Droit du logiciel : 13 juin 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/04380

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Droit du logiciel : 13 juin 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 21/04380

C4

N° RG 21/04380

N° Portalis DBVM-V-B7F-LCP5

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL LEXAVOUE [Localité 5] – [Localité 4]

Me Anaïs FAURE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section A

ARRÊT DU MARDI 13 JUIN 2023

Appel d’une décision (N° RG 20/00071)

rendue par le Greffe du Conseil de Prud’hommes de VALENCE

en date du 16 septembre 2021

suivant déclaration d’appel du 14 octobre 2021

APPELANTE :

S.A.S. SOVERT ‘anciennement dénommée ALPHA’, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité audit siège,

[Adresse 2]

[Localité 8]

représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocat postulant inscrit au barreau de GRENOBLE,

et par Me Sébastien ARDILLIER de la SELAS FIDUCIAL LEGAL BY LAMY, avocat plaidant inscrit au barreau de LYON, substituée par Me Amina MOKDADI, avocat au barreau de LYON,

INTIME :

Monsieur [E] [J]

né le 26 Juillet 1962 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

représenté par Me Anaïs FAURE, avocat au barreau de VALENCE,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente,

Madame Gwenaëlle TERRIEUX, Conseillère,

Madame Isabelle DEFARGE, Conseillère,

DÉBATS :

A l’audience publique du 09 mai 2023,

Mme Valéry CHARBONNIER, Conseillère faisant fonction de Présidente chargée du rapport, et Mme Gwenaëlle TERRIEUX, Conseillère, ont entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, assistées de Mme Mériem CASTE-BELKADI, Greffière, en présence de M. Victor BAILLY, Juriste assistant, conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, les parties ne s’y étant pas opposées ;

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 13 juin 2023, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L’arrêt a été rendu le 13 juin 2023.

Exposé du litige :

M. [J] a été engagé, en qualité de vendeur, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 9 mai 1983 par la SAS AGRODIS devenue en suite SAS ALPHA en 1985 (devenue suite à une fusion SAS SOVERT en 2021).

La SAS ALPHA, située à [Localité 8], exploite l’enseigne GAMM’VERT de [Localité 7] (26).

M. [J] a fait l’objet d’une mise à pied disciplinaire le 12 décembre 2014 pour avoir utilisé plusieurs cartes de fidélité de clients qui étaient restées en caisse pour prendre en compte les achats effectués par ces clients déclenchant des bons de réduction utilisés pour ses achats personnels à plusieurs reprises.

Il a fait l’objet d’un avertissement le 22 novembre 2018 pour avoir adopté un comportement et des propos inappropriés envers son supérieur hiérarchique et la clientèle eu égard à son devoir de réserve et de confidentialité.

M. [J] a été convoqué à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement le 7 octobre 2019, avec une mise à pied conservatoire.

L’entretien préalable s’est tenu le 16 octobre 2019. M. [J] y a assisté accompagné d’un délégué du personnel.

M. [J] a été licencié pour faute grave le 23 octobre 2019 par lettre recommandée avec accusé de réception.

M. [J] a saisi le conseil des prud’hommes de Valence, en date du 03 mars 2020 aux fins de faire déclarer son licenciement comme dépourvu de cause réelle et sérieuse et obtenir les indemnités afférentes.

Par jugement du 16 septembre 2021, le conseil de prud’hommes de Valence, a :

Requalifié le licenciement pour faute grave de M. [J] en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamné la SAS ALPHA à payer à M. [J] les sommes suivantes :

4 409,18 euros brut au titre de l’indemnité de préavis ;

440,91 euros brut au titre des congés payés afférents ;

24 924,10 euros brut au titre de l’indemnité de licenciement ;

44 091,80 euros net au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

2 000,00 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Fixé la moyenne des salaires de M. [J] à la somme de 2 204,59

Débouté la SAS ALPHA de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Condamné la SAS ALPHA aux entiers dépens de l’instance.

La décision a été notifiée aux parties et la SAS SOVERT(anciennement SAS ALPHA) en a interjeté appel le 14 octobre 2021 par le Réseau Privé Virtuel des Avocats.

Par conclusions du 14 décembre 2021, la SAS SOVERT(anciennement SAS ALPHA) demande à la cour d’appel de :

Infirmer le jugement du 16 septembre 2020 du Conseil de Prud’hommes de VALENCE

Débouter M. [J] de l’ensemble de ses demandes

A titre subsidiaire: Requalifier le licenciement pour faute grave de M. [J] en licenciement pour cause réelle et sérieuse

Condamner M. [J] au paiement d’une somme de 2 500 euros à la Société SOVERT au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens de l’instance.

Par conclusions en réponse du 11 mars 2022, M. [J] demande à la cour d’appel de :

Dire l’appel interjeté par la société SOVERT (ANCIENNEMENT ALPHA) (anciennement ALPHA) recevable mais particulièrement mal fondé

Confirmer intégralement le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de VALENCE le 16 septembre 2021

Condamner la société SOVERT (ANCIENNEMENT ALPHA) (anciennement ALPHA) à verser à M. [J] la somme de 4 000 € d’indemnités sur le fondement de l’article 700 du CPC dans le cadre de la présente procédure d’appel

L’ordonnance de clôture a été rendue le 25 avril 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées.

SUR QUOI:

Sur le bien-fondé du licenciement :

Moyens des parties :

La société soutient que le licenciement pour faute grave de M. [J] est justifié. En effet, elle expose que :

– M. [J] a, à plusieurs reprises, refusé d’appliquer les procédures internes de la Société SOVERT ;

– M. [J] s’est comporté comme s’il était gérant de son propre magasin familial ;

– M. [J] a utilisé des cartes de fidélité de clients lors de passages en caisse de clients non détenteurs de carte ;

– M. [J] a octroyé des remises en caisse non autorisées ainsi que des produits gratuits non autorisés ;

– M. [J] a effectué des sorties de marchandises non autorisées ;

– Il est reproché à M. [J] :

Le non retrait des rayons de produits périmés et conseils aux clients en violation des consignes internes,

Le stockage d’un produit non issu du magasin.

– M. [J] a déjà été sanctionné d’une mise à pied disciplinaire en 2014 pour avoir

utilisé la carte fidélité d’un client ;

– M. [J] a commis des actes d’insubordination.

M. [J] conteste le bien-fondé de son licenciement. En effet, il expose que :

– La mise à pied disciplinaire doit être écartée des débats dans la mesure où celle-ci est intervenue le 12 décembre 2014, soit il y a plus de 3 ans ;

– M. [J] déclare qu’il était envié et jalousé de la part de plusieurs collègues pour son bon relationnel et son lien privilégié avec certains clients ;

– Aucune faute ne peut être objectivement démontrée ;

– M. [I], client de la société, a lui-même demandé à M. [J] d’effectuer des achats pour son compte (et ainsi d’alimenter sa carte de fidélité) ;

– M. [J] déclare qu’en tant que responsable PET FOOD, il avait la possibilité de consentir des rabais soit en demandant au responsable du magasin son accord, soit lui-même lorsque celui-ci était absent, puisqu’il le suppléait ;

– Quant à la sortie de marchandises non autorisée, M. [J] indique qu’il a chargé des sacs de terreau dans son véhicule pendant son temps de repos et qu’il les a livrés à Mme [S], suite à la demande de cette dernière ;

– Les articles périmés contenaient une DLUO (date limite d’utilisation optimale). M. [J] indique qu’il était possible de vendre ces produits 2 mois après cette date selon les consignes orales du responsable de magasin.

Sur ce,

Il est de principe que la faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de l’intéressé au sein de l’entreprise même pendant la durée du préavis. La mise en ‘uvre de la procédure de licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits fautifs mais le maintien du salarié dans l’entreprise est possible pendant le temps nécessaire pour apprécier le degré de gravité des fautes commises. L’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

La gravité de la faute s’apprécie en tenant compte du contexte des faits, de l’ancienneté du salarié et des conséquences que peuvent avoir les agissements du salarié et de l’existence ou de l’absence de précédents disciplinaires.

Si elle ne retient pas la faute grave, il appartient à la juridiction saisie d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l’employeur, conformément aux dispositions de l’article L. 1232-1 du code du travail.

En l’espèce, il ressort de la lettre de licenciement en date du 23 octobre 2019, que M. [J] est licencié pour faute grave pour :

Procédures non respectées :

Utilisation de cartes fidélité de clients nominatives (Notamment celles de M. [Z] [I] et de Mme [X] [T]) lors du passage en caisse de clients non détenteurs de carte,

M. [I] : les 15 juin pour l’encaissement de deux pleins de carburant sur le même ticket, le 3 juillet pour l’encaissement d’un tuyau extensible, le 2 août pour l’encaissement d’une brouette, le 23 août pour l’encaissement de 2 bib de rosé, les encaissements du client [I] ayant été réglés avec 8 cartes bancaires différentes sur les 9 derniers mois,

Mme [T] : les 19, 20, 21 septembre, le 23 septembre à 15 heures puis à 16H50 et le 28 septembre, la cliente ayant confirmé ne pas avaoir fait d’achats durant cette période.

Remises effectuées non autorisées et octroi de produits gratuits (8 juin, 3 juillet et 9 août),

Sortie de marchandises non autorisée le 18 septembre 2019 pendant la pause de midi (15 sacs de terreau de 70 litres) pour les livrer.

Manquements sur des aspects essentiels de son poste de travail à savoir beaucoup de produits périmés depuis plusieurs mois qui auraient dû être retirés du rayon, conseils aux clients en contradiction avec les pratiques édictées par le franchiseur et engagement de vente de produits périmés infectés de sylvains en accord avec le client ;

Conduites frauduleuses : stockage d’un bidon usagé plein en salle de pause près du frigo à la demande d’un client en le faisant entrer dans les locaux, a priori produit exclusivement réservé aux professionnels et plus disponible à la vente aux particuliers depuis de nombreuses années, probablement du produit phyto.

S’il est de principe qu’un même fait ne saurait justifier successivement deux mesures disciplinaires et que lorsque l’employeur notifie une sanction disciplinaire, il épuise son pouvoir de sanction et il ne peut donc faire état, pour justifier la mesure de licenciement, de faits antérieurs à la sanction prononcée, l’employeur peut invoquer à l’appui de licenciement des faits antérieurs déjà sanctionnés sous réserve que les faits invoqués remontent à moins de 3 ans et qu’il se borne à invoquer la réitération par le salarié des faits fautifs.

Il ressort de la lettre de licenciement du 23 octobre 2019 que l’employeur évoque deux sanctions disciplinaires de M. [J] du 12 décembre 2014 et du 22 novembre 2018.

La première sanction visant des faits déjà sanctionnés et antérieurs de plus de trois ne peut être évoquée au soutien du licenciement.

S’agissant du non-respect des procédures :

Sur l’utilisation de cartes clients nominatives :

La SAS SOVERT(anciennement SAS ALPHA) verse aux débats au soutien de ce grief :

Un exemplaire de carte de fidélité avec code barre ;

Le guide des méthodes Pôle grand public du 28 septembre 2018 et instructions générales relatives aux méthodes de travail du personnel ayant une tache de caisse qui précise les vérifications à effectuer et interdictions et notamment que le salarié doit « demander systématiquement si le client est titulaire de la carte de fidélité en début d’encaissement. Si non, lui proposer de lui en ouvrir une. En cas de non présentation de la carte, rechercher le client sur l’écran de caisse afin de lui créditer les points. S’assurer qu’il s’agit bien du bon client afin de ne pas créditer les points à homonyme. » ;

L’attestation de Madame [O], ancienne collaboratrice, qui atteste que le 3 août 2019, il lui a demandé de lui octroyer une remise de 70 % sur une brouette, qu’elle lui a refusé car le produit était mis en stock mort ni en NAP, que M. [J] a insisté et a passé un long moment à chercher sur le logiciel, et « le même jour je suis parti à la banque. En son absence il est passé en caisse avec [L]. Résultat sans mon accord, il a demandé -50 % (il a dit à [L] que j’étais d’accord !) Puis il a encore passé cet achat sur la carte de Mr [I]. [L] lui a demandé à 2 reprises était bien sûr de vouloir procéder de la sorte. M. [J] insisté. Un bon de 7 € est sorti. Il a refusé que [L] [N] pour le remettre à Mr [I], est parti avec. Le 9 août, à client achète un garde-manger. Ce dernier demande qu’on lui offre une terrine, M. [J] offre une terrine. Un jour une cliente, Madame [T] demande à ce que l’on vérifie dans ses derniers achats pour savoir quelles références de croquette la grande habitude. Nous avons constaté que sur certains de ses tickets figuraient des articles qu’elle n’a jamais achetés’ Le vendredi 20 septembre, une de nos clientes en aliments chevaux appelle. Elle me demande si elle peut avoir plus d’aliments Destrier senior à ce prix-là’ je ne comprends pas’ je lui explique ne plus avoir cet aliment. À son tour elle explique effectivement le fait que ces aliments sont périmés mais qu’elle a vu avec [E] (M. [J] ) et lui propose d’en payer 3 et d’en avoir 9 ! Je précise que cet élément n’était plus en stock car périmé en juillet, de plus « allucinés » car charançons à l’intérieur. Je demande des explications. Il m’explique ça combine’ 3 sacs pour 9 et comme en stock, cette personne ne les paierait au black. Je reste bouche bée ! Ça le fait rire, il dit « Bouah, ça fait 100 balles ! [K] ayant déjà expliqué que nous ne possédons pas de la sorte. J’ai commencé à regarder de plus près les tickets de Mr [I]’ j’ai pu constater que certains samedis, ils seraient venus plusieurs fois. Tickets de caisse avec du gasoil et du sans plomb (même ticket) le matin, et de nouveau l’après-midi’ » ;

Les tickets de caisse du 2 août 2019 et 3 juillet 2019 faisant apparaître des remises de 50 et 70 % avec le vendeur prénommé [L] ;

Une attestation de Mme [T] qui témoigne n’avoir jamais fait d’achat de produits du terroir et apiculture du magasin de [Localité 7] alors que ces achats figurent sur sa carte.

M. [J] ne conteste pas avoir utilisé la carte de fidélité de M. [I] mais se justifie en ayant rendu service à ce client en effectuant ces achats à sa place, celui-ci ne pouvant pas se déplacer.

M. [I] atteste ainsi à la procédure que ne pouvant se rendre au magasin, avoir demandé à M. [J] de lui acheter le 3 juillet, un tuyau d’arrosage à un prix intéressant sur les soldes en cours, puis une brouette le 2 août que M. [J] lui a livrée le soir avec un bon d’achat de 7 € qu’il a utilisé quelques jours plus tard au magasin. M. [I] indique également que le 23 août avant midi, il a acheté ‘1 bib de rosé’ et que son fils l’ayant récupéré il est allé en acheter un autre le soir.

Il en ressort que s’il n’est pas établi que M. [J] a bénéficié de l’usage de la carte de fidélité de M. [I] à son profit, il a accepté d’acheter des produits pour le compte de ce client et de les enregistrer sur son compte fidélité en son absence, lui permettant de bénéficier de bons d’achats, en contradiction avec les règles de fonctionnement du magasin qu’il connaissait compte tenu de sa longue ancienneté.

En effet si le client, aux termes du règlement du magasin, peut se contenter de donner son nom et non de présenter sa carte de fidélité en caisse pour bénéficier du programme fidélité comme conclu par le salarié, il se déduit du guide des méthodes susvisé que le client doit être présent quand il le demande sauf à admettre que n’importe quel salarié pourrait utiliser les cartes de fidélité de tous les clients sans accord ni connaissance de leur part, au bénéfice de n’importe qui, mettant ainsi à bas le sens même du programme de fidélité par nature individualisé.

M. [J] ne conteste pas non plus avoir utilisé la carte de fidélité de Mme [T] à 6 reprises au mois de septembre 2019 à son insu et pour des achats qu’elle n’a pas effectués comme elle l’atteste dans la présente procédure.

Le fait conclu selon lequel il l’aurait fait pour « faire le nécessaire pour le cumul de points perdus » à la suite d’un passage en caisse antérieur sans carte, « la procédure prévue dans ce cas s’avérant compliquée », n’est confirmé ni par la cliente ni par la stagiaire dont M. [J] ne produit par ailleurs pas l’identité. Il reconnait au surplus ne pas avoir suivi la procédure interne imposée par l’employeur et M. [J] ne démontre pas que Mme [O] ne s’y était pas opposée comme conclu.

Le seul fait que les clients puissent attester de son professionnalisme est inopérant s’agissant des fautes commises par M. [J] dans le cadre de sa relation de travail avec son employeur, M. [J] n’ayant pas été licencié pour insuffisance professionnelle et le salarié n’étant pas rémunéré par l’employeur pour « effectuer des actes d’entraides » comme conclu au bénéfice de certains clients particuliers dont on ignore par ailleurs les liens avec le salarié.

Ce fait est par conséquent établi.

Sur l’octroi de remises non autorisées :

La SAS SOVERT(anciennement SAS ALPHA) verse aux débats au soutien de ce grief :

L’attestation de Mme [O] ;

Les tickets de caisse des 3 juillet et 2 août 2019 faisant apparaître des remises de 50 et 70 % avec le vendeur prénommé [L] ;

Le ticket de caisse du 9 août 2019 portant la mention « Nico offre une terrine » ;

L’attestation de M. [P], responsable du magasin qui affirme que c’était difficile de faire comprendre à M. [J] qu’il n’était pas le propriétaire du magasin mais salarié’et que « j’ai trop entendu de clients demander à parler à M. [J] pour demander des remises et d’autres arrangements. Vous pouvez me faire un prix NON ‘ je verrai avec [E], il me fera quelque chose lui. M^me un commercial d’une entreprise extérieure profitait d’une remise salarié quand il prenait de l’aliment jusqu’à ce que j’arrête cela’ » ;

L’attestation de Mme [A] qui indique que des clients viennent au magasin et demandent à voir « [E] » (M. [J] ) et que lorsqu’elle répondait qu’il était en repos ou en congés payés, les clients répondaient qu’ils repasseraient ;

Règles de fonctionnement magasins.

M. [J] ne conteste pas avoir accordé des remises à certains clients mais revendique qu’en sa qualité de « responsable PET FOOD » avoir la possibilité de consentir des rabais soit en demandant son accord au responsable du magasin, soit lui-même si celui-ci est absent.

D’une part, M. [J] ne justifie pas de sa qualité de « responsable PET FOOD » au sein du magasin et des prérogatives qui pourraient y être associées.

D’autre part, s’il ressort de la fiche de poste de ‘vendeur confirmé’ versée aux débats par M. [J] et non contestée par la SAS SOVERT(anciennement SAS ALPHA) qu’il « peut être amené à seconder le responsable du magasin et le suppléer en cas d’absence », il n’en ressort pas que tous les vendeurs puissent, en l’absence du responsable du magasin quelle que soit la durée de cette absence (1 heures ou plusieurs jours), assumer l’ensemble des missions lui incombant, et notamment modifier la politique commerciale à leur guise.

Mme [O] attestant par ailleurs, s’agissant de l’achat de la brouette au profit de M. [I] et sans que ce soit contesté par le salarié, avoir, avant son absence temporaire dans la journée, expressément refusé la remise sollicitée par M. [J], celui-ci l’ayant ensuite accordée en dépit de ce refus pendant son absence, caractérisant ainsi un acte d’insubordination, peu important la question de savoir si le produit faisait ou non partie du stock mort et les règles applicables dans ce cas.

M. [J] ne conteste par ailleurs pas avoir offert une terrine le 9 août 2019 à une cliente qui fréquentait le magasin 2 à 3 fois par an et soutient que ledit produit offert était déréférencé du fait du dépôt de bilan du fournisseur et qu’il fallait l’écouler au plus vite en faisant des remises attractives.

S’il ressort du document ACTU 3A N° 90 du 25 juillet 2019 relatif au dépôt de bilan du fournisseur Drôme cailles qu’une promo était possible à savoir « 1 bocal acheté, le second à ‘ 50 % (opération en cours en magasin) et intération des produits dans les paniers garnis », M. [J] ne justifie qu’il lui était possible d’offrir ce produit hors du cadre prévu par l’employeur. Ce fait est établi.

Sur la sortie non autorisée de marchandises le 18 septembre 2019 :

M. [J] ne conteste pas avoir le 18 septembre 2019, livré des sacs de terreau à une cliente mais affirme l’avoir valablement fait pendant son temps de repos du midi, n’ignorant pas que les livraisons étaient interdites pendant le temps de travail.

Il verse aux débats l’attestation de Mme [S] qui témoigne avoir sollicité M. [J] pour lui livrer les sacs de terreau achetés en magasin, M. [J] lui répondant que c’était possible mais pas pendant les heures de travail et qu’il les lui a livrés le 18 septembre 2019 vers 12 heures 30 avec son véhicule lui rendant ainsi un précieux service.

La SAS SOVERT (anciennement SAS ALPHA) qui affirme que les salariés, même quand le magasin est fermé entre 12 et 14 heures et lors de ce temps de pause, ne sont pas autorisés à réaliser des opérations de vente, ne démontre pas que M. [J] a réalisé une opération de vente pendant cette période, ni qu’il lui était interdit de vaquer pendant ce temps libre, à des occupations personnelles et notamment de livrer dans son véhicule personnel un cliente qui avait d’ores et déjà acquis les produits comme elle l’atteste.

Ce fait n’est pas établi.

Sur le retrait de produits périmés des rayons :

La SAS SOVERT(anciennement SAS ALPHA) verse aux débats au soutien de ce grief :

Un listing intitulé « démarque N° 123377 de produits du rayon animaux en date du 27 juillet 2019 ([O]je) et modifié le 12 août 2019 (Bleum) ;

Des photographies de produits périmés ;

L’avertissement du 28 novembre 2018 aux termes duquel il est reproché à M. [J] de façon récurrente de ne pas réorganisé le rayon PETFOOD et le rayon élevage (Sellerie, friandise’), ne pas avoir respecté les consignes de sécurité en laissant son collège seul un jour de livraison et s’être plaint auprès des clients.

M. [J] conteste avoir laissé dans le rayon alimentation animale beaucoup de produits périmés, et fait valoir que les produits n’étaient pas périmés mais avaient une DLUO dépassée qui leur permettant d’être vendus jusqu’à deux mois après la date selon les consignes orales du responsable du magasin.

Il produit pour en justifier un mail dans lequel l’employeur préconise aux vendeurs de « faire des bonnes affaires avec les éleveurs en vendant les articles périmés ou proches périmés ».

Si ce mail concerne « la gamme périmée dauphinoise d’octobre 2019 », soit postérieure aux faits reprochés et la pièce jointe des produits concernés n’est pas versée aux débats comme conclu par l’employeur, il doit être cependant rappelé que la charge de la preuve s’agissant d’un licenciement pour faute grave, incombe à l’employeur et que la SAS SOVERT(anciennement SAS ALPHA) échoue à démontrer la vente par M. [J] « de produits périmés depuis plusieurs mois qui auraient dû être retirés du rayon come la réglementation l’impose » comme reproché dans la lettre de licenciement. Les seules photographies versées aux débats ne permettant pas à la cour de s’assurer que les produits photographiés étaient en cours en rayon après la date de péremption et/ ou la DLUO.

Ce fait n’est pas établi.

Sur la vente de produits d’alimentation animale infectés de sylvains :

M. [J] affirme qu’une cliente (Mme [R]) souhaitait faire l’acquisition de ces produits Destrier senior (9 sacs pour le prix de 3) infestés de sylvains mais conteste avoir réalisé la vente en raison du désaccord du responsable du magasin avec lequel il avait pris attache.

Le salarié produit l’attestation de Mme [R] qui explique que c’est M. [J] qui lui a demandé si elle était intéressée par de l’aliment pour chevaux âgés périmé de quelques jours et « mais après avoir vérifié ensemble nous avons constaté que le grain était sain. De plus sa proposition d’un sas offert pour un sac acheté était intéressante. Avant de conclure la vente, le vendeur devait en référer à ses responsables si l’achat était possible mais cela a été refusé car les sacs étaient sortis du stock informatiquement ‘ ».

La seule attestation de Mme [O] en contradiction de celle de la cliente susvisée ne permet pas démontrer que M. [J] s’était engagé, comme il lui est reproché, auprès de Mme [R] de lui vendre les sacs infestés de sylvains alors qu’ils avaient été retirés du stock sans demander l’accord du responsable du magasin.

Ce fait n’est pas établi.

S’agissant des conseils donnés à un client par M. [J] sur le désherbage au gros sel et au vinaigre blanc, M. [J] le conteste et la SAS SOVERT(anciennement SAS ALPHA) n’apporte aucun élément objectif permettant de le démontrer. Ce fait n’est pas établi.

Sur des conduites frauduleuses :

Il est reproché à M. [J], la semaine 39, le stockage d’un produit phytosanitaire livré par M. [B], client agriculteur, dans la salle de pause à côté du frigo en contradiction avec la réglementation.

La SAS SOVERT(anciennement SAS ALPHA) verse aux débats au soutien de ce grief :

La fiche d’information de la préfecture de Burgogne sur la fraude aux produits phyto ;

L’attestation de Mme [O] qui déclare avoir vu M. [J] discuter avec un client qui se servait de carburant à la station, qu’elle a senti qu’elle dérangeait, qu’ils ont continué leur conversation discrètement dans le fond du magasin et qu’elle a vu M. [J] se précipiter en salle de pause et en ressortir, qu’à midi elle a regardé sous la table et y a trouvé un bidon, M. [J] lui ayant indiqué « en cafouillant » que c’était un produit pro pour son entreprise. Elle atteste également que le lendemain une personne est venue réclamer du DECIS, un produit interdit à la vente aux particuliers depuis plusieurs années et que lorsqu’elle a répondu que le magasin n’en vendait pas, il a indiqué « ce n’est pas grave, je demanderais à [E] » ;

Un mail de la responsable de magasin avec des photos adressés au responsable de groupe.

M. [J] produit pour sa part l’attestation de M. [B] qui confirme avoir demandé à M. [J] des conseils le 20 septembre 2019 sur les ébrancheurs du rayon alors qu’il venait faire le plein de carburant, et lui avoir remis à cette occasion avant de partir, un bidon de savon de nettoyage professionnel de marque WURTH qu’il lui avait demandé lors d’un de ses pages précédents au magasin.

Faute pour la SAS ALPHA de démontrer que le bidon conservé par M. [J] dans la salle de pause contenait effectivement le produit phytosanitaire interdit, le grief n’est pas établi.

Les faits ainsi établis, s’ils constituent des faits fautifs justifiant le licenciement de M. [J] pour cause réelle et sérieuse, n’ont pas le caractère de gravité rendant impossible le maintien de M. [J] au sein de l’entreprise même pendant la durée du préavis par voie d’infirmation du jugement déféré.

Il convient par conséquent de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a condamné la SAS SOVERT

(anciennement SAS ALPHA) à payer à M. [J] les sommes suivantes :

4 409,18 euros brut au titre de l’indemnité de préavis ;

440,91 euros brut au titre des congés payés afférents ;

24 924,10 euros brut au titre de l’indemnité de licenciement ;

Il y a lieu d’infirmer la décision déférée en ce qu’elle a condamné la SAS ALPHA à verser à M. [J] des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

SUR QUOI,

La cour, statuant contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a :

Condamné la SAS ALPHA à payer à M. [J] les sommes suivantes :

4 409,18 euros brut au titre de l’indemnité de préavis ;

440,91 euros brut au titre des congés payés afférents ;

24 924,10 euros brut au titre de l’indemnité de licenciement ;

2 000,00 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Fixé la moyenne des salaires de M. [J] à la somme de 2 204,59 ;

Débouté la SAS ALPHA de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamné la SAS ALPHA aux entiers dépens de l’instance.

L’INFIRME, pour le surplus,

STATUANT à nouveau sur les chefs d’infirmation,

Y ajoutant,

DIT que le licenciement de M. [J] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

DEBOUTE M. [J] de sa demande de dommages et intérêts à ce titre,

DIT que chaque partie supportera la charge des frais et dépens qu’elles ont engagés en cause d’appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Valéry Charbonnier, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Madame Mériem Caste-Belkadi, Greffière, à qui la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.

La Greffière, La Conseillère faisant fonction de Présidente,

 


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