COUR D’APPEL DE BORDEAUX
QUATRIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 12 JUIN 2023
N° RG 21/05188 – N° Portalis DBVJ-V-B7F-MKBC
S.A.S. JDC
c/
S.A.R.L. [Adresse 2]
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 15 juillet 2021 (R.G. 2020F00260) par le Tribunal de Commerce de BORDEAUX suivant déclaration d’appel du 16 septembre 2021
APPELANTE :
S.A.S. JDC, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis,[Adresse 1]S/ FRANCE
représentée par Maître Océanne AUFFRET DE PEYRELONGUE de la SELARL AUFFRET DE PEYRELONGUE, avocat au barreau de BORDEAUX et assistée par Maître Romain TRESSERRES, avocat au barreau de PARIS, substituant Maître Olivier DESCAMPS, avocat au barreau des HAUTS DE SEINE
INTIMÉE :
S.A.R.L. [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège sis, [Adresse 2]
représentée par Maître Augustin DE GROMARD, avocat au barreau de BORDEAUX et assistée par Maître Jean Eloi de BRUNHOFF, avocat au barreau de NANTES
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 03 mai 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller chargé du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président,
Madame Marie GOUMILLOUX, Conseiller,
Madame Sophie MASSON, Conseiller,
Greffier lors des débats : Monsieur Hervé GOUDOT
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
EXPOSE DU LITIGE
Par contrat du 24 mai 2018, la société De [Adresse 2] a acquis auprès de la société JDC, des balances informatisées, connectées et gérées via un logiciel de caisse pour un montant de 18 017,04 euros. Le contrat portait la mention suivante ‘développement de la tare en automatique et manuel, en prix net sur la ligne de l’article afin de conserver des quantitées vendues sur les produits et statistiques. Une seule ligne sur le ticket de caisse contenant compris’ suivie de l’ajout manuscrit suivant ‘condition indispensable pour honorer le contrat’.
Le matériel a été installé les 20 et 21 novembre 2018.
Par mails du 22 février 2019, du 9 mars 2019 et du 19 mars 2019, la société De [Adresse 2] a informé à la société JDC de difficultés concernant la prise en compte de la tare.
Par courrier du 22 mars 2019, la société De [Adresse 2] a mis en demeure la société JDC de rémédier au problème affectant la prise en compte de la tare par le logiciel vendu.
Par acte d’huissier de justice du 25 février 2020, la société De [Adresse 2] a assigné la société JDC devant le tribunal de commerce de Bordeaux aux fins d’obtenir la résolution judiciaire du contrat du 24 mai 2018, sa condamnation au paiement de la somme de 15 014,20 euros HT au titre de la restitution du prix de vente et de la somme de 5000 euros à titre de de dommages et intérêts.
Par jugement contradictoire du 15 juillet 2021, le tribunal de commerce de Bordeaux a :
– prononcé la résolution du contrat du 24 mai 2018 entre les parties,
– débouté la société JDC de toutes ses demandes,
– condamné la société JDC à verser à la société De [Adresse 2] la somme de 15 014,20 euros HT,
– condamné la société De [Adresse 2] à restituer le matériel à la société JDC en tout lieu désigné par cette dernière sous astreinte de 30 euros par jour de retard à compter du 15ème jour de délai suivant la signification du présent jugement,
– condamné la société JDC à verser à la société De [Adresse 2] la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts,
– condamné la société JDC à verser à la société De [Adresse 2] la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que l’exécution provisoire est de droit,
– condamné la société JDC aux entiers dépens.
Par déclaration du 16 septembre 2021, la société JDC a interjeté appel de cette décision, énonçant les chefs de la décision expressément critiqués, intimant la société De [Adresse 2].
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par dernières écritures notifiées par RPVA le 05 novembre 2021, auxquelles la cour se réfère expressément, la société JDC, demande à la cour de :
– vus les articles 1355, 1353 et 1104 du code civil,
– vues les pièces versées aux débats,
– juger que la société De [Adresse 2] ne prouve pas ses allégations,
– juger qu’elle a parfaitement rempli ses obligations contractuelles,
– juger que la société De [Adresse 2] reconnait ne pas vouloir régler sa facture n°950003333,
– juger que la société De [Adresse 2] a manqué à son obligation de bonne foi,
– juger que la société De [Adresse 2] a commis des mauvaises manipulations à l’origine des dysfonctionnements allégués,
– en conséquence, statuant à nouveau,
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a condamné à régler la somme de 15 014,20 euros HT,
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a condamné à régler la somme de 2 500 euros,
– débouter la société De [Adresse 2] de ses demandes, fins et prétentions,
– condamner la société De [Adresse 2] à lui régler la somme de 1 757,76 euros TTC,
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société De [Adresse 2] à restituer le matériel, sous astreinte de 30 euros par jour de retard,
– condamner la société De [Adresse 2] à lui payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
– condamner la société De [Adresse 2] à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société De [Adresse 2] aux entiers dépens de la présente instance.
Par dernières écritures notifiées par RPVA le 03 février 2022, auxquelles la cour se réfère expressément, la société De [Adresse 2], demande à la cour de :
– vu les articles 1103, 1104, 1224 et suivants, 1231 et suivants du code civil,
– infirmer le jugement du tribunal de commerce en ce qu’il a limité à 2 500 euros la somme qui lui était due par la société JDC,
– condamner la société JDC à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts,
– confirmer intégralement le jugement pour le surplus,
– y ajoutant,
– condamner la société JDC à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société défenderesse aux entiers dépens de l’instance.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 19 avril 2023 et le dossier a été fixé à l’audience du 03 mai 2023.
Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.
MOTIFS DE LA DECISION
1- L’appelante soutient que le matériel livré est conforme à la commande, ce qui est attesté par le bon d’intervention sans réserve signé par la cliente lors de l’installation de celui-ci et le fait que les premières réclamations ne sont intervenues que plusieurs mois après la livraison. Elle fait valoir que le contrat comportait une clause stipulant que les caractéristiques du produit n’étaient pas contractuelles et étaient susceptibles de changement en fonction des approvisionnements et des choix de JDC.
Elle affirme que la société intimée a souhaité une amélioration du logiciel qui est à l’origine de la suppression de la mention des produits sur une seule ligne. Elle fait valoir qu’elle a dû développer un produit sur mesure pour satisfaire sa cliente.
2- L’intimée soutient que le développement d’une tare en automatique et en manuel en prix net sur la ligne de l’article en une seule ligne était une condition déterminante du contrat qui n’a pas été respectée; qu’elle s’est plainte d’un dysfonctionnement dès décembre 2018; que les difficultés rencontrées ne proviennent ni d’une mauvaise manipulation de sa part ni d’une demande d’amélioration du logiciel; que la société JDC a reconnu sa responsabilité.
3- La mention ‘une seule ligne sur le ticket de caisse contenant compris’, mention manuscrite acceptée par la société JDC est une condition essentielle du contrat, qui ne peut être contredite par la clause du contrat autorisant les modifications des caractéristiques du produit vendu. Il appartenait donc à la société JDC de livrer à sa cliente un logiciel permettant cette fonctionnalité.
4- La société De [Adresse 2] a signé lors de la livraison du produit deux bons d’intervention sans émettre aucune réserve. Ce bon ne mentionne cependant pas que la cliente atteste de la conformité du matériel livré.
5- Il ressort en outre des pièces produites que le dysfontionnement du système de prise en charge de la tare n’est apparu qu’avec l’utilisation du matériel .
6- En effet, il est indiqué :
– dans le mail du 22 février 2019 de la société De [Adresse 2]’
‘programme de tare. Comme je vous l’ai expliqué auparavant, cela marche très bien, cependant il faudrait vraiment que nous puissons vérifier les tares mises sur chaque produit au fur et à mesure, pour l’instant la tare ne s’affiche que quelques secondes, si nous sommes distraits par un client nous n’avons pas le temps de vérifier et lorsque nous faisons le sous toial il est impossible de savoir sur quel produit les tares ont été déduites…Et même si nous constatons une erreur à ce moment, il est impossible de la modifier!!Les tares n’apparaissent qu’une fois que le ticket est imprimé , il est alors trop tard pour le modifier et cela créé beaucoup trop de perte de temps en caisse’.
– dans les mails du 9 mars 2019 et 19 mars 2019 de la société De [Adresse 2]
‘cette tare n’est en fait pas reliée à l’article mais à la ligne’ et que la suppression d’un article ‘remonte’ tous les articles mais pas la ligne de tare qui se trouve affectée au mauvais article et ‘ la solution proposée est d’avoir deux lignes, une avec le poids brut et la seconde avec la tare et donc le prix en négatif, soit la version proposée au départ que nous avions refusée’.
– dans le mail de JDC du 9 avril 2019 qu’il appartenait à la société De [Adresse 2] de supprimer la tare lorsqu’elle supprimait un article; que la nouvelle version permet une suppression automatique mais implique un produit sur deux lignes ‘ en effet, Kezia n’étant pas à l’origine de la lecture de la balance ( sinon il serait certifié comme tel en métrologie) nous sommes contraints de conserver la ligne de pesée et nous ne pouvons qu’ajouter une ligne permettant la soustraction. Il est possible qu’un logiciel possédant une certification métrologique puisse se passer de cette seconde ligne mais dans notre cas c’est contraire à la loi’.
7- Il ressort de ces éléments, et des autres mails de la société De [Adresse 2] faisant état d’autres difficultés affectant le logiciel, que la version initiale ne permettait pas un usage aisé compatible avec le temps passé par les clients en caisse et que la version corrigée ne permettait pas l’affichage de l’article sur une seule ligne comme la société JDC s’y était engagée contractuellement.
8- Il apparaît ainsi, que si la société JDC a bien tenté de remédier aux insuffisances du logiciel initial afin de répondre aux attentes de sa cliente, elle n’est pas parvenue dans un délai raisonnable à remédier aux difficultés rencontrées par celle-ci en lui livrant un produit strictement conforme aux stipulations contractuelles.
9 – La décision de première instance sera donc confirmée en ce qu’elle a prononcé la résiliation du contrat de vente. Il sera précisé que la société De [Adresse 2] justifie avoir restitué le matériel.
10- La décision de première instance sera également confirmée sur le principe et le montant des dommages et intérêts alloués, la société De [Adresse 2] justifiant de son préjudice résultant de la faute de l’appelante mais pas dans les proportions sollicitées dans le cadre de cet appel.
11- La société JDC sollicite le paiement d’une facture de maintenance du 4 novembre 2019. Le tribunal de commerce a omis de statuer sur ce chef de demande.
12- La société De [Adresse 2] soutient que la société JDC a accordé un avoir au titre de cette facture.
13- Il ressort du recto de la facture litigieuse ( pièce 8 de l’appelante) que celle-ci a effectivement accordé un avoir du montant de cette facture à sa cliente. Sa demande en paiement sera de ce fait rejetée.
14- La société JDC sera condamnée aux dépens de cette procédure d’appel.
15- Elle sera condamnée à verser la somme de 2500 euros à la société De [Adresse 2] au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour
statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort,
Confirme la décision du tribunal de commerce de Bordeaux du 15 juillet 2021,
y ajoutant,
Déboute la société JDC de sa demande en paiement de sa facture n°950003333,
Condamne la société JDC aux dépens d’appel,
Condamne la société JDC à verser la somme de 2500 euros à la société De [Adresse 2] au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par M. Franco, président, et par M. Goudot, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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