Droit du logiciel : 15 juin 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 21/01636

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Droit du logiciel : 15 juin 2023 Cour d’appel de Poitiers RG n° 21/01636

PC/PR

ARRET N° 376

N° RG 21/01636

N° Portalis DBV5-V-B7F-GI5B

[Z]

C/

S.A.S. LAZZARA

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

Chambre Sociale

ARRÊT DU 15 JUIN 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 mai 2021 rendu par le Conseil de Prud’hommes de [Localité 5]

APPELANTE :

Madame [G] [Z]

née le 12 février 1995 à [Localité 3] (29)

[Adresse 2]

[Localité 5]

Ayant pour avocat Me Alexandra DUPUY de la SELARL DUPUY ALEXANDRA, avocat au barreau de [Localité 5]-ROCHEFORT

INTIMÉE :

S.A.S. LAZZARA

N° SIRET : 403 733 967

[Adresse 1]

[Localité 5]

Ayant pour avocat Me Emmanuelle MONTERAGIONI-LAMBERT de la SCP ELIGE LA ROCHELLE-ROCHEFORT, avocat au barreau de [Localité 5]-ROCHEFORT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 907 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 avril 2023, en audience publique, devant :

Monsieur Patrick CASTAGNÉ, Président

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Monsieur Patrick CASTAGNÉ, Président

Madame Marie-Hélène DIXIMIER, Présidente

Madame Valérie COLLET, Conseillère

GREFFIER, lors des débats : Madame Patricia RIVIERE

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile que l’arrêt serait rendu le 1er juin 2023. A cette date le délibéré a été prorogé au 8 juin 2023, puis au 15 juin 2023.

– Signé par Monsieur Patrick CASTAGNÉ, Président, et par Madame Patricia RIVIERE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Selon contrat de professionnalisation du 12 mars 2018, à effet du 8 mars 2018 et échéance du 31 août 2019, Mme [G] [Z] a été engagée en qualité de vendeuse conseil par la S.A.S. Lazzara, exploitant divers magasins de vente de vêtements sur la région de [Localité 5], sur la base d’une durée de travail hebdomadaire de 35 heures et d’une rémunération de 1 198,78 € brut par mois.

Exposant avoir pris acte de la rupture de son contrat de travail le 5 juillet 2019, Mme [Z] a, par requête reçue le 10 juillet 2020, saisi le conseil de prud’hommes de [Localité 5] d’une action tendant à voir juger que sa prise d’acte de la rupture doit produire les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement de diverses indemnités et rappels de rémunération (indemnité de licenciement, indemnités de préavis et congés payés sur préavis, dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la rupture, indemnité de requalification du contrat en contrat à durée indéterminée, rappel de salaire, indemnité pour rétention abusive de rémunération, indemnité pour travail dissimulé, indemnité pour exécution déloyale du contrat de travail, indemnité pour violation de la vie privée).

Par jugement du 17 mai 2021, le conseil de prud’hommes de [Localité 5] a débouté Mme [Z] de l’ensemble de ses demandes, débouté la S.A.S. Lazzara de l’ensemble de ses demandes et condamné Mme [Z] aux dépens.

Mme [Z] a interjeté appel de cette décision selon déclaration transmise au greffe de la cour le 25 mai 2021.

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du magistrat de la mise en état en date du 7 mars 2023.

Au terme de ses dernières conclusions remises et notifiées le 18 août 2021, auxquelles il convient à ce stade de se référer pour l’exposé détaillé des éléments de droit et de fait, Mme [Z] demande à la cour, infirmant le jugement entrepris :

– de requalifier son contrat en contrat à durée indéterminée et de condamner la société Lazzara à lui verser un mois de salaire, soit 1521,25€,

– de condamner la société Lazzara à lui verser la somme de 4 514 € au titre de rappel de salaires bruts outre 451,40 € au titre des congés payés afférents et la somme de 2 000 € à titre de dommages-intérêts pour la rétention abusive de la rémunération,

– de condamner la société Lazzara à lui verser la somme de 10 000 € de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la situation de harcèlement moral dont elle a été victime, caractérisant une violation des obligations de loyauté et de sécurité de l’employeur,

– de condamner la société Lazzara à lui verser une somme de 2 000€ à titre de dommages-intérêts pour violation de sa vie privée dans le cadre judiciaire,

– de juger que la prise d’acte de la rupture du 5 juillet 2019 produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et nul et, subsidiairement, que la rupture du contrat de travail du 22 juillet 2019 n’a pas été consentie par elle et produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et nul,

– de condamner en conséquence la société Lazzara à lui verser les sommes de 571,97 € au titre de l’indemnité de licenciement, 1 521,25 € au titre de l’indemnité de préavis outre 152,12 € au titre des congés payés afférents, 9 127,50 € au titre des dommages et intérêts en réparation des préjudices subis du fait de la rupture de son contrat de travail,

– de constater l’existence d’une situation de travail dissimulé et de condamner la société Lazzara à lui verser une indemnité équivalente à six mois de salaire soit 9 127,50 €,

– de condamner la société Lazzara à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du CPC pour la procédure de première instance, outre 3 000 € en cause d’appel,

– de condamner la société Lazzara aux entiers dépens ainsi qu’aux frais d’exécution de la décision à intervenir,

– d’assortir l’ensemble des condamnations des intérêts de droit à compter du jour de la demande.

Au terme de ses conclusions remises et notifiées le 17 novembre 2021, auxquelles il convient également de se référer pour l’exposé détaillé des éléments de droit et de fait, la S.A.S. Lazzara demande à la cour de confirmer le jugement entrepris et de condamner Mme [Z] à lui payer la somme de 2 000 € en application de l’article 700 du C.P.C., outre les entiers dépens.

MOTIFS

I – Sur les demandes relatives à l’exécution du contrat :

1 – Sur la demande tendant à la requalification du contrat de professionnalisation en contrat à durée indéterminée :

Au visa des articles L.1242-3 et L.6325-3 du code du travail, Mme [Z] expose :

– qu’elle n’a bénéficié d’aucune formation dispensée par son employeur durant la période d’exécution du contrat du 8 mars 2018 au 31 août 2019, exerçant pleinement et sans soutien ni accompagnement le métier de vendeuse, se trouvant fréquemment seule au magasin ainsi qu’en attestent les pièces versées aux débats (SMS adressés à son référent et demandes en rapport avec sa formation) nonobstant les attestations non probantes de salariés sous la contrainte d’un lien de subordination,

– que la formation externe ne se substitue pas à la formation interne,

– que le contrat de professionnalisation s’est trouvé privé d’objet et doit être requalifié en contrat à durée indéterminée.

Au soutien de sa demande, elle produit:

– le contrat de professionnalisation stipulant que l’employeur s’engage à assurer au titulaire du contrat une formation lui permettant d’acquérir une qualification professionnelle et à lui fournir un emploi en relation avec cet objectif pendant la durée du contrat à durée déterminée,

– deux SMS (pièce 12) ainsi rédigés : ‘Je voudrais savoir s’il était possible de m’entretenir avec vous (ou marie selon vos dispos) concernant mon projet d’étude. De se voir avec mon projet et mon ordinateur car j’ai des questions afin d’avoir le plus d’informations et de compléter ce que j’ai déjà fais. Cela peut prendre un peu de temps donc soit sur mon temps de travail et sur mon temps d’école. Dites moi si cela est jouable ou si je dois plutôt voir cela avec [I] ‘(31 janvier 2019, 11h48), ‘je vous envoie plusieurs questions auxquelles nous pourrons discuter demain pour l’école: quel est votre taux de démarque inconnue ‘ Pourquoi introduire golden goose enfant uniquement sur l’île  » (13h54).

La S.A.S. Lazzara conclut au débouté de Mme [Z] en soutenant:

– que Mme [Z] a bénéficié d’une formation effectuée par un organisme de formation pour 830 heures ainsi que d’une formation en interne lorsqu’elle se trouvait au magasin,

– qu’elle bénéficiait d’un tuteur dans l’entreprise dont l’intervention récurrente auprès de Mme [Z], qui n’a jamais été laissée seule pour gérer la boutique, est établie par diverses pièces

– que le tutorat n’implique pas nécessairement une présence constante aux côtés du stagiaire qui peut être autonome,

– s’agissant des SMS produits, que ceux-ci n’appelaient pas de réponse sous la même forme mais une explication en présentiel, que l’absence de réponse ne signifie donc pas qu’il n’y a pas été donné suite, ce que confirme l’absence de relance de la part de Mme [Z].

A l’appui de ses prétentions, elle produit :

– trois attestations de salariés (Mme [P], Mme [S], M. [J], pièces 5 à 7), indiquant en substance que Mme [Z] n’a jamais travaillé seule dans les boutiques, M. [J] précisant qu’il l’a toujours encadrée en lui montrant et expliquant les rudiments du métier,

– quatre fiches bimestrielles de liaison avec l’organisme de formation (pièce 8) indiquant les points travaillés avec Mme [Z] (septembre-octobre 2018: vente: conseils, création détaxe, management: réorganisation PPV/réserves, gestion; réception nouvelle co., novembre-décembre 2018: mise en place info sur les ventes de Noël, création vitrine de noël; mise en avant produits pour les fêtes, janvier-février 2019: soldes, organisation PPV, inventaire, étiquetage nouvelle collection, mise en rayon nouvelle co., mars-avril 2019: organisation PDV, arranger la réserve, réassort, faire les prix, réaliser une facture),

– des plannings informatiques reconstitués intitulés ‘plannings de présence Lazzara’ édités en novembre 2020 précisant l’affectation quotidienne des salariés dans les divers établissements de vente sur la durée d’exécution du contrat (pièces 13 à 29) desquels il résulte que, quel que soit l’établissement concerné ([Localité 5] ou [Localité 6]) Mme [Z] a toujours été affectée en doublon avec un autre salarié.

Sur ce,

Il doit être ici rappelé:

– que le contrat de professionnalisation associe des enseignements généraux, professionnels et technologiques dispensés dans des organismes publics ou privés de formation ou, lorsqu’elle dispose d’un service de formation, par l’entreprise, et l’acquisition d’un savoir-faire par l’exercice en entreprise d’une ou plusieurs activités professionnelles en relation avec les qualifications recherchées (article L.6325-2 du code du travail),

– que l’employeur s’engage à assurer une formation au salarié lui permettant d’acquérir une qualification professionnelle et à lui fournir un emploi en relation avec cet objectif pendant la durée du contrat à durée déterminée ou de l’action de professionnalisation du contrat à durée indéterminée (article L.6325-3 du code du travail),

– que l’employeur désigne, pour chaque salarié en contrat de professionnalisation, un tuteur chargé de l’accompagner. Un décret fixe les conditions de cette désignation ainsi que les missions et les conditions d’exercice de la fonction de tuteur (article L.6325-3-1 du code du travail).

L’examen des pièces versées aux débats établit que la S.A.S. Lazarra a rempli les obligations lui incombant en matière de formation ‘en interne’ en confiant à Mme [Z] des tâches (dont les attestations, fiches de liaison avec l’organisme de formation et plannings précités établissent qu’elles n’étaient pas exercées de manière isolée, sans contrôle ni accompagnement) en lien direct avec la formation suivie, la société Lazzara soutenant exactement que les SMS envoyés par Mme [Z] n’appelaient pas de réponse sous la même forme, que l’absence de réponse ne signifie donc pas qu’il n’y a pas été donné suite, ce que confirme l’absence de relance de la part de celle-ci.

Mme [Z] sera en conséquence déboutée de sa demande de requalification du contrat de professionnalisation en contrat à durée indéterminée pour manquement de l’employeur à son obligation de formation.

2 – Sur la demande en paiement de rappel de salaire et la demande subséquente en dommages-intérêts pour rétention abusive de rémunération :

Après rappel du droit positif, Mme [Z] expose :

– que le contrat de travail prévoit qu’elle est embauchée pour une durée hebdomadaire de travail de 35 heures moyennant un salaire brut de 1 198,78 € par mois,

– qu’elle n’a jamais été payée sur une base de 151,67 heures équivalente à un temps plein mais sur une base de 121,34 heures, sans explication,

– que le salaire versé au titre des 121,34 heures ne correspond pas au salaire contractuel puisqu’il s’agit d’une somme de 1 198,80 € puis de 1 217,04 € rémunérant un temps de travail inférieur à celui prévu au contrat,

– qu’il ne peut être sérieusement soutenu qu’il s’agit d’une simple erreur de présentation des bulletins de salaire qui aurait perduré,

– que la société Lazzara demeure débitrice du reliquat du temps de travail non rémunéré et non déclaré , soit 30,33 heures par mois, soit 4 514 € brut outre 451,40 € brut au titre des congés payés y afférents,

– que cette rétention de rémunération lui a causé un préjudice particulier au regard de la précarité de sa situation.

La S.A.S. Lazzara conclut au débouté de Mme [Z] en soutenant :

– que Mme [Z] a été rémunérée davantage que ce qui était prévu au contrat (1 217,04 € brut au lieu de 1 198,78 € brut) et ne peut prétendre qu’elle aurait dû être rémunérée à hauteur de 1 521,25 € brut en retenant un taux horaire de 10,03 € brut (division entre la rémunération et le nombre d’heures renseigné sur les bulletins de paie),

– que Mme [Z] travaillait effectivement à temps plein lorsqu’elle était dans l’entreprise,

– que cependant, s’agissant d’un contrat de professionnalisation, au regard de son âge et de la formation suivie, l’employeur ne la rémunérait qu’à concurrence de 80 % du SMIC, raison pour laquelle figure sur les bulletins de salaire, jusqu’en décembre 2018, la mention ‘salaire de base 80 %’

– qu’elle a modifié la présentation des bulletins de paie en suite du passage à la retenue à la source, sans modification de la base de calcul,

– qu’elle aurait pu faire apparaître une durée de travail de 151,67 heures ce qui aurait conduit à diminuer le taux horaire à 8,02 € brut au lieu de 10,03 € mais que le logiciel informatique ne le permettait pas dans la mesure où le taux horaire se trouvait alors être inférieur au SMIC,

– qu’elle ne pouvait dès lors agir que sur le temps de travail pour parvenir à la bonne rémunération.

Sur ce,

Mme [Z] sera déboutée de sa demande en rappel de rémunération et de sa demande indemnitaire subséquente, étant constaté que le taux horaire tel que pouvant être calculé sur la base des énonciations du contrat de travail, soit 7,90 € brut, correspond à 80 % du taux horaire du SMIC en vigueur au 1er janvier 1998 (9,88 € brut) soit la rémunération minimale majorée applicable compte-tenu de son âge (23 ans révolus à la date de signature du contrat) et de son niveau de qualification avant le contrat (cf. pièce 10 de l’intimée, extrait du site travail-emploi.gouv.fr, afférent à la rémunération des bénéficiaires de contrats de professionnalisation).

3 – sur la demande indemnitaire au titre d’une situation de travail dissimulé :

Dès lors que Mme [Z] a été ci-dessus déboutée de sa demande en rappel de rémunération, elle sera également déboutée de sa demande indemnitaire subséquente fondée sur les dispositions de l’article L.8223-1 du code du travail, aucune situation de travail dissimulé ni a fortiori aucune intention de l’employeur à se soustraire à ses obligations déclaratives en la matière n’étant caractérisées.

4 – Sur la demande indemnitaire pour harcèlement moral et manquement de l’employeur à ses obligations de sécurité et de loyauté :

Il doit être rappelé :

– qu’aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (article L.1152-1 du code du travail),

– que le harcèlement moral est constitué, indépendamment de l’intention de son auteur, dès lors que sont caractérisés des agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d’altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel,

– que le harcèlement moral est caractérisé par la constatation de ses conséquences telles que légalement définies, peu important l’intention (malveillante ou non) de son auteur,

– que le régime probatoire du harcèlement moral est posé par l’article L.1154-1 du code du travail qui prévoit que dès lors que le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement,

– que le salarié n’est tenu que d’apporter au juge des éléments permettant de supposer l’existence d’un harcèlement moral et qu’il ne supporte pas la charge de la preuve de celui-ci,

– que le juge doit examiner la matérialité des faits allégués par le salarié en prenant en compte tous les éléments invoqués y compris les certificats médicaux, qualifier juridiquement ces éléments en faits susceptibles, dans leur ensemble, de faire présumer un harcèlement moral, examiner les éléments de preuve produits par l’employeur pour déterminer si ses agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement et si ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement,

– que peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de management par un supérieur hiérarchique dès lors qu’elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Par ailleurs, il doit être indiqué, s’agissant des obligations de loyauté et de sécurité pesant sur l’employeur :

– que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi ce qui implique une exécution loyale de ses obligations par chacune des parties (article L.1222-1 du code du travail),

– qu’en application de l’article L.4121-1 du code du travail, l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs et qu’il lui est interdit de prendre des mesures qui auraient pour objet ou pour effet de compromettre la santé et la sécurité des salariés,

– que l’obligation de prévention qui résulte des articles L.4121-1 et L.4121-2 du code du travail est distincte de la prohibition des agissements de harcèlement moral et de discrimination instituée par les articles L. 1152-1 et L.1132-1 du code du travail et qu’elle ne se confond pas avec elle.

En l’espèce, Mme [Z] soutient que la gérante de la société Lazarra s’est livrée à son égard à des agissements constituant à la fois des actes répétés constitutifs de harcèlement moral et des violations manifestes de ses obligations de loyauté et de sécurité, se matérialisant :

– par un harcèlement téléphonique protéiforme (SMS, appels, messages audio) désagréable voire violent et sans respect des temps de repos/congés/arrêts de travail,

– par une organisation du temps de travail chaotique, participant aux conditions anxiogènes s’agissant à la fois de son planning et de son lieu de travail (pas de communication de plannings, écrits ou électroniques, affectations entre les deux sites de vente ([Localité 5] et [Localité 4]) annoncées tardivement),

– des conséquences négatives sur son état de santé: malaise en se rendant sur son lieu de travail le 25 juillet 2018 ayant entraîné un arrêt de travail de plusieurs jours, divers arrêts de travail versés aux débats.

Elle expose qu’il s’agit d’un comportement inadmissible de la gérante de la société à son égard, qu’elle a subi un harcèlement manifeste tant sur la forme que sur le fond de la part d’un employeur qui organise le temps de travail de sa salariée au gré de ses besoins et envies sans tenir compte à aucun moment de sa disponibilité, de sa capacité à s’organiser et en ignorant sciemment sa vie personnelle et sa santé psychique et physique.

Elle expose par ailleurs qu’elle a été ainsi contrainte début juin 2019 de signaler la situation à l’organisme de formation qui lui a conseillé de procéder à une rupture d’un commun accord du contrat de professionnalisation dont l’employeur n’a pas respecté les termes prévoyant une fin de collaboration en juin 2019, recourant à ses services pour la saison estivale malgré ses engagements.

A l’appui de ses allégations, elle produit :

– divers échanges de SMS relatifs à son planning (pièces 3 et 4) reproduits en pages 17 à 22 de ses conclusions consistant en de multiples demandes de Mme [Z] relativement à ses affectations et son planning de travail (10, 19, 30, 31 décembre 2018 , 14, 15 février 2019, 19 avril 2019, 17, 19, 20, 22 mai 2018) en des notifications de changements d’affectation géographique ou temporelle (27 mars 2019, 17 avril 2019),

> échange des 14 et 15 février 2019: bonjour [G] rappelez-moi merci (17h57) Bonjour je sors de la danse je ne suis pas dispo pour appeler on avait convenu par SMS / Vous ne travaillez pas demain, je voulais vous l’expliquer si vous ne souhaitez pas répondre je vous l’expliquerai samedi / je suis dans un endroit très bruyant, je vais essayer de m’éloigner (20h02) Bonjour [G] du coup nous verrons demain le planning ensemble directement au téléphone cela sera plus simple. Aujourd’hui cette journée sera compensée, nous verrons plus tard 15/02/2018, 8h54)

> échange du 17 avril 2018, 20h08 Bonjour [G] à demain 10 heures.

Bonne soirée à [Localité 5] [Adresse 7] / Bonjour Ah pas sur l’Ile au final Vous faites bien de me le dire, c’est noté alors

> échange du 19 avril 19h39: Bonsoir je suis sur [Localité 5] demain ‘ / non, sur l’Ile, à demain

> un échange du 24 mai 2018: je n’avais pas mon téléphone, je travaille aujourd’hui’ / Je vous attends depuis hier, hier vous avez été absente sur [Localité 5] aujourd’hui vous êtes prévue sur l’île / il aurait fallu m’envoyer le planning de la semaine je pense le mercredi étant mon jour de repos / vous avez eu lundi / il aurait fallu le préciser qu’il était considéré comme jour de repos alors car il change toutes les semaines et je ne peux plus m’organiser

> échange du (dimanche) 3 juin 2018 Bonjour voici le planning Lundi après-midi, mardi, mercredi, vendredi, samedi (10h30) Bonjour j’ai des rendez-vous médicaux cet après-midi / donc demain toute la semaine avec nous (11h44) J’étais chez le médecin. A demain / Rappelez-moi (19h18) messagerie 20h03, messagerie 20h11, messagerie 20h32.

> message du 4 juin 2019, 7h01: eh bien bonjour [G] impossible de vous joindre hier, vous deviez m’appeler pour votre emploi du temps, du coup vous êtes sur l’Ile avec [R], donc appelez-la pour le trajet ou alors si vous préférez prenez le bus à tout à l’heure,

> échange de SMS du 25 juillet 2018 : Bonjour je suis au pont je viens de faire un malaise – On va m’emmener chez le médecin. J’ai dû m’arrêter au pont / Je constate encore votre retard encore ce jour 25072018 / Vous n’avez pas du recevoir je vais chez le médecin j’ai fait un malaise chez moi et et pont /

– samedi 15 juin 2018 (19h09) Bonjour [I] quel est mon planning svp ‘

– échanges de SMS du 3 août 2018: [G] vous êtes en repos ce vendredi et avec moi sur Ré à partir de samedi / Je me suis réveillée je et ok pour l’île… Je suis OK mais être prévenue à cette heure-là n’est pas possible. Je ne peux rien prévoir dans ce cas / Vous étiez à [Localité 5]. Il faut voir avec françois que vous avez vu ou m’appeler si vous avez un doute mon message a été envoyé hier du magasin quand j’ai fermé enfin bon repos à demain / Il m’a dit que vous m’appelleriez / La prochaine fois appelez-moi, vous savez que je travaille tard le soir sur l’île c’est plus simple soyons-le / Être prévenue à la dernière minute n’est pas possible et il me semble qu’on en a déjà parlé. [H] m’a dit que vous me tiendrez au courant car vous n’étiez pas dispo hier soir. Je ne vais pas vous appeler à 23 heures mon téléphone est éteint depuis longtemps, à demain / Moi au moins je préviens / A pas d’heure et je n’appelle pas cela prévenir mais plutôt mettre sur le fait accompli, ce n’est pas des choses qui se font / Bon arrêtons.

– des avis d’arrêt de travail délivrés les 25 mai 2018 (jusqu’au 26 mai 2018) 6 février 2019 (jusqu’au 8 février 2019) 24 avril 2019 (jusqu’au 26 avril 2019), 4 juillet 2019 (jusqu’au 21 juillet 2019)

– copie d’un courrier du 17 juillet 2019, intitulé ‘rupture d’un commune accord’ (postérieur à la notification de la prise d’acte de la rupture) ainsi rédigé: ‘je soussigné, [V] [H] directeur général de la S.A.S. Lazzara et [G] [Z], salarié alternant décidons suite à votre demande d’un commun accord de mettre un terme au contrat de professionnalisation qui nous lie depuis le 8 mars 2018. Cette rupture prendra effet le 22 juillet 2019 après votre arrêt-maladie’,

– un texte non daté (transmis par mail le 1er juillet 2019 à son conseil) de M. [U] [Z], son père, adressé à un destinataire non identifié (a priori le directeur général de la S.A.S. Lazzara) et auquel il n’est pas justifié de sa transmission effective dans lequel celui-ci développe divers griefs à l’encontre de l’employeur de sa fille,

– un échange de SMS (pièce 7) avec une référente de l’école ADC, non identifiée à l’exception du prénom ‘[A]’, datés du 4 juin 2019 (et non 2018 comme indiqué dans les conclusions de l’appelante) relativement aux modalités envisageables de rupture du contrat de professionnalisation.

Il doit être ici considéré :

– que l’échange de SMS avec une référente AFC, au demeurant non identifiée, est inopérant dans la démonstration de la matérialité même des faits de harcèlement allégués par Mme [Z], dès lors qu’il n’est pas établi, à la lecture de ces messages, que la personne avec laquelle les messages ont été échangés a été personnellement témoin de faits de harcèlement à l’encontre de l’intéressée,

– que de même est inopérant le courrier (courriel ‘) ni daté ni signé, établi au nom du père de Mme [Z], dont la transmission à son destinataire n’est pas établie et qui ne constitue en toute hypothèse qu’un témoignage indirect,

– que les SMS échangés entre Mme [Z] et son employeur révèlent des difficultés récurrentes (ayant affecté neuf des dix-sept mois d’exécution du contrat) quant à la détermination de son emploi du temps en termes de jours et de lieux de travail, laissant supposer la situation d’incertitude dénoncée par la salariée, constitutive d’une pression psychologique déstabilisante, ayant conduit à divers arrêts de travail (étant observé que l’intéressée ne se prévaut pas des arrêts de travail trouvant leur origine dans des activités étrangères à l’exécution du contrat de travail).

Il apparaît ainsi que les éléments produits par Mme [Z], pris dans leur ensemble, laissent supposer la situation de harcèlement moral dans les termes par elle invoqués, de sorte qu’il appartient à l’employeur de démontrer que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En réponse, la S.A.S. Lazzara soutient :

– que l’emploi du temps était dicté par l’organisme de formation (scolarité les lundis et mardis, planning AFC, pièce 11) et était ainsi arrêté: mercredi: magasin, jeudi: repos, vendredi-samedi: magasin,

– que les quelques demandes de changement de dernière minute qu’elle a pu adresser à Mme [Z] (et dont elle a respecté les refus opposés par celle-ci) étaient justifiées par des circonstances exceptionnelles (absences d’autres salariés),

– que le mode de communication par SMS a été exigé par Mme [Z] (cf. message du 14 février 2019 rappelant les règles de communication convenues entre les parties),

– que les SMS incriminés, espacés dans le temps, ne témoignent en eux-mêmes nullement d’un quelconque harcèlement, que si la gérante était parfois contrainte de tenter d’appeler Mme [Z] à plusieurs reprises, c’est parce que cette dernière se dispensait de la tenir informée de ses retards et absences ou parce qu’elle voulait discuter de son emploi du temps suite à des modifications nécessitées par ses absences, ce dont Mme [Z] ne se préoccupait pas ou à la dernière minute, (messages des 4 juin 2019 et 25 juillet 2018),

– qu’en réalité alors que Mme [Z] se trouvait à la boutique et pouvait dès lors vérifier son emploi du temps, elle se préoccupait en arrivant chez elle le soir, de son heure d’embauche du lendemain matin, qu’en réalité c’est elle qui ne se préoccupait pas de son emploi du temps et non la S.A.S. Lazzara qui ne le lui communiquait pas,

– que la ‘commande’ mentionnée dans le SMS du 6 décembre 2018 (pâte à fixe et fil portable avec prise) concernait simplement du matériel oublié dans un magasin à ramener sur un autre site dans le cadre de la préparation des vitrines de Noël et non dans une demande d’achat/courses dans l’intérêt personnel de la gérante,

– que Mme [Z] ne démontre pas davantage une altération de sa santé due exclusivement et directement à la relation de travail, les arrêts de travail versés aux débats ne comportant aucune précision et n’étant pas suffisants à eux seuls à le démontrer.

Il doit ici être considéré que :

– si le harcèlement moral ne peut être justifié par le comportement du salarié, quelque fautif qu’il soit, étant en outre observé qu’en l’espèce, aucune mesure disciplinaire n’a été notifiée à Mme [Z] pendant la durée d’exécution du contrat,

– l’employeur justifie objectivement, à l’examen des ‘dossiers mensuels’ (pièces 14 à 29) par lui produits, que les messages invoqués par Mme [Z] trouvent leur cause et leur nécessité dans des adaptations de planning à l’issue et/ou à l’occasion de périodes de congés ou d’arrêts-maladie de celle-ci et/ou d’absences imprévues de salariés,

– ils ne traduisent ainsi ni une désorganisation du service ni une utilisation de l’intéressée comme une variable d’ajustement la soumettant à l’arbitraire de l’employeur en termes de détermination de ses lieux et horaires de travail,

– l’employeur soutient, sans être objectivement démenti, que le message du 6 décembre 2018 est afférent non à des courses personnelles de la gérante mais à du matériel nécessaire à la préparation des vitrines de Noël.

Il en résulte que la situation de harcèlement moral invoquée par Mme [Z] n’est pas caractérisée, de sorte que le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il l’a déboutée de sa demande indemnitaire de ce chef.

S’agissant de la demande indemnitaire fondée sur de prétendus manquements de l’employeur à ses obligations de loyauté et de sécurité, aucun élément objectif et vérifiable ne caractérise de tels manquements, alors même que les griefs articulés par Mme [Z] dans sa lettre de ‘prise d’acte’ ne sont pas avérés.

II – Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de professionnalisation :

Mme [Z] expose que, contrainte par les circonstances et épuisée psychologiquement, elle a notifié à la S.A.S. sa décision de prendre acte de la rupture du contrat par une LRAR du 5 juillet 2019 ainsi motivée :

Cela fait des semaines pour ne pas dire des mois que je subis des conditions de travail devenues depuis longtemps intenables.

Mes plannings qui changent dans l’heure voire dans la minute.

Vos messages ininterrompus qui changent mes jours de repos ou mes jours travaillés dans la nuit qui précède.

La communication téléphonique incessante alors que je suis en repos, en vacances et même en arrêt maladie.

Vos menaces, vos agressions permanentes.

Déjà il y a quelque temps, je m’étais trouvée en état de choc de sorte que j’avais fait malaise sur un trajet pour venir au travail sur l'[Localité 4].

J’étais déjà épuisée et mon médecin m’avait alertée et arrêtée quelques jours.

Mais j’ai repris espérant toujours naïvement que la situation allait s’améliorer.

Elle ne s’est pas améliorée, au contraire elle empire.

Je n’en peux plus.

Mon médecin m’a encore arrêtée. Mon corps ne suit plus, mon esprit non plus.

C’est tellement vrai que je vous avais demandé à arrêter mon contrat avant la fin ce à quoi vous aviez donné votre accord au mois de mars.

Vous m’aviez dit que je sera arrêtée pour la fin du mois de juin et évidemment vous n’avez pas tenu vos engagements.

Je m’aperçois également à la lecture de mes bulletins de salaire que vous m’avez payée sur une base de temps partiel alors que j’ai toujours été engagée à temps plein.

Après calcul, vous me devez actuellement une somme de 4 563,14 € brut et les congés payés sur cette somme, soit 456,31 €.

Je vous remercie de bien vouloir me régler cette somme dès réception de la présente.

Je vous informe également qu’au regard de tout ce que je subis, de vos fautes incessantes et douloureuses pour moi, je mets un terme à mon contrat de travail à vos torts exclusifs…

Elle expose :

– que compte-tenu de la requalification du contrat en contrat à durée indéterminée elle a été contrainte de prendre acte de la rupture de son contrat le 5 juillet 2019,

– que si elle n’a pu retrouver l’accusé de réception de cette lettre, il est établi que l’employeur en a eu connaissance ainsi qu’il résulte de la preuve de dépôt de ladite lettre (pièce 14) et des échanges de SMS des 17 et 18 juillet 2019 avec M. [V], directeur de la société (pièce 12) :

> Bonjour j’ai rédigé votre rupture de contrat à votre demande d’un commun accord que vous devez signer, pouvez-vous passer demain matin 11 h rue St Yon ‘),

> Bien je vous en remercie. D’après mon courrier, mon contrat est rompu depuis le 9/07, à savoir dès la réception du courrier. Je ne suis pas sur place cette semaine, nous pouvons convenir d’une faute afin de récupérer les papiers Pôle Emploi ou me les envoyer si cela vous ai préférable,

> je vous envoie votre rupture par courrier. Elle prendra effet le 22 juillet après votre arrêt maladie. Je ferai suivre les documents assedic etc.. après

– qu’ainsi la société Lazzara connaissait l’existence de cette rupture et qu’elle y a acquiescé en prenant acte d’un prétendu accord sur une rupture du contrat déjà entérinée depuis plusieurs jours,

– qu’en toute hypothèse, s’il était considéré que la prise d’acte n’a pas été valablement réceptionnée par l’employeur, la rupture d’un commun accord dont se prévaut la société Lazzara s’avère abusive puisque manifestement unilatérale, étant constaté que le courrier adressée par la S.A.S. Lazzara le 17 juillet 2019 (pièce 9, ainsi rédigé: ‘Je soussigné [V] [H], directeur général et [G] [Z], salariée alternant, décidons suite à votre demande d’un commun accord de mettre un terme au contrat de professionnalisation qui nous lie depuis le 8 mars 2018. Cette rupture prendra effet le 22 juillet 2019 après votre arrêt maladie’) n’a jamais été signé et accepté par elle,

– qu’en effet sa décision de prendre acte de la rupture du contrat aux torts exclusifs de l’employeur n’est pas compatible avec la rupture postérieure du contrat d’un commun accord avec ce dernier,

– que dès lors la rupture unilatérale du contrat s’analyse en une rupture abusive et irrégulière en dehors de toute procédure et de toute motivation écrite.

La S.A.S. Lazzara conclut au débouté de Mme [Z] en soutenant:

– que Mme [Z] ne justifie pas de la réception effective de la lettre de notification de prise d’acte de la rupture datée du 5 juillet 2019,

– que dès lors, elle ne peut invoquer une prise d’acte alors qu’elle indique elle-même avoir sollicité une rupture d’un commun accord à laquelle l’employeur a consenti par courrier du 17 juillet 2019 (ainsi que mentionné dans l’attestation Pôle Emploi),

– que le contenu du SMS du 17 juillet 2019 ne peut suffire à établir la prise d’acte et sa réception par l’employeur (le courrier pouvant être afférent à une démission) et établit même son acceptation d’une rupture d’un commun accord.

Sur ce,

L’argumentation et les prétentions de Mme [Z] partent du postulat selon lequel le contrat de travail doit être requalifié en contrat à durée indéterminée.

Dès lors que Mme [Z] a été déboutée de sa demande de requalification, les règles relatives à la prise d’acte, mode de rupture spécifique au contrat à durée indéterminée, ne peuvent recevoir application et le litige relatif à l’imputabilité de la rupture du contrat et ses conséquences doit être examiné au regard des dispositions des articles L.1243-1 du code du travail (selon lesquelles, sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l’échéance du terme qu’en cas de faute grave, de force majeure ou d’inaptitude constatée par le médecin du travail) et L.1243-4 du code du travail (disposant que la rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée qui intervient à l’initiative de l’employeur, en dehors des cas de faute grave, de force majeure ou d’inaptitude constatée par le médecin du travail, ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d’un montant au moins égal aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat, sans préjudice de l’indemnité de fin de contrat prévue à l’article L.1243-8).

A cet égard, à défaut de preuve d’un accord, même tacite mais univoque des parties, sur la mise en oeuvre d’une rupture du contrat d’un commun accord, la ‘prise d’acte’ dont se prévaut Mme [Z] doit s’analyser en une démission, de sorte que la rupture du contrat lui est exclusivement imputable et qu’intervenue hors cadre fixé par l’article L.1243-1 du code du travail, elle ne lui ouvre droit à aucune des indemnités prévues en cas de rupture anticipée du contrat imputable à l’employeur.

Le jugement déféré sera en conséquence confirmé en ce qu’il a débouté Mme [Z] de ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail (indemnité de licenciement, indemnité de préavis et congés payés afférents, indemnité en réparation des préjudices subis du fait de la rupture du contrat de travail).

III – Sur la demande indemnitaire pour atteinte à la vie privée :

Mme [Z] sollicite de ce chef l’octroi d’une indemnité de 2 000 € en exposant :

– que, dans les 17 ‘dossiers mensuels’ versés aux débats par la société Lazzara, celle-ci commente d’une manière vexatoire voire diffamatoire des publications Facebook de Mme [Z] ou de son entourage (notamment de nombreuses photos),

– que cette violation injustifiée de sa vie privée ne répondant à aucune des problématiques soulevées lui cause un préjudice qu’il convient de réparer à hauteur de la somme susvisée.

La S.A.S. Lazzara conclut au débouté de Mme [Z] en exposant que les extraits litigieux sont visibles de tous et que c’est de manière libre et non déloyale qu’elle y a eu accès.

Sur ce,

Les pièces litigieuses consistent en diverses photographies dans lesquelles figure Mme [Z], extraites de pages du compte Facebook ‘[W] [O] [Z]’ dont l’accès n’est pas restreint.

Leur publication ne peut dès lors être constitutive d’une atteinte à l’intimité de la vie privée ni d’une preuve obtenue d’une manière illicite, étant par ailleurs constaté que Mme [Z] ne demande pas que ces pièces soient écartées des débats.

Mme [Z] sera en conséquence déboutée de ce chef de demande indemnitaire.

IV – Sur les demandes accessoires:

L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du C.P.C. en faveur de l’une quelconque des parties, s’agissant tant des frais irrépétibles exposés en première instance que de ceux exposés en cause d’appel.

Mme [Z] sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort

Vu le jugement du conseil de prud’hommes de [Localité 5] en date du 17 mai 2021

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant :

– Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du C.P.C. en faveur de l’une quelconque des parties en cause d’appel,

– Condamne Mme [Z] aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

 


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