ARRET N°
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03 Mai 2023
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N° RG 21/00275 – N° Portalis DBVE-V-B7F-CCXU
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[L] [W]
C/
S.A.S. LE PETIT FORESTIER LOCATION
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Décision déférée à la Cour du :
02 décembre 2021
Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BASTIA
F 20/00182
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Copie exécutoire délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE BASTIA
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU : TROIS MAI DEUX MILLE VINGT TROIS
APPELANT :
Monsieur M. [L] [W]
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représenté par Me Christian FINALTERI, avocat au barreau de BASTIA substitué par Me Laureva BERNARDI, avocat au barreau de BASTIA
INTIMEE :
S.A.S. PETIT FORESTIER LOCATION prise en son établissement secondaire [Adresse 6], elle-même prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social
N° SIRET : 300 571 049
[Adresse 6]
[Localité 1]
Représentée par Me Marie-Véronique LE FEVRE, avocat au barreau de PARIS et par Me Stephanie TISSOT-POLI, avocat au barreau de BASTIA
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 février 2023 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame BETTELANI, conseillère chargée du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Monsieur JOUVE, Président de chambre,
Madame COLIN, Conseillère
Madame BETTELANI, Conseillère
GREFFIER :
Madame CARDONA, Greffière lors des débats.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 03 mai 2023
ARRET
– CONTRADICTOIRE
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
– Signé par Monsieur JOUVE, Président de chambre et par Madame CARDONA, Greffière présente lors de la mise à disposition de la décision.
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [L] [W] a été lié à la S.A.S. Petit Forestier Services, aux droits de laquelle est venue la S.A.S. Petit Forestier Location, dans le cadre d’une relation de travail à durée indéterminée, à effet du 2 mai 2005, occupant dans le dernier état de celle-ci les fonctions de directeur des sites de [Localité 4] et [Localité 3].
Les rapports entre les parties étaient soumis à la convention collective nationale des transports routiers et des activités auxiliaires de transport.
Selon courrier en date du 27 novembre 2019, la S.A.S. Petit Forestier Location a convoqué le salarié à un entretien préalable à un licenciement fixé au 16 décembre 2019, et celui-ci s’est vu notifier son licenciement pour faute grave par lettre recommandée avec avis de réception adressée le 20 décembre 2019
Monsieur [L] [W] a saisi le conseil de prud’hommes de Bastia, par requête reçue le 29 octobre 2020, de diverses demandes.
Selon jugement du 2 décembre 2021, le conseil de prud’hommes de Bastia a :
-dit que Monsieur [L] [W] que le licenciement pour faute grave est justifié,
-débouté Monsieur [L] [W] de l’ensemble de ses demandes,
-dit qu’il n’y a pas lieu d’appliquer l’article 700 du code de procédure civile,
-dit que chaque partie conservera ses propres dépens.
Par déclaration du 31 décembre 2021 enregistrée au greffe, Monsieur [L] [W], intimant la S.A.S. Le Petit Forestier Location, a interjeté appel de ce jugement, en ce qu’il a: dit que le licenciement pour faute grave est justifié, l’a débouté de l’ensemble de ses demandes, dit qu’il n’y a pas lieu d’appliquer l’article 700 du code de procédure civile, dit que chaque partie conservera ses propres dépens.
Aux termes des dernières écritures de son conseil transmises au greffe en date du 22 février 2022 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens de la partie, l’appelant a sollicité :
-de réformer le jugement rendu le 2 décembre 2021 par le conseil de prud’hommes de Bastia en ce qu’il a : dit que le licenciement pour faute grave de Monsieur [L] [W] est justifié, débouté Monsieur [L] [W] de l’ensemble de ses demandes, dit qu’il n’y a pas lieu d’appliquer l’article 700 du code de procédure civile, dit que chaque partie conservera ses propres dépens.
Et, statuant à nouveau :
-de juger l’appel interjeté par Monsieur [L] [W] recevable et bien fondé ;
-de juger que le licenciement de Monsieur [L] [W] est dépourvu de cause réelle et sérieuse, et en conséquence, de condamner la SAS Le Petit Forestier Location à payer à Monsieur [L] [W] les sommes suivantes: 50.196 euros bruts à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 16.034,82 euros bruts au titre de l’indemnité de licenciement, 12.459 euros bruts au titre de l’indemnité de préavis, 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral, ordonner la remise du bulletin de salaire de décembre 2019 et des documents légaux de fin de contrat rectifiés en conséquence, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, condamner la SAS Le Petit Forestier Location à payer à Monsieur [L] [W] la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, correspondant aux frais irrépétibles de première instance, condamner la SAS Le Petit Forestier Location à payer à Monsieur [L] [W] la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, correspondant aux frais irrépétibles d’appel, la condamner aux entiers dépens (article 696 du code de procédure civile).
Aux termes des dernières écritures de son conseil transmises au greffe en date du 10 mai 2022 auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens de la partie, l’intimée a demandé :
-de la recevoir en ses demandes, fins et argumentation,
-à titre principal, de confirmer le jugement entrepris, en conséquence : de constater que le licenciement de Monsieur [W] repose une faute grave et, déclarer Monsieur [W] irrecevable et mal fondé en toutes ses demandes, débouter Monsieur [W] de l’ensemble de ses demandes,
-à titre subsidiaire, de limiter le montant des dommages et intérêts dus à Monsieur [W], de débouter Monsieur [W] de ses demandes au titre du préjudice moral,
-en tout état de cause, juger à nouveau : le condamner à lui verser la somme de 3.000 euros au
titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 6 septembre 2022, et l’affaire fixée à l’audience de plaidoirie du 8 novembre 2022, puis un renvoi a été ordonné à l’audience du 14 février 2023.
A l’audience du 14 février 2023, l’affaire a été appelée et la décision mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 3 mai 2023.
MOTIFS
A titre liminaire, il convient de constater que la déclaration d’appel et les conclusions d’appel transmises contiennent manifestement une pure erreur matérielle en ce que l’intimée ne se dénomme pas la S.A.S Le Petit Forestier Location mais la S.A.S. Petit Forestier Location.
La recevabilité de l’appel n’est pas discutée et les éléments du dossier ne conduisent pas la cour à le faire d’office. Cet appel sera donc déclaré recevable en la forme.
Sur le fond, il convient, à titre préalable, de constater que la recevabilité formelle des demandes de Monsieur [W] n’est en réalité pas contestée par la S.A.S. Petit Forestier Location, qui ne développe pas de moyens à même de fonder sa demande tendant à déclarer Monsieur [W] irrecevable en toutes ses demandes, demande qui ne pourra qu’être rejetée.
S’agissant des demandes afférentes au licenciement, il y a lieu de rappeler que l’article L1232-1 du code du travail subordonne la légitimité du licenciement à une cause réelle et sérieuse. En application de l’article L1235-1 du code du travail, lorsqu’il est saisi du bien fondé d’une mesure de licenciement, le juge se détermine au vu des éléments qui lui sont fournis par les parties, le doute devant profiter au salarié. Il est néanmoins admis qu’il appartient à l’employeur d’établir de façon certaine la réalité des faits et de fournir au juge des éléments permettant de caractériser leur caractère suffisamment sérieux pour légitimer le licenciement. Il convient donc, en premier lieu, d’apprécier la réalité des faits énoncés par la lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l’employeur, fixant de manière irrévocable les limites du litige, puis le sérieux du motif invoqué. Ce n’est que dans un second temps, lorsque la légitimité du licenciement est tenue pour acquise que l’employeur peut chercher à s’exonérer des indemnités de rupture en invoquant la faute grave du salarié, étant précisé que la charge de la preuve de la gravité de la faute incombe exclusivement à l’employeur. La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée du préavis.
La lettre de licenciement, datée du 20 décembre 2019, ne sera pas reprise in extenso au présent arrêt, compte tenu de sa longueur.
Aux termes de cette lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige (faute d’avoir fait usage de la possibilité d’en préciser les motifs en application de l’article R1232-13 du code du travail), l’employeur, qui se place sur le terrain disciplinaire, reproche à Monsieur [W] plusieurs séries de faits afférentes :
-à des défaillances dans la gestion de dossiers Mel Distrib, Boulangerie Ventura, Transports Gandolfi, Cordirom, avec un désintérêt du salarié pour son poste engendrant une mauvaise relation commerciale vis à vis des clients s’interrogeant fortement sur la volonté de l’entreprise de travailler avec eux, outre à une absence de renseignement des éléments relatifs aux clients dans l’outil Greenforce, plaçant l’employeur face à une impossibilité de retracer les historiques des dossiers commerciaux,
-aux comptes de résultats, avec une absence d’action engagée, face à une perte de profitabilité et de productivité de l’activité en Corse, pour endiguer les pertes et retrouver de la rentabilité,
-à un non respect de la procédure par le salarié relative au contrôle des véhicules roulants de clients (avec des contrôles échus sur la période du 21 octobre au 25 novembre 2019), susceptible d’engager la responsabilité tant civile que pénale de l’entreprise,
-à la gestion du plan d’entretien préventif, avec une absence d’application du Fondamental 10 et de la procédure envoyée par mail le 6 septembre 2019, une saisie des entretiens dans le logiciel Igloo non réalisée et des convocations non envoyées aux clients, une absence de dossiers de véhicules en agence, avec un manque de gestion et d’intérêt amplifiant les pertes enregistrées,
-aux factures fournisseurs (avec une validation de factures non opportune concernant un compresseur, des validations de factures 452A au lieu de 404A opérées en ne respectant pas les règles régissant ce suivi, avec une absence de sollicitation du responsable grande froid territorial, une validation de factures liées à des dommages sans ouverture de dossiers auprès l’assurance, une validation de facture sans faire remonter l’information au service technique pour faire une demande de garantie),
-au partenariat local, avec une perte de confiance du partenaire sur place, le fait que les visites de l’agence d'[Localité 3] ne sont plus réalisées depuis plusieurs mois et qu’une partie des clients ont décidé de stopper toutes relations commerciales avec l’entreprise, et un partenaire exclusif, Monsieur [H], ayant fait part d’une possible cessation de partenariat, évoquant une suspicion créée par le salarié avec ses équipes et une perte de confiance du fait d’une absence de tenue par le salarié des engagements clients de l’entreprise.
Il y a lieu de constater que Monsieur [W] ne produit pas de pièces à même de démontrer que les faits invoqués ne correspondent pas aux motifs réels du licenciement et que le licenciement a en réalité une cause distincte.
S’agissant des faits reprochés, l’employeur vise aux débats différentes pièces (notamment un courriel de Monsieur [Z] du 11 septembre 2019 ; des échanges de courriels relatifs au client Mel Distrib, un protocole d’accord avec Mel Distribution ; un échange de courriels relatifs au client Boulangerie Ventura; des documents intitulés ‘Comptes créés [W]’ ‘Opportunités [W]’ et ‘Activités [L] [W]’ ; un courriel du 6 septembre 2019 relatif à la ‘Mise en place d’une procédure sur le suivi de notre Plan d’Entretien Préventif’; des courriel du 1er août 2019 et échange de courriels du 2 septembre 2019 ; des échanges de courriels relatifs à des dossiers 60832, 54818, 81034 ; une attestation de Monsieur [H] ; outre différentes pièces adverses). Parallèlement, Monsieur [W], qui conteste les faits reprochés ou leur imputabilité, contrairement à ce qu’énonce l’employeur, se réfère notamment à divers éléments (une fiche descriptive pour livraison matériel auprès de Mel Distrib et une fiche technique, un courriel du 27 novembre 2019; des échanges de courriers de 2017 et 2018 avec la Boulangerie Pâtisserie Ventura, des courriels du 9 septembre et du 3 octobre 2019, un échange de courriels des 13 et 17 septembre 2019, des échanges de courriels avec le dirigeant de la société Cordirom, un rapport statistiques EDJ, des comptes de résultat économique 2016 à 2018 [E], des comptes de résultat économique 2018 et 2019 [Localité 4] et [Localité 3], des courriels des 10 et 12 janvier, 20 juin 2019, des courriels récapitulatifs contrôles DF3 et tableau de bord DF3, des courriels relatifs à ‘la mise en place d’une procédure sur le suivi de notre Plan d’Entretien Préventif’ et un courriel intitulé ‘suite à notre entretien’ daté du 11 septembre 2019, des échanges de courriels du 9 juillet 2019, 1er et 2 août, 12, 21 et 26 août 2019, un courriel relatif à une réservation d’hôtel à [Localité 3] du 24 septembre 2019 et un document relatif à un déplacement à [Localité 3] du 4 novembre 2019).
Au regard de ces éléments, il convient de constater :
-que la matérialité des faits, imputables au salarié, afférents à défaillances dans la gestion de dossiers Mel Distrib peut être considérée comme établie, étant observé que, contrairement à ce qu’expose Monsieur [W], l’employeur reproche pas stricto sensu dans la lettre de licenciement une perte de 40.000 euros imputable au salarié. En revanche, s’agissant des dossiers Boulangerie Ventura, Transports Gandolfi, Cordirom, les éléments visés sont insuffisants pour permettre à la juridiction saisie de caractériser des défaillances de gestion pouvant être reprochées à Monsieur [W], ou encore des manquements imputables au salarié relatifs à une absence de renseignement des éléments relatifs aux clients dans l’outil Greenforce plaçant l’employeur face à une impossibilité de retracer les historiques des dossiers commerciaux. Dans le même temps, les éléments soumis à l’appréciation de la cour sont également insuffisants pour mettre en évidence la réalité des faits reprochés afférents un désintérêt du salarié pour son poste engendrant une mauvaise relation commerciale vis à vis des clients s’interrogeant fortement sur la volonté de l’entreprise de travailler avec eux,
-que les pièces produites ne permettent pas à la cour de caractériser les manquements invoqués, non reconnus par le salarié, afférents, pour ce qui est des comptes de résultats, à une absence d’action engagée, face à une perte de profitabilité et de productivité de l’activité en Corse, pour endiguer les pertes et retrouver de la rentabilité, mais également les faits reprochés relatifs à la gestion du plan d’entretien préventif, avec une absence d’application du Fondamental 10 et de la procédure envoyée par mail le 6 septembre 2019, une saisie des entretiens dans le logiciel Igloo non réalisée et des convocations non envoyées aux clients, une absence de dossiers de véhicules en agence, avec un manque de gestion et d’intérêt amplifiant les pertes enregistrées,
-que concernant les contrôles de véhicules roulants, si l’existence de contrôles échus sur la période du 21 octobre au 25 novembre 2019, mentionnée dans la lettre de licenciement, n’est pas contestée, la réalité des faits qui sont reprochés au salarié sur ce point, c’est-à-dire des faits afférents à un non respect de la procédure relative au contrôle des véhicules roulants de clients, susceptible d’engager la responsabilité tant civile que pénale de l’entreprise, ne se déduit pas des pièces soumises à l’appréciation de la cour,
-que pour ce qui est des faits afférents aux factures fournisseurs, la matérialité des faits, imputables au salarié, est caractérisée concernant une validation de factures non opportune concernant un compresseur, des validations de factures 452A au lieu de 404A opérées en ne respectant pas les règles régissant ce suivi, avec une absence de sollicitation du responsable grande froid territorial, à rebours des dénégations du salarié, qui ne vise pas d’éléments suffisants pour justifier de l’inanité desdits faits, ou faire peser un doute suffisant sur ceux-ci. Par contre, la matérialité de faits, imputables au salarié, est insuffisamment établie, s’agissant d’une validation de factures liées à des dommages sans ouverture de dossiers auprès l’assurance, et d’une validation de facture sans faire remonter l’information au service technique pour faire une demande de garantie,
-que pour ce qui est de faits reprochés imputables au salarié, afférents au partenariat local, leur matérialité est mise en évidence uniquement s’agissant des faits à l’égard d’un partenaire exclusif, Monsieur [H], hormis ceux relatifs à une possible cessation de partenariat non mis en lumière. Par contre, les éléments soumis à l’appréciation de la cour sont insuffisants pour démontrer de la réalité des faits afférents aux visites de l’agence d'[Localité 3] qui ne sont plus réalisées depuis plusieurs mois et à une partie des clients qui ont décidé de stopper toutes relations commerciales avec l’entreprise.
Au vu de ce qui précède, du caractère établi ou partiellement établi de plusieurs des faits reprochés, de leur nature, la cour constate que ceux-ci sont suffisamment sérieux pour, sans disproportion, fonder un licenciement de Monsieur [W], objet précédemment d’un avertissement dans le délai de trois ans, en 2017 (certes pour des faits différents de ceux fondant son licenciement). Le licenciement de Monsieur [W] par la S.A.S. Petit Forestier Location est donc pourvu d’une cause réelle et sérieuse. Monsieur [W] sera dès lors débouté de sa demande tendant à dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et à condamner l’employeur au paiement d’une somme de 50.196 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le jugement entrepris étant confirmé sur ces points.
En revanche, l’employeur ne rapporte pas la preuve de ce que les faits établis imputables au salarié, ayant plus de quatorze ans d’ancienneté et ayant connu une évolution de carrière favorable depuis 2005 passant des fonctions de commercial territorial à celles de directeur de plusieurs sites, et n’ayant pas subi de reproches avant une période récente, ni de mise à pied conservatoire avant le licenciement, aient constitué une violation des obligations du contrat de travail telle qu’ils aient rendu impossible le maintien de celui-ci dans l’entreprise même pendant la durée du préavis, étant observé que si l’absence de mise à pied conservatoire n’empêche pas l’employeur de licencier pour faute grave, elle ne vient pas étayer l’impossibilité de maintien du salarié dans l’entreprise pendant le préavis.
Le licenciement de Monsieur [W] sera donc considéré comme fondé sur une cause réelle et sérieuse, mais non sur une faute grave. Le jugement entrepris, critiqué de manière justifiée en ce qu’il a conclu dans sa motivation au caractère fondé du licenciement pour faute grave, sera donc infirmé en ce qu’il a: dit que le licenciement pour faute grave est justifié.
Le licenciement n’étant pas fondé sur une faute grave et l’inexécution du préavis étant imputable à l’employeur, il sera, après infirmation du jugement à ces égards, octroyé à Monsieur [W] les sommes suivantes, dont les montants ne sont pas contestés en eux-même par la S.A.S. Petit Forestier Location :
-la somme de 12.549 euros, somme exprimée nécessairement en brut, à titre d’indemnité compensatrice de préavis (correspondant à trois mois, au vu des salaires que Monsieur [W] appartenant à la catégorie cadre, aurait perçus s’il avait effectué le préavis au regard des dispositions conventionnelles applicables), tel que sollicité par l’appelant, dont le dispositif des écritures comporte manifestement une pure erreur de plume (12.459 euros, au lieu de 12.549 euros soit 4.183 euros x 3 comme exposé dans le corps de ses écritures), erreur qui n’a généré aucune méprise, ni pour la cour saisie, ni pour l’intimée, et que la cour ne peut ainsi que corriger,
-la somme de 16.034,82 euros à titre d’indemnité légale de licenciement, tel que sollicité par l’appelant en application des dispositions légales, notamment l’article R1234-2 du code du travail.
Les demandes en ses contraire seront rejetées.
L’appelant ne justifie pas, au soutien de sa demande de condamnation de l’employeur à lui verser une somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral, des conditions abusives, vexatoires et brutales du licenciement dont il allègue l’existence. Il sera ainsi débouté de sa demande de ce chef, le jugement entrepris étant confirmé en ses dispositions querellées sur ce point et les demandes en sens contraires rejetées
Au regard des développements précédents, après infirmation du jugement sur ce point, il sera ordonné à la S.A.S. Petit Forestier Location de remettre à Monsieur [W] un dernier bulletin de paye et des documents sociaux rectifiés conformément au présent arrêt, dans un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision, ce sans astreinte inutile en l’espèce, Monsieur [W] étant débouté du surplus de sa demande à cet égard, non justifié. Les demandes en sens contraire seront rejetées.
La S.A.S. Petit Forestier Location, succombant principalement à l’instance sera condamnée aux dépens de première instance (le jugement entrepris étant infirmé en ses dispositions querellées relatives aux dépens de première instance) et aux dépens de l’instance d’appel.
Le jugement entrepris, utilement critiqué, sera infirmé en ses dispositions querellées relatives aux frais irrépétibles de première instance.
L’équité commande de prévoir la condamnation de la S.A.S. Petit Forestier Location à verser à Monsieur [W] une somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel. La demande de la S.A.S. Petit Forestier Location sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.
Les parties seront déboutées de leurs demandes plus amples ou contraires à ces égards.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe le 3 mai 2023,
CONSTATE à titre liminaire que la déclaration d’appel et les conclusions d’appel transmises contiennent manifestement une pure erreur matérielle en ce que l’intimée ne se dénomme pas la S.A.S Le Petit Forestier Location mais la S.A.S. Petit Forestier Location,
DECLARE recevable en la forme l’appel,
INFIRME le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Bastia le 2 décembre 2021, tel que déféré, sauf:
-en ce qu’il a débouté Monsieur [L] [W] de sa demande tendant à dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et au titre d’un préjudice moral,
Et statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
DIT que le licenciement dont Monsieur [L] [W] a été l’objet de la part de la S.A.S. Petit Forestier Location est fondé sur une cause réelle et sérieuse, mais non sur une faute grave,
CONDAMNE la S.A.S. Petit Forestier Location, prise en la personne de son représentant légal, à verser à Monsieur [L] [W] les sommes de :
– 12.549 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
– 16.034,82 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,
ORDONNE à la S.A.S. Petit Forestier Location, prise en la personne de son représentant légal, de remettre à Monsieur [L] [W] un dernier bulletin de paye et des documents sociaux rectifiés conformément au présent arrêt, dans un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision,
DEBOUTE la S.A.S. Petit Forestier Location de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel,
CONDAMNE la S.A.S. Petit Forestier Location, prise en la personne de son représentant légal, à verser à Monsieur [L] [W] la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles de l’entière instance,
CONDAMNE la S.A.S. Petit Forestier Location, prise en la personne de son représentant légal, aux dépens de première instance et de l’instance d’appel,
DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
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