explications ; il déclare :
‘Après le 2 juin, le laissez-passer était mort. Je souhaite quitter le territoire directement pour aller en Hollande.’
Son avocat a été régulièrement entendu ; se référant à l’acte d’appel, il soulève l’irrecevabilité de la demande préfectorale en troisième prolongation de la rétention, à défaut d’avoir renseigné le registre en mentionnant le rejet de la demande d’asile de M. [X].
Il soutient par ailleurs que les conditions d’une troisième prolongation de la rétention ne sont pas satisfaites en ce que le laissez-passer délivré par l’Algérie n’était plus valable pour prendre le vol prévu le 2 juin 2023 et qu’en outre M. [X] avait fait une demande d’asile, ce qui ne permettait pas de l’éloigner et qu’il ne peut donc lui être reproché d’avoir refusé son éloignement. Il ajoute que la préfecture n’a pas réalisé les diligences nécessaires à l’éloignement de M. [X] le 2 juin, ce qui a pour effet de prolonger la rétention.
Il sollicite en conséquence la mise en liberté de M. [X]. Il précise que la mention de la notification de la décision de maintien en rétention ne figurait pas sur les pièces ayant saisi le juge des libertés et de la détention qui lui ont été transmises en première instance et que la pièce produite à ce sujet par le représentant de la préfecture doit être écartée des débats.
Le représentant de la préfecture sollicite la confirmation de la décision déférée. Il fait valoir qu’il n’existe pas de case ‘résultat’ à la demande d’asile du retenu sur le registre tenu au centre de rétention, que ces renseignements figurent au contraire sur le fichier LOGICRA et qu’en outre, la décision d’irrecevabilité de sa demande a été notifiée à l’intéressé .
Il précise que M. [X] a indiqué avoir le droit de refuser le vol ‘car c’était la première fois’, qu’un nouveau laissez-passer aurait été demandé mais ne l’a pas été du fait du refus de départ du retenu.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La recevabilité de l’appel contre l’ordonnance du juge des libertés et de la détention n’est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d’irrégularité.
Sur la recevabilité de la requête préfectorale en prolongation de la rétention :
Aux termes de l’article R. 743-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, à peine d’irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l’étranger ou son représentant ou par l’autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention.
Lorsque la requête est formée par l’autorité administrative, elle est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l’article L. 744-2.
Cet article dispose qu’il est tenu, dans tous les lieux de rétention, un registre mentionnant l’état civil des personnes retenues, ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien en rétention. Le registre mentionne également l’état civil des enfants mineurs accompagnant ces personnes ainsi que les conditions de leur accueil. L’autorité administrative tient à la disposition des personnes qui en font la demande les éléments d’information concernant les date et heure du début du placement de chaque étranger en rétention, le lieu exact de celle-ci ainsi que les date et heure des décisions de prolongation.
En application de l’article 2 de l’arrêté du 6 mars 2018 portant autorisation du registre de rétention prévu à l’article L. 553-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et d’un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « logiciel de gestion individualisée des centres de rétention administrative » (LOGICRA), le registre et le traitement mentionnés à l’article 1er enregistrent des données à caractère personnel et informations, figurant en annexe du présent arrêté, et relatives :
– à l’étranger placé en rétention administrative et, le cas échéant, aux enfants mineurs l’accompagnant ;
– à la procédure administrative de placement en rétention administrative ;
– aux procédures juridictionnelles mises en ‘uvre au cours de la rétention ;
– à la fin de la rétention et à l’éloignement.
Il résulte de l’étude du dossier remis par le greffe du juge des libertés et de la détention de Marseille qu’était annexée à la requête préfectorale une copie actualisée du registre tenu au centre de rétention de Marseille faisant état d’une demande d’asile faite le 19 mai 2023 à 16h15 et d’un arrêté préfectoral de maintien en rétention notifié à l’intéressé le 24 mai 2023 à 14 heures. Si la procédure met en évidence que la demande d’asile de M. [X] a été déclarée irrecevable par décision notifiée à l’intéressé le 30 mai 2023 à 17h06, l’absence de mention de cette décision récente sur la copie du registre annexée à la requête préfectorale du 7 juin 2023 laquelle n’est pas prévue sur le formulaire tenu au centre de rétention , n’est pas de nature à porter atteinte aux droits de M. [X] parfaitement informé de sa situation, conformément aux dispositions de l’artiche L 743-12 du CESEDA.
Dès lors, la requête préfectorale en troisième prolongation de la rétention apparaît recevable.
Sur son bien-fondé :
L’article L 742-5 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile dispose qu’avant l’expiration de la durée maximale de rétention prévue aux troisième et quatrième alinéas, le juge compétent peut, à titre exceptionnel, être à nouveau saisi lorsque, dans les quinze derniers jours, l’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la mesure d’éloignement ou présenté, dans le seul but de faire échec à la mesure d’éloignement, une demande de protection contre l’éloignement au titre du 9° de l’article L 611-3 ou du 5° de l’article L631-3 ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L 754-1 et L 754-3 ou lorsque le mesure d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai. L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge des libertés et de la détention ait statué. Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.
Il est constant que l’éloignement de M. [X] était programmé pour le 2 juin 2023 et que l’intéressé a refusé le 2 juin 2023 à 8 heures de sortir de sa chambre disant qu’il ne voulait pas partir en Algérie car il avait le droit de refuser parce que c’était la première fois.
M. [X] prétend que le laissez-passer délivré par l’Algérie le 30 mai 2023 ayant une durée de validité de 15 jours ne permettait plus son départ le 2 juin 2023, ce qui est contredit par la position de l’administration préfectorale ; en fait, si ce laissez-passer porte la mention ‘ valable pour un seul voyage limité à 15 jours’, il indique aussi qu’il devient sans valeur un mois après le jour de sa délivrance dans la mention figurant en bas de page, ce qui est contradictoire; en l’état, il n’est pas démontré que le départ de M. [X] n’était plus possible du fait de l’expiration du laissez passer algérien, le rejet de sa demande d’asile lui ayant par ailleurs été notifié le 30 mai 2023.
Dès lors, l’existence d’une obstruction commise par M. [X] dans les 15 derniers jours est caractérisée.
Par ailleurs, aucun défaut de diligence préfectorales n’est démontré, le caractère caduc du laissez-passer délivré par l’Algérie n’étant pas établi et la préfecture ayant sollicité un nouveau routing pour un départ ultérieur.
Les conditions d’une troisième prolongation de la rétention étant satisfaites, la décision déférée sera confirmée.
PAR CES MOTIFS,
Statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,
Confirmons l’ordonnance du Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE en date du 08 Juin 2023.
Les parties sont avisées qu’elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d’Etat ou de la Cour de cassation.
Le greffier, Le président,
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