Collecte de la rémunération équitable
La loi n° 85-660 du 3 juillet 1985 dite « Lang » qui a reconnu des droits exclusifs aux artistes interprètes et aux producteurs de phonogrammes, a prévu, par dérogation à ceux-ci, un régime de licence légale pour certaines utilisations publiques des phonogrammes du commerce. En contrepartie de la liberté de diffusion (« communication directe dans un lieu public », « radiodiffusion » et « distribution par câble simultanée et intégrale », la « reproduction strictement réservée à ces fins » ayant été ajoutée par la loi n° 2006-961 du 1 er août 2006) des phonogrammes publiés à des fins de commerce, les utilisateurs de ces derniers doivent s’acquitter d’une somme qualifiée de rémunération équitable (article 22 désormais codifié à l’article L 214-1 du code de la propriété intellectuelle).
Cette rémunération est assise sur les recettes de l’exploitation ou, à défaut, évaluée forfaitairement dans les cas prévus à l’article L 131-4 et est répartie par moitié entre les artistes-interprètes et les producteurs de phonogrammes ainsi que le prévoit l’article L 214-1 du code de la propriété intellectuelle. Ce principe de la rémunération équitable est également prévu par l’article 12 de la Convention de Rome du 26 octobre 1961 et par l’article 8.2 de la directive 2006/115/CE du 12 décembre 2006 relative au droit de location et de prêt et à certains droits voisins du droit d’auteur dans le domaine de la propriété intellectuelle codifiant la directive 92/100/CEE du 19 novembre 1992.
Conformément à l’article L 214-5 du code de la propriété intellectuelle, la rémunération équitable est perçue pour le compte des ayants droit et répartie entre ceux-ci par un ou plusieurs organismes mentionnés au titre II du livre III (articles L 321-1 et suivants) au rang desquels figure la SPRE dont les conditions de constitution et d’habilitation au sens de l’article L 321-3 du code de la propriété intellectuelle.
La SPRE, une société civile cogérée
La SPRE a la forme d’une société civile (article L 321-1 dans sa version antérieure à l’ordonnance n°2 016-1823 du 22 décembre 2016) régie par les articles 1832 et suivants du code civil et est cogérée par quatre sociétés représentant les artistes interprètes (l’ADAMI et la SPEDIDAM) et les producteurs (la SCPP et la SPPF) qui répartissent directement les sommes perçues par la SPRE à leurs bénéficiaires. Elle est la seule société civile de perception et de répartition de droits (SPRD, aujourd’hui organisme de gestion collective) statutairement chargée par les représentants de tous les ayants-droit concernés de la perception de la rémunération équitable et a en particulier pour mission de percevoir celle-ci au nom de ses associés dont elle reçoit délégation à cet effet à titre exclusif du simple fait de leur adhésion.
Dans ce cadre, la SPRE est investie d’une mission légale et statutaire de perception de la rémunération équitable dont le principe légal est insusceptible d’être remis en cause devant les tribunaux par la voie de l’exception d’illégalité.
Pas de mission d’intérêt public
La CJUE a jugé dans son arrêt du 27 février 2014 OSA — Ochranny svaz autorsky pro pràva k dil ilin hudebnim o.s. c. Léêebné làznè Mariànské Làznè a.s., qui opposait la société de gestion collective de droits d’auteur tchèque OSA à une société gérant un établissement de soins de santé, qu’une activité de gestion collective de droits d’auteur et de droits voisins ne constituait pas une mission d’intérêt public : « l’article 106, paragraphe 2, TFUE, qui contient des règles particulières s’appliquant aux entreprises chargées, notamment, de la gestion de services d’intérêt économique général, ne fait pas obstacle à l’application de l’article 102 TFUE à une société de gestion telle qu’OSA. En effet, une telle société de gestion, que l’Etat n’a pas chargé d’une mission et qui gère des intérêts privés, même s’il s’agit de droits de propriété intellectuelle protégés par la loi, n’est pas de nature à relever du champ d’application de cette première disposition […] ».
Ainsi, non chargée d’une mission de service public, elle n’est pas non plus dépositaire de l’autorité publique, le fait que certains de ses membres soient également membres de la commission ne modifiant ni sa nature ni celle de sa mission. Par ailleurs, pas plus que les organisations représentant les intérêts des utilisateurs de phonogrammes, la SPRE n’a pas la charge « d’assurer la surveillance, l’administration, la liquidation ou le paiement » d’une opération ou d’une entreprise touchant à la rémunération équitable : elle ne décide pas des barèmes qui assoient le paiement des sommes qu’elle a la charge de percevoir et répartir, cette tâche incombant à la commission que les membres de la SPRE ne composent que pour moitié.
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