Droit du logiciel : 17 février 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 20/02237

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Droit du logiciel : 17 février 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 20/02237

ARRÊT DU

17 Février 2023

N° 339/23

N° RG 20/02237 – N° Portalis DBVT-V-B7E-TIY4

LB/CH

Jugement du

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LILLE

en date du

30 Septembre 2020

(RG F20/00217 -section )

GROSSE :

aux avocats

le 17 Février 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

– Prud’Hommes-

APPELANTE :

Association L’UNEDIC DELEGATION AGS, CGEA DE LILLE

[Adresse 3]

représentée par Me Catherine CAMUS-DEMAILLY, avocat au barreau de DOUAI, substitué par Me Cecile HULEUX, avocat au barreau de DOUAI

INTIMÉS :

M. [F] [K]

[Adresse 1]

représenté par Me Rémi GIROUTX, avocat au barreau de LILLE

S.C.P. BTSG2 Hauts de France représentée par Maître [L] [M] es-qualité de liquidateur judiciaire de la SASU BATISBAT en remplacement de la SELARL MJ VALEM ASSOCIES

[Adresse 2]

assignée + conclusions le 3 octobre 2022 à personne habilitée

n’ayant pas constitué avocat

DÉBATS : à l’audience publique du 10 Novembre 2022

Tenue par Laure BERNARD

magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Valérie DOIZE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Pierre NOUBEL

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Virginie CLAVERT

: CONSEILLER

[G] [O]

: CONSEILLER

Le prononcé de l’arrêt a été prorogé du 27 janvier 2023 au 17 février 2023 pour plus ample délibéré.

ARRÊT : Réputé contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 17 Février 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Pierre NOUBEL, Président et par Nadine BERLY, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 20 octobre 2022

EXPOSE DU LITIGE

M. [F] [K] a été engagé par la société Batisbat par contrat de travail à durée indéterminée du 27 novembre 2017 en qualité de comptable niveau D.

Par jugement du 8 juillet 2019, le tribunal de commerce de Lille a ordonné la liquidation judiciaire de la société Batisbat et a désigné Me [J] en qualité de liquidateur judiciaire.

M. [F] [K] a été convoqué à un entretien préalable fixé le 8’juillet’2019′; il a été licencié pour motif économique par courrier en date du 16’juillet’2019.

Le 4 mars 2020, M. [F] [K] a saisi le conseil de prud’hommes de Lille aux fins notamment de voir condamner l’AGS CGEA de Lille à lui payer les sommes dues au titre de sa garantie des créances salariales, ainsi qu’une indemnité procédurale.

Par jugement rendu le 30 septembre 2020, la juridiction prud’homale a’:

– dit qu’il existe une relation contractuelle entre M. [F] [K] et la société Batisbat,

– fixé la créance salariale de M. [F] [K] au passif de la liquidation judiciaire de la société Batisbat aux sommes suivantes’:

* 9’999,84’euros au titre du paiement des salaires de janvier à juin 2019,

* 427,03’euros au titre du paiement du salaire du 1er au 7 juillet 2019,

* 549,03’euros au titre du paiement du salaire du 8 au 16 juillet 2019,

* 1 300’euros au titre de la carence du délai de réflexion,

* 3 008, 92’euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés,

* 827,14’euros au titre de l’indemnité de licenciement,

– dit n’y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– laissé les dépens à la charge du passif de la liquidation judiciaire de la société Batisbat,

– donné acte au CGEA de LILLE de son intervention,

– dit le jugement opposable au CGEA dans la limite de sa garantie légale et réglementaire,

– débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires.

L’AGS CGEA de Lille a régulièrement interjeté appel contre ce jugement par déclaration du 12’novembre’2020.

Aux termes de ses conclusions transmises par RPVA le 26’septembre’2022, l’AGS CGEA de Lille demande à la cour de’:

– infirmer le jugement déféré sauf en ce qu’il a dit n’y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouter M. [F] [K] de l’ensemble de ses demandes,

– dire et juger qu’elle ne garantit pas les sommes dues en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– dire que l’arrêt à intervenir ne lui sera opposable que dans la limite de sa garantie légale telle que fixée par les articles L.3253-6 et suivants du code du travail (ancien art. L 143.11.1 et suivants du code du travail) et des plafonds prévus à l’article D.3253-5 du code du travail (ancien art. D 143.2 du code du travail), et ce toutes créances du salarié confondues,

– dire et juger que son obligation de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le mandataire judiciaire conformément aux dispositions de l’article L.3253-20 du code du travail,

– statuer ce que de droit quant aux dépens.

Aux termes de ses conclusions transmises par RPVA le 11 octobre 2022, M. [F] [K] demande à la cour de’:

– débouter le CGEA de sa demande de conditionner son intervention à la justification d’absence de fonds disponible, contraire à la loi,

– confirmer le jugement déféré sauf en ce qu’il l’a débouté de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– lui accorder la somme de 3’000’euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance,

– condamner le CGEA à lui payer la somme de 3’000’euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

Me [J], bien que s’étant vu signifier la déclaration d’appel par exploit d’huissier du 4’janvier’2021 et les conclusions d’appelant le 9’février’2021, n’a pas constitué avocat et n’a pas conclu.

Par ordonnance du 21 avril 2022, le président du tribunal de commerce a désigné Me [M] en lieu et place de Me [J]. Le CGEA lui a fait signifier ses conclusions du 26 septembre 2022 par acte d’huissier du 3 octobre 2022.

Pour un exposé complet des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère aux conclusions écrites transmises par RPVA en application de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 20’octobre’2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’existence du contrat de travail

Le CGEA conteste l’existence d’une relation de travail entre M. [F] [K] et la société Batisbat. Il fait valoir que la production d’un contrat de travail écrit, de fiches de paie ou d’une lettre de licenciement ne suffit pas justifier de l’existence d’un contrat de travail ; qu’il existe des incohérences dans les pièces produites quant à la date du commencement de la relation de travail alléguée ; que le relevé de carrière de M. [F] [K] qu’il a occupé son dernier emploi en 2013, au sein de la société Herbat, également placée en liquidation judiciaire. Le CGEA relève que M. [F] [K] engagé comme comptable, ne justifie pas de sa qualification ni de son expérience dans ce domaine ; qu’il n’est pas non plus démontré la réalisation de prestations de travail effectives. L’appelante estime qu’aucun lien de subordination n’est démontré, et observe que les rapports du liquidateur établis sur le fondement des articles R.653-1 et L.641-2 du code de commerce révèlent des erreurs ou des incomplétudes dans la comptabilité, voire une comptabilité inexistante (pour 2019), or, M. [F] [K] n’a jamais été sanctionné pour ses défaillances dans ses fonctions de comptable. Enfin, le CGEA fait valoir que le caractère tardif de la demande de rappel de salaire est un élément en faveur de l’absence de relation de travail réelle en la société Batisbat et M. [F] [K].

En réponse, M. [F] [K] expose qu’il appartient au CGEA, qui invoque le caractère fictif du contrat de travail écrit signé le 27 novembre 2017, de le démontrer, ce qu’il ne fait pas. Il soutient qu’il avait bien la qualité de salarié de la société Batisbat et qu’il en rapporte la preuve en versant aux débats un contrat de travail écrit, une déclaration d’embauche auprès de l’Urssaf, ses fiches de paie avec ses relevés de compte correspondant et ainsi que ceux de la société, le justificatif de son affiliation à la mutuelle proBTP ; qu’il produit également des attestations d’ancien client ou salarié et des documents comptables établis par ses soins notamment au moyen du logiciel Ciel Compta ; que la mauvaise gestion de la société par ses gérants ne saurait lui être imputée, en dépit de ses fonctions de comptable.

Sur ce,

Aux termes de l’article L.1221-1 du code du travail, le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun. Il peut être établi selon les formes que les parties contractantes décident d’adopter.

Le contrat de travail est une convention par laquelle une personne s’engage à travailler pour le compte d’une autre et sous sa subordination moyennant une rémunération.

En présence d’un contrat de travail écrit, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif d’en rapporter la preuve.

En l’espèce, M. [F] [K] se prévaut d’un contrat de travail à durée indéterminée signé le 27 novembre 2017 avec la société Batisbat pour un emploi de comptable.

Il appartient donc au CGEA de démontrer que celui-ci a un caractère fictif.

Il est versé aux débats les pièces suivantes :

– la déclaration préalable à l’embauche de M. [F] [K] par la société Batisbat auprès de l’Urssaf le 12 décembre 2017,

– les fiches de paie établies par la société Batisbat au nom de M. [F] [K] du 1er juillet 2018 au 31 juillet 2019,

– les justificatifs de la perception de salaires mensuels entre le mois de décembre 2017 et le mois de novembre 2018 (attestations de paiement, relevés de compte de M. [F] [K] correspondant et relevés de compte de la société Batisbat correspondants),

– un courrier de la proBTP dans lequel il est indiqué que M. [F] [K] a été affilié à cette mutuelle employeur jusqu’au 8 octobre 2019,

– des échéanciers clients fournisseurs, un compte de résultat synthétique, et le grand livre global établis sur le logiciel Ciel Compta par M. [F] [K] pour l’année 2019,

– une attestation d’un ancien client et d’un ancien salarié de la société dans lesquels il est fait état de ce que M. [F] [K] exerçait effectivement les fonctions de comptable au sein de la société Batisbat,

– le relevé de carrière de M. [F] [K].

Le fait que le relevé de carrière de M. [F] [K] ne porte pas mention de son emploi au sein de la société Batisbat, et que la gestion de cette société se soit révélée particulièrement défaillante ne permettent pas d’établir le caractère fictif du contrat de travail de M. [F] [K] en qualité de comptable.

Dès lors, faute pour le CGEA de rapporter la preuve du caractère fictif du contrat de travail signé entre la société Batisbat et M. [F] [K] le 27 novembre 2017, il y a lieu de retenir, par confirmation du jugement entrepris, qu’il existait entre ces derniers une relation de travail.

Sur les sommes sollicitées par M. [F] [K]

L’employeur restant redevable de ces sommes, c’est à juste titre que le jugement de première instance a fixé au passif de la liquidation de la société Batisbat les sommes figurant dans l’état des créances établi par le liquidateur au profit de M. [F] [K].

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

Sur la garantie du CGEA

Le jugement de première instance doit être confirmé en qu’il a dit que le CGEA devait garantie dans les limites légales et réglementaires applicables.

Conformément à l’article L.3253-20 du code du travail, si les créances ne peuvent être payées en tout ou partie sur les fonds disponibles avant l’expiration des délais prévus par l’article L. 3253-19, le mandataire judiciaire demande, sur présentation des relevés, l’avance des fonds nécessaires aux institutions de garantie mentionnées à l’article L. 3253-14.

Dans le cas d’une procédure de sauvegarde, le mandataire judiciaire justifie à ces institutions, lors de sa demande, que l’insuffisance des fonds disponibles est caractérisée. Ces institutions peuvent contester, dans un délai déterminé par décret en Conseil d’État, la réalité de cette insuffisance devant le juge-commissaire. Dans ce cas, l’avance des fonds est soumise à l’autorisation du juge-commissaire.

S’agissant en l’espèce d’une liquidation judiciaire et non d’une procédure de sauvegarde, il n’y a pas lieu de subordonner l’avance des fonds par le CGEA à la production par le mandataire d’un justificatif de l’insuffisance des fonds disponibles, seule la production d’un relevé étant prévue par le texte susvisé.

Sur les dépens et l’indemnité de procédure

Les dispositions du jugement de première instance relatives aux dépens et à l’indemnité de procédure seront confirmées.

Maître [M], en qualité de liquidateur, sera condamné aux dépens de l’instance, qui seront recouvrés selon les règles applicables en matière de liquidation judiciaire.

M. [F] [K] sera en outre débouté de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement rendu le 30 septembre 2020 par le conseil de prud’hommes de Lille dans toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

DIT n’y avoir lieu de subordonner l’avance des fonds par l’AGS CGEA de Lille à la production par le mandataire d’un justificatif de l’insuffisance des fonds disponibles, seule la production d’un relevé étant prévue en cas de liquidation judiciaire ;

CONDAMNE Maître [M] en qualité de liquidateur de la société Batisbat aux dépens qui seront recouvrés selon les règles applicables en matière de liquidation judiciaire ;

DEBOUTE M. [F] [K] de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER

Nadine BERLY

LE PRESIDENT

Pierre NOUBEL

 


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