Droit du logiciel : 6 juin 2023 Cour d’appel d’Agen RG n° 22/00166

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Droit du logiciel : 6 juin 2023 Cour d’appel d’Agen RG n° 22/00166

ARRÊT DU

06 JUIN 2023

NE/CO*

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N° RG 22/00166 –

N° Portalis DBVO-V-B7G-C7FF

———————–

[K] [Y]

C/

SA GROUPE [Localité 1]

———————–

Grosse délivrée

le :

à

ARRÊT n° 91 /2023

COUR D’APPEL D’AGEN

Chambre Sociale

Prononcé par mise à disposition au greffe de la cour d’appel d’Agen conformément au second alinéa des articles 450 et 453 du code de procédure civile le six juin deux mille vingt trois par Nelly EMIN, conseiller faisant fonction de président de chambre assistée de Chloé ORRIERE, greffier

La COUR d’APPEL D’AGEN, CHAMBRE SOCIALE, dans l’affaire

ENTRE :

[K] [Y]

né le 04 mai 1975 à [Localité 3]

demeurant [Adresse 2]

[Localité 1]

Représenté par Me Nathalie CLAIR, avocat inscrit au barreau de TOULOUSE

APPELANT d’un jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CAHORS en date du 01 février 2022 dans une affaire enregistrée au rôle sous le n° R.G. 20/00103

d’une part,

ET :

La SA GROUPE [Localité 1] prise en la personne de son représentant légl et ayant son siège social :

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Me Elodie DRIGO, avocat postulant inscrit au barreau d’AGEN et par Me Cyprien PIALOUX, avocat plaidant inscrit au barreau de PARIS

INTIMÉE

d’autre part,

A rendu l’arrêt contradictoire suivant après que la cause a été débattue et plaidée en audience publique le 2 mai 2023 sans opposition des parties devant Nelly EMIN, conseiller faisant fonction de président de chambre et Pascale FOUQUET, conseiller, assistés de Chloé ORRIERE, greffier. Les magistrats en ont, dans leur délibéré rendu compte à la cour composée, outre eux-mêmes, de Benjamin FAURE, conseiller, en application des dispositions des articles 945-1 et 805 du code de procédure civile et il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés, les parties ayant été avisées de la date à laquelle l’arrêt serait rendu.

* *

*

FAITS ET PROCÉDURE :

Par contrat du 18 février 2011, Monsieur [Y] a été embauché par la société GROUPE [Localité 1] afin d’occuper les fonctions de contrôleur de gestion selon un nombre annuel de jours de travail fixé à 218 jours par an.

Par avenant à effet au 1er juillet 2013, Monsieur [Y] a été promu au poste de Directeur de la Comptabilité de GROUPE [Localité 1].

Par un nouvel avenant à effet au 1er mars 2019, Monsieur [Y] s’est vu confier les fonctions de Directeur de la Comptabilité Groupe, statut cadre dirigeant. Sa rémunération était fixée à 7 000 € bruts par mois, outre une prime de 13ème mois et une prime dite ‘part variable’.

Par courrier du 10 juillet 2020, Monsieur [Y] a sollicité la conclusion d’une rupture conventionnelle de son contrat de travail avec GROUPE [Localité 1].

La convention de rupture a été signée le 15 juillet 2020, à effet du 30 septembre 2020.

Monsieur [Y] a saisi le conseil de prud’hommes de Cahors le 14 décembre 2020 de diverses demandes relatives à l’exécution du contrat de travail et à la nullité de la rupture conventionnelle.

Par jugement du 1er février 2022, le conseil de prud’hommes de Cahors a :

– dit et jugé que la convention de forfait jours est applicable à Monsieur [Y] ;

– dit et jugé que le statut de cadre dirigeant est opposable à Monsieur [Y] ;

– débouté Monsieur [Y] de ses demandes au titre de l’exécution de son contrat

de travail ;

– dit et jugé que la rupture conventionnelle homologuée conclue entre Monsieur [Y] et GROUPE [Localité 1] est valable ;

– débouté Monsieur [Y] de toutes ses demandes au titre de la nullité de la rupture conventionnelle homologuée de son contrat de travail ;

– débouté Monsieur [Y] de sa demande de paiement par le GROUPE [Localité 1] de la somme de 4000 euros sur le fondement de l’article 700 code de procédure civile ;

– débouté GROUPE [Localité 1] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et déloyale ;

– débouté la SA GROUPE [Localité 1] de sa demande de paiement par Monsieur [Y] de la somme de 4000 euros sur le fondement de l’article 700 code de procédure civile ;

– condamné Monsieur [Y] aux entiers dépens.

Par déclaration du 28 février 2022, Monsieur [Y] a formé appel du cette décision, visant les chefs de jugement expressément critiqués.

MOYENS ET PRÉTENTIONS :

M.[Y], dans ses derniers conclusions reçues au greffe le 1er février 2023, et auxquelles il est expressément renvoyé pour une parfaite connaissance de la motivation, demande à la cour de :

Infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :

– dit et jugé que la convention de forfait jours lui est applicable,

– dit et jugé que le statut de cadre dirigeant lui est opposable,

– l’a débouté de toutes ses demandes au titre de l’exécution de contrat de travail,

– dit et jugé que la rupture conventionnelle homologuée conclue entre lui et le GROUPE [Localité 1] est valable,

– l’a débouté de toutes ses demandes au titre de la nullité de la rupture conventionnelle homologuée de son contrat de travail,

– l’a débouté de sa demande de paiement par le GROUPE [Localité 1] de la somme de 4000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau :

Vu l’inopposabilité de la convention de forfait en jours,

Vu l’absence du statut de cadre dirigeant,

– condamner la Société GROUPE [Localité 1] à lui verser la somme de 7 849,74 € bruts au titre du rappel de salaire en raison d’heures supplémentaires pour l’année 2017, outre 784,97 € au titre de l’incidence congés payés sur le rappel précité ;

– condamner la Société GROUPE [Localité 1] à lui verser la somme de 46 950,97 € bruts au titre du rappel de salaire en raison d’heures supplémentaires pour l’année 2018, outre 4 695,09 € au titre de l’incidence congés payés sur le rappel précité ;

– condamner la Société GROUPE [Localité 1] à lui verser la somme de 86 993,85 € bruts au titre du rappel de salaire en raison d’heures supplémentaires pour l’année 2019, outre 8 699,38 € au titre de l’incidence congés payés sur le rappel précité ;

– condamner la Société GROUPE [Localité 1] à lui verser la somme de 20 464,57 € bruts au titre du rappel de salaire en raison d’heures supplémentaires pour l’année 2020, outre 2 046,45 € au titre de l’incidence congés payés sur le rappel précité ;

– condamner la Société GROUPE [Localité 1] à lui verser la somme de 25 428,22 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions relatives aux contreparties obligatoires en repos au titre de l’année 2018 ;

– condamner la Société GROUPE [Localité 1] à lui verser la somme de 51 010,06 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions relatives aux contreparties obligatoires en repos au titre de l’année 2019 ;

– condamner la Société GROUPE [Localité 1] à lui verser la somme de 5 325,71 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect des dispositions relatives aux contreparties obligatoires en repos au titre de l’année 2020 ;

– condamner la Société GROUPE [Localité 1] à lui verser à titre principal la somme de 82 484,94 € à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé ; et 59 219, 58 € à titre subsidiaire ;

– condamner la Société GROUPE [Localité 1] à lui verser la somme de 5 000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect des durées maximales de travail et des temps de repos ;

– condamner la Société GROUPE [Localité 1] à lui verser la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement de la Société à l’obligation de loyauté ;

– annuler la rupture conventionnelle de son contrat de travail à effet du 30 septembre 2020 ;

– condamner la Société GROUPE [Localité 1] à lui verser à titre principal la somme de 123 727,41 € au titre de la nullité de la rupture conventionnelle, et 80 000 € à titre subsidiaire ;

– condamner la Société GROUPE [Localité 1] à lui verser la somme de 41 242,47 € bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 4 124,24 € au titre des congés payés y afférents ; et 29 609,79 € à titre subsidiaire, outre 2 960,97 € au titre des congés payés y afférents ;

– rejeter l’exception d’irrecevabilité soulevée par la société GROUPE [Localité 1].

En conséquence,

– condamner la Société GROUPE [Localité 1] à la somme de 42 617,21 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement ; et à titre subsidiaire 23 522,27 € ;

– débouter la Société GROUPE [Localité 1] de sa demande reconventionnelle et subsidiaire de le voir condamné à lui rembourser l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle de 22 000 euros ;

Sur l’appel incident :

– confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :

– débouté la Société GROUPE [Localité 1] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et déloyale ;

– débouté la Société GROUPE [Localité 1] de sa demande de paiement de la somme de 4000 euros sur le fondement de l’art. 700 du code de procédure civile ;

En tout état de cause :

– rappeler que chacune des sommes allouées au salarié produira des intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil pour les sommes ayant le caractère de salaire et à compter de la décision à intervenir pour les autres sommes ;

– faire application de l’anatocisme ;

– condamner la société GROUPE [Localité 1] à lui verser la somme de 4000 € sur le

fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner la société GROUPE [Localité 1] aux entiers dépens en ce compris le remboursement d’émoluments et recouvrement résultant des dispositions de l’article A444-32 du code du commerce que le requérant serait amené à régler dans l’hypothèse d’un recours à l’exécution forcée de la décision à intervenir.

Au soutien de ses prétentions, il fait valoir notamment que :

– Sur l’exécution déloyale du contrat de travail

1- une absence de formalisation de l’évolution professionnelle convenue

– dès juillet 2018, alors que la société faisait déjà face à des difficultés financières, la Direction générale lui demandait de prendre la direction financière du groupe pour mener à bien la restructuration financière du groupe,

– le poste de directeur financier du groupe lui avait donc été promis, ce qui n’a pas été remis en cause par le changement de gouvernance puisqu’au mois de novembre 2019, la société le sollicitait afin qu’il détermine la nouvelle organisation de la direction financière et qu’il présentait le nouvel organigramme en comité de retournement au mois de décembre 2019,

– il a accepté de suivre une formation lourde de 500 heures en Gestion des Entreprises pour Dirigeants au sein de l’EESC HEC Paris, du 21 novembre 2018 au 31 juillet 2020, en finançant à titre personnel un montant très significatif puisqu’il a renoncé au versement de sa part variable pour les années 2016,2017, 2018 soit un montant pouvant aller jusqu’à 72 000 euros,

– dans les faits, il a dès le mois de juillet 2018 occupé progressivement les fonctions de directeur administratif et financier (il a participé au recrutement de Mme [B] au poste de directeur comptable Groupe)

– il s’est plaint par courriel du 23 février 2020 de l’absence d’avenant à son contrat de travail et ce courriel est resté sans réponse,

– Mme [B] s’est vue confier l’intégralité des tâches contractuelles de Monsieur [Y], celui-ci assumant dans les faits les tâches de directeur administratif et financier,

– ses objectifs fixés par Monsieur [N] par courriel du 31 mars 2020 sont ceux d’un directeur administratif et fiancier et non ceux d’un directeur comptable,

– l’employeur a précisé qu’il a eu la charge de plusieurs sujets sensibles pour l’entreprise, notamment l’assurance – crédit du groupe, qu’il était impliqué dans les décisions stratégiques de l’entreprise, ce qui relève à l’évidence du poste de directeur administratif et financier.

2- la mise à l’écart progressive de Monsieur [Y]

– il a libéré son bureau pour l’arrivée de sa remplaçante, se retrouvant dans un bureau sans fenêtre sur l’extérieur, servant de dépôt de boîtes à archives,

– il était décidé par la société la dématérialisation des factures fournisseurs et d’un projet de saisie des encaissements, sans qu’il ne soit impliqué dans ces projets,

– il n’a pas été informé lorsque Monsieur [N] a demandé à la filiale marocaine de modifier les délais de paiement à toutes les sociétés du groupe ni du passage du plus gros client (ENEDIS), au factor, et non plus au reverse factor,

3- des conditions de travail dégradées par la société

– il était contraint de relancer à plusieurs reprises le Président du Conseil d’Administration pour connaître sa position sur des sujets urgents

– des consignes peu éthiques le mettaient en difficulté, comme la demande de la société de baisser les comptes de résultats sur certaines sociétés du groupe afin de pas verser la participation et l’intéressement des salariés,

– il lui était aussi demandé de travailler, normalement et ce alors même que la Société bénéficiait des allocations de chômage partiel,

4- la demande indemnitaire

– l’employeur a incontestablement manqué à l’obligation de loyauté inhérente au contrat de travail, de sorte qu’il est en droit de solliciter la somme de 50 000 € à titre de dommages et intérêts pour manquement de la société à l’obligation de loyauté.

– Sur sa charge excessive de travail

1- sur la réalité de cette charge excessive

– il verse aux débats des centaines de courriels qui démontrent l’amplitude de ses journées de travail, et il était contraint de travailler les week-end pour répondre aux nombreuses sollicitations de Monsieur [N],

– la rupture prématurée du contrat de Madame [B], sa remplaçante au poste de Directeur comptable, a accru d’autant sa charge de travail puisqu’il était contraint de reprendre des missions de son ancien poste,

2- sur l’inopposabilité de la convention de forfait en jours

– il a été engagé dans le cadre d’une convention de forfait-jours, rédigée de manière

pour le moins lacunaire, se contentant de préciser que la durée du travail du requérant était fixée à 218 jours par an,

– la société GROUPE [Localité 1] n’a jamais produit aux débats l’accord d’entreprise auquel se réfère le contrat de travail, or le simple renvoi à un accord d’entreprise, sans qu’il soit prévu dans la convention de forfait en jours les modalités de décompte et de contrôle du temps de travail, ne peut être opposé au salarié,

– la convention de forfait en jours prévue contractuellement, n’a fait l’objet d’aucun suivi comme l’exige désormais de manière constante la chambre sociale de la Cour de cassation

3- sur le statut de cadre dirigeant

– le statut de cadre dirigeant ne peut pas lui être applicable car les conditions ne sont pas réunies :

– la société GROUPE [Localité 1] a été dans l’impossibilité de démontrer que sa rémunération se situait dans les rémunérations les plus importantes de la société

– le GROUPE [Localité 1] se contente d’affirmer qu’il participait à ses COMEX alors qu’il a été au fur et à mesure écarté des décisions stratégiques de l’entreprise à partir du moment où il a revendiqué, ce qui était légitime, que sa situation de fait soit mise en cohérence avec sa situation contractuelle, ce que le GROUPE [Localité 1] a refusé

4- sur la demande d’heures supplémentaires

– il produit un décompte très précis, sur les années non prescrites, de ses horaires de travail

– ce décompte est corroboré par de nombreux mails produits aux débats

– il produit également ses agendas pour démontrer ses rendez-vous et réunions

– la société GROUPE [Localité 1] prétend qu’il existe au sein de l’entreprise un logiciel de suivi du temps de travail, GESTOR, qui permet de suivre le nombre de jours travaillés et non travaillés de chaque salarié, or la pièce produite est inexploitable car semble concerner un relevé des repas pris sur place

– le fait que le salarié n’ait pas revendiqué le paiement des heures supplémentaires pendant la relation contractuelle ne suffit pas à remettre en cause sa demande de paiement des heures

5- sur la demande de dommages et intérêts pour non-respect des contreparties obligatoires en repos pour dépassement du contingent annuel d’heures supplémentaires

– il résulte des décomptes des heures supplémentaires effectuées, un dépassement très important du contingent annuel d’heures supplémentaires de 220 jours prévu par la Convention Collective applicable, de sorte qu’il aurait dû bénéficier d’une contrepartie obligatoire sous forme de repos.

6- sur la demande de dommages et intérêts au titre du non-respect des durées de travail maximales quotidiennes et hebdomadaires et des temps de repos

– les décomptes d’heures supplémentaires font apparaître qu’il était contraint de réaliser un très grand nombre d’heures de travail en méconnaissance totale des durées de travail maximales quotidiennes et hebdomadaires

– à de très nombreuses reprises, il ne bénéficiait pas du repos hebdomadaire minimum de 11 heures consécutives.

7- sur la demande de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé

– la convention de forfait-jours ne saurait lui être opposable au requérant, de sorte que l’élément intentionnel est en l’espèce avéré,

– c’est bien parce que la convention de forfait en jours était inadaptée à la charge de travail, que l’employeur y a substitué une qualité de cadre dirigeant, tout aussi inapplicable.

– Sur la nullité de la rupture conventionnelle

– la société lui a imposé des fonctions relevant du poste de Directeur Financier sans formaliser contractuellement ce changement, et sans évolution salariale, et une charge de travail excessive qu’il ne pouvait d’évidence plus laisser perdurer afin de préserver son état de santé,

– cette situation, caractéristique d’une contrainte morale au sens de l’article 1140 du code civil a indéniablement vicié son consentement à la convention de rupture du contrat de travail, dès lors qu’il ne pouvait plus en poursuivre l’exécution sans que sa santé physique ou mentale n’en soit gravement altérée,

– Sur les demandes indemnitaires au titre de la rupture du contrat de travail

1- dommages et intérêts pour nullité de la rupture conventionnelle

– la rupture de son contrat de travail dans les conditions susvisées, lui cause un préjudice important notamment en raison de :

‘ l’interruption brutale et prématurée d’une activité professionnelle dans laquelle il s’était fortement investi, notamment en suivant une formation diplômante lourde,

‘ la perte de la situation sociale qui en résulte pour lui,

‘ la difficulté à retrouver un nouvel emploi de qualification et de rémunération équivalente, en raison d’un contexte économique difficile ; il a dû déménager à [Localité 4]

‘ la perte de revenu qui en résulte.

2- indemnité compensatrice de préavis et indemnité de licenciement

– lorsqu’est prononcée la nullité de la rupture conventionnelle, notamment pour vice du consentement, cette dernière entraine la requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse

– la demande de paiement d’indemnité conventionnelle de licenciement, consiste à simplement opposer une compensation entre l’indemnité conventionnelle de rupture et l’indemnité de licenciement due en cas de nullité de la rupture conventionnelle, et qu’en toute hypothèse cette prétention n’est que la conséquence de la nullité de la rupture conventionnelle,

3- le rejet de la demande reconventionnelle et subsidiaire de la Société Groupe [Localité 1] au titre du remboursement de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle

– lorsqu’est prononcée la nullité de la rupture conventionnelle, notamment pour vice du consentement, cette dernière entraine la requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse, de sorte qu’en pareille hypothèse, la société ne peut pas solliciter le remboursement de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle, mais peut tout au plus solliciter qu’il soit fait compensation entre l’indemnité conventionnelle de licenciement à laquelle elle sera nécessairement condamnée, et l’indemnité de rupture conventionnelle d’un montant de 22 000 euros.

– Sur le rejet de la demande reconventionnelle au titre de la procédure abusive et déloyale

– La Société Groupe [Localité 1] ne démontre aucunement l’existence d’un abus de droit, et ne verse aucun élément au débat ou circonstance de nature à faire dégénérer en abus le droit d’ester en justice.

La Société GROUPE [Localité 1], par conclusions reçues au greffe le 1er février 2023, et auxquelles il est expressément renvoyé pour une parfaite connaissance de la motivation, demande à la cour de :

– A titre liminaire, déclarer irrecevable la demande nouvelle en appel de Monsieur [Y] tendant à sa condamnation à lui verser une indemnité conventionnelle de licenciement ;

– Confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Cahors le 1er février 2022 , en ce qu’il :

o juge que la convention de forfait jours est applicable à monsieur [Y] ;

o juge que le statut de cadre dirigent est opposable à Monsieur [Y] ;

o déboute Monsieur [Y] de toutes ses demandes au titre de l’exécution de son contrat de travail ;

o juge que la rupture conventionnelle homologuée conclue entre Monsieur [Y] et GROUPE [Localité 1] est valable ;

o déboute Monsieur [Y] de toutes ses demandes au titre de la nullité de la rupture conventionnelle homologuée de son contrat de travail ;

o déboute Monsieur [Y] de sa demande de paiement par le Groupe [Localité 1] de la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 code de procédure civile

o condamne Monsieur [Y] aux dépens.

– Infirmer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Cahors le 1er février

2022, en ce qu’il :

o la déboute de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et déloyale ;

o la déboute de sa demande de paiement par Monsieur [Y] de la somme de 4000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

En conséquence et statuant à nouveau :

– Sur l’exécution du contrat de travail de Monsieur [Y] :

o juger qu’elle a exécuté loyalement le contrat de travail de Monsieur [Y] ;

o juger que la convention de forfait jour la liant à Monsieur [Y] jusqu’au 1er mars 2019 est valide ;

o juger que Monsieur [Y] bénéficiait du statut de cadre dirigeant à partir du 1er mars 2019 ;

En conséquence :

o débouter Monsieur [Y] de toutes ses demandes, fins et conclusions au titre de l’exécution de son contrat de travail ;

– Sur la rupture conventionnelle conclue :

o juger que la rupture conventionnelle homologuée conclue entre Monsieur [Y] et elle est parfaitement valable,

En conséquence :

o débouter Monsieur [Y] de toutes ses demandes, fins et conclusions au titre de la nullité de la rupture conventionnelle homologuée de son contrat de travail ;

o A titre subsidiaire et reconventionnel uniquement en cas d’annulation de la rupture conventionnelle, condamner Monsieur [Y] à lui restituer la somme de 22.000 € au titre de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle perçue ;

– En tout état de cause :

o débouter Monsieur [Y] de toutes ses demandes,

o condamner Monsieur [Y] à lui payer la somme de 4000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance,

o condamner Monsieur [Y] à lui payer la somme de 4000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure de d’appel,

o condamner Monsieur [Y] à lui payer la somme de 57000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et déloyale,

o le condamner aux entiers dépens de la présente instance et de ses suites.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que :

– Sur l’irrecevabilité de la demande nouvelle de Monsieur [Y] au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement

– cette nouvelle prétention n’apparaissait pas ni dans les conclusions de première instance de Monsieur [Y] qui n’a jamais sollicité le paiement d’une indemnité conventionnelle de licenciement, ni dans le dispositif des conclusions de première instance. Il s’agit donc d’une demande nouvelle,

– il n’explique pas en quoi sa demande nouvelle consisterait en une compensation à opposer, ni en quoi elle serait la simple conséquence de sa demande de nullité de la rupture conventionnelle,

– la cour n’est donc pas saisie d’une demande de compensation qui ne figure pas dans le dispositif des conclusions adverses,

– la nullité de la rupture conventionnelle n’entraine pas de facto le versement de

l’indemnité de licenciement par l’employeur,

– La société GROUPE [Localité 1] a exécuté le contrat de travail de Monsieur [Y] de manière loyale

1- sur les manquements de Monsieur [Y] à l’obligation de bonne foi

– il a bénéficié à sa demande d’une formation à HEC très couteuse prise en charge en grande partie par l’entreprise, puis a refusé une promotion en tant que Directeur administratif et financier, puis a sollicité une rupture conventionnelle qui a été acceptée et homologuée, avant de saisir, quelques semaines après son départ, le conseil de prud’hommes pour demander la nullité de cette rupture conventionnelle et le paiement de sommes totalement exorbitantes notamment au titre de prétendues supplémentaires

2- sur les conditions de travail de Monsieur [Y]

a) sur les discussions relatives à la promotion de Monsieur [Y]

– aucune promotion n’a été promise à Monsieur [Y], des pourparlers ont au lieu mais aucun engagement n’a été pris,

– Monsieur [Y] a été à l’initiative de la demande de formation HEC et la société a pris en charge une partie des frais de scolarité qui se sont élevés à près de 66.500 € sans compter les nombreux frais annexes (transport, hôtel, etc.) également pris en charge,

– Monsieur [Y] prétend que sa promotion aurait été actée du fait d’un organigramme cible le présentant comme Directeur administratif et financier à sa direction en novembre 2019 mais ce document a été préparé par Monsieur [Y] et n’est absolument pas officiel,

– le fait que les objectifs fixés à Monsieur [Y] comprennent la réorganisation du « Finance department group » n’est pas davantage probant ; la comptabilité appartenant au service finance, Monsieur [Y] pouvait très bien être chargé du projet de réorganisation de ce service,

– Monsieur [Y] a finalement refusé le poste de Directeur administratif et financier

– GROUPE [Localité 1] a donc pris acte du refus de Monsieur [Y] de prendre ce poste au niveau du Groupe et a donc été contrainte de mettre fin aux discussions sur un éventuel projet de promotion

– Monsieur [Y] a donc conservé son poste de Directeur de la comptabilité Groupe, avec les mêmes prérogatives et les conditions afférentes qui sont demeurés inchangées

– concernant l’embauche de Madame [B]: elle n’était pas Directrice comptable Groupe, poste occupé par Monsieur [Y], ses attributions se limitaient à la consolidation des comptes

– elle bénéficiait d’une classification conventionnelle ainsi que d’un niveau de rémunération moins importants que Monsieur [Y]

– elle n’a pas été recrutée pour remplacer Monsieur [Y] mais bien pour l’épauler, notamment dans la perspective d’une éventuelle promotion

– concernant l’absence de réalisation des tâches d’un Directeur administratif et financier :

– Monsieur [Y] est particulièrement contradictoire puisqu’il se plaint d’avoir été impliqué dans des projets stratégiques, d’avoir accompli des tâches dévolues à un Directeur administratif et financier mais soulève une mise à l’écart

– la qualité de Directeur comptable Groupe est en soit un poste stratégique qui peut très bien justifier la présence du salarié au COMEX

– Monsieur [Y] a travaillé sur le dossier de l’assurance-crédit groupe en sa qualité de Directeur comptable groupe et membre du COMEX. Son rôle s’est cantonné à la partie comptable

b) sur l’absence de mise à l’écart de Monsieur [Y]

– Monsieur [Y] a volontairement, et sans même consulter la direction, laissé son bureau à Madame [B]

– le bureau dans lequel Monsieur [Y] s’est volontairement installé lui-même, reste tout à fait correct, spacieux et disposant de fenêtre

– Monsieur [Y] a choisi, librement et de son plein gré, de refuser le poste proposé

– il est parfaitement inexact de soutenir que son contrat de travail aurait été modifié du fait de l’arrivée de Madame [B]. Monsieur [Y] n’était pas privé de la partie consolidation de ses fonctions puisqu’il continuait à superviser ces missions

– Madame [B] a quitté la société en avril 2020, un mois après son arrivée et les négociations relatives à une promotion de Monsieur [Y] se sont arrêtées fin mars. La période de chevauchement n’est donc pas significative.

– contrairement à ce qu’il soutient, Monsieur [Y] est resté impliqué dans les principaux projets comptables du Groupe

– Monsieur [Y] détourne certains emails pour les besoins de sa cause

– Il faisait partie du COMEX du Groupe, il présentait les informations financières au Conseil d’administration, il a participé activement au processus d’adossement de GROUPE [Localité 1] à Epsys, il a été informé, impliqué et s’est vu confier des projets stratégiques pour l’entreprise, notamment ceux dont il prétend ne pas avoir eu connaissance (recouvrement client, dématérialisation des factures, facotring), il a également participé à des réunions stratégiques pour le groupe, notamment l’assureur-crédit du Groupe, relation qu’il a ensuite dû gérer

c) sur l’absence de conditions de travail « dégradées »

– Il est difficile de comprendre en quoi une relance isolée du Président Directeur Général, à un moment particulièrement difficile de la vie de l’entreprise constitue une condition de travail dégradée

– Monsieur [Y] ne produit aucun élément relatif aux ordres, contre ordres ou consignes peu éthiques qu’il revendique

– pour ce qui se rapporte à la question de l’activité partielle, Monsieur [Y] ne démontre pas qu’il aurait effectivement travaillé pendant ces périodes et les pièces qu’il produit ne démontrent pas la réalisation effective d’une prestation de travail

– les opérations comptables qui ont été réalisées sont parfaitement légales, les comptes des différentes sociétés ont été validés par les commissaires aux comptes et Monsieur [Y] ne démontre pas avoir réprouvé les décisions de Monsieur [N], au contraire, il abonde dans son sens comme le démontre les échanges de SMS produits

3- l’absence de caractère « excessif » de la charge de travail de Monsieur [Y]

a) pour la période antérieure au 1er mars 2019 : les demandes de Monsieur [Y] sont infondées :

– les éventuelles demandes formulées au titre d’événements antérieurs au 1er octobre 2017 sont donc prescrits

– à partir du 1er mars 2019, Monsieur [Y] a bénéficié du statut de cadre dirigeant

– ses demandes relatives à sa convention de forfait jours ne peuvent donc concerner que des événements compris entre le 30 septembre 2017 et le 28 février 2019

– la convention de forfait de Monsieur [Y] a été régularisée en 2011, soit avant la loi Travail. De ce fait, elle est sécurisée, peu importe les stipulations de l’accord collectif sur lequel elle est adossée puisque GROUPE [Localité 1] respecte les dispositions relatives au suivi de la charge de travail du salarié prévues à l’article L.3121-65 du code du travail, dans sa version applicable au présent litige.

– Monsieur [Y] n’établit aucune carence fautive de la société en matière de gestion et de suivi de la charge de travail,

– elle dispose d’un logiciel de suivi du temps de travail, GESTOR, et produit les relevés relatifs à Monsieur [Y] pour la période 2017- février 2019,

– chaque année, Monsieur [Y] a bénéficié d’un entretien au cours duquel la question de la charge de travail était abordée,

b) pour la période postérieure au 1er mars 2019 : le statut de cadre dirigeant de Monsieur [Y] lui est parfaitement opposable

– Monsieur [Y] réunit les conditions pour bénéficier du statut de cadre-dirigeant

– il bénéficiait de la classification la plus élevée de la convention collective de la Métallurgie et disposait d’une large autonomie notamment dans la gestion de son emploi du temps

– dans l’organisation hiérarchique du Groupe, Monsieur [Y] était directement

rattaché au Président Directeur Général du Groupe, Monsieur [N]

– le périmètre rattaché au poste de Monsieur [Y] impliquait forcément une gestion autonome et indépendante de son travail : son périmètre géographique comprenait les filiales françaises et étrangères de l’ensemble du groupe soit plus de 17 entités, il supervisait l’ensemble de la comptabilité du Groupe, ce qui inclut bien évidemment la comptabilité du groupe mais également la comptabilité de chaque filiale du groupe, il était à la tête d’une équipe de 25 personnes environ,

– Monsieur [Y] faisait partie des salariés de GROUPE [Localité 1] bénéficiant de la rémunération la plus élevée

– Monsieur [Y] était impliqué dans les décisions stratégiques et faisait partie des cadres de direction de l’entreprise ;

4- les demandes formulées au titre de l’exécution du contrat de travail sont

infondées et exorbitantes

– le 15 juillet 2020, lorsqu’il a signé la rupture conventionnelle, il a expressément reconnu avoir perçu toutes les sommes qui lui étaient dues au titre de l’exécution de son contrat de travail

– à titre subsidiaire, les heures supplémentaires doivent être réalisées à la demande de l’employeur et constituer un temps de travail effectif, or ce n’est pas le cas,

– les échanges de SMS produits par Monsieur [Y] ne sont pas probants, il ne s’agit pas d’éléments démontrant une sollicitation à travailler les weekends,

– Monsieur [Y] sollicite le paiement d’heures supplémentaires pour des périodes pendant lesquelles il était en formation partiellement payée par GROUPE [Localité 1].

– le salarié, qui sollicite le paiement d’heures supplémentaires, doit étayer sa demande par la production d’éléments précis, ce qui n’est absolument pas le cas

– le croisement entre les données des tableaux et les emails produits par Monsieur [Y] démontre l’imprécision des tableaux établis par le demandeur, et Il existe de très nombreuses incohérences entre les heures effectives d’envoi et de réception des emails et les heures figurant dans le tableau du demandeur

– si par extraordinaire, la cour jugeait fondée la nullité de la convention de forfait jour et écartait le statut cadre, la société GROUPE [Localité 1] ne saurait être condamnée au titre du travail dissimulé dans la mesure où Monsieur [Y] ne rapporte nullement la preuve d’un élément intentionnel

– La rupture conventionnelle homologuée est parfaitement valable

– Monsieur [Y] n’a fait l’objet d’aucune pression en vue de la conclusion d’une rupture conventionnelle. Son consentement n’a absolument pas été vicié

– il convient de rappeler que c’est Monsieur [Y] lui-même qui a sollicité de son

employeur une rupture de son contrat, et non l’inverse

– la procédure de rupture conventionnelle, qui a été parfaitement respectée, permet au salarié de mesurer sa décision, de s’assurer de son consentement et se rétracter s’il le considère opportun

– les demandes indemnitaires formulées par Monsieur [Y] au titre de la nullité de la rupture conventionnelle sont infondées et exorbitantes

– Monsieur [Y] ne produit aucun élément au soutien de ses affirmations quant aux préjudices qu’il aurait subis, et il a retrouvé un emploi très rapidement, à un poste plus important de Directeur Administratif et Financier chez Socri REIM, puis chez ACTIA AUTOMOTIVE

– Sur les demandes reconventionnelles

– Il a formé des demandes totalement exorbitantes alors que sa mauvaise foi est évidente, qu’il a bénéficié d’une formation financée en grande partie par GROUPE [Localité 1], qu’il a sollicité la rupture conventionnelle qui n’a fait l’objet d’aucune rétractation, qui a été homologuée par l’administration et qui a été parfaitement exécutée, qu’il a confirmé son consentement à la rupture conventionnelle, qu’il n’a jamais fait état des prétendues heures supplémentaires et du non-respect des dispositions sur la durée du travail, qu’il a confirmé, par écrit, qu’il avait perçu toutes les sommes qui lui étaient dues.

MOTIFS :

SUR L’EXÉCUTION DU CONTRAT DE TRAVAIL

Monsieur [Y] fait grief à la société GROUPE [Localité 1] :

– d’avoir exécuté la contrat de travail de manière déloyale,

– d’une charge de travail excessive

I- Sur l’exécution loyale du contrat de travail

Monsieur [Y] reproche à l’employeur :

– l’absence de formalisation d’une évolution professionnelle convenue,

– sa mise à l’écart progressive,

– des conditions de travail dégradées.

a) concernant l’absence de formalisation d’une évolution professionnelle convenue :

Monsieur [Y] soutient que dès juillet 2018, il s’est vu proposer le poste de Directeur Administratif et Financier, que ce poste lui avait été promis et qu’en dépit de ses nombreux rappels aucun avenant à son contrat de travail n’a été formalisé.

Cependant, ce grief ne saurait propérer dès lors que les échanges de courriels en date des 15 et 31 mars 2020 entre Monsieur [N] et Monsieur [Y] montrent que ce dernier a refusé le poste de Directeur Administratif et Financier lorsque celui-ci lui a été proposé.

La cour constate au surplus que les pièces produites par Monsieur [Y], sur lequel pèse la charge de la preuve, ne sont pas de nature à établir la réalité d’une promesse de signature d’un avenant à son contrat de travail afin qu’il occupe les fonctions de Directeur Administratif et Financier.

La présentation de l’organigramme finance cible de décembre 2019 portant le nom de Monsieur [Y] sous la fonction de Directeur Administratif et Financier ne saurait avoir un quelconque caractère probant dès lors qu’il n’est pas contesté que cet organigramme a été réalisé par Monsieur [Y] lui même et qu’il n’est pas rapporté qu’il aurait par la suite été validé.

Les échanges de courriels produits ne témoignent pas plus d’une quelconque promesse faite à Monsieur [Y].

Il ne saurait se déduire du recrutement d’une directrice comptable consolidation l’existence d’une promesse en faveur de Monsieur [Y] de voir occuper le poste de Directeur Administratif et Financier.

b) concernant une mise à l’écart progressive :

Monsieur [Y] n’établit pas avoir été contraint de libérer son bureau au profit de Madame [B], le courriel du 31 mars 2020 de Monsieur [N] indique le contraire, et les photographies versées aux débats montrent un bureau pourvu de fenêtres.

Contrairement à ce que soutient Monsieur [Y], le courriel du 31 mars 2020 de Monsieur [N] mentionne clairement que dès lors qu’il a refusé le poste de Directeur Administratif et Financier, Monsieur [Y] s’est vu conserver son poste de Directeur de la Comptabilité du Groupe avec les mêmes prérogatives et des conditions afférentes inchangées.

La cour note que Madame [B], recrutée en qualité de directrice comptable consolidation le 2 mars 2020 et dont d’ailleurs les tâches confiées n’étaient pas stritement identiques à celles de Monsieur [Y], a quitté le Groupe à la fin de sa période d’essai de deux mois, qu’il ne peut donc s’évincer de cette courte période une mise à l’écart de Monsieur [Y] en raison de ce recrutement.

Les quatre courriels produits (pièces 12, 14, 15 et 16) sont insuffisants à traduire une mise à l’écart de Monsieur [Y].

c) concernant les conditions de travail dégradées :

Contrairement à ce qu’affirme Monsieur [Y], il ne résulte pas des courriels produits l’existence de consignes peu éthiques pour baisser les comptes de résultat de certaines sociétés du groupe mais des questionnements sur ce point.

Les invitations de collaborateurs pour une formation le 28 avril 2020, ou les quelques courriels ou appels téléphoniques entre le 27 et le 29 avril ou les 9 et 10 avril alors que la société était en chômage partiel ne peuvent traduire une demande de l’employeur à travailler normalement.

Enfin le dossier médical ne fait que rapporter des propos de Monsieur [Y] et ne présente aucune valeur probante.

Monsieur [Y] ne rapporte donc pas la preuve de l’existence d’une exécution déloyale du contrat de travail par la société GROUPE [Localité 1].

La cour confirme le jugement du conseil des prud’hommes qui l’a débouté des demandes formées à ce titre.

II- Sur la charge de travail excessive

Aux termes du contrat de travail du 18 février 2011, Monsieur [Y] était soumis à une convention de forfait en jours fixée à 218 jours par an.

Suite à l’avenant à son contrat de travail signé à effet au 1er mars 2019, Monsieur [Y] a bénéficié du statut cadre dirigeant.

Monsieur [Y] soulève tant l’inopposabilité de la convention de forfait en jours que le statut cadre.

a) sur la convention de forfait en jours :

A titre liminaire , il convient de rappeler :

– que le droit à la santé et au repos sont au nombre des exigences constitutionnelles ;

– qu’il résulte des articles 17 §§1 et 4 de la directive 93/ 104/CE du Conseil du 23 novembre 1993 et des articles 17 §1 et 19 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 que les Etats membres de l’Union européenne ne peuvent déroger aux dispositions relatives à la durée du temps de travail que dans le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé du travailleur ;

– que toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les dispositions assurent la garantie du respect de durées raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires ;

– que la conclusion d’une convention individuelle de forfait, établie sur une base hebdomadaire, mensuelle ou annuelle, requiert l’accord du salarié et que la convention doit être établie par écrit.

Aux termes de l’article L.3121-39 du code du travail, dans rédaction antérieure à la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 applicable en l’espèce, « la conclusion de conventions individuelles de forfait, en heures ou en jours, sur l’année est prévue par un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche. Cet accord collectif préalable détermine les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait, ainsi que la durée annuelle du travail à partir de laquelle le forfait est établi, et fixe les caractéristiques principales de ces conventions ».

En l’espèce, le contrat de travail du 18 février 2011 dispose ‘de convention expresse entre les parties et en application de l’accord de réduction du temps de travail signé par la MAEC le 26 janvier 2000, la durée du travail de Monsieur [K] [Y] est déterminée selon un nombre annuel de jours de travail fixé à 218 jours par an.’

Il incombe à l’employeur de rapporter la preuve qu’il a respecté les stipulations de l’accord collectif destinées à assurer la protection de la santé et de la sécurité des salariés soumis au régime du forfait en jours.

Or l’accord de réduction du temps de travail visé par le contrat de travail n’a pas été versé aux débats.

L’employeur ne rapporte donc pas la preuve de l’existence d’un accord d’entreprise de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition dans le temps du salarié concerné, ni qu’il en a respecté les termes.

L’article L.3121-65 du code du travail dispose qu’à défaut de stipulations conventionnelles prévues aux 1° et 2° du II de l’article L.3121-64, une convention individuelle de forfait en jours peut être valablement conclue sous réserve du respect des dispositions suivantes :

1° L’employeur établit un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées. Sous la responsabilité de l’employeur, ce document peut être renseigné par le salarié ;

2° L’employeur s’assure que la charge de travail du salarié est compatible avec le respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires ;

3° L’employeur organise une fois par an un entretien avec le salarié pour évoquer sa charge de travail, qui doit être raisonnable, l’organisation de son travail, l’articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle ainsi que sa rémunération.

Les relevés informatiques issus du logiciel GESTOR versés au débat par l’employeur ne permettent aucunement de comptabiliser les jours travaillés ou non par le salarié, contrairement à ce que soutient l’employeur, ou alors force serait de constater que Monsieur [Y] soit travaillait bien plus de 218 jours par an si on ne soustrait pas les répétitions de jours figurant sur les listings, soit travaillait moins de 150 jours par an.

L’employeur qui verse aux débats un formulaire vierge d’entretien d’évaluation ne rapporte pas la preuve d’avoir organisé annuellement avec Monsieur [Y] un entretien pour évoquer sa charge de travail et son organisation.

Dès lors, il s’en déduit que la société GROUPE [Localité 1] ne peut opposer la convention de forfait en jours à Monsieur [Y].

Par suite il y a lieu d’infirmer le jugement entrepris et de déclarer la convention de forfait-jours stipulée dans le contrat de travail conclu par les parties le 18 février 2011 inopposable à Monsieur [Y].

b) sur le statut de cadre dirigeant :

En vertu de L.3111-2 du code du travail, sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement.

Les trois critères ainsi requis, indépendance dans l’organisation de l’emploi du temps, prise de décision largement autonome et rémunération élevée sont cumulatifs et impliquent que seuls relèvent de cette catégorie les cadres participant à la direction de l’entreprise.

Il en résulte que, sauf stipulations contractuelles ou conventionnelles plus favorables, les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux dispositions relatives à la réglementation du travail en matière de repos quotidien, de repos hebdomadaire, de durées maximales de travail (quotidienne, hebdomadaire), de contrôle de la durée du travail, d’heures supplémentaires, de jours fériés, de travail de nuit.

En l’espèce, pour soutenir que Monsieur [Y] relevait du statut de cadre dirigeant depuis le mois de mars 2019, l’employeur produit :

– les bulletins de salaire depuis cette date

– l’organisation hiérarchique du groupe (Finance : Comptabilité)

– un courriel du Président Directeur Général du 31 mars 2020 pour fixer ses objectifs

– des échanges de courriels entre le Président Directeur Général et Monsieur [Y] sur des projets

– la participation de Monsieur [Y] au COMEX du Groupe

La Cour constate que si Monsieur [Y] pouvait bénéficier d’autonomie dans l’exercice de ses fonctions et dans certaines prises de décision, pour autant aucun élément n’est produit pour justifier que celui-ci bénéficiait d’une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans l’entreprise, l’employeur se contentant de l’affirmer sans le démontrer.

Cette condition faisant défaut, la qualité de cadre dirigeant ne peut s’appliquer à Monsieur [Y].

Le jugement du conseil des prud’hommes sera infirmé sur ce point.

c) sur les heures supplémentaires :

Il résulte des constatations de la cour ci-avant que le temps de travail de Monsieur [Y] doit être évalué conformément aux règles du droit commun et que celui-ci est fondé à sollicter le paiement des heures supplémentaires.

La durée de la prescription étant déterminée par la nature de la créance invoquée, l’action en paiement d’un rappel de salaire fondée sur l’invalidité d’une convention de forfait en jours est soumise à la prescription triennale prévue par l’article L.3245-1 du code du travail.

La convention de forfait en jours était inopposable à Monsieur [Y], celui-ci est fondé à solliciter un rappel d’heures supplémentaires exécutées durant les trois années précédant la rupture du contrat de travail.

Le contrat de travail ayant été rompu le 30 septembre 2020, les demandes de rappel de salaire antérieures au 1er octobre 2017 sont prescrites.

Aux termes de l’article L.3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l’article L.3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l’employeur tient à la disposition de l’inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Enfin, selon l’article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’ heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

En l’espèce, Monsieur [Y] produit au soutien de sa demande :

– un décompte de ses horaires de travail

– des courriels

– ses agendas

– des échanges de SMS

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l’employeur d’y répondre.

C’est vainement que l’employeur invoque l’absence de toute réclamation de Monsieur [Y] relative à des heures supplémentaires durant l’ensemble de la collaboration, dès lors que l’absence de protestation, même prolongée, n’est pas de nature à priver le salarié du droit de réclamer le versement de toutes les rémunérations qui ne lui ont pas été payées, cette demande n’ayant pour seule limite que la prescription de son action, étant rappelé par ailleurs que la relation de travail s’inscrit dans le cadre d’un lien de subordination et de dépendance du salarié, qui explique les hésitations et les réticences de celui-ci à protester, qui ne valent jamais acceptation de la situation irrégulière.

La société GROUPE [Localité 1] produit un listing informatique extrait du logiciel GESTOR et une liste des incohérences relevées entre les heures de travail mentionnées sur le décompte produit par Monsieur [Y] et les heures effectives d’envoi et de réception des courriels.

Ainsi que vu précédemment, le listing informatique, qui est une série de dates auxquelles sont attibuées le prix du repas, ne permet pas de s’assurer du temps de travail effectif du salarié.

Mais la cour constate que si l’employeur ne produit pas d’éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il verse avec pertinence une liste établie sur la base des pièces produites par le salarié (relevé des courriels) dont la cour a pu s’assurer par comparaison de la correspondance des données.

Il s’en évince que Monsieur [Y] a effectivement envoyé à de nombreuses reprises des courriels très tard le soir, ou durant les fins de semaines mais qu’il existe aussi certaines incohérences entre les relevés de SMS et les heures supplémentaires indiquées dans son tableau.

Le fait que le salarié ait envoyé un courriel au moyen de sa boîte professionnelle à une heure très tardive ou sur un temps de fin de semaine, ne l’empêchait nullement de vaquer à des occupations personnellles avant ou après l’envoi de ces courriels.

La lecture des courriels ne fait pas ressortir un caractère d’urgence particulière justifiant l’envoi de ces messages à des horaires particulièrement tardif ou le samedi et le dimanche tard.

En revanche, les échanges de courriels et SMS produits établissent que le Président Directeur Général, Monsieur [N], ne se privait pas de solliciter Monsieur [Y] les samedis et dimanches, ou tard le soir et que dès lors, il donnait ainsi implicitement son accord pour la réalisation d’heures supplémentaires.

Au regard de l’ensemble des éléments produits par les parties, il apparaît à la cour que le salarié a effectué des heures supplémentaires, mais dans une proportion moins importante que celle qu’il revendique, et évalue sa créance à ce titre ainsi :

– année 2017 (octobre à décembre) : 5887,30 euros,outre les congés payés afférents à hauteur de 588,73 euros

– année 2018 : 35 213,22 euros outre les congés payés afférents à hauteur de 3521,32 euros

– année 2019 : 65 245,38 euros outre les congés payés afférents à hauteur de 6524,53 euros

– année 2020 : 15 348,42 euros outre les congés payés afférents à hauteur de 1534,84 euros

d) sur la demande au titre du non respect des durées de travail maximales quotidiennes et hebdomadaires et des temps de repos :

La durée quotidienne maximale de travail effectif ne peut excéder 10 heures aux termes de l’article L.3121-18 du code du travail.

L’article L.3121-20 ajoute qu’au cours d’une même semaine, la durée du travail ne peut dépasser quarante-huit heures.

En outre, tout salarié bénéficie d’un repos quotidien d’une durée minimale de onze heures consécutives.

Les durées de travail s’apprécient sur la période du lundi 0 heure au dimanche 24 heures. C’est à l’employeur qui prétend avoir respecté les durées maximales de travail et les temps de repos qu’il appartient de le prouver.

En l’espèce, si l’employeur allègue que le logiciel de décompte du temps de travail comprend un dispositif d’alerte qui indique le dépassement des seuils de durées maximales du travail et que la durée du travail de Monsieur [Y] n’a jamais généré d’alerte démontrant qu’il excédait ces seuils, néanmoins, il n’en justifie pas.

La société GROUPE [Localité 1] ne rapporte pas la preuve du respect des durées maximales de travail et des temps de repos obligatoires du salarié pour l’ensemble de la période considérée alors que le volume d’heures supplémentaires retenu par la cour est considérable. Le seul constat du dépassement de la durée maximale du travail ouvre droit à réparation.

Dans ces conditions, la société GROUPE [Localité 1] condamnée à payer à Monsieur [Y] la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts de ce chef.

e) sur la demande pour non respect des contreparties obligatoires en repos pour dépassement du contingent annuel d’heures supplémentaires :

Dans les entreprises de plus de vingt salariés, les heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel d’heures supplémentaires ouvrent droit à un repos compensateur égal à 100 % de chaque heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent.

Le salarié qui n’a pas été mis en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos obligatoire en cas de dépassement du contingent d’heures supplémentaires a droit à l’indemnisation du préjudice subi.

La convention collective Nationale des Ingénieurs et Cadres de la Métallurgie applicable fixe le contingent annuel d’ heures supplémentaires à 220 heures.

Il résulte de ce qui précède et du nombre d’heures supplémentaires retenu par la cour que Monsieur [Y] a effecuté des heures de travail au delà du contingeant annuel.

Il en résulte nécessairement un préjudice et dans ces conditions la société GROUPE [Localité 1] sera condamnée à lui verser une somme de 30 000 euros de dommages et intérêts en réparation de ce préjudice.

f) sur le travail dissimulé :

Monsieur [Y] sollicite la somme de 82484,94 euros à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé en raison de la dissimulation par l’employeur d’une partie des heures de travail effectivement réalisées, cette volonté de dissimulation ressortant notamment de l’application d’une convention de forfait jours irrégulière et de l’absence de contrôle de sa charge de travail.

La société conteste cette demande et soutient que Monsieur [Y] étant soumis à une convention de forfait jours, puis ayant bénéficié du statut de cadre dirigeant, l’employeur ne pouvait être animé d’une telle intention de dissimulation.

Il appartient au salarié de rapporter la preuve des éléments constitutifs du travail dissimulé.

Le caractère intentionnel du travail dissimulé ne peut se déduire de la seule application par l’employeur d’une convention de forfait privée d’effet, faute pour lui d’avoir respecté les dispositions légales qui avaient pour objet d’assurer la protection de la sécurité et de la santé du la salarié.

Monsieur [Y] n’établit pas que la société a, de manière intentionnelle, omis de mentionner sur ses bulletins de salaire les heures qu’il a effectuées. Il sera en conséquence débouté de sa demande en paiement d’une indemnité pour travail dissimulé sur le fondement de l’article L.8223-1 du code du travail et le jugement confirmé de ce chef.

SUR LA RUPTURE CONVENTIONNELLE

Le salarié qui entend contester la validité d’un acte de rupture conventionnelle doit démontrer l’existence d’un vice du consentement afin d’obtenir des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L’article 1130 du code civil dispose : ‘L’erreur, le dol et la violence vicient le consentement lorsqu’ils sont de telle nature que, sans eux, l’une des parties n’aurait pas contracté ou aurait contracté à des conditions substantiellement différentes.

Leur caractère déterminant s’apprécie eu égard aux personnes et aux circonstances dans lesquelles le consentement a été donné’.

L’article 1140 du même code précise : « Il y a violence lorsqu’une partie s’engage sous la pression d’une contrainte qui lui inspire la crainte d’exposer sa personne, sa fortune ou celles de ses proches à un mal considérable ».

Il appartient à la partie qui prétend que son consentement a été vicié d’en rapporter la preuve.

Monsieur [Y] soutient l’existence d’une contrainte morale résultant de sa charge de travail excessive, des conditions de travail dégradées, de sa mise à l’écart et de l’exercice des fonctions de directeur administratif et financier sans évolution salariale.

La cour, comme développé précédemment, juge que Monsieur [Y] ne rapporte pas la preuve de manquements de l’employeur dans ses obligations inhérentes au contrat de travail et notamment en raisons de conditions de travail dégradées, d’une mise à l’écart de Monsieur [Y] ou de l’exercice des fonctions de directeur administratif et financier sans évolution salariale.

Si la cour a retenu la réalité des heures supplémentaires effectuées par le salarié, aucun élément du dossier n’établit une situation de violence qui aurait vicié son consentement au moment de la signature de la convention de rupture.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a jugé que la rupture conventionnelle conlcue entre Monsieur [Y] et GROUPE [Localité 1] est valable, débouté Monsieur [Y] de toutes ses demandes au titre de la nullité de la rupture conventionnelle.

En conséquence, il n’y a pas lieu à statuer sur la demande d’indemnité conventionnelle de licenciement.

SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE AU TITRE DE LA PROCÉDURE ABUSIVE ET DÉLOYALE

La société GROUPE [Localité 1], qui succombe partiellement en cause d’appel, ne démontre pas en quoi Monsieur [Y] aurait abusé de son droit à agir en justice ou se serait montré déloyal. Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il l’a déboutée de cette demande.

SUR LES DEMANDES ANNEXES, LA DEMANDE AU TITRE DE L’ARTICLE 700 DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE ET LES DÉPENS

Les créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l’employeur de la convocation à comparaître à l’audience de conciliation.

Les sommes allouées à titre indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter de l’arrêt.

La capitalisation des intérêts dus pour une année entière est ordonnée en application de l’article 1343-2 du code civil.

Eu égard à la solution apporté au litige, il n’y a pas lieu à satisfaire les demandes formées au titre des frais irrépétibles.

Chaque partie succombant partiellement en ses prétentions, la charge des dépens de première instance et d’appel sera partagée par moitié.

Il n’y a pas lieu de se prononcer actuellement sur les frais d’exécution forcée d’une décision dont l’exposé reste purement hypothétique et qui sont réglementés par l’article L.111-8 du code des procédures civiles d’exécution qui prévoit la possibilité qu’ils restent à la charge du créancier lorsqu’il est manifeste qu’ils n’étaient pas nécessaires au moment où ils ont été exposés, étant rappelé qu’en tout état de cause, le titre servant de fondement à des poursuites permet le recouvrement des frais d’exécution forcée.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement du conseil des prud’hommes de Cahors du 1er février 2022 en ce qu’il a :

– dit et jugé que la rupture conventionnelle homologuée conclue entre Monsieur

[Y] et GROUPE [Localité 1] est valable ;

– débouté Monsieur [Y] de toutes ses demandes au titre de la nullité de la

rupture conventionnelle homologuée de son contrat de travail ;

– débouté Monsieur [Y] de ses demandes au titre de l’exécution de son contrat de travail s’agissant des dommages et intérêts pour manquement de l’employeur à l’obligation de loyauté,

– débouté Monsieur [Y] de sa demande de paiement par le GROUPE [Localité 1] de la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 code de procédure civile,

– débouté le Groupe [Localité 1] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et déloyale ;

– débouté la SA GROUPE [Localité 1] de sa demande de paiement par Monsieur [Y] de la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 code de procédure civile ;

INFIRME le jugement du conseil des prud’hommes de Cahors du 1er février 2022 en ce qu’il a:

– dit et jugé que la convention de forfait jours est applicable à Monsieur [Y] ;

– dit et jugé que le statut de cadre dirigeant est opposable à Monsieur [Y] ;

– débouté Monsieur [Y] de toutes ses demandes au titre de l’exécution de son contrat de travail ;

– condamné Monsieur [Y] aux entiers dépens.

Statuant à nouveau des chefs infirmés et ajoutant au jugement,

CONDAMNE la société GROUPE [Localité 1] à payer à M. [K] [Y] la somme de 5887,30 euros euros bruts à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires au titre de l’année 2017 ;

CONDAMNE la société GROUPE [Localité 1] à payer à M. [K] [Y] la somme de 588,73 euros bruts au titre de congés payés afférents ;

CONDAMNE la société GROUPE [Localité 1] à payer à M. [K] [Y] la somme de 35 213,22 euros bruts à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires au titre de l’année 2018 ;

CONDAMNE la société GROUPE [Localité 1] à payer à M. [K] [Y] la somme de 3521,32 euros bruts au titre de congés payés afférents ;

CONDAMNE la société GROUPE [Localité 1] à payer à M. [K] [Y] la somme de 65 245,38 euros bruts à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires au titre de l’année 2019 ;

CONDAMNE la société GROUPE [Localité 1] à payer à M. [K] [Y] la somme de 6524,53 euros bruts au titre de congés payés afférents ;

CONDAMNE la société GROUPE [Localité 1] à payer à M. [K] [Y] la somme de 15 348,42 euros bruts à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires au titre de l’année 2020 ;

CONDAMNE la société GROUPE [Localité 1] à payer à M. [K] [Y] la somme de 1534,84 euros bruts au titre de congés payés afférents ;

CONDAMNE la société GROUPE [Localité 1] à payer à M. [K] [Y] la somme de 2000 euros de dommages et intérêts au titre du non respect des durées de travail maximales quotidiennes et hebdomadaires et des temps de repos ;

CONDAMNE la société GROUPE [Localité 1] à payer à M. [K] [Y] la somme de 30 000 euros de dommages et intérêts au titre du non respect des contreparties obligatoires en repos pour dépassement du contingent annuel d’heures supplémentaires ;

DÉBOUTE M. [K] [Y] de sa demande au titre du travail dissimulé ;

RAPPELLE que les créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l’employeur de la convocation à comparaître à l’audience de conciliation ;

RAPPELLE que les sommes allouées à titre indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter de l’arrêt ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts dûs pour une année entière ;

DÉBOUTE la société GROUPE [Localité 1] de ses demandes sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE M. [K] [Y] de sa demande sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

DIT que les dépens de première instance et de la procédure d’appel seront partagés par moitié entre les parties ;

DIT n’y avoir lieu à statuer sur les frais d’exécution forcée.

Le présent arrêt a été signé par Nelly EMIN, conseiller faisant fonction de Président de chambre et Chloé ORRIERE, greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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